La royauté, modèle de démocratie... en Espagne et ailleurs ?

vendredi 19 octobre 2012.
 

- 1) Réponse à Laurent ZIDEL-CAUFFET, royaliste farouche, ex élève de Sainte Geneviève Saint Joseph Toulouse
- 2) Message en forum émanant de Laurent ZIDEL-CAUFFET reçu sur notre site le 9 octobre 2012

1) Réponse à Laurent ZIDEL-CAUFFET, royaliste farouche

Monsieur, vous avez mis en ligne et signé un message en forum sur notre site ; merci. Je ne doute pas de votre sincérité ; ceci dit, j’ai mis deux heures à me remettre de votre écrit.

Prendre l’exemple de l’histoire espagnole pour vanter les mérites démocratiques de la royauté comme régime politique me coupe le souffle.

ROYAUTE ESPAGNOLE = TOTALITARISME MOYENNAGEUX

- Si nous acceptons comme définition du totalitarisme un régime politique imposant une idéologie unique, ne tolérant aucune opposition, exigeant le rassemblement de tous les citoyens en un bloc unique derrière lui, prétendant gérer, outre la vie publique, la vie privée des individus (croyance, type de famille, régime policier, encadrement de la jeunesse...), la royauté espagnole en représente un exemple parfait.

Je suis d’accord avec les historiens qui comptent les forces contre-révolutionnaires des siècles précédents comme une source décisive du fascisme du 20ème. Or, le royaume d’’Espagne constitue l’archétype de cette Contre-révolution pré-fasciste en Europe.

La description de Charles Quint par Bartolomé Bennassar ( Le temps de l’Espagne : XVIe-XVIIe siècles, Hachette , 2010) paraît écrite pour l’élite franquiste. « Charles-Quint ... était bien un Espagnol. Du moins il en était une caricature, par son orgueil, par sa piété ardente et fanatique, son intolérance, sa haine de tout ce qui n’était pas catholique. Pour cette raison les Espagnols se sont reconnus en lui et ils lui ont beaucoup pardonné... L’éclat de son règne ne doit pas faire oublier qu’avec lui a commencé la décadence espagnole. Le despotisme qu’il a achevé d’établir n’a pas été... un instrument de progrès ; il n’a pas donné à l’Espagne l’ordre et la prospérité intérieure tout en la privant de ses libertés ; il l’a mise au service d’une politique qui devait la conduire à la ruine »

Le philosophe catholique Miguel de Unamuno a raison d’écrire que l’Espagne a pris la tête de la Contre-Réforme aux 16è et 17è siècles face à la Renaissance progressiste et aux premières révolutions (Hollande, Angleterre, Genève...). Au 17ème, Madrid représente un cloaque du fanatisme religieux. L’Eglise impose une idéologie unique, ne tolérant aucune opposition, exigeant le rassemblement de tous les citoyens en un bloc unique derrière elle, prétendant gérer, outre la vie publique, la vie privée des individus. L’historien catalan Juan Reglá a bien résumé la puissance de ses appareils répressifs comme l’Inquisition, tellement craints que leur existence suffit à apeurer quiconque. « La caractéristique des appareils répressifs est que, lorsqu’ils sont solidement installés, ils ont à peine besoin de se manifester. Leur simple présence et leur disponibilité garantissent leur efficacité. Au bout de quelque temps, ils n’ont rien à prohiber ni à réprimer parce que l’ose rien ou très peu... Cependant, tout le monde sait qu’elle est là, prêté à se manifester aussi rapidement qu’il le faut. »

Au 18ème siècle, l’Espagne s’exclut de l’Europe des Lumières :

- économiquement et sociologiquement : record du latifundisme et de la misère paysanne, record du nombre de monastères (3210) et de religieux (147415)

- idéologiquement : Les célèbres anti-Lumières Nonotte (confesseur jésuite) et Valsecchi (prédicateur dominicain) ont plus d’influence en Espagne que Voltaire, Diderot ou Rousseau. Leur délire réactionnaire est relayé dans la péninsule par de nombreux écrivaillons totalitaires (Torrubia, Zeballos, Rodriguez, Valcarce, Colomés...). Dans son ouvrage "L’Espagne de la Contre-révolution", Franck Lafage affirme fort justement "Loin d’avoir pu s’épanouir parmi les privilégiés comme en France, la franc-maçonnerie s’était étiolée en Espagne sous les coups de l’Inquisition."

