16 et 17 juin 2007 Fondation de Die Linke en Allemagne

mercredi 17 juin 2020.
 

1) Jean-Luc Mélenchon, François Delapierre et Raquel Garrido présents au congrès de fondation de "La Gauche" en Allemagne

Aujourd’hui je m’envole pour Berlin avec François Delapierre et Raquel Garrido. Nous allons participer en observateurs au congrès de fondation du nouveau parti, Die Linke, né de la fusion de l’organisation socialiste WASG fondée par Oskar Lafontaine et de l’ancien parti communiste allemand. Les lecteurs réguliers de ce blog savent que les responsables de PRS (Pour la République Sociale) s’impliquent beaucoup dans l’observation active de ce processus de recomposition politique. Depuis des mois je m’exprime à intervalle régulier avec Oskar Lafontaine sur les questions qui concernent la construction européenne. J’ai répondu au journal « l’Humanité » qui m’interrogeait dans le cadre d’un grand papier d’ensemble sur ce congrès qui retient beaucoup l’attention des communistes. Je pense que je dois reproduire ici cet entretien. Ceux qui apprécieront positivement son contenu peuvent appuyer la démarche en faisant connaître ce texte dans leur liste de diffusion militante. D’avance je les en remercie. Le premier média d’un point de vue, je me répète, ce sont les gens qui le partagent.

2) « Une des issues possibles pour la gauche » (Interview de Jean-Luc Mélenchon, 14 juin 2007)

Sénateur socialiste, président du mouvement Pour la République sociale, Jean-Luc Mélenchon privilégie un processus à l’allemande et pense au divorce avec la rue Solférino.

Vous serez présent dans quelques heures au congrès fondateur du Die Linke en Allemagne. Pourquoi donnez-vous une telle importance à ce moment politique d’outre-Rhin ?

Jean-Luc Mélenchon. Le processus de constitution de cette formation n’est évidemment pas transposable en France. En revanche, ce qui est directement transposable est la situation d’impasse de la social-démocratie allemande aboutissant à ce qu’un secteur de celle-ci, tant sur le plan électoral que militant, décide de s’engager dans un processus de construction politique original. Cette impasse est emblématique. L’Allemagne et la Grande-Bretagne sont le coeur de la social-démocratie internationale. Dans ces deux pays aujourd’hui, les sociaux-démocrates sont des acteurs enthousiastes du démantèlement de l’État social qu’ils ont eux-mêmes construit. Ils arrivent ainsi au bout de la politique d’accompagnement de la mondialisation libérale. Un seul exemple : dans ces deux pays, ils participent à l’allongement de l’âge de la retraite, comme tous les autres partis sociaux-démocrates d’Europe. Cette impasse stratégique, ce renoncement à transformer la société, nous concerne : elle n’est ni allemande ni anglaise mais internationale. Nous sommes donc directement impliqués par l’évènement. C’est sans doute aussi le moment, ici, de se demander s’il est bien l’heure de se découvrir une vocation sociale-démocrate qui n’a jamais été dans la tradition du socialisme français.

Considérez-vous ce scénario à allemande comme une piste pour la gauche française ?

Jean-Luc Mélenchon. Je suis cette évolution depuis les premières heures. J’ai participé à plusieurs réunions avec Oskar Lafontaine. J’ai la conviction que nous pouvons y trouver une source d’inspiration très forte pour notre propre travail de construction politique en France. Après l’observation des conséquences de la chute du communisme d’État, on est en train de découvrir la catastrophe qui frappe la social-démocratie internationale. Pour ma part, je crois que la formule et la méthode de construction de ce nouveau parti peuvent nous donner une indication sur ce que nous avons nous-mêmes à faire. J’y vois une des issues possibles de la crise de la gauche en France. C’est celle que je privilégie à cette heure. J’observe de la part des communistes français une volonté de dépassement des formes politiques anciennes, tout en ayant le souci de protéger leur identité. Le même souci existe chez une partie des militants socialistes qui n’acceptent pas de se résigner à une fumeuse orientation sociale-démocrate, ni à un tropisme pour le centre. Ceux-là ne veulent pas qu’on substitue à l’aspiration sociale des Français une inclination préférentielle pour les revendications sociétales des classes moyennes supérieures des centres-villes.

En France, cela signifierait une double rupture : celle entre vous et le PS actuel, et celle du PCF avec son passé. La situation vous semble-t-elle s’y prêter ?

