La question la plus importante en économie politique : le partage des richesses produites par la population active.

mardi 6 février 2024.
 

Tous les moyens imaginables de dissimulation, de diversion, de manipulation, de division sont mises en œuvre par le pouvoir économique et politique dominant pour empêcher qu’il existe un débat central sur le partage des richesses produites par les travailleurs. L’appareil médiatique met tout en œuvre pour appliquer cette stratégie d’évitement.

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I – Population active et création des richesses

Les biens et services en France sont produits par une population active de l’ordre de 30 millions de personnes. Le nombre de salariés, selon les sources varie entre 26 et 28 millions de personnes ce qui représente 90 à 92 % de cette population active.

La population âgée de moins de 17 ans est environ de 12 millions pour une population totale de 68 millions d’habitants.

La valeur ajoutée créée par les travailleurs dans une entreprise est composée des salaires des travailleurs et des profits réalisés par les chefs d’entreprise.

La valeur globale de cette valeur ajoutée pour toutes les entreprises françaises s’appelle PIB, c’est-à-dire production intérieure brute.

En valeur monétaire, en 2022 le PIB s’élevait à 2639 milliards d’euros.

Les cotisations sociales payées par les salariés et par le patronat qui sont versées ensuite à la sécurité sociale sont à décompter avec les salaires.

Les impôts payés d’une part par les salariés (impôt sur le revenu) et d’autre part par les employeurs (impôt sur les sociétés) sont répartis dans la partie salaires et dans la partie profits.

Les prélèvements obligatoires comprennent les impôts et les cotisations sociales.

En 2022, en France, le total des prélèvements obligatoires s’élève à 45,4 % du PIB.

Comment se répartissent ces prélèvements obligatoires entre salariés et employeurs ?

« À la louche », 30 % pour les salariés et 15 % pour les employeurs. Pour être plus précis, voici un tableau récapitulatif en pourcentages du PIB

Prélèvements sur les ménages  : 28,2 %

dont : impôts directs 23,8 % et Cotisations sociales 4,4 %

Prélèvements sur les chefs d’entreprises 17,2 %

dont : Impôts sur les sociétés 13,6 % et Cotisations sociales 3,6 %

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mais quel est actuellement le niveau de partage de la valeur ajoutée globale entre salaires et profits ? En utilisant les sources de l’INSEE :

Ordre de l’écriture : Année – Part des salaires – Part des profits

2020 58,2 % 41,8 %

2021 58,5 % 41,5 %

2022 58,3 % 41,7 %

La répartition de la valeur ajoutée entre salaires et profits est calculée par l’INSEE à partir des données de la comptabilité nationale. Elle est exprimée en pourcentage de la valeur ajoutée totale, qui est la somme de la rémunération des salariés, du revenu mixte des entrepreneurs individuels, des impôts sur la production nets des subventions d’exploitation et du solde des intérêts et dividendes.

Depuis les années 1970 – 1980 le partage de la valeur ajoutée produite par les travailleurs est de plus en plus défavorable au salariat et favorable au patronat.

Voici deux articles pour plus de détails sur cette question centrale :

Un partage des richesses produites de plus en plus inégal : la déformation de la valeur ajoutée. https://www.gauchemip.org/spip.php?...

Casse du siècle : 250 milliards passés du travail au capital, dans un silence assourdissant https://www.gauchemip.org/spip.php?...

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Mais ce partage de la valeur ajoutée entre salaires et profits ne doit pas nous faire oublier ce que représente, par exemple, le total des patrimoines des 500 premières fortunes de France dans le PIB et son évolution impressionnante.

Rappelons pour mémoire : Selon le classement des 500 plus grandes fortunes de France publié par le magazine Challenges le 5 juillet 2023, le patrimoine cumulé de ces 500 fortunes s’élève à 1 170 milliards d’euros. Le PIB français s’élevait à 2 590 milliards d’euros en 2022. Le patrimoine des 500 premières fortunes représente donc 45,2 % du PIB français.

Dans le magazine Challenges en 1999, le total des 500 premières fortunes de ces 500 personnes était de 147,1 milliards d’euros, soit environ 6,5 % du PIB français de cette année-là, qui était de 2 280 milliards d’euros.

