FO et CFDT : la base met la pression sur les chefs

dimanche 24 septembre 2017.
 

Les deux confédérations, qui refusent de défiler au côté de la CGT, font face au mécontentement d’une partie de leurs militants.

La neutralité syndicale face à la mobilisation contre les ordonnances Pénicaud paraît de plus en plus difficile à tenir. A deux jours d’une nouvelle journée de manifestations à l’appel de la CGT, de Solidaires et de la FSU, les remous s’accentuent au sein des confédérations ayant choisi de ne pas battre le pavé.

A Force ouvrière, la fracture entre les tenants de l’action et la direction confédérale, partisane d’un certain attentisme, s’est encore creusée. Selon nos informations, 58 unions départementales, contre 53 la semaine dernière, et 8 fédérations professionnelles appellent à descendre dans la rue, jeudi, contre l’avis de leur secrétaire général, Jean-Claude Mailly. « Il y a beaucoup de mécontentement en interne sur la position de la confédération, affirme le responsable de la fédé des transports, Patrice Clos. Même parmi les fédérations qui n’appellent pas à la manif, ça bouge, notamment dans la métallurgie. » Et l’homme de prédire une séance d’explications « tendues », la semaine prochaine, lors du comité confédéral national, parlement de l’organisation. « Ça va être un peu chaud, confirme le responsable de FO Manche, Yann Perrotte. Quand vous voyez que l’UIMM [patronat de la métallurgie, ndlr], considère que 66 % des mesures des ordonnances sont en leur faveur, contre 15 % pour les syndicats, tout est dit. »

Agitation.

A la CFDT aussi, l’unité commence à se fissurer. Après la journée d’action, lundi, de la branche route, dont le secrétaire général, Patrick Blaise, affirme néanmoins qu’elle s’est tenue dans le cadre de la ligne confédérale, c’est au tour de la fédération de la métallurgie de ruer dans les brancards. Dans un courrier adressé au responsable de la confédération, Laurent Berger, et rendu partiellement publique par l’AFP, la fédé des métallos réclame « un appel national à manifester de la part de la CFDT ». Et d’expliquer que le choix de ne pas mobiliser plus amplement « a occasionné la colère de nombreux militants qui, appartenant à la première organisation syndicale du privé, s’attendaient à une réaction bien plus forte » de la centrale. Pour l’heure, aucune autre fédération n’a embrayé. Mais là aussi, les discussions pourraient être serrées, lors du bureau national de la confédération qui s’ouvre ce mardi pour trois jours. « Il n’y a pas de position encore tranchée chez nous, confie un membre de la CFDT chimie. Mais les remontées de terrain font état d’une incompréhension de la position confédérale, notamment sur la façon de s’exprimer. »

L’agitation ne semble cependant pas homogène dans l’organisation. « Je n’ai pas de montée d’huile de ce type-là, même à Florange, c’est le calme plat, confie le responsable de la CFDT Lorraine, Alain Gatti. Les reproches portent plus sur le fait que la confédération a tardé à donner des consignes. » Le secrétaire général de la CFDT Occitanie, Grégory Martin, restera, lui aussi, sur la ligne confédérale : « Pendant toute la période de concertation avec le gouvernement, le bureau national a été étroitement associé au processus, la direction l’a joué collectif, ce qui justifie que nous soyons solidaires ». D’accord, donc, pour exprimer les « désaccords profonds » avec les ordonnances, « mais dans le brouhaha ambiant, on doit le faire de manière différente de ce qui se fait d’habitude. En tout cas, pas à la remorque de la CGT ».

Faibles.

Ce positionnement ambigu de la CFDT, opposée à la réforme mais frileuse sur les modes de protestation, serait ainsi dû, en grande partie, au contexte, qui tétaniserait l’organisation. Selon un membre du bureau national, la centrale de Belleville ne s’attendait pas à ce que Macron fasse si peu de cas des syndicats dans sa réforme. « On ne pensait pas qu’il savait qu’on était aussi faibles, confie-t-il, sous couvert d’anonymat. On s’est dit, il est social démocrate, il va faire attention aux corps intermédiaires. En fait, non. Il a défoncé les partis, et maintenant, il semble que ce soit au tour des syndicats. » Mais l’organisation est coincée : « Il y a quelques mois, on craignait le chaos du FN. Là, on craint, en plus, le chaos de La France insoumise. Si Macron échoue, on ne sait pas comment ça va finir. » Car Macron, cette fois, « joue avec le feu démocratique ».

Luc Peillon


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message