‌Gérard Chaouat, animateur national d’Ensemble, est décédé

mercredi 28 avril 2021.
 

Ci-dessous hommages de l’Equipe d’animation nationale d’Ensemble, de Frank Prouhet, de Charles Michaloux, de Robi Morder, de Janette Habel, de Bristol et Olive, de Pierre Rousset.

Cela sera une crémation sans office religieux avec des roses rouges, un drapeau rouge sur le cercueil, les personnes cités plus haut ont le OK de gérard pour dire un mot « sur 3 airs : l’Internationale, hasta siempre (version carlos Puebla) et « sans la nommer » (Moustaki) »

1) Un parcours militant exceptionnel ( par l’Equipe d’animation nationale d’Ensemble)

Notre ami et camarade Gérard Chaouat vient de nous quitter. C’était un ami que beaucoup d’entre nous connaissaient. Mais c’était aussi un parcours militant exceptionnel.

Né en 1944, il fait de la lutte contre l’extrême droite pro-Algérie française au Quartier Latin son premier combat au sein du Front Universitaire Antifasciste (FUA). Il se situe ainsi dans la génération militante qui, imprégnée des récits des horreurs de la Seconde Guerre mondiale, refusa le comportement de l’armée française en Algérie. Ces militant.es ont été à l’origine de la radicalisation qui devait déboucher sur mai 68. Une radicalisation qui, pour Gérard et ses camarades, est passée de l’Algérie au Vietnam, combat emblématique de ces années. S’étant orienté vers les études médicales, il apporta son soutien actif à la lutte pour le droit à l’avortement en pratiquant de manière illégale des avortements clandestins avant le vote de la loi Veil.

Gérard rejoignit la JCR, la Ligue et la Quatrième Internationale. Il fut également un militant syndical au Syndicat des chercheurs scientifiques de la FEN, puis de la FSU (il était encore récemment membre de son service d’ordre). Il n’hésitait jamais à accomplir une tâche militante, ses camarades du XXe arrondissement de Paris le savent.

D’origine juive, il mettait un point d’honneur à être déterminé dans son soutien à la lutte du peuple palestinien. Il animait à ce titre la commission Palestine d’Ensemble et s’était rendu sur les lieux avec une délégation de notre mouvement.

Chercheur en immunologie, directeur de recherche émérite au CNRS, passionné par son travail (il allait encore au labo ces derniers temps), il faisait toujours le lien entre ses préoccupations scientifiques et les aspects politiques de la recherche et de la médecine, si essentiels en ces temps.

ENSEMBLE rend hommage à son parcours militant, un parcours fait de fidélité à nos idéaux, quels qu’aient été les aléas du militantisme des années qui suivirent 68. Son histoire est la nôtre, son départ est notre tristesse.

2) Docteur de très haut niveau mais aussi militant de terrain

Frank Prouhet

Sur ces listes nous sommes nombreux à l’avoir découvert sur zoom ou jitsi, lors des réunions du collectif Brevets sur les vaccins contre la covid, stop. Réquisition, ou lors des réunions de l’Appel de Paris. A avoir écouté ou animé avec lui des débats sur les vaccins, les brevets, la lutte contre la covid. Mais Gérard, c’est bien plus que cela. Tout un pan de notre histoire et de nos colères.

Immunologiste de la reproduction, pasteurien, directeur de recherche au CNRS, syndicaliste et militant politique, Gérard CHAOUAT est décédé le 23 avril. Jamais avare de ses explications savantes, toujours pédagogiques. Jamais le dernier à manifester, à agir, à bouger. Il faisait d’ailleurs partie du service d’ordre de son syndicat !!

Sandrine CARISTAN, chercheuse chez Sanofi et militante du collectif anti sanofric m’a informé de son décès. Le temps de regarder mes mails et de nombreux témoignages affluaient. Preuve de ses nombreuses vies !

Il serait décédé d’un arrêt cardiaque sur choc septique à Tenon (Paris 20e). Tout a été très vite. Il avait été admis en urgence après un malaise mardi et semblait prêt à sortir.

Nous étions moins nombreux à connaitre son humour. Son neveu Matthieu rencontré ce matin à la chambre mortuaire est arrivé avec une enveloppe façon Gérard

« Je ne veux PAS d’annonce dans le Figaro (ni dans Libération d’ailleurs). Le Monde suffira »

« Prévenir (ils feront ce qu’ils veulent) » :

Suivait la liste des « prévenus » : le syndicat national des chercheurs scientifique : SNCS-FSU , les société d’immunologies de la reproduction (internationale- européenne), Le labo, la 4e internationale… avec les noms et mails.