La part du total des patrimoines des 500 premières fortunes dans le PIB en France a donc été multiplié par 7 (6,95 pour être plus précis).

Dans le même temps, le PIB n’avait progressé que de 14 % c’est-à-dire multiplié par 1,14.

Cela signifie que le patrimoine des 500 personnes des plus fortunées de France a progressé six fois plus vite que le PIB ces 20 dernières années.

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II – La protection sociale dans le partage de la valeur ajoutée

1 – Le partage de la valeur ajoutée et le modèle social français.

La valeur ajoutée se divise en deux composantes : d’une part, les bénéfices des employeurs, alimentés par les marges des entreprises industrielles et commerciales, ainsi que par les bénéfices des sociétés financières (tels que les intérêts bancaires) et les revenus patrimoniaux issus de la location de biens mobiliers et immobiliers.

Une fraction de ces bénéfices est redistribuée sous forme de dividendes aux actionnaires, ainsi que sous forme de revenus destinés à la consommation privée des employeurs. L’autre portion peut être réinvestie dans la production ou la sphère financière, prenant notamment la forme de l’épargne. Cette part des bénéfices a tendance à diminuer avec la financiarisation de l’économie et le développement du néolibéralisme.

L’autre composante de la valeur ajoutée se compose principalement des salaires directs et indirects. Une partie des bénéfices et une fraction des salaires contribuent aux recettes issues des cotisations sociales et des impôts.

Les paragraphes suivants permettent de mieux comprendre les mécanismes précis par lesquels fonctionne ce que l’on nomme le "modèle social français".

2 – Les recettes et les dépenses de financement des services publics : leurs liens avec le PIB.

2. 1 – Quels sont les recettes, les ressources financières pour financer les dépenses publiques. (Services publics)

Source 1 : OCDE

En France, les recettes publiques sont principalement constituées d’impôts, de cotisations sociales et de produits non fiscaux.

a) Les impôts représentent la principale source de recettes publiques, avec un montant de 323,3 milliards d’euros en 2022. Ils sont répartis en trois grandes catégories :

Les impôts directs, qui sont prélevés sur les revenus et le patrimoine des particuliers et des entreprises. Ils représentent 53,5 % des recettes fiscales en 2022. Les impôts indirects, qui sont prélevés sur les consommations et les transactions. Ils représentent 46,5 % des recettes fiscales en 2022. Les impôts locaux, qui sont prélevés par les collectivités territoriales. Ils représentent 10 % des recettes fiscales.

b)Les cotisations sociales représentent la deuxième source de recettes publiques, avec un montant de 218,2 milliards d’euros en 2022. Elles sont prélevées sur les salaires et les revenus des travailleurs pour financer la protection sociale.

c) Les produits non fiscaux représentent la troisième source de recettes publiques, avec un montant de 11,5 milliards d’euros en 2022. Ils sont constitués par les produits des monopoles publics, des redevances, des amendes, des droits de douane, etc.

En ventilation par parties de ressources, les recettes publiques se répartissent comme suit en 2022 :

État : 262,7 milliards d’euros ) Sécurité sociale : 155,5 milliards d’euros ) Collectivités territoriales : 70,1 milliards d’euros Autres administrations publiques : 6,0 milliards d’euros

Autres sources : ministère de l’économie

État : 257,7 milliards d’euros Sécurité sociale : 147, cible 7 milliards d’euros Collectivités territoriales : 70,5 milliards d’euros Autres administrations publiques : 17,3 milliards d’euros (5,9 %) Le total est donc de 483,2 milliards d’euros, soit 18 % du PIB.

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2.2 – quels sont les montants des dépenses publiques ?

Cette thématique est difficile à défricher car la comptabilité publique est relativement complexe et il peut exister des problèmes de terminologie : prestations sociales, protection sociale, sécurité sociale en tant que couverture générique ou en tant qu’organisme définit administrativement, et de sociales et allocations, etc. de même pour la terminologie « dépenses publiques », dépenses pour les services publics.

De ce fait, l’utilisation de logiciels d’intelligence artificielle s’avère délicate et demande croisement des réponses et vérification des données.

