Trump battu ! Bon débarras !

mercredi 11 novembre 2020.
 

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2) Joe Biden, une victoire dans une démocratie américaine fragilisée

Source : https://theconversation.com/joe-bid...

Comme dans les meilleures (ou pires ?) séries américaines, les jours qui ont suivi l’élection présidentielle de 2020 auront été marqués par un suspense éreintant et de nombreux retournements de situation, notamment en raison d’un dépouillement plus long dû au volume de votes par correspondance.

Mais samedi soir, à 17h30 heure française, les media américains ont annoncé la victoire du démocrate Joe Biden, qui devient ainsi le 46e président des États-Unis d’Amérique, après avoir gagné l’État de Pennsylvanie.

Même s’il est encore trop tôt pour effectuer une analyse complète des résultats, on dispose déjà d’un certain nombre de données intéressantes et marquantes dans ce scrutin singulier. On sait d’ores et déjà, par exemple, que le taux de participation est bien plus élevé qu’en 2016. Selon les projections publiées dans le Washington Post, il pourrait même être le plus élevé depuis plus d’un siècle.

Avec presque plus de 69 millions de voix, Donald Trump a étendu sa base à presque 7 millions de nouveaux électeurs. Ces élections ne sont donc en rien une répudiation du Trumpisme, qui semble être là pour durer.

Mais les Démocrates se sont eux aussi fortement mobilisés : près de 8 millions de nouveaux votants ont soutenu le candidat du « parti de l’âne » cette année par rapport à 2016. Alors qu’en 2016 Hillary Clinton avait gagné le vote populaire avec 2,8 millions de voix de plus que Donald Trump, Joe Biden, lui, devrait obtenir une avance de quelque 4 millions de suffrages.

Et avec près de 74 millions de voix, aucun président n’aura été élu par autant d’Américains que lui.

On pourrait, à première vue, considérer ces chiffres comme les signes d’une grande victoire de la démocratie. Mais il faut, pour en être certain, regarder les résultats des autres élections, notamment celles de la Chambre, du Sénat (dont un tiers des sièges était renouvelés), et des législatures des États…

De nombreux leviers aux mains des Républicains

Si les Démocrates semblent pouvoir garder le contrôle de la Chambre des Représentants, ils y ont toutefois perdu des sièges. Mais c’est la chambre haute du Congrès, le Sénat, qui a le plus de pouvoir. Non seulement il doit donner son approbation pour qu’une loi soit ratifiée, mais il doit également donner son accord aux nominations décidées par le président pour les juges fédéraux, les ambassadeurs et même pour les membres de son propre Cabinet.

Or, les Républicains devraient à priori conserver le contrôle du Sénat. Les Démocrates ont pourtant battu des candidats républicains dans le Colorado et l’Arizona, mais ils ont perdu un siège dans l’Alabama.

Avec deux sénateurs par État, soit 100 sénateurs au total, il faut donc 51 sièges pour atteindre la majorité. Toutefois, 50 sièges peuvent suffire aux Démocrates, puisque c’est Kamala Harris, la vice-présidente, qui présidera le Sénat et aura le droit de vote pour départager en cas d’égalité.

À ce stade, on se trouve à 48 sièges pour chaque parti, et tout pourrait, en fait, se jouer en janvier, lors du second tour de deux élections sénatoriales partielles dans l’État de Géorgie. L’attente va donc se prolonger, et ce sera l’occasion de mettre en exergue la question de la représentativité démocratique des institutions américaines.

Une représentativité discutable

Le fait même que la Constitution confère deux sénateurs à chaque État, et ce quelle que soit sa population, pose en effet un problème de légitimité démocratique. Les États les plus ruraux, qui sont aussi les plus républicains, y disposent en effet d’un poids supérieur à la proportion de la population qu’ils représentent. On estime ainsi que même s’ils devaient perdre les deux sièges en Géorgie en janvier, et, donc, rester minoritaires en sièges, les Démocrates représenteraient au moins 20 millions d’Américains de plus que les Républicains. Et le différentiel serait de 41 millions en cas de victoire démocrate en Géorgie, avec un Sénat à 50/50.

