L’enjeu de la bataille présidentielle à venir

vendredi 2 octobre 2020.
 

C’était il y a 20 ans. Pour la dernière fois, les Français étaient appelés à s’exprimer par référendum sur un changement de leur Constitution. Si 73 % des suffrages exprimés disaient « oui » à la réduction de la durée du mandat du président de la République de 7 à 5 ans, ce passage au quinquennat ne suscita aucun enthousiasme : près de sept Français sur dix s’abstinrent. Deux ans plus tard, le PS était éliminé au premier tour. Cinq ans plus tard, une nette majorité populaire rejetait le traité constitutionnel européen. La preuve que l’exigence démocratique portait sur autre chose.

Le quinquennat devait faire « moderne » et « donner la parole plus souvent aux Français ». Il aura surtout créé un autre temps démocratique. Celui de l’hyper-présidentialisation de la 5e République, celui d’un débat totalement phagocyté par l’élection présidentielle (celle qui vient d’avoir lieu, celle qui se profile déjà, voire parfois celle qui viendra ensuite). Combinée à l’inversion du calendrier électoral (les élections législatives après l’élection présidentielle), cette réforme aura définitivement achevé le Parlement. Déjà bien corsetée par le soi-disant « parlementarisme rationalisé » des inventeurs de cette Constitution, l’Assemblée n’est plus qu’une chambre d’enregistrement des désirs du monarque élyséen. Et tous les cinq ans, la France joue sa politique à la roulette russe d’un scrutin où seuls deux prétendants peuvent s’affronter au deuxième tour. Absurde ! Voyez ces sondages qui annoncent à la fois un deuxième tour Le Pen - Macron en 2022 et qu’une majorité de Français ne veut pas de ce match retour !

Pour « donner la parole aux Français », les Gilets jaunes exigent le référendum d’initiative citoyenne ; les syndicats demandent à contrôler l’usage fait de l’argent public, les mouvements écologistes défendent le bilan d’une convention citoyenne que le président Macron veut fouler aux pieds. N’est pas « moderne » qui veut. La modernité n’est pas d’abord dans la désignation, fusse pour un temps réduit, de représentants à l’heure où le peuple veut se représenter lui-même. Et lorsqu’il faut désigner des représentants, il exige que ceux-ci se conforment aux exigences de leurs mandants contrairement à la forfaiture européenne d’après 2005. Car la modernité repose sur l’intervention populaire permanente, directe, pour élaborer, proposer, contrôler, révoquer.

L’enjeu de la bataille présidentielle à venir est là. Il n’y aura ni changement écologique ni justice sociale si le pouvoir reste entre les mains des mêmes, et si les citoyens continuent à n’être que des intermittents d’un spectacle politicien devenu un théâtre d’ombres. C’est l’exigence de l’Assemblée citoyenne constituante, de la 6e République, des droits nouveaux pour les citoyens comme pour les travailleurs, qu’il faut faire grandir. Vingt ans après le quinquennat, c’est un autre temps démocratique qu’il faut inventer !


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