Parmi ses nombreuses indignations, le sort du peuple palestinien. Il faisait partie de la commission Palestine Proche Orient d’Ensemble ! dont il assurait la coordination ces derniers temps, et qu’il représentait au Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens. Gérard était également membre de l’Union Juive Française pour la Paix,et défendait les campagnes de BDS France. Gérard était militant de très longue date de la Quatrième Internationale (JCR, LCR, IMG en Angleterre, NPA puis Ensemble), un internationaliste profondément convaincu. Il était chercheur docteur de très haut niveau mais aussi militant de terrain.

Il est possible de lire sa biographie sur le dictionnaire Maitron du mouvement ouvrier. Une biographie en forme de révision de l’histoire de notre siècle, entre guerre d’Algérie, métro Charonne, Ivg et Planning familial, exclusion du PCF pour trotskyste, LCR puis NPA avec tous ses débats, puis Ensemble, la Palestine, les brevets sur les vaccins anti-covid.

https://maitron.fr/spip.php?article...

3) Gérard laissé une trace profonde

Charles Michaloux

‌Comme en témoignent les nombreux messages qui ont suivi l’annonce du décès de Gérard Chaouat, il a laissé une trace profonde dans la vie de ceux qui l’ont connu ou croisé ; sans doute en raison de la sympathie évidente qu’on ne pouvait manquer d’éprouver pour ce grand bonhomme, simple d’abord mais dont on sentait rapidement la détermination et la solidité des convictions : une balise et souvent un repère.

Je l’ai connu il y a 55 ans, quand je suis arrivé à la fac de médecine de Paris. Il avait quelques années de plus que moi et nous avons tout de suite lié une amitié qui a duré plus d’un demi siècle. En ce temps-là avant 68, on se voyait très souvent pour discuter politique bien sûr, mais aussi de tas de choses : il était un puit de science et de connaissance, toujours avide d’aller à la racine des choses.

Plusieurs ont parlé de son expertise technico-militaire sur l’armement russe au Vietnam. Je me souviens encore avec grande émotion de notre accablement en 67 quand nous avons appris la mort du Che en Bolivie. Je ne voulais d’abord pas y croire ; nous avons discuté tard dans la nuit de ce que cela signifiait. Et lui pressentait déjà ce que l’évènement impliquait quant à l’évolution de la direction cubaine qui avait finalement lâché Guevara...

Je me fichais gentiment de lui quand on se revoyait, en lui disait : « Mais tu ne changes pas, Gérard ! ». A qui il me répondait invariablement : « Tu n’es plus matérialiste, Charles, on vieillit, on change et le monde n’a pas changé comme nous l’espérions... » Mais pour moi, il était toujours cette grande silhouette synonyme d’une fidélité à toute épreuve, alliage étrange de professeur Nimbus et de révolutionnaire professionnel en habit de scientifique de très haut niveau.

Gérard était vraiment impressionnant pour ces raisons, en même temps qu’extrêmement chaleureux, amical et fraternel. Dans les discussions politiques, même quand on n’était pas d’accord, les échanges privés ou publics étaient toujours empreints de respect et de la joie de se savoir toujours embarqués sur la même galère.

Repose en paix, Gérard, vieux frère.

En plein cent cinquantenaire de la Commune

Robi Morder

Sacré choc, imprévisible tant il semblait indestructible... On devait se voir prochainement, sans avoir fixé de date, pour approfondir l’histoire de la mino médecine de l’UNEF dans les années 1960.

Je l’ai mieux connu à la direction de section Paris-Centre (1-2-3-4 arrondissements) de la Ligue ou étaient également Jean-François Vilar et Alain Bellet de la cellule « travailleurs sociaux », Nart (Michel Martet) des HLM Ville de Paris, dans la cellule presse il y avait Chauvin. Les Halles et Beaubourg étaient en chantier. Il y avait rue Saint-Antoine - non loin du local de la Ligue l’impasse Guéménée - dans un étroit passage (je l’ai recherché, il a disparu ou été privatisé) un local de section, avec petite table, ronéo. Epoque où il y avait plusieurs locaux de section dans Paris.

Plus récemment, il avait accepté lors du confinement de mars 2020 de participer à la tentative de Comité national de santé publique parti du 11e, il y avait fait forte impression, et nourri d’articles riches et explicatifs la série de publications pdf « un virus très politique » chez Syllepse.