Il est d’ailleurs tout à fait remarquable de se dire qu’un président et une chambre minoritaires en voix ont pu nommer trois juges à la Cour suprême… En cas de victoire des Républicains, le président Biden va devoir composer avec Mitch McConnell, un chef de la majorité avec qui il s’entend bien, mais qui ne fait pas de cadeaux.

Un autre vote absolument crucial qui avait lieu lors de ces élections était le vote pour les législatures des États. En effet, et pour mémoire, dans le système fédéral américain, chaque État a son propre système de gouvernement local composé d’une branche exécutive (avec le gouverneur), d’une branche législative appelée généralement « Législature de l’État » (State Legislature) ou « Assemblée générale ou législative » (General or Legislative Assembly) et d’une branche judiciaire (incluant une Cour suprême locale). Ces gouvernements locaux décident de sujets majeurs tels que l’avortement, les armes à feu, l’environnement ou la réforme de la police, pour ne citer que quelques sujets d’actualité.

L’enjeu était cette année particulièrement critique : suite au recensement décennal de la population exigé par l’Article I de la Constitution, qui doit être réalisé d’ici la fin de l’année, ces gouvernements locaux vont pouvoir procéder au redécoupage des cartes électorales. Or les Démocrates n’ont pas réussi à reprendre le contrôle d’une seule législature. Sur les 44 États où des élections législatives locales ont eu lieu, un seul (le New Hampshire) a vu ses chambres changer de majorité… et elles sont allées aux Républicains. Le Minnesota est la seule législature dont les deux chambres sont divisées entre Démocrates et Républicains. Selon les calculs de la National Conference of State Legislatures, sur 98 chambres (le Nebraska ayant une seule chambre non partisane), 37 sont tenues par des Démocrates et 59 par des Républicains.

3) Joe Biden a mis un terme à 4 ans de trumpisme (Mediapart)

https://www.mediapart.fr/journal/in...

L’annonce est finalement venue samedi 7 novembre de CNN et de l’agence Associated Press, deux des principaux médias américains : à l’issue de quatre jours de suspense – et de lents dépouillements, en raison du nombre de bulletins envoyés par correspondance sur fond de pandémie –, le candidat démocrate Joe Biden est assuré de suffisamment de voix de grands électeurs (au moins 270) pour entrer à la Maison Blanche en janvier comme 46e président des États-Unis.

Des manifestations de joie ont éclaté dans plusieurs villes des États-Unis, dont la capitale Washington, où une foule s’est dirigée vers la Maison Blanche, mais aussi à New York.

Sur son compte Twitter, Joe Biden a publié le message suivant, samedi vers 18h : « Amérique, je suis honoré d’avoir été choisi pour diriger notre grand pays. Le travail qui nous attend sera difficile, mais je vous le promets : je serai le président de tous les Américains – que vous ayez voté pour moi ou non. Je garderai la foi que vous avez placée en moi. »

Dans la soirée, il a pris la parole depuis sa ville de Wilmington (Delaware) devant ses partisans pour son premier discours de président élu : « Le peuple de cette nation a parlé », a-t-il affirmé, évoquant une « victoire claire, une victoire convaincante », bâtie sur « la coalition la plus large de l’histoire américaine », et citant les anciens présidents Franklin Delano Roosevelt, John Fitzgerald Kennedy et Barack Obama.

« Je me suis engagé à être un président qui cherche non pas à diviser mais à unifier, a-t-il ajouté. Je me suis porté candidat pour restaurer l’âme de l’Amérique et pour reconstruire la colonne vertébrale de cette nation, la classe moyenne. Et pour faire en sorte que l’Amérique soit respectée dans le monde à nouveau ».

