Premier tour des présidentielles : Le lendemain qui chante

mardi 24 avril 2007.
 

Dimanche soir, à partir du moment où la réunion du bureau du parti a été finie tout le monde s’est dispersé et moi je suis descendu dans la cour du siège socialiste. Il n’y avait que des journalistes. Des dizaines. De tous les pays. J’ai donc fait deux heures et demi de commentaires non stop en passant de l’un à l’autre. Dans la série, un nombre non négligeable de radios et télés en espagnol puisque je parle cette langue exquise.

Ce matin dans ma boite mail totalement explosée par les courriers du jour et les dizaines d’alertes bidons du week-end, un message d’un ami lointain qui a capté les commentaires en questions dans les crachotis de RFI sur la route entre La Paz et El alto en Bolivie. Je m’émeux de penser à ce filet qui relie nos émotions, où que nous soyons, sitôt qu’un événement nous sollicite.

Chapitre émotion encore : quand il fut sûr que la gauche serait présente au second tour ma pensée s’est tournée vers le héros malheureux du 21 avril il y a cinq ans, Lionel Jospin. Comme c’est injuste ce qui nous est arrivé alors. Et spécialement injuste s’agissant de lui. La ferveur du vote utile qui s’est imposée de façon si violente chez les électeurs de gauche s’ancrait profond dans la leçon reçue ce jour là.

Je reviens à mon commentaire. Il y a quatre bonnes nouvelles dans les résultats de dimanche.

Primo le vote massif. Là-dessus on a entendu beaucoup de choses assez lénifiantes et gnan gnan. La vérité, c’est que la force du vote est un signal de politisation qui ne s’épuise pas dans le bulletin de vote qu’il utilise pour s’exprimer. Donc, les espérances sont à la hauteur de l’implication. La machine à donner des claques politique ne faiblira pas de sitôt... Si l’on y réfléchis plus avant on peut aussi y voir un acte de résistance à la pente anglo saxonisante du monde qui pousse le populaire à jeter l’éponge de la chose publique comme aux Etats unis ou en Angleterre.

Secundo, l’extrême droite recule. Très bonne chose même si c’est au prix d’une extrêmisation de la droite dite républicaine. Car ce qui compte c’est l’affaiblissement de l’original pour mieux le diluer. Du reste la droitisation de la droite et l’émergence d’un centre visible oblige la gauche a renforcer sa propre visibilité c’est-à-dire a se définir plus clairement si elle ne veut pas être cannibalisée. J’admets que ce point de vue est très personnel. Qui vivra verra...

Tertio, la gauche est qualifiée pour le deuxième tour. Je n’insiste pas. Nous jouions tout simplement l’existence de la gauche en tant que force politique dans cette affaire. La gauche comme se la représente les Français c’est-à-dire frontalement opposée à la droite au contraire des mélis mélos tordus ou contre nature en vigueur en Italie Allemagne et Royaume uni. Le refus clair et net de suivre les voix perfides qui ont recommandé de façon si irresponsable l’entente avec l’UDF avant le premier tour est une des composantes de la force du résultat acquis, ne l’oublions jamais.

Quarto, le résultat acquis rend la victoire possible. Si l’on ne s’illusionne pas sur l’existence d’un centre tout à fait improbable et si l’on comprend que la composante numéro un qui a multiplié par trois le vote Bayrou est le rejet du système politique en place, alors un chemin peut être ouvert qui écarte Sarkozy. Un mot à son sujet. Il donne une leçon. Il a créé un parti et une opinion de droite clairement assumée. C’est un fait nouveau qui tourne la page de la droite honteuse d’elle-même depuis l’après guerre. La méthode vaut vraiment leçon.

L’UMP est un parti. Un vrai. Une organisation centralisée coordonnant l’action de ses militants. Avec une doctrine et des mots d’ordre enseignés et répétés à longueur de campagne en vue de créer une adhésion intellectuelle des ses électeurs. Avis aux faiseurs de phrases sur la « fin des partis » et des programmes flous attrape tout.... La leçon devrait aussi parvenir jusqu’à certains secteurs de l’autre gauche où le thème de « la fin des partis » a déjà fait quelques ravages.

J’en viens à ce sujet de l’autre gauche. Je n’en dis pas plus que ce que j’en avais dit à Montpellier dans le dernier grand meeting unitaire : « si vous entrez divisés dans l’élection vous en sortirez en poussière ». C’est fait. Mille fois hélas. Et la première victime c’est la gauche elle-même, privée de la dynamique qu’un attelage à deux lui aurait apporté. Ce que nous avions appelé « l’union dans l’union » passait pour un thème abstrait. Le soir du premier tour, en faisant les comptes et en constatant la maigreur des réserves, il parait sans doute plus concret... Mais de toutes façon la page est tournée.

Un autre moment tout neuf commence. La vie est simplifiée depuis dimanche vingt heures. Nous sommes passés de douze possibilités pour l’avenir, à deux. Toute la réalité est inscrite dans ces deux possibilités : Sarkozy ou Royal. Et tout le reste est différé après le règlement de cette question. Donc, à chacun d’être ou le devoir commande une fois de plus. Car le score acquis par Sarkozy, acquis comme il l’a été nous prévient sans aucune ambiguïté de ce qui nous attend s’il l’emporte.


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