Jean-Luc Mélenchon. Je suis obligé de constater une évolution du PS dans le sens d’une mise aux normes européennes. La gauche du PS est de plus en plus un alibi pour ce parti. Elle n’est plus admise à jouer un rôle actif dans le mouvement socialiste. Il suffit de voir comment cette gauche, ses idées et ses représentants ont été traités pendant la campagne présidentielle. Les choses se sont depuis considérablement aggravées avec les surenchères vers le centre. La question du divorce commence à être posée. Elle n’est toutefois pas tranchée. D’ailleurs à l’heure actuelle il n’existe pas d’alternative. Les communistes n’ont pas encore fait ouvertement le choix de la construction d’une force nouvelle. Leur choix sera tout à fait décisif. Un projet alternatif doit avoir trois caractéristiques : être républicain, de gauche et gouvernemental. Sur ces points, la convergence est extrêmement avancée entre PRS et le PCF d’aujourd’hui. Reste le facteur déclenchant : la décision des communistes. Ce n’est pas la première fois que je lance cet appel. Dans la présidentielle j’ai parlé « de l’union dans l’union ». J’ai voulu montrer qu’une affirmation identitaire n’est pas contradictoire avec une affirmation unitaire.

Entretien réalisé par Dominique Bègles

Source : http://www.jean-luc-melenchon.fr/ar...

3) Les fondements de DIE LINKE

Ce sont les forces réformatrices au sein du SED, parti communiste de l’ex-RDA, qui dans leur lutte contre le stalinisme et le totalitarisme, jouent un grand rôle dans la création du PDS. Malgré sa rupture avec le stalinisme et son ferme engagement pour un socialisme démocratique, Il est rejeté d’emblée par les partis traditionnels allemands, précisément en tant qu’héritier du parti communiste de l’ex-RDA. Une de ses missions principales immédiates est de s’engager pour les intérêts des Allemands de l’Est.

Dans ce contexte, rappelons que la façon dont se réalise l’unité allemande provoque un véritable tsunami sur l’Est, balayant l’héritage social et culturel, liquidant les entreprises, laissant les Allemands de l’Est livrés à eux-mêmes et sans travail. Sans le PDS, bon nombre d’Allemands de l’Est, ne serait-ce qu’au plan humain, n’auraient jamais pu trouver leur voie dans l’unité allemande. De ce fait, le parti du socialisme démocratique, s’inspirant des thèses de Rosa Luxemburg contre la guerre, pour la liberté, la démocratie et le socialisme, s’impose comme parti est-allemand, après des moments extrêmement douloureux et des déchirures. Il devient incontournable dans le paysage politique allemand, malgré le rejet persistant par les grands partis. Sa présence au Bundestag, dans les Länder et les municipalités de l’Est, en fait un véritable parti de justice sociale et de proximité face au néolibéralisme destructeur. Bien entendu, "la seule défense des intérêts des Allemands de l’Est fut une mission limitée historiquement, une époque transitoire importante. Il fallait aller au-delà, car nous voulions changer la société allemande" aime à dire Gregor Gysi. La tentative de s’implanter dans la cour des grands, c’est à dire au niveau de toute l’Allemagne, ne peut se faire tout seul. Des femmes et hommes de gauche de l’Ouest font preuve d’un immense courage pour rejoindre le PDS. En effet, l’Allemagne fédérale est contaminée par un anticommunisme d’une telle virulence depuis 1949, que l’ancrage de celui-ci dans la société ouest-allemande ne permettait pas l’acceptation générale d’un parti postcommuniste issu de l’ex-RDA. Cela ne fonctionnait ni politiquement, ni culturellement.

Que faire ? Renoncer ? Le PDS, riche de 60 000 adhérents dont la moyenne d’âge est élevée continue de mener sa vie à l’Est, région où le chômage atteint des pics au-delà des 20% et où les salaires à l’Est sont de 21% inférieur à ceux de l’Ouest pour le même travail. Les militants les plus âgés ont l’audace de placer dès le début les plus jeunes à des fonctions électives. Bon nombre d’entre eux, très engagés, ne passant pas inaperçus, siègent au Bundestag, dans les parlements locaux et régionaux. Des jeunes femmes de moins de 30 ans s’affirment au Bundestag. Le changement générationnel semble être ainsi assuré.