En 2022, les dépenses publiques en France s’élevaient à 58,1 % du PIB, soit 1 500 milliards d’euros. Ces dépenses comprennent l’investissement et le fonctionnement des services publics.

L’investissement public représente environ 5 % du PIB, soit 75 milliards d’euros. Il est principalement consacré à l’infrastructure (transports, énergie, etc.), aux équipements (santé, éducation, etc.) et à la recherche et développement.

Le fonctionnement des services publics représente environ 53 % du PIB, soit 775 milliards d’euros. Il comprend les rémunérations des agents publics, les achats de biens et services, les subventions aux ménages et aux entreprises, etc.

En 2022, la part du PIB consacrée à l’investissement et au fonctionnement des services publics en France est légèrement supérieure à la moyenne de l’OCDE, qui s’établit à 52,5 %.

Il est important de noter que ces chiffres ne comprennent pas les cotisations sociales versées par les travailleurs indépendants, qui s’élèvent à environ 20 milliards d’euros par an.

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3 – Les prestations sociales

3. 1 – Les recettes pour financer les prestations sociales.

Selon les chiffres clés de la sécurité sociale 2022 publiés par la Direction de la sécurité sociale, les recettes pour les prestations sociales s’élèvent à 648 milliards d’euros en 2022.

Les cotisations sociales salariés et employeurs prélevés sur les salaires représentent 60,5 % de ces recettes, soit 390 milliards d’euros. Les cotisations salariales représentent 31,8 % des recettes de la sécurité sociale, soit 207,4 milliards d’euros. Les cotisations patronales représentent 28,7 % des recettes de la sécurité sociale, soit 182,6 milliards d’euros.

L’autre partie des recettes de la sécurité sociale, comprenant la CSG, RDS, les différentes taxes, (ITAF) représente 39,5 % des recettes, soit 258 milliards d’euros. La CSG représente 18,4 % des recettes de la sécurité sociale, soit 121,7 milliards d’euros. La RDS représente 1,3 % des recettes de la sécurité sociale, soit 8,5 milliards d’euros. Les autres taxes représentent 19,8 % des recettes de la sécurité sociale, soit 127,8 milliards d’euros.

Voir aussi la description des recettes pour la protection sociale dans Vie publique (2016)

https://www.vie-publique.fr/fiches/...

remarquons que les recettes pour la protection sociale en 2016 s’élevaient à 758,7 milliards d’euros. La baisse entre 2016 et 2022 et donc de 110,7 milliards d’euros soit une diminution de 15 %. Soit une baisse moyenne de 3 % par an

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3.2 – Recettes des caisses de retraite en France.

Régime général

Cotisations sociales : 272,8 milliards d’euros (82,1 %)

Impôts et taxes affectées : 16,4 milliards d’euros (5,1 %)

Transferts de compensation démographique et d’équilibre : 33,6 milliards d’euros (10,7 %)

Produits financiers : 13,2 milliards d’euros (4,1 %)

Total : 336 milliards d’euros

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Autres caisses de retraite

Régimes spéciaux : 101,3 milliards d’euros (30 %)

Caisses de retraite complémentaire : 73,7 milliards d’euros (21,4 %)

Total : 175 milliards d’euros

Total des dépenses et recettes pour les retraites

346 milliards d’euros (régime général) + 175 milliards d’euros (autres caisses de retraite) = 521 milliards d’euros

le régime général des retraites de 346 milliards d’euros représente 14 % du PIB en 2021

Commentaires

Les cotisations sociales sont la principale source de financement des retraites en France, représentant 79 % des recettes du régime général.

Les impôts et taxes affectées constituent la deuxième source de financement, avec 12 % des recettes.

Les transferts de compensation démographique et d’équilibre permettent de compenser les disparités entre régimes, notamment entre les régimes des salariés du secteur privé et des fonctionnaires.

Les produits financiers constituent une source de recettes minoritaire, mais qui a tendance à augmenter ces dernières années.

Les régimes spéciaux représentent environ un tiers des recettes des retraites, mais ils ne concernent qu’une minorité de retraités.

Les caisses de retraite complémentaire représentent environ un quart des recettes des retraites. Elles sont financées par des cotisations sociales supplémentaires, versées par les salariés et les employeurs.

