Les citoyens gilets jaunes seuls à l’assaut de l’oligarchie

samedi 21 septembre 2019.
 

Novembre 2018 : On est encore loin d’une révolution bien sûr mais les revendications s’affinent et la détermination est impressionnante. On entend de plus en plus d’appels à un référendum révocatoire (qui figure dans le programme de la France insoumise), de dissolution de l’assemblée nationale, de blocage des ports, de points de ralliement autour des centres des impôts et des préfectures, de blocages sporadiques et très ciblées pour toucher le système et épargner les habitants.

La marche vers l’Elysée était un objectif samedi dernier. 77% des français soutiennent après 5 jours de dénigrement du mouvement par la nomenklatura parisienne (abrutis, incultes, fachos, racistes, etc). Un militant explique bien ici les raisons de la colère en s’adressant aux parisiens riches qui ne peuvent pas comprendre…Bon résumé factuel de la situation par un jeune très sympathique.

Les appels au blocage sont détaillés comme celui ci. Et de plus en plus sophistiqués quant aux cibles et aux finalités politiques du mouvement comme celui-ci. Impressionnant. Pour ce dernier on observe bien un mélange des codes esthétiques du FN et des revendications de la France Insoumise qui nous replonge dans la longue histoire de France. Qui se souvient comme le rappelait Jean-Luc Mélenchon que Zola et les bien pensants de l’époque s’étaient bouchés le nez lors de la commune de Paris, avaient déserté la lutte sous prétexte de la barbarie des protagonistes, et laissé Victor Hugo et Jules Vallès seuls à ferrailler pour aider la lutte ? Qui pense que la révolution française s’est faite avec des « progressistes » bon teints qui auraient intégré le manuel du parfait petit humaniste ?

L’inculture générale et l’inculture politique en particulier sont des freins incroyables à l’action politique. La nomenklatura en joue à plein et l’électorat des Hamon ou des Hollande, des Jadot, est un électorat sans une once de considération politique. Comment comprendre autrement que EELV et le PS ont été les principaux pourvoyeurs de félons politiques de ces dernières années : Cohn-Bendit, Placé, De Rugy, Pompili, Valls, Le Drian, etc… Leur électorat gobe tout. Et le positionnement destructeur d’un Hamon/Glucksmann prolonge ce spectacle désolant de partis politiques qui n’ont jamais eu la moindre influence positive sur la vie des gens mais parasitent le débat publique et freinent l’apparition de forces décisives.

Par contraste avec l’inaction des belles personnes, un chiffre exprime la pertinence des choix spontanés du mouvement de blocage des gilets jaunes : 26% d’achats par carte bleue en moins la journée du 17 novembre, 39% de baisse de fréquentation des centres commerciaux. Le temple consumériste de la pieuvre financière touché de plein fouet par les laissés pour compte de l’abondance décadente. Etonnant. A mettre en rapport avec les tentatives infructueuse de réduction de la consommation souhaitées par tant d’associations et citoyens très bien éduquées, tellement politiquement correctes qu’ils ne sont encore jamais arrivés à baisser la consommation de Nutella ou à imposer l’étiquetage des aliments poisons...

Face à l’irruption des sans voix et des pauvres dans la fenêtre médiatique (fin de la société du spectacle ?), le matraquage de la presse oligarchique ne fait illusion que pour les frustrés de la mort de cette sociale démocratie. Cette sociale démocratie a tant envoyé de gens dormir sur les trottoirs que ses électeurs enjambent littéralement les duvets depuis une dizaine d’années. Cependant pour eux l’important reste le politiquement correcte et le rejet de la radicalité nécessaire pour changer les choses. Evidemment les habituels diviseurs de la gauche s’en donnent à coeur joie. Anciens du PS ou EELV pour la plupart, ils conservent leurs salaires et subventions, bien qu’incapables de tendre la main au pauvres. Ils épousent la propagande officielle mot pour mot. Ils s’offusquent des actes racistes qui émaillent ces journées de mobilisation pour justifier leur mépris du peuple. Ils temporisent et esquivent. Ils moralisent. Ils ne font jamais de politique, restent dans l’incantation, expriment leurs souhaits et leurs désirs. Ils ne savent pas ce qu’est la politique. La vie de la cité. La tribune. Ils ne connaissent pas.

Pourtant sur deux à trois millions de gens rassemblés, comment s’étonner que les chaines de télés ne trouvent pas quelques dizaines de faits inqualifiables à agiter comme épouvantail à la face des faux « progressistes » ? Est-ce vraiment nécessaire de plonger tête baissée dans le piège grossier et y trouver un prétexte pour bouder l’élan populaire ?

Comme si la place de la gauche n’était pas justement auprès du peuple pour tenir tête à l‘extrême droite. Comme si la lutte pour le renouveau social et écologique ne passait pas par l’échange avec les citoyens du pays pour les convaincre d’y adhérer. Comme si les pétitions et les appels étaient le seul horizon militant et allaient changer quelque chose pour les pauvres.

Les progressistes réagissent comme si le peuple les dégoutaient et comme s’ils ne pouvaient plus s’extraire de leur entre sois de caste (cf le précédent post montrant les liens personnels entre Plenel/Besancenot/Hamon).

Alors, encore une fois c’est François Ruffin qui a fait le job tout le weekend avec les autres députés de la France insoumise, écoutant, rassemblant les doléances. Lui qui a arraché son élection à un bastion FN en battant la campagne et en ouvrant des milliers de portes pour discuter et convaincre, il a martelé inlassablement : « ce ne sont pas les étrangers le problème, c’est là haut. Les pauvres ne doivent pas se déchirer entre eux. » Ils sont respectés nos députés. Leur message porte. Le vote FN n’est pas une fatalité et nous savons exactement quel est le vaccin : porte à porte, considération, respect et conviction. La Picardie l’a montré pour Ruffin.