- politiquement : les Bourbons confortent l’absolutisme

- Au moment où les autres royautés commencent à prendre en compte les aspirations modernes, l’Eglise catholique espagnole fait de la surenchère dans le rôle religieux du trône castillan qualifiant de "souverain pontife", de "Vice-Dieu", de "Vicaire du Christ sur la terre espagnole" le benêt Don Fernando, par la grâce de Dieu, roi de Castille, de Léon, d’Aragon, des deux Siciles, de Jérusalem, de Navarre, Grenade, Tolède, Valence, de Galice, Majorque, Séville, Sardaigne, de Cordoue, de Corse, de Murcie, Jaen, Seigneur de Biscaye et de Molina. Voilà un nom de roi à faire pâlir de fierté tous les royalistes.

L’Encyclopédie Méthodique (1782) décrit justement "la honteuse léthargie" du royaume d’Espagne « Les arts sont éteints chez elle, les sciences, le commerce ! Elle a besoin de nos articles dans ses manufactures ! Les savants sont obligés de s’instruire en cachette avec nos livres ! Elle manque de mathématiciens, de physiciens, d’astronomes, de naturalistes... ! »

La grande période révolutionnaire des années 1773 à 1802 et sa petite réplique des années 1820, touche beaucoup de pays. En Espagne, elle se termine par une sorte de génocide des démocrates.

Dès 1789, le pouvoir royal et l’Eglise coopèrent pour interdire toute écrit concernant la Révolution française (en bien ou en mal), pour préparer une répression sanglante de la liberté d’expression.« Il faut faire dès le début quelques bons exemples qui retiennent ces gens à temps, car il est nécessaire de les traiter comme des pestiférés ou des chiens enragés, sans leur faire quartier. Une intelligence secrète entre l’Inquisition et la Cour serait, à mon sens, le meilleur moyen d’enrayer le mal. Les intérêts de la religion sont inséparables de ceux de l’Etat » (comte de Fernàn Nunez, ambassadeur).

En 1823, les volontaires royalistes, couverts par le roi d’Espagne, assassinent systématiquement les familles soupçonnées de sentiments démocrates (2044 personnes exterminées en Catalogne selon un recensement partiel du consul de France). Ce totalitarisme sanglant permet de tuer les progressistes connus et de pousser les autres à l’émigration.

Au 20ème siècle, cette tradition totalitaire de la royauté espagnole a logiquement débouché sur le fascisme

Juillet 1936 Avril 1939 La vraie Espagne en guerre contre le fascisme

1931-1939 : naissance et mort de la Seconde République espagnole

Les enfants volés du fascisme catholique espagnol

Non seulement vous défendez la royauté espagnole mais vous vous revendiquez de l’idéologie totalitaire diffusée par l’Eglise et les Anti-Lumières pour la valoriser

« Même si la fonction royale est héréditaire, c’est justement ce qui fait la continuité et la force d’une monarchie. Le roi est le père de la nation, son but est de léguer à son héritier(e) un pays dans un meilleur état qu’il l’a trouvé » écrivez-vous. L’exemple de la France comme de l’Espagne montre l’inanité d’un tel point de vue. En France, la démence de Charles V n’a pas assuré la continuité de la nation, au contraire. En Espagne, Charles II l’Ensorcelé n’a pas "légué à son héritier(e) un pays dans un meilleur état qu’il l’a trouvé », loin de là.

Vous osez même écrire : « Aucun président ne peut représenter l’ensemble d’une nation car c’est le chef d’un parti alors que le roi est un arbitre impartial. » Je connais suffisamment bien l’histoire de mon village d’Entraygues sur Truyère pour savoir que chaque roi de France a été plus partial et plus répressif que chaque président de la république française (malgré leurs nombreux défauts). Parmi les rois de France qui se sont comportés ici de façon totalitaire je citerais Philippe Auguste, Louis IX, Philippe le Bel... Charles IX, Henri III, la régente Marie de Médicis et Richelieu, Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, Louis XVIII, Charles X.

Comme vous le savez, chaque progrès démocratique a été conquis par la lutte aux dépens des tyrannies couronnées, du Portugal à la Russie, de la Grèce à la Prusse.

