Pour une République sociale européenne (Hubert Sage)

lundi 26 mars 2007.
 

Je me rappelle du 25 mars 1957 ; je venais d’avoir 12 ans ; et comme chaque soir, au moment du repas, après avoir écouté les informations à la radio à partir de 20h, mon père, soutien inconditionnel des actions passées de Jaurès et de Blum, me les commentait ; ce soir là il me dit (à peu près ceci dans le souvenir) " c’est le premier pas pour construire l’Europe ; il faudra continuer et créer les Etats-Unis d’Europe ; il n’y aura plus de guerre en Europe ; on pourra faire face à l’URSS et ne plus être sous la coupe de l’Amérique " ; c’est sans doute la première profession de foi en faveur d’un nationalisme européen (au sens de nationisme selon Taguief) que j’entendis et qui, sans doute, me suis jusqu’à maintenant Dans le même temps, je fus attiré à la sortie du Lycée un jeudi matin par le premier (ou le second) numéro de l’hebdomadaire " Démocratie 60 " de la SFIO, à la devanture d’un kiosque (et après, je l’acheta régulièrement) ; celui-ci présentait en première page la carte des 6 pays du Traité de Rome, avec le sigle des 6 partis socialistes ou social-démocrates, censés réaliser ce grand objectif des Etats-Unis d’Europe. Et un des articles , à l’intérieur de l’hebdomadaire, nous faisait connaître l’interview d’un ministre italien (je ne me rappelle plus du nom) qui disait très exactement en substance : après ce traité, il faudra établir une politique industrielle commune, après il faudra établir une politique agricole commune, après, on aura besoin d’un monnaie commune, après il faudra un ministre des finances commun, et ensuite il faudra un gouvernement et un parlement communs : les Etats-Unis d’Europe seront alors créés " Je n’ai jamais oublié cette prophétie.

Aussi, je saluai l’arrivée des politiques industrielle et agricole communes, et malgré la signature par Mitterrand du traité sur l’Acte Unique Européen qui fit un saut qualitatif décisif dans la soumission aux forces financières et marchandes mondiales au détriment des pouvoirs politiques (bien plus, à mon avis, que le Traité suivant de Maastricht), je votai encore (avec réticence, mais je le votai) le référendum sur le traité de Maastricht parce qu’il instituait cette " monnaie commune ", l’Euro qui pouvait devenir une arme indispensable face à l’hégémonie du dollar. Mais cela s’arrêta là : pas de ministère des finances commun, puisque que la BCE fut créer comme une institution totalement indépendante au profit des financiers, et cerise sur le gâteau, après la soumission de Jospin aux marchands lors du Traité d’Amsterdam, on en vint à ce fameux Traité Constitutionnel qui fut rejet é par le peuple français le 29 mai 2005, et qui avait l’intention de soumettre définitivement les états européens au profit des financiers et des marchands, en soustrayant leur destin à la souveraineté populaire.

En effet, actuellement il y a un grave abus de langage de Chevenement à De Villiers : l’Europe des nations qu’ils magnifient, ce n’est que l’Europe des traités, traités qui ôtent aux peuples la souveraineté populaire ; et il ne suffit pas d’être contre le Traité constitutionnel que l’on voulait nous imposer pour donner aux peuples la maîtrise politique de leur destin, car si on ne leur donne pas les moyens politiques suffisamment puissants pour pouvoir décider à la place des forces mondiales financières et marchandes, ce n’est qu’hypocrisie ou incompétence.

La seule solution, c’est justement de donner les moyens politiques suffisants à une représentation élue des nations européennes pour décide dans les domaines des décisions économiques (une BCE dans l’action serait obligatoirement soumise à un ministre des finances), des relations diplomatiques internationales et de la défense, ministres soumis au contrôle d’un parlement européen élu au suffrage universel direct. On appelait cette construction politique dans mes années de lycée : une " Confédération de type fédérale " Confédération, parce que le champ de délégation de pouvoirs étaient limitées aux décisions économiques qui influaient par la monnaie sur l’économie de tous les états, aux décisions de la politique dite étrangère qui pour être efficace doit être unifiée, et à une politique de défense unique.

Fédérale, parce que les décisions à prendre pour ce champ de compétences relevaient d’un parlement élu au suffrage universel direct.

Exit donc dans cette construction politique la commission de Bruxelles formée d’oligarques sans mandat des peuples et qui décident de directives s’ingérant dans les politiques des états-nations pour les soumettre aux lois des marchés, détruisant au passage toute protection sociale et services publiques.

Exit dans cette construction politique tous les traités qui se sont succédés depuis le Traité de Rome et qui asservissent les peuples à des décisions contractuelles immuables, sans que ceux-ci puissent les modifier suivant le temps par le vote de lois par un parlement. Le traité, par définition , est un obstacle à l’exercice de la souveraineté populaire car, elle ne peut s’exercer que par des lois votées par un parlement élu au suffrage universel direct.

C’est pourquoi la revendication d’une Constituante Européenne élue pour définir les mécanismes d’une constitution décidant , et du champ des compétences futures, et de l’abolition des traités antérieurs, est désormais la revendication centrale pour créer cette République Européenne Sociale que nous devons appeler de nos voeux, héritière directe de cette aspiration aux Etats-Unis d’Europe de nos parents ou grands-parents.

Hubert Sage


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