« Il est temps de mettre de côté la rhétorique violente, de faire descendre la température, de se voir et s’écouter à nouveau. Et de progresser. Nous devons cesser de traiter nos opposants comme des ennemis. Ils ne sont pas nos ennemis, ils sont des Américains. Ils sont américains. Le temps est venu d’apaiser l’Amérique. »

Sa vice-présidente, Kamala Harris, 56 ans, première femme et première personne noire élue à cette fonction, a elle rendu hommage dans un discours renouant avec les accents de l’époque Obama aux « générations de femmes, de femmes noires, hispaniques et autochtones qui ont tracé la voie de ce moment ce soir. »

Après le scrutin du mardi 3 novembre, Joe Biden avait d’abord rattrapé son retard sur Donald Trump vendredi, au fil d’un décompte des bulletins interminable, puis il a remporté samedi deux États cruciaux, la Pennsylvanie (prise décisive) et le Nevada. Au total, il a obtenu près de 75 millions de suffrages, un record historique (Barack Obama avait été crédité de plus de 69 millions de votes en 2008), contre plus de 70 millions pour l’ancien magnat de l’immobilier.

Cependant, Donald Trump – premier président à ne pas être réélu depuis le républicain George H. W. Bush en 1992, défait par Bill Clinton – n’en démord toujours pas, après avoir lancé une série de recours en justice.

Dans un communiqué diffusé samedi, il a contesté la victoire de son rival en l’accusant de se « précipiter pour se présenter faussement comme le vainqueur », et critiqué « ses médias alliés » qui l’ont annoncée. « Tout simplement cette élection est loin d’être terminée, a-t-il asséné. À partir de lundi, notre équipe de campagne va commencer à porter notre affaire devant les tribunaux pour s’assurer que les lois électorales sont pleinement respectées et déterminer le vainqueur légitime. Le peuple américain a droit à une élection honnête : cela signifie qu’il faut compter tous les bulletins de vote légaux et ne pas compter les bulletins illégaux. C’est la seule façon de garantir que le public ait pleinement confiance en notre élection. »

Depuis Philadelphie, où il donnait une conférence de presse, son avocat personnel, Rudy Giuliani, a déclaré : « Il est évident qu’il ne va pas concéder sa défaite. »

Jeudi soir, depuis la Maison Blanche, le président sortant avait évoqué les fraudes en cours pour qu’on lui « vole » sa réélection, sans apporter de preuves, alors que des rassemblements pro-Biden avaient lieu dans plusieurs villes pour réclamer que le décompte se déroule jusqu’au bout.

Malgré ces tentatives désespérées de Donald Trump, qui apparaît de plus en plus comme un mauvais perdant, l’ancien vice-président de Barack Obama de 2008 à 2016, sénateur réélu pendant 36 ans, a donc remporté son pari, et il pourrait reprendre la phrase favorite de son adversaire, quand ce dernier animait l’émission de téléréalité « L’Apprenti » : « Vous êtes viré ! »

Pendant la campagne, Joe Biden n’a en effet cessé d’affirmer qu’il était celui capable de tourner la page Trump, celle de la division, de la haine et des injustices.

En avril 2019, il l’avait lancée à Pittsburgh, ville symbole de l’ancienne « Rust Belt », dans cet État de Pennsylvanie où il est né, rejeton d’une très catholique famille de quatre, typique de la Middle America laborieuse, catholique et blanche des années 1950. En novembre 2016, la Pennsylvanie, cet État industriel rural de l’est américain qui votait d’habitude pour le candidat démocrate à la Maison Blanche, avait choisi Trump d’une courte tête, comme l’Ohio ou le Michigan, où la population blanche est très majoritaire.

Biden, qui peaufine depuis des années une image de défenseur de l’Américain « moyen », voulait montrer qu’il était en mesure de ramener au bercail les électeurs d’Obama qui avaient préféré s’abstenir, ou voter Trump plutôt que Clinton.

