Un vote au "jugement majoritaire" aurait placé Mélenchon devant Macron

lundi 22 mai 2017.
 

Une étude menée par le CNRS, l’université de Paris-Dauphine, l’École polytechnique et LaPrimaire.org explore ce nouveau type de scrutin, qui consiste à donner une appréciation à chaque candidat plutôt qu’à glisser un bulletin pour une personne dans l’urne.

Emmanuel Macron a été élu avec 66% des voix, mais il n’en recueillait au premier tour que 24%, et même 18% si on ne compte que les inscrits. Au second tour, nombreux étaient ceux qui avaient voté pour lui avant tout pour faire "barrage" à Marine Le Pen : seulement 20% des électeurs du nouveau président ont indiqué avoir voté pour lui "par adhésion", selon une enquête BVA réalisée le 7 mai 2017. Ce qui pose une question cruciale : existe-t-il un système de vote qui permettrait d’élire des candidats qui rassemblent plus d’électeurs, et qui permettrait d’établir un plus large consensus ?

C’est la promesse du jugement majoritaire. Dans ce type de scrutin, vous ne votez pas pour un candidat, mais vous attribuez une appréciation à chaque candidat : "Très bien", "Bien", "Assez bien", "Passable", "Insuffisant", "À rejeter". Les candidats qui arrivent en tête sont ceux qui ont obtenu la meilleure "mention-majoritaire".

Les chercheurs qui ont inventé cette méthode, Michel Balinski et Rida Laraki, ont mené pendant l’élection présidentielle une expérimentation auprès de 53.000 électeurs, en partenariat avec le CNRS, l’université de Paris-Dauphine, l’École polytechnique et LaPrimaire.org, une primaire en ligne ouverte aux candidats hors partis. Les résultats ont été révélés ce mardi 16 mai, sur le site dédié. Le profil des participants était largement à gauche, ce qui explique un résultat très favorable à Jean-Luc Mélenchon, qui arrive premier de cette expérience.

Mais les chercheurs ont aussi appliqué leur méthode à un sondage Ifop mené les 11 et 12 avril pour La Fabrique Spinoza auprès d’un échantillon de 1.000 personnes représentatives de la population française. Et là, surprise ! Le scrutin lui profite aussi. « Le match aurait clairement été entre Mélenchon et Macron », qui obtiennent tous deux la mention "assez bien", constate Rida Laraki. Le candidat de La France insoumise récolte 13,3% de "très bien", 22,2% de "bien" et 28,8% d’"assez bien". Celui d’En marche ! obtient 9,6% de très bien 22,8% de "bien" et 25,7% d’"assez bien", soit une "mention-majoritaire" légèrement inférieure à celle de Jean-Luc Mélenchon :

Extrait de l’étude "Résultats du vote au jugement majoritaire" menée par les chercheurs Michel Balinski et Rida Laraki.

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Benoît Hamon arrive troisième, Dupont-Aignan quatrième, et Marine Le Pen… cinquième seulement. La candidate du Front national suscite certes un fort taux d’adhésion (15,3% de "très bien", soit plus que Mélenchon et Macron), mais nombreux ont aussi été les "électeurs" de ce sondage à lui accorder la mention "à rejeter" (34%) et la mention "insuffisant" (13,6%), ce qui l’éloigne du podium.

Ce sondage ne reflète pas complètement les résultats finaux : avec le scrutin majoritaire, Mélenchon obtient dans ce sondage 20,7% des voix, et Macron 20,4%, une différence de quatre points avec le résultat de l’élection. Une chose cependant est certaine : le jugement majoritaire permet d’éliminer les candidats les plus rejetés par une large partie de la population.

Il a aussi ses défauts, ou ses critiques possibles : il est plus difficile à comprendre et demande à l’électeur de prendre position sur chacun des candidats, ce qui pourrait potentiellement exclure encore un peu plus les électeurs qui se sentent déjà loin de la politique, ou qui n’ont d’intérêt que pour un seul candidat.


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