En conséquence, la royauté ne peut être posée par postulat comme le plus démocratique des régimes... et les royalistes comme toute l’extrême droite encore moins.

De ce point de vue, il est étonnant que vous utilisiez l’exemple norvégien à l’appui de votre thèse alors que la tuerie récente d’Utoeya a montré que dans chaque pays l’extrême droite reste un danger pour les acquis démocratiques, particulièrement en période de crise.

Persuadé d’avoir raison sans aucun risque d’être contredit, vous faites également référence à l’histoire de la royauté grecque, catastrophe éminente du 20ème siècle :

- bien plus portée sur les coups d’état militaires et l’extermination des démocrates que sur le respect des droits de l’homme

- utilisant le potentiel économique du pays pour enrichir les copains et non pour construire une société comme un "père de la nation" devrait le faire en suivant votre credo.

Vous reprenez le leitmotiv faux "Staline a fait plus de morts qu’Hitler". Est-ce parce que vous défendez le point de vue des royalistes français des années 1930 "Mieux vaut Hitler que le Front populaire" ? Quant à moi, quant au Parti de Gauche et quant à ce site, nous n’avons jamais, au grand jamais, défendu Staline.

Enfin, vous terminez votre message par un cri du coeur "Vive Louis XX". L’affaire est compliquée pour un royaliste qui défend le trône comme moyen d’éviter les problèmes lors des successions. N’existe-t-il pas une querelle séculaire entre :

- d’une part les royalistes légitimistes (dont vous), fondamentalement anti-démocratiques, reconnaissant Louis XX, de son nom de naissance Don Luis Alfonso de Borbón y Martínez-Bordiú, (et son fils, le futur Louis XXI, récemment baptisé au Vatican)

- d’autre part les Orléanistes acceptant une évolution démocratique du rôle du souverain et ne reconnaissant ni Louis XX ni Louis XXI.

Je termine en vous remerciant d’avoir signé votre message, d’où ma réponse alors que, jusqu’à présent, les messages royalistes sur notre site ne l’étaient pas.

Jacques Serieys

2) Message en forum émanant de Laurent ZIDEL-CAUFFET reçu sur notre site le 9 octobre 2012

Réponse à l’article Espagne : La monarchie est illégale (par Antonio Romero Ruiz, Coordinateur du réseau des municipalités pour la troisième République)

La volonté de remplacer un gouvernement par un autre surtout en temps de crise est un erreur, surtout en Espagne qui est un pays multiculurel et à l’histoire complexe.

Je suis navré mais je pense que mettre fin au royaume d’espagne, c’est mettre fin à l’espagne. En effet même si la fonction royale est héréditaire, c’est justement ce qui fait la continuité et la force d’une monarchie. Le roi est le père de la nation, son but est de léguer à son héritier(e) un pays dans un meilleur état qu’il l’a trouvé, je sais ce que vous allez dire : l’espagne est dans un sale état et c’est une monarchie.

Mais moi je répond : la faute à qui ?

Et j’y répond aussi : C’est la faute à l’union européenne qui a enrollé des pays faible en europe de l’est et qui ont tiré vers le bas les autres vers le bas (nous y compris), et si ces pays sont faibles, c’est la faute aux communistes dont vous vous ventez d’être les héritiers. L’autre raison de l’echec espagnol, c’est la gauche, c’est la gauche qui adirigé ce pays depuis 30 ans et qui a aussi dirigé la grèce qui elle est une république est qui est dans un état encore pire.

La seconde république espagnole est morte dans une guerre civile et son éventuelle héritière finira de même car comme son président sera incapable d’assurer l’unité du pays donc toutes les provinces allant de la galice à la catalogne provlameront leur indépendance et comme madrid refusera, elles l’obtiendront dans le sang et il n’y aura plus d’espagne.

Aucun président ne peux représenter l’ensemble d’une nation car c’est le chef d’un parti alors que le roi est un arbitre impartial.

Je vous conseille de voir si les monarchies sont ou non moins démocratiques que les républiques et vous aurez la surprise de constater que le pays le plus démocratique au monde est le royaume de norvege et que toutes les monarchies européennes sont plus démocratiques que la france.

Alors je ne vois pas pourquoi vous venez faire des lecons de démocratisme quand vous vous déclarez héritier de robespierre et de staline(qui a fait plus de morts qu’hitler).

Vive la france et vive louis XX !


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