Ce parti est-allemand qui vient perturber la scène politique nationale décide d’asseoir ses fondements au niveau théorique grâce à la Fondation Rosa Luxemburg qu’il met en place. Celle-ci joue un rôle d’échanges contradictoires, de formation, de réflexion aux plans national, européen et international. Des intellectuels de nombreux pays, mais aussi des intellectuels allemands de toute couleur politique, venant parfois de partis rejetant le PDS, interviennent au sein de la Fondation sur des grands thèmes d’actualité.

Les choses s’accélèrent pour la gauche allemande avec le plan de démantèlement de l’Etat providence déployé par l’ex-Chancelier Gerhard Schröder. Les principales victimes de ces réformes en sont les retraités, les chômeurs, les femmes et les personnes malades. Que cette politique soit l’oeuvre d’un chancelier social-démocrate est insupportable pour des militants et responsables du SPD (Parti Social-Démocrate), des syndicalistes, des altermondialistes, des communistes, des trotskystes, etc.. tous de l’Ouest dans leur majorité. Ils décident de créer en 2004 la WASG. Les militants et responsables sociaux-démocrates qui en sont partie prenante quittent le SPD, parti dans lequel bon nombre militaient activement parfois depuis des décennies. Pour la première fois depuis 1949, grâce à la WASG, une critique sans précédent du capitalisme s’engage dans l’Ouest du pays. Pourquoi ne pas la porter au niveau national ? Surtout que le PDS ne ménage pas ses efforts à l’Est dans ce domaine.

La loi qui régit les partis en Allemagne étant très rigoureuse, la WASG, qui est d’abord une association, se transforme en parti. La moyenne d’âge de ses militants est plus jeune qu’au PDS. Par contre, ce sont les plus âgés qui deviennent membres de la direction de la WASG. Les femmes y sont moins nombreuses que les hommes. L’objectif immédiat de ce nouveau parti est de se présenter aux élections régionales et d’avoir une visibilité politique dans le grand mouvement social naissant contre les mesures du gouvernement Schröder. Ce dernier, suite aux résultats catastrophiques du SPD aux élections régionales, appelle à des élections législatives anticipées. Oskar Lafontaine, en désaccord avec la politique néolibérale de Gerhard Schröder, avait démissionné plusieurs années auparavant de toutes ses fonctions, notamment de la présidence du SPD et du poste de ministre des finances. Il déclare à Lothar Bisky, Président du PDS, qu’il est prêt à être candidat, si le PDS et la WASG se rassemblent. Pour Lothar Bisky, la question décisive était : « Avons-nous le courage de gagner d’autres personnes, d’apprendre avec elles ? Il y avait des oppositions chez nous : Mon Dieu ! Avec un Social-Démocrate ! Mais, le PDS qui est rejeté à l’Oust, ne décollait pas des 0,9% dans cette partie de l’Allemagne !. Alors, ma réponse a été : Bienvenue Oskar !. Puis d’autres membres de la direction du PDS ont dit la même chose. Car il ne s’agissait pas de renoncer à notre identité, bien au contraire, mais de l’enrichir ! Donc, j’ai dit : Prenons au sérieux nos partenaires de la WASG et que le PDS et la WASG s’unissent sur un pied d’égalité ! »

Les choses vont vite, des négociations passionnées, âpres, vigoureuses s’engagent entre le PDS et la WASG, dans le but de créer une nouvelle force de gauche en Allemagne contre le néolibéralisme, qui doit faire le lien entre l’histoire du mouvement ouvrier, l’écologie, la justice sociale, le féminisme. Il faut aussi dépasser les barrières culturelles interallemandes. Pas simple de s’allier avec un parti issu de la RDA ! Parce que la fusion est encore à l’état de processus, le PDS fait une concession, il accepte de changer de nom. Il devient le Linkspartei, afin que les candidats de la WASG, notamment ceux qui ont des préjugés vis à vis du PDS, puissent aussi être candidats sur la même liste. La disparition du nom « PDS » provoque, bien sûr, des protestations chez les militants de l’Est, par peur de perdre leur identité. Alors une solution est trouvée, deux appellations sont reconnues officiellement : « Linkspartei » et « Linkspartei.PDS » pour les Länder de l’Est. Le Linkspartei obtient plus de 8% des voix aux élections législatives de 2005, Oskar Lafontaine et Gregor Gysi deviennent co-présidents du groupe parlementaire au Bundestag

Qu’apportent mutuellement ces deux forces ?