Gérard nous a quitté en plein cent cinquantenaire de la Commune. Salut à toi, Vingtras et Vallès :

Dimanche 23 avril 1871

Direction des ambulances.. […] Considérant que la Commune a décrété la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et que, d’une autre part, il importe de laisser toute liberté à chaque citoyen de vivre et de mourir selon sa croyance, s’il en a une, j’ai fait enlever des salles d’ambulances tout insigne religieux de n’importe culte ; j’en ai interdit l’entrée aux membres de toutes les sectes ou corporations religieuses, tout en procurant immédiatement au blessé, qui en fait la demande, la visite du ministre de sa religion, curé, pasteur, pope ou rabbin.

J’ai surtout eu soin d’écarter des blessés ces visites fatigantes de gens qui, sous prétexte de religion, viennent démoraliser les blessés, et ajouter aux souffrances physiques des tortures morales, […] leur faisant un crime du grand combat soutenu au nom du droit et de la République universelle, au point de les faire rougir de leur glorieuses blessures.

Dr Rousselle.

4) « Hasta siempre, Comandante... »

Janette Habel

Je viens d’apprendre son décès. Beaucoup de choses ont été écrites sur Gérard. Sa fidélité, son internationalisme, son parcours militant de la JCR à la LCR , son soutien au Comité Vietnam National. Lors des réunions, pendant la guerre, il dessinait des avions américains bombardant la population au napalm.

C’était aussi un chercheur, un scientifique érudit toujours prêt à mettre ses connaissances en immunologie au service de ses combats , encore récemment avec la pandémie. Souvenir, souvenir, notre discussion lors de la mort du Che, après le meeting d’hommage de la JCR que nous avions organisé à la Mutu. Dans une Mutu pleine à craquer Ernest Mandel était intervenu ainsi que Maurice Nadeau, avec en fond sonore le chant des Martyrs en mémoire des révolutionnaires russes de 1905. Gérard était bouleversé par l’assassinat du Che. Pas étonnant que pour ses obsèques il ait souhaité que soit interprétée la chanson du musicien cubain Carlos Puebla « Hasta siempre, Comandante Che Guevara »...

5) Rêver encore

Alain Cyroulnik, Olivier Martin

Nous avons connu Gérard en 65 à la création de la JCR il nous impressionnant avec ces connaissances militaro politique pour dénoncer dans Avant-garde jeunesse, le journal de la JCR, l’insuffisance du soutien de l’URSS aux combattants vietnamiens. Un sacré bon homme généreux courageux et surtout qui ne supportait pas l’injustice.

Nous nous nous souviendront de ce médecin avec son ciré jaune et ses lunettes noyées sous la pluie au milieu du service d’ordre FSU dans toutes les manif.Il était de tous nos combats et nous savions qu’il en serait ainsi jusqu’au bout fidèle à cette révolution qu’il à tant aimé

Au revoir Gérard on t’emmène avec nous pour résister et rêver encore et encore à des lendemains qui chantent et des drapeaux rouges qui flottent aux vents de nos révoltes.

Bristol et Olive

6) Au temps de la guerre d’Indochine

Pierre Rousset

Mes souvenirs de Gérard remontent aux années 60-70, quand nous luttions contre l’escalade militaire US en Indochine – une guerre totale, prolongée, sans équivalent, menée sur tous les terrains.

Le Vietnam était alors, véritablement, l’épicentre des conflits mondiaux : révolution et contre-révolution, bloc de l’Ouest contre bloc de l’Est, montée en puissance de la confrontation sino-soviétique… Dans ce contexte très spécifique, la solidarité internationale a joué un rôle important dans la période précédant la défaite impérialiste. Gérard en était très conscient et s’attachait tout particulièrement aux données géopolitiques et à la nature du soutien que le Vietnam recevait, au Nord, de la part de l’URRS (ou de la Chine) : de quoi tenir, mais pas de quoi gagner, avec en perspective une nouvelle négociation entre grandes puissances pour redéfinir le compromis imposé au PCV en 1954. Comme d’autres l’ont déjà noté ici avant moi, c’est pour cela que Gérard s’attachait à analyser la nature de l’armement reçu par Hanoi, en le comparant à l’armement qu’il aurait pu recevoir, mais dont il était privé. Il aurait été idiot de prétendre que Hanoi ne recevait pas d’aide, mais il importait de démontrer précisément les limites militaires et politiques de cette aide.

Nous n’avons pas eu l’occasion de militer véritablement ensemble les décennies qui ont suivi, mais Gérard était de celles et ceux qui donnent envie de changer le monde.


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