Connu des électeurs, toujours souriant, l’ancien sénateur de 76 ans était « testé » et donné comme favori par les sondeurs avant même de s’être déclaré, malgré les fameuses gaffes dont il est coutumier – en 2007, au premier jour de sa campagne présidentielle, il avait qualifié Obama d’« Africain-Américain mainstream, articulé, intelligent, propre sur lui et bien fait de sa personne », une remarque paternaliste aux relents racistes qui avait choqué.

Ses rivaux démocrates pour la primaire, notamment le sénateur socialiste du Vermont Bernie Sanders, 78 ans, et la sociale-démocrate du Massachusetts Elizabeth Warren, 69 ans, affichaient des programmes de réformes radicales, qui collent aux demandes d’une partie grandissante de la base démocrate, énergisée par le dynamisme des activistes qui luttent pour la couverture santé universelle, contre les violences policières et la catastrophe climatique. Lui, le candidat préféré de l’establishment démocrate, était critiqué pour son côté conservateur.

Même si le pari était audacieux, alors qu’une grande partie de la base démocrate réclame de nouvelles têtes capables de changer enfin le quotidien des Américains, il a fini par s’imposer. D’abord sur ses rivaux démocrates, puis face à Trump.

La troisième tentative semble donc avoir été la bonne. Il avait déjà concouru deux fois en vain à la présidentielle. D’abord en 1987 (il s’était retiré, accusé à raison de plagiat dans plusieurs discours). Puis en 2007, avant d’être choisi comme candidat à la vice-présidence par le vainqueur des primaires, le sénateur de l’Illinois Barack Obama, qui souhaitait ainsi lancer des signaux à l’électorat démocrate de la classe moyenne, alors qu’il s’apprêtait à devenir le premier président noir du pays.

Agacé par les critiques de ce qu’il appelle la « nouvelle gauche », Biden estime au contraire avoir « le bilan le plus progressiste ». Une façon de souligner sa longévité et son expérience en politique.

Sans cesse réélu dans le petit État du Delaware (par ailleurs un paradis fiscal, nous y reviendrons), Biden a de 1976 à 2008 été un membre éminent du puissant Sénat américain, dont il a présidé la commission de la justice qui procède aux nominations présidentielles (1987-1995), et celle des affaires étrangères (2001-2003, puis 2007 et 2009).

Vice-président de Barack Obama, il a souvent été chargé de dossiers internationaux, notamment l’Irak dont il a été, selon Foreign Policy, le « régent officieux ». Il a promis de rompre avec la politique étrangère de Donald Trump marquée par la confrontation, en renouant notamment les fils avec les alliés européens.

C’est ce qu’il a exposé dans un article publié par Foreign Affairs dans son numéro de mars-avril et intitulé « Why America Must Lead Again. Rescuing U.S. Foreign Policy Trump » (« Pourquoi l’Amérique doit de nouveau diriger. Sauver les États-Unis de la politique étrangère de Trump »). Afin de constituer ce front uni, Joe Biden précise que, s’il est élu, il organisera dès sa première année de mandat un « sommet de la démocratie » pour rassembler les démocraties du monde entier afin de « forger un agenda commun » face à des puissances comme la Chine et la Russie. À l’intérieur des frontières étasuniennes ou à l’extérieur, toujours cette position de celui qui cherche à rassurer après quatre ans d’ouragan Trump.

Depuis Londres, le premier ministre britannique Boris Johnson a tweeté pour féliciter Joe Biden et Kamala Harris pour leur élection. « Les États-Unis sont notre allié le plus important et je me réjouis de travailler étroitement ensemble sur des priorités communes, depuis le changement climatique, jusqu’au commerce et à la sécurité. » C’est également sur Twitter que le président français Emmanuel Macron s’est exprimé : « Nous avons beaucoup à faire pour relever les défis d’aujourd’hui. Agissons ensemble ! »


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