La WASG apporte dans le processus tout ce qui est mentionné dans l’interview, certes. Mais avec ses militants syndicaux, elle apporte un plus, une expérience considérable, celle de la tradition des grandes luttes sociales et revendicatives des syndicats allemands, notamment d’IG Metall. Pourquoi est-ce si important dans le cadre de l’unité de l’Allemagne ? Parce que le PDS ne connaît pas cette tradition de lutte revendicative dans les entreprises. En effet, la RDA était dominée par l’étatisme. Les conflits sociaux étaient inexistants. Ainsi, l’expérience de la WASG peut faire découvrir aux militants du PDS et aux Allemands de l’Est l’histoire de l’ancienne Allemagne fédérale, celle de 1949 à la chute du mur de Berlin, notamment celle des conflits sociaux et des luttes revendicatives.

Le PDS, de par ses célèbres interventions au Bundestag contre la guerre et sa participation aux mobilisations, apporte avec lui son engagement contre la guerre et contre les dépenses d’armement. Dans sa dénonciation des régimes totalitaires, il apporte la démocratie, un socialisme démocratique et écologique, qui place au centre l’unité entre liberté et justice sociale. Et surtout, de par sa proximité avec les couches les plus défavorisés, il s’avère être le parti qui a freiné et empêché l’implantation de l’extrême-droite en Allemagne. Ce n’est pas rien ! Il faut le dire haut et fort, et surtout ne pas le cacher ! La RFA a toujours fait partie de ce qu’on appelle « les Etats démocratiques ». Mais l’expérience du PDS devrait permettre aux militants de la WASG et aux Allemands de l’Ouest en général de réfléchir à la façon d’approfondir la démocratie, de démocratiser la démocratie.

Depuis les élections législatives de 2005 jusqu’au 16 juin 2006, jour de la fusion, le PDS qui est devenu Linkspartei et la WASG sont conscients qu’il existe un espace pour une véritable gauche en Allemagne et ont montré combien ce projet de fusion est important pour la société allemande. Aussi ont-ils commencé à s’attaquer aux tabous. Prenons deux exemples : Il y a encore peu de temps, il était impossible d’aborder la question de l’introduction d’un salaire minimum en Allemagne. Le Linkspartei et la WASG ont lancé une campagne sans répit en sa faveur. Aujourd’hui grâce à cette campagne, ce point figure à l’ordre du jour du Bundestag et les deux partis de la coalition du gouvernement Merkel se disputent sur cette question. « Nous rencontrons un grand écho, quand nous disons que des formes de lutte sont à inventer, pour que la population puisse imposer sa volonté » déclare Oskar Lafontaine. Et de poursuivre : « En effet, nous devons en Allemagne apprendre à penser en français pour défendre nos revendications. Je suis convaincu que si le gouvernement français avait décidé de porter l’âge de la retraite à 67 ans, il aurait du reculer sous la pression d’une grève générale ». Le principe de grève générale ou de grève politique est interdit en Allemagne. Aussi, outre le fait que les retraites vont être un grand thème de lutte, la WASG et le Linkspartei bousculent les habitudes, en essayant d’installer en Allemagne une nouvelle culture de lutte, qui existe déjà en Europe.

C’est aussi parce qu’ils ont décidé de prendre en considération l’histoire du mouvement ouvrier allemand : ses unions, ses divisions, ses succès et ses défaites, que la WASG et le Linkspartei ont choisi, pour le nouveau parti, le nom de « DIE LINKE ». Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht sont les figures emblématiques du mouvement ouvrier allemand pour Gregor Gysi, Oskar Lafontaine, Lothar Bisky et bien d’autres. Ils se réfèrent à la tradition anti-guerre instaurée par Karl Liebknecht. Ils font référence à Rosa Luxemburg pour qui « le socialisme et la démocratie sont indivisibles » et « la liberté est toujours la liberté de celui qui pense autrement ». Oskar Lafontaine y ajoute le chancelier Willy Brandt pour qui « Plus jamais de guerre ne doit partir du sol allemand ». Ils soulignent que Die LINKE doit se situer dans la tradition de ceux qui sont morts dans les camps de concentration hitlériens. Ils font remarquer que DIE LINKE doit tenir compte de l’héritage de celles et ceux qui ont été persécutés et incarcérés : que cela soit les sociaux-démocrates et socialistes en RDA et les communistes en RFA. Ceci est la preuve éclatante que les deux partis, tout comme les Allemands de l’Est et de l’Ouest, ont une histoire différente, qu’une curiosité mutuelle s’installe.

