Retour sur la révolution citoyenne en Thaïlande

samedi 19 décembre 2020.
 

La Thaïlande, plus connue chez nous comme destination touristique de rêve que pour sa vie politique tumultueuse, est marquée depuis février 2020 par un puissant soulèvement populaire. L’autoritarisme de la junte militaire, la répression judiciaire, et in fine la monarchie, institution centrale du pays, sont visés. Retour sur les origines de ce mouvement de contestation et les revendications qui l’animent.

Cet article a été co-écrit par Arnaud Le Gall et Édouard Richard membres du Monde en commun.

Un autoritarisme qui vient de loin

Depuis la révolution de palais de 1932 ayant aboli la monarchie absolue, le Royaume de Thaïlande est présenté comme une monarchie constitutionnelle, voire comme un modèle de démocratie comparé à ses voisins birman et cambodgien. Derrière cette vision officielle, le pays se caractérise avant tout depuis huit décennies par le rôle octroyé à l’armée et au roi qui se sont autoproclamés garants de la démocratie (Mérieau Eugénie, Idées reçues sur la Thaïlande. Le Cavalier Bleu éditions, 2018). L’armée a ainsi mené au moins 12 coups d’État – sans compter ceux qui ont échoué – depuis 1932, pour certains suivis d’une répression de masse.

En 2014, à la suite d’un coup d’état judiciaire, puis militaire, contre la première ministre Yingluck Shinawatra, sœur du premier ministre Thaksin Shinawatra lui-même renversé par l’armée en 2006, une junte militaire a pris le pouvoir. De « démocratie illibérale » la Thaïlande a glissé de nouveau vers un autoritarisme militaire classique. Une nouvelle constitution a été adoptée en 2016-2017 via un referendum sans campagne contradictoire. Mais l’aggravation des abus de pouvoir depuis son adoption a entraîné une large prise conscience du fait qu’elle a été pensée par et pour l’ancienne junte, et renforce les pouvoirs discrétionnaires du roi.

Officiellement dissoute en juillet 2019 après les élections générales, la junte a grâce à ces règles faites sur mesure gardé une influence décisive au sein du commandement des opérations de sécurité intérieure présidé par le premier ministre Prayut Chan-ocha – qui n’est autre que l’ancien chef de la junte -, comme au sein du conseil privé du roi, Maha Vajiralongkorn (Rama X), qui accédé au trône en 2016 à la mort de son père.


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