L’ISF, un symbole de justice plébiscité

jeudi 8 décembre 2016.
 

Les Français sont attachés à l’impôt de solidarité sur la fortune, malgré la lubie obsessionnelle de François Fillon, chef de file d’une droite qui souhaite le supprimer pour mieux renforcer l’injustice profonde de notre régime fiscal.

L’écrasante majorité des candidats à la primaire de la droite veulent supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Il coûterait bien plus cher qu’il ne rapporte, plaident-ils de façon hasardeuse. Manque de bol, cette vieille rengaine ne convainc pas les Français. Ils sont 72 % à être contre la suppression de l’ISF, selon un sondage Odoxa-le Parisien paru jeudi. « Cela montre l’attachement de la nation à la contribution juste de chacun, apprécie le député PCF Nicolas Sansu. Les Français comprennent bien que l’ISF est un outil de redistribution alors que les inégalités explosent. Vouloir le supprimer est une bêtise économique et un symbole grave. »

Derrière la question de l’ISF, se cache surtout celle de la justesse de notre architecture fiscale. Là encore, le bât blesse à droite, de la hausse de la TVA, impôt injuste car il pénalise davantage les plus démunis, à l’instauration, comme le défend Nathalie Kosciusko-Morizet, d’un impôt à taux unique, à hauteur de 20 %, qui profiterait très largement aux plus riches. « Mais il faudrait alors, pour rester cohérent, une TVA proportionnelle à la richesse de chacun », raille Nicolas Sansu. Ce que la droite ne prévoit absolument pas.

Le parlementaire, qui a voté pour améliorer la lutte contre les optimisations fiscales abusives visant à se soustraire à l’ISF, dans le cadre du projet de budget 2017, considère néanmoins que « le quinquennat Hollande restera celui de la révolution fiscale ratée ». « Ce gouvernement n’a même pas remis l’ISF au niveau qui était le sien avant sa diminution par Nicolas Sarkozy. Si la légitimité de son existence ne souffre aucune discussion, son assiette et son taux peuvent par contre très bien être revus dans le cadre d’un projet global. L’ISF à lui seul, et c’est bien la preuve que les plus riches n’ont pas à le fuir, n’a pas empêché la France de devenir un pays de rentiers. Les droits de succession se sont effondrés. Les 10 % sont les plus riches possèdent 48 % du patrimoine, et le 1 % le plus fortuné s’en est accaparé 17,5 %. Environ 350 000 foyers fiscaux sont assujettis à l’ISF, soit 0,53 % des ménages, qui détiennent à eux seuls 1 400 milliards d’euros, sur lesquels sont prélevés 5 milliards d’euros au titre de l’ISF, soit 0,3 % de leur patrimoine… » La fraude fiscale est estimée à 70 milliards d’euros en France

À cela s’ajoute le fait que les cinq cents plus grandes fortunes françaises ont vu leur patrimoine gonfler de 20 % en cinq ans. « L’ISF n’est donc ni confiscatoire ni dissuasif », argumente Nicolas Sansu. Et ne résout pas, en l’état, l’extrême concentration des richesses par quelques-uns. « Je n’oublie pas qu’il a été créé au départ pour financer le RMI, même s’il n’est plus fléché aujourd’hui. Ce qu’il nous faut bâtir, au-delà, c’est surtout un système fiscal plus efficient et plus juste, avec un impôt sur les revenus plus progressif et composé de davantage de tranches. Sur l’ISF, il faudrait un plafond en valeur, afin d’éviter l’inconstitutionnalité et surtout pour ne pas laisser des sommes faramineuses aux mains de quelques-uns au nom du pourcentage. Pourquoi ne pas laisser une sorte de reste à vivre aux plus riches, à hauteur par exemple de 10 millions d’euros par an, en dehors de leur patrimoine ? »

Reste enfin la lutte contre la fraude fiscale. Environ 70 milliards d’euros sont ainsi volés chaque année à la France… À côté, les 5 milliards rapportés par l’ISF apparaissent bien ridicules, quand bien même la droite les trouve insupportables…

Aurélien Soucheyre, l’Humanité


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