Après quelques jours Besancenot, Martinez de la CGT, Laurent du PCF, voire Hamon et Glucksmann, ont tous été obligés de rétropédaler. Après avoir diabolisé le mouvement exactement comme BFM et Macron leur demandait de le faire sur la base d’images passées en boucle, il se sont rendus compte que leur propre base était évidemment très fortement représentée dans les blocages. La CGT de la chimie a ouvert une brèche et maintenant le syndicat vote contre son secrétariat général le soutien officiel au mouvement. Besancenot se fend de tweet expliquant qu’il faut en être du bout des lèvres. FO Transport s’est lancé hier. 6 des 7 raffineries de pétrole françaises sont en grève aujourd’hui du fait d’appels à la grève.

Encore une fois les derniers représentants du système politique datant des années 80 se sont fourvoyés. Et ainsi, en quelques jours de mobilisation, les gilets jaunes font voler en éclat le ronron social démocrate qui permettait aux financiers de s’engraisser sans risque. Le dégagisme est enfin appliqué au groupuscules de la fausse gauche et du syndicalisme de connivence. Car s’ils avaient joué leur rôle de défenseurs des faibles, ils n’auraient pas eu à subir l’affront de voir une contestation s’organisée sans eux.

Ainsi, en se rendant visibles par eux mêmes, les laissés pour compte du régime, cet état désormais entièrement livré aux prédateurs financiers, ont complètement déstabilisé l’édifice oligarchique. Rendons nous bien compte du résultat de ces premiers jours de mobilisation : réduire puissamment les ventes des centres commerciaux à la première journée de blocage balayer l’écran de fumée de la fausse gauche groupusculaire faire irruption sur les écrans dans les chaumières et imposer son agenda au gouvernement en pleine panique

Le moment est important dans l’histoire du pays.

C’est tout le consentement du peuple au vol des fruits de son travail qui s’effondre après des dizaines d’années d’obéissance entretenue cruellement par la gauche des pseudos révolutionnaires ou des amis des puissants. La réduction des salaires (non compensation de l’inflation, CDD, temps partiels, chasse aux chômeurs), la réduction des taxes pour les entreprises qui crée l’assèchement du financement des droits sociaux, l’indignité qui en découle (retraites, hospices, hôpitaux, écoles, justice, polices, etc) : tout converge.

Et le peuple se lève. La présence physique sur les blocages se double d’une irruption dans l’intimité des français. Des gens qu’on n’avaient jamais vus auparavant passer à la télé y décrivent leur vie, des abstentionnistes n’ayant jamais manifesté, des gens éduqués dans la crainte du pouvoir ou des sachants, des gens qui n’avaient jamais imaginé tenir tête à quiconque. C’est littéralement la faim qui a poussé beaucoup d’entre eux. Le long cri déchirant de cette femme hurlé à la face des riches en pleine rue résume à lui seul la situation. Combien de femmes seules qui avaient déjà dû choisir entre l’essence et le chauffage doivent se résoudre à rationner l’alimentation depuis qu’elles perdent 30 à 50 euros de plus par mois en diesel ? Combien de retraités dans le dénuement le plus total ?

La France crie sa misère et sa tristesse. C’est ça qu’il faut savoir entendre. Rien d’autre. Le rideau est déchiré. On voit maintenant l’envers du décor tous les soirs au 20h, ces gens qui dansent, qui pleurent, qui crient, qui disent maladroitement leur souffrance, qui montrent leur exaspération, leur désarroi. Spectacle effarant après tant de décennies de bien pensance dégoulinante. La dignité et le courage nous frappent au visage. Le désespoir nous unit.

Ni de droite ni de gauche cette puissante manifestation de désarroi est l’expression viscérale d’une exigence de dignité. Il n’y a pas de construction politique à cette étape. Il y a uniquement le cri de cette jeune femme dans la nuit des ravages du libéralisme. Il y a le besoin d’être ensemble pour retrouver cette chaleur humaine qui fait tant défaut quand tout n’est plus que calculs, peurs de manquer et impossibilité de ne rien prévoir ou rêver. Faire fuir cette solitude qui s’abat comme un châtiment sur les pauvres.

Si on avait voté tous France insoumise, nous serions en train de rédiger une nouvelle constitution. C’est ce que nous avions prévu de faire et c’est le seul baume possible pour nous rendre notre dignité. Au lieu de cela, nous allons devoir passer par le chaos. Le pouvoir actuel est inexpérimenté et méprise le peuple. Les jours qui viennent ne vont pas être beaux à voir. Il y aura des drames et une colère redoublée qui se nourrira d’elle seule puisque dans notre pays actuellement les politiques qui proposent des projets de société sont raillés, insultés, mis au ban. L’état est devenu policier sous Hollande, Hamon, leurs amis d’EELV, et la répression sera suffisante cette fois ci pour mater la révolte. Mais nous entrons dans une période très dure.

Quoi qu’il arrive la violence sera toujours à proscrire. La seule porte de sortie est politique. Il faut occuper le terrain, discuter, proposer le programme de la France insoumise aux gens, le lire avec eux, l’expliquer point par point, dénoncer les marchands du temple qui entretiennent le système (la triste fausse gauche), et tout faire pour gagner les européennes devant Le Pen. C’est la rampe de lancement pour les présidentielles. Sans cela, il y aura des années et des années de révoltes.

Deeplo


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