Turquie Stoppons la pente fascisante du régime d’Erdogan

jeudi 4 août 2016.
 

Nous mettons en ligne ci-dessous :

- A) le communiqué du PCF dont la qualité et la cohérence d’analyse méritent d’être soulignées

- B) Notre chemin est sombre ; que l’espoir et la résistance soient nos lumières ! (Déclaration de la section Turquie de la 4ème Internationale)

A) Turquie : "La France doit cesser son soutien au régime sanguinaire d’Erdogan" (PCF)

La tentative de putsch militaire en Turquie, dans la nuit du 15 au 16 juillet, organisée par quelques divisions de l’armée turque insurgées contre le président Erdogan s’est soldée par près de 300 morts à Istanbul et Ankara, plus d’un millier de blessés, et a entraîné en moins de 24 heures 6 000 arrestations. À l’appel du pouvoir, des lynchages de putschistes ont eu lieu et l’éventualité d’un rétablissement de la peine de mort ressurgit. La politique de polarisation extrême, orchestrée par l’AKP, a attisé des fractures au sein de l’armée.

Le Parti communiste français tient à exprimer sa solidarité avec les peuples de Turquie, les démocrates et progressistes qui sont pris en étau entre la violence d’Etat, la mobilisation de l’extrême droite et des ultra-religieux, et la rébellion militaire. Or, comme le souligne le Parti démocratique des peuples (HDP), il ne peut y avoir d’autres solutions qu’une démocratisation de la Turquie et l’établissement d’une paix durable dans tout le pays, et particulièrement dans les villes kurdes assiégées depuis près d’un an par les forces de l’ordre et armées.

Les événements des 15 et 16 juillet montrent que la politique de R.T. Erdogan conduit au chaos. La France et l’Union européenne doivent la condamner et cesser de la soutenir. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, en affirmant ce matin la volonté de la France de voir "l’Etat de droit fonctionner pleinement en Turquie" et refuser tout "chèque en blanc à Monsieur Erdogan", engage une inflexion du discours de la France qui devra être suivie d’effets. Car, après l’échec de la tentative de coup d’État, le pire est déjà en marche.

R.T. Erdogan amplifie la purge de ses opposants dans l’appareil d’État, notamment dans la magistrature et l’armée, en violation totale de l’Etat de droit. Des milliers de juges ont été destitués et arrêtés dont des membres du Conseil d’État et de la Cour constitutionnelle. Cette purge devrait s’élargir à toute la haute administration.

Tout en se présentant désormais comme le "défenseur de la démocratie", R.T. Erdogan poursuit l’établissement de sa dictature après avoir écrasé les libertés, muselé les médias, réduit les pouvoirs de l’opposition, levé l’immunité parlementaire des députés du HDP afin de les jeter en prison, et déclenché une guerre meurtrière contre les populations kurdes du pays.

Au moment où les forces conservatrices et nationalistes font bloc autour du pouvoir, il faut certainement s’attendre à l’annonce d’un référendum sur la réforme constitutionnelle afin d’établir le régime ultra-présidentiel sans contre-pouvoir auquel aspire Erdogan.

R.T. Erdogan croit pouvoir capitaliser sur les événements de ces derniers jours pour restaurer son image, et celle de la Turquie jusqu’alors isolée sur le plan diplomatique en raison de son soutien apporté aux différentes organisations djihadistes Daesh et Al Nosra. Si J.-M. Ayrault doute de la fiabilité du régime turc en la matière, le PCF tient à lui rappeler que les preuves de cette duplicité sont connues et qu’elles ont valu à des journalistes, comme Can Dündar, des poursuites judiciaires et une tentative de meurtre.

Aujourd’hui, Erdogan se considère autorisé aux brutalités de masse les plus sanglantes. Il est de la responsabilité de la France et des pays membres de l’UE de cesser leurs soutiens à ce régime qui représente pour la Turquie et sa région un obstacle de plus à la paix et à la sécurité collective.

B) Notre chemin est sombre ; que l’espoir et la résistance soient nos lumières ! (Déclaration de la section Turquie de la 4ème Internationale)

Contre les coups d’Etat militaire et d’Erdogan, organisons le front de la démocratie, construisons la politique de classe.

Soudainement, dans la nuit du 15 juillet, nous avons été témoin, d’un processus de coup d’Etat avec toutes ses incertitudes, ses hésitations, ses initiatives réciproques des camps en présence et sa sauvagerie. On se souviendra de cette nuit sanglante à travers les affrontements entre soldats et policiers, les occupations des sièges des médias, les images des civils massacrés et de soldats lynchés avec pour un des points culminants le bombardement de l’Assemblée. Cela paraît être l’un des derniers actes de la lutte pour le pouvoir entre l’AKP et la confrérie Gülen au sein de l’Etat que les deux anciens complices ont construit ensemble.

