Pour ou contre les partis, un cadre institutionnel obsolète

mercredi 22 février 2017.
 

par Clémentine Autain, porte-parole d’Ensemble  !

Le débat sur la fin des partis politiques fait rage depuis des années. Les termes binaires dans lesquels il se mène ne me paraissent pas de nature à nous aider à affronter les défis contemporains. Pour ou contre les partis politiques  ? Là n’est pas exactement la question. Si elle se pose, c’est que la forme parti telle qu’elle a existé au XXe siècle est à bout de souffle. C’est aussi que le cadre institutionnel dans lequel évoluent les partis politiques se trouve obsolète et discrédité. C’est enfin que les frontières entre les partis actuels de gauche semblent reposer sur des clivages correspondant au monde du XXe siècle.

Nous aurons demain comme hier besoin d’organisations politiques. En effet, si la vie politique se veut démocratique, elle doit reposer sur des formes collectives de délibération. On peut changer le nom de ce cadre, cela ne dit rien sur la façon de bâtir un espace commun de fabrication politique. Les partis issus du XXe siècle sont d’abord critiqués en raison de leur fonctionnement pyramidal, vertical. La place de l’individu apparaît comme niée, diluée dans le tout collectif. L’arrivée des femmes dans l’espace politique et le changement des rythmes de vie posent également la question du temps dans l’élaboration politique. Les façons de faire – longues réunions publiques avec tribuns se succédant derrière la tribune, tracts bavards distribués sur les marchés, monopolisation de la parole dans les réunions par les plus rompus à l’exercice… – apparaissent en partie dépassées par l’essor d’Internet ou une lassitude à l’égard des formes traditionnelles de militantisme. Il est plus simple de dire ce qui dysfonctionne que de tracer une autre voie opérationnelle. Mais nous ne pouvons répondre qu’aux questions que l’on se pose. Et celles-ci sont décisives pour l’avenir.

À l’adaptation des formes de l’organisation politique au monde contemporain s’ajoute l’attractivité du projet politique. Si les partis français à gauche semblent passés de mode, c’est aussi, voire avant tout, que leur proposition politique n’apparaît pas comme suffisamment séduisante. Syriza, dans un style classique, puis Podemos, dans un genre plus innovant, sont des partis qui ont percé de façon significative. En France, le Front national est un parti qui progresse là où le PS s’effondre depuis le fiasco gouvernemental. Pour s’engager dans une organisation politique, il faut estimer que cet engagement est utile, qu’il donne de l’espoir, du sens, une perspective d’avenir. S’attacher à la forme ne doit donc pas faire oublier le fond. Mais les deux ne doivent-ils pas en réalité être liés  ?

Ma conviction, c’est que nous avons besoin d’une force politique nouvelle capable de dessiner un projet émancipateur, social et écologiste, du XXIe siècle. Cette nouvelle force ne se créera pas de toutes pièces, en dehors de l’apport des partis existants. Elle mêlera des courants, des militants porteurs de traditions diverses issues du mouvement ouvrier et de l’écologie politique. Pour être une force large, elle devra accepter cette hétérogénéité des cultures tout en assurant une cohérence d’ensemble, forcément nouvelle, mais dont nous voyons année après année la possibilité de se dégager. Mais, et ce point est fondamental, cette nouvelle force ne saurait résulter d’un simple réagencement de l’existant, d’une seule recomposition à partir des appareils actuels. Fatigués par les alternances qui se succèdent et ne changent rien, les Français, comme ailleurs en Europe et à travers le monde, cherchent une voie nouvelle, une rupture. Et donc du neuf. C’est à cette tâche que, du côté de l’émancipation humaine, nous devons nous atteler.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message