D’ailleurs, l’unité allemande, telle qu’elle s’est réalisée, ne pouvait pas éveiller cette curiosité, dans la mesure où il s’agissait d’un rattachement, où l’Ouest plus fort a absorbé l’Est. Gregor Gysi a un plaisir à dire : « nous organisons notre unité autrement, chez nous il n’ y a pas d’Anschluss ». En effet, si l’on considère le nombre d’adhérents dans les deux partis :60 000 pour le Linkspartei, implanté à l’Est, 11 000 pour la WASG, plus forte à l’Ouest, à savoir 6 fois moins d’adhérents que pour le Linkspartei, les postes de direction au niveau du nouveau parti seront répartis à 50 – 50. Pour le Linkspartei, c’est tout à fait normal quand on crée une organisation nouvelle. Il tient également à montrer qu’il s’agit d’une véritable unité et non d’un Anschluss. Un pied de nez à la réalisation de l’unité allemande. Oui ! le rôle du Linkspartei est bien loin d’être négligeable !

Concernant le déroulement du congrès de fusion, d’autres y ont également participé. Je conseille vivement de lire l’approche très intéressante de Clémentine Autain sur son blog. Il serait bien d’avoir aussi les points de vue des membres de la délégation du PCF : Jacques Fath, Daniel Cirera, Alain Rouy ainsi que celui de Jean-Luc Mélenchon.

J’aimerais toutefois préciser quelques points. Les deux partis ont tenu simultanément et séparément leur congrès le 15 juin, afin d’élire celles et ceux qu’ils devaient présenter à l’élection de la direction de DIE LINKE. La double parité : homme – femme et WASG – Linkspartei doit être respecté. Si cette dernière l’est, Katia Kiping, 29 ans, Vice-Présidente du Linkspartei et députée du Bundestag considère que « c’est une faute politique qu’aucune femme ne soit élue à la tête du nouveau parti, surtout quand on veut faire de DIE LINKE un parti féministe moderne ». Il faut souligner que déjà la co-présidence du groupe parlementaire est assurée par deux hommes : Gregor Gysi et Oskar Lafontaine.

La 16 juin, le mur qui sépare les deux salles, a disparu. Une symbolique forte pour un congrès de fusion rassemblant 576 délégués. Sont élus aux instances dirigeantes de DIE LINKE comme co-présidents : Oskar Lafontaine et Lothar Bisky. Deux hommes sont élus au poste de secrétaire général et de trésorier. Les femmes se contenteront de trois vice-présidences sur quatre, dont Katia Kiping. La double parité, par contre, est respectée au niveau du comité directeur.

Au plan contenu, les questions de l’unité allemande et des fondements de la fusion traitées plus haut, sont évoquées assez longuement. Le démantèlement de l’Etat providence, les méfaits du néolibéralisme cause de la pauvreté, sont fustigés. Il faut constater que chacun des deux partis de la fusion est conscient des ses différences par rapport à l’autre, ce qui est important pour l’avenir, notamment pour l’élaboration du programme où les divergences pourraient émerger de nouveau.

Le Congrès de fusion a accueilli des organisations politiques venant de 50 pays et de 4 continents. Nous avons pu découvrir, que les militants étaient très sensibilisés par l’Europe à travers l’activité du Parti des Gauches Européennes et du Groupe de la Gauche Unie du Parlement européen. Leur président respectif, Fausto Bertinotti et Francis Wurtz se sont exprimés au Congrès. Francis Wurtz a donné raison au député européen André Brie, quand il écrit : « dans nos pays, la gauche sera européenne ou ne sera pas » !

Un grand parti de gauche de la transformation sociale, ça fait rêver ! Il y a des idées à prendre, en tenant compte que les expériences de nos deux pays sont très différentes.

par Françoise Diehlmann

Source : http://www.forumgc.org/spip.php?art...

4) Ce week-end, fondation en Allemagne du parti antilibéral "La Gauche" réunissant la gauche social-démocrate et les communistes

L’installation d’un nouveau parti de gauche dans le paysage politique allemand, Die Linke, qui tient son congrès d’unification ce week-end à Berlin, est suivie avec intérêt en France.