Les hypothèses conspirationnistes selon lesquelles cette tentative a été mise en place pour réaliser les ambitions dictatoriales d’Erdogan ont connu un large écho. Cela est dû au fait que depuis les élections du 7 juin 2015 le régime d’Erdogan n’hésite pas à provoquer le chaos et une situation de guerre civile, que le coup d’Etat fut rapidement écrasé, que les membres du gouvernement réapparaissent dans les médias avec une image renouvelée. Dans des conditions où le régime s’est consolidée lors des dernières élections en obtenant près de 50% des votes, une interprétation plus raisonnable est que les pro-Gülen confrontés à la menace d’une opération de purge de grande ampleur ont précipitamment pris l’initiative d’un coup d’Etat anticipé.

Si nous allons devoir attendre un peu plus pour avoir des informations plus complètes sur les motifs, les acteurs et le degré de connaissance des services secrets au sujet de ce projet, il est évident que la conséquence objective de cette séquence va être de renforcer le caractère islamique-autoritaire du régime d’Erdogan.

Un jour après que les soutiens du régime aient sauvés la démocratie aux cris de « Allahu ekber », « Recep Tayyip Erdogan » « Nous voulons des condamnations à mort », le renvoi de leurs postes de milliers de procureurs et de juges, l’arrestation de certains hauts magistrats sont les signaux que l’on se dirige vers une nouvelle et, peut-être définitive, purge au sein de l’appareil d’Etat.

Le fait que les appels depuis les institutions de l’Etat et les mosquées pour descendre dans les rues afin de défendre le régime contre le coup d’Etat entraînent, dès le deuxième soir, à des attaques contre les syriens et des tensions dans les quartiers alévis montrent le niveau dangereux atteint par les multiples oppositions dans la société de Turquie.

Et nous n’avons aucun doute sur le fait que Erdogan - qui assimile toute critique du régime avec du terrorisme et qui proclame que des universitaires, des journalistes, des fonctionnaires, des militants kurdes et des socialistes sont des putschistes pour les faire arrêter - va utiliser la tentative du 15 juillet pour légitimer une attaque bien plus dure contre toute forme d’opposition. A plus moyen terme, nous pouvons être surs que le 15 juillet deviendra un des mythes fondateurs du régime comme un coup d’Etat qui a été empêché par le peuple montant sur les tanks et non comme une tentative sans base, sans direction, sans soutien externe et vouée à l’échec.

Toutes les organisations de gauche radicale et tous les partis au parlement ont déclaré être opposés au coup d’Etat. Pour nous également, c’est une tâche primordiale que de prendre position avant tout contre le coup d’Etat en étant conscient que les travailleurs et les opprimés ne gagneront rien d’interventions militaires suspendant les droits et libertés démocratiques. Outre cela, nous déclarons notre opposition aux coups d’Etat d’Erdogan qui ne reconnaît pas les résultats des élections pour maintenir son pouvoir, qui tourne le Kurdistan en un champ de ruines pour gagner les votes nationalistes, qui interdit les grèves sous prétexte qu’elles sont « une menace nationale », qui cherche à détruire la représentation du peuple kurde. Aujourd’hui, une opposition au coup d’Etat qui ne s’extrait pas du « Ou Coup d’Etat Ou Erdogan » auquel l’AKP essaie de réduire la politique, ne fera que renforcer le régime qui écrase de manière sanglante non seulement les coups d’Etat mais tout ce qui s’oppose à lui au nom de la « volonté nationale », n’hésitant pas à utiliser les forces chariatistes et fascisantes que nous voyons à l’œuvre depuis le 15 juillet.

Il est urgent de constituer le front uni des forces démocratiques et pro-Paix existantes pour faire barrage aux attaques contre les travailleurs, les minorités éthniques-religieuses, les femmes, les LGBTI d’un régime qui recherche le pouvoir absolu dans tous les domaines politique, juridique, militaire et économique. Quoi qu’il en soit, la voie pour envoyer de manière définitive le bloc islamique-capitaliste au pouvoir ou l’option d’une dictature militaire sanglante est celle, négligée jusqu’à présent, de la construction patiente et par en bas d’une opposition sociale accordant une place centrale à la classe ouvrière.

Notre chemin est sombre ; que l’espoir et la résistance soient nos lumières !

Cours Nouveau pour la Démocratie Socialiste

16 juillet 2016


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