Non, le Covid ne nous oblige pas à réformer les retraites

lundi 12 juillet 2021.
 

La droite, qu’elle soit macroniste où LR a d’ores et déjà décidé de faire de la réforme des retraites un des thèmes de la campagne présidentielle de 2022. Son argument : la crise sanitaire aurait creusé le déficit et rendrait une réforme plus urgente que jamais. Pourtant, le Conseil d’Orientation des Retraites lui-même prévoit un retour à l’équilibre dès 2022, sans qu’aucune réforme ne soit nécessaire.

Les récentes annonces de la majorité narrant la volonté d’Emmanuel Macron de faire passer une réforme des retraites dès septembre 2021 n’auront été qu’un galop d’essai. Après avoir fait part, par voie de presse, de sa volonté d’inscrire le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans dans le projet de loi de finances de la sécurité sociale 2021 présenté à l’automne, le président de la République cherche finalement à temporiser.

C’est du moins ce que semblent croire les syndicats de salariés CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC) et les organisations patronales (Medef, CPME, U2P) qui ont rencontré le Président ainsi que des membres du gouvernement ce mardi 6 juillet. Si la tempête semble reportée à plus tard, nul doute cependant que la réforme des retraites fera son retour avant la fin du quinquennat, soit sous la forme d’un projet de loi soit, a minima, sous celle d’un thème de campagne lors des présidentielles.

La réforme des retraites : un marqueur fort à droite

On peut comprendre ce qui a pu motiver le chef de l’État à aller tâter le terrain en matière de réforme des retraites : à droite, la course à qui promet de réformer le plus vite est bel et bien lancée.

Le dores et déjà candidat à l’élection présidentielle Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, annonçait dès mars dans une interview donnée au Point : « À l’horizon 2028-2030, il nous faudra travailler deux ans de plus, jusqu’à 64 ans, et si l’espérance de vie continue à progresser, il faudra, dans les années qui suivent, aller jusqu’à 65 ans. » De son côté, le ministre de l’économie Bruno le Maire ne cesse de répéter depuis la rentrée de septembre que, la crise sanitaire ayant creusé le déficit des retraites, une réforme n’est plus que jamais nécessaire. Autant d’éléments qui poussent Emmanuel Macron à se positionner sur le sur sujet.

Le trou du Covid

L’argument de Bruno Le Maire n’est d’ailleurs pas faux. Il est vrai que la crise sanitaire a creusé le déficit du système des retraites en 2020. Alors que le régime était pratiquement à l’équilibre en 2019, son déficit est désormais de 13 milliards (au lieu de 18 milliards grâce à un « transfert exceptionnel » de ressources du fonds de réserve vers le régime général) soit 0,6 % du PIB, détaille le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) dans son rapport de juin 2021.

En cause : avant tout la baisse de l’activité salariée et donc des cotisations prélevées. Baisse qui n’a pas été compensée par la surmortalité des retraités. Pourtant ce déficit s’avère moins important que celui anticipé par le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) dans son précédent rapport de novembre 2020. À l’époque, il tablait sur un trou dans la caisse de 23,4 milliards d’euros, soit 1,1 % du PIB.

Un système à l’équilibre dès 2022 ?

Pourtant un autre indicateur permet de relativiser cette rhétorique catastrophiste : la part des dépenses de retraite dans le PIB. Si celle-ci a atteint un niveau particulièrement élevé en 2020, montant à 14,7 % du PIB, elle devrait retrouver son niveau d’avant crise dès 2022 (13,7 %).

Selon les projections du COR, ce ratio devrait même se stabiliser à ce niveau jusqu’en 2030 et diminuer à partir de cette date malgré le vieillissement attendu de la population française. N’en déplaise à Xavier Bertrand, qui s’alarme du vieillissement de la population française : « les évolutions démographiques défavorables seront contrebalancées par la baisse à venir de la pension moyenne rapportée aux revenus d’activité », souligne le COR.

Pourquoi de tels résultats ? Avant tout grâce à l’indexation des pensions sur les prix et non plus sur les salaires, mesure conquise par la mobilisation des gilets jaunes, souligne le COR.

Mais également du fait des réformes passées qui continuent de retarder l’âge de départ à la retraite. Situé à 62,2 ans en 2019 il sera d’environ 64 ans vers 2040. Ainsi, la durée de cotisation s’allonge (à relativiser puisque le taux d’emploi des plus de 55 ans est particulièrement bas) et surtout, les dépenses reculent.

Les projections du COR esquissent donc un tout autre tableau que celui dépeint par la droite. Le trou des retraites ne serait qu’un élément conjoncturel et non structurel. Une observation qui rend une réforme du système plus questionnable que jamais. D’autant plus qu’en matière de résorption du déficit, les solutions existent. Au premier rang desquelles : l’augmentation des recettes de la caisse des retraites. Sans parler d’une augmentation des taux de cotisation, les niches sociales qui exemptent le patronat de 10 milliards d’euros de cotisations retraites sont toujours d’actualité.


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