Miroir inversé sur les deux rives du Rhin. D’un côté, une défaite cuisante à l’élection présidentielle oblige toute la gauche française à un travail de réflexion, de confrontation et finalement de reconstruction. De l’autre, un nouveau parti émerge et bouscule la donne politique allemande après un demi-siècle de bipartisme. Il n’en fallait pas moins pour que des militants socialistes, communistes, antilibéraux portent un regard intéressé du côté de Berlin. Une chose est sûre : à l’est il y a du nouveau. Modèle à suivre ? Source d’inspiration pour la gauche de transformation sociale face à la crise de la social-démocratie ? La question est ouverte et le débat n’est pas clos.

En Allemagne, du moins dans sa partie occidentale, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les sociaux-démocrates du SPD et les chrétiens-démocrates de la CDU-CSU se succèdent au pouvoir ou gouvernent ensemble dans de « grandes coalitions », avec l’appoint du petit parti libéral (FDP). Seule l’émergence du parti des Verts dans les années 1980 était venue perturber quelque peu cette construction bien huilée. Mais la véritable entaille dans le bipartisme remonte au mois de septembre 2005, avec l’élection au Bundestag de 53 députés de l’alliance de gauche Die Linke. Le rassemblement du Parti du socialisme démocratique (PDS), influent dans l’ex-RDA, et de l’Alternative électorale pour la justice sociale (WASG) regroupant, principalement à l’Ouest, des sociaux-démocrates en rupture avec la ligne du SPD, obtenait alors plus de 8 %. Depuis avril 2007, et cela pour la première fois, un parlement régional d’Allemagne occidentale, celui de Brême, compte un groupe d’élus de Die Linke. « Le spectre d’un nouveau parti de gauche à l’échelle fédérale », selon l’expression de commentateurs effrayés pastichant Karl Marx, est devenu réalité.

À l’heure où le PDS et la WASG vont au-delà d’une alliance électorale pour constituer une nouvelle formation dont le congrès d’unification s’ouvre samedi à Berlin, l’écho de l’expérience allemande dans le débat français ne doit pas estomper une singularité nationale et historique. Il s’agit de la fusion entre deux branches du mouvement progressiste qui ont vécu des expériences très différentes dans deux États séparés pendant quarante ans : la République fédérale à l’ouest (RFA), rattachée au bloc atlantique dominé par les États-Unis, et la République démocratique à l’est (RDA), intégrée au camp socialiste sous la tutelle soviétique. Dans les deux États allemands issus de la capitulation du nazisme, l’influence et le rôle du courant communiste sont très différents de ce qui a prévalu dans d’autres pays européens, comme la France et l’Italie : quasi-inexistence en Allemagne de l’Ouest du fait de la « guerre froide » et idéologie ossifiée au sein d’un parti-État à l’est.

Le PDS a, en effet, succédé au SED, le parti qui exerçait le monopole du pouvoir en RDA. Après la chute du mur de Berlin, il est parvenu, sous la direction de Gregor Gysi et de Lothar Bisky, à se muer en un parti démocratique et à s’affirmer comme le défenseur des couches populaires est-allemandes face à la brutalité des réformes qui ont accompagné la réunification. Considéré avec dédain par les autres forces politiques comme un « parti résiduel » appelé à s’éteindre à brève échéance, le PDS a déjoué les prévisions : dès le début il s’impose à l’est et franchit la barre symbolique des 5 % au Bundestag en 1998. Mais sans parvenir à étendre son influence à l’ouest : un pari qu’il réussira en s’alliant avec la WASG.

Celle-ci est issue du mouvement syndical ouest-allemand lié historiquement au SPD. En réaction à la politique néolibérale de l’ex-chancelier Schröder, des militants de plus en plus nombreux, réunis autour d’Oskar Lafontaine, se sont affranchis de la tutelle sociale démocrate. Ces deux traditions se rejoignent aujourd’hui, en une sorte de réunification réussie du mouvement progressiste, au terme d’une histoire tumultueuse, telle qu’aucun autre pays européen n’en a connu. Une histoire allemande avant tout. Mais une histoire riche d’enseignements en deçà du Rhin.

Jean-Paul Piérot dans l’Humanité ce jour.


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