Le total des dépenses pour les retraites en France s’élève à 521 milliards d’euros.

Les recettes de 521 milliards d’euros pour les caisses de retraite font parti du total des 648 milliards des recettes pour les prestations sociales vu précédemment.

En effet, les prestations sociales comprennent les pensions de retraite, mais aussi d’autres prestations telles que les allocations familiales, les allocations chômage, les aides sociales, etc.

Les pensions de retraite représentent une part importante des prestations sociales, soit environ 80 %. En 2022, les pensions de retraite ont représenté 521 milliards d’euros, soit 77 % du total des prestations sociales.

Voici un tableau récapitulatif :

Type de prestation Recettes en 2022 (en milliards d’euros) Part dans les prestations sociales Pensions de retraite 521 77 %

Allocations familiales 37 6 %

Allocations chômage 29 5 %

Aides sociales 42 7 %

Autres prestations 1 8 3 %

Total 648 100 %

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4 – Les dépenses de l’assurance-maladie

Selon les données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), les dépenses d’assurance maladie en France s’élevaient à 226,7 milliards d’euros en 2022, soit 9,1 % du produit intérieur brut (PIB). Cette dépense représente en moyenne 3 350 euros par habitant.

Les dépenses se répartissent de la manière suivante :

Soins hospitaliers : 62,4 % (142,8 milliards d’euros)

Soins de ville : 32,5 % (73,6 milliards d’euros)

Biens médicaux : 5,1 % (11,3 milliards d’euros)

Les dépenses hospitalières représentent la part la plus importante des dépenses de santé, avec 62,4 %. Elles comprennent les dépenses de soins dispensés dans les hôpitaux publics, privés, les cliniques et les établissements de santé spécialisés.

Les dépenses de soins de ville représentent 32,5 % des dépenses de santé. Elles comprennent les dépenses de soins dispensés par les médecins généralistes, les spécialistes, les dentistes, les pharmaciens, etc.

Les dépenses de biens médicaux représentent 5,1 % des dépenses de santé. Elles comprennent les dépenses de médicaments, de matériel médical, d’optique médicale, d’audioprothèse, etc.

La répartition des dépenses de santé par secteurs a évolué au cours des dernières années. Les dépenses hospitalières ont progressé plus rapidement que les dépenses de soins de ville, ce qui s’explique par le vieillissement de la population et l’augmentation de la complexification des soins.

En 2022, les ménages ont pris en charge 7,2 % des dépenses de santé, soit environ 16 milliards d’euros. Cette part est stable par rapport à 2021.

Ce taux de prise en charge prend en compte tous les types de dépenses précédents.

Mais la prise en charge par les ménages des frais de médicaments est d’un taux plus élevé.

Selon les données de l’Assurance maladie, la part prise en charge par les ménages des frais de médicaments prescrits par un professionnel de santé est de 23,2 % en moyenne en 2023. Ce taux est calculé en tenant compte de la franchise médicale, qui est une somme forfaitaire à payer par les assurés avant d’être remboursés par l’Assurance maladie. En 2023, la franchise médicale est de 50 € par an et par personne.

Le taux réel global moyen de remboursement des médicaments en France est donc de 76,8 %. Ce taux est plus élevé pour les médicaments à service médical rendu majeur ou important, qui sont remboursés à 65 % par l’Assurance maladie. Le taux de remboursement est plus faible pour les médicaments à service médical rendu modéré, qui sont remboursés à 30 %, et pour les médicaments à service médical faible, qui sont remboursés à 15 %.

Le taux réel global moyen de remboursement des médicaments en France est en baisse depuis plusieurs années. En 2010, ce taux était de 81,4 %. Cette baisse est due à plusieurs facteurs, notamment à la hausse des prix des médicaments, à la diminution du nombre de médicaments remboursables à 100 %, et à la mise en place de la franchise médicale.

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5 – Assurance-chômage : recettes et dépenses

5 -1 Les ressources financières de l’assurance chômage en France

Les ressources financières de l’assurance chômage en France sont constituées de cotisations patronales, de cotisations salariales et de la contribution sociale généralisée (CSG).

Les cotisations patronales sont calculées sur la base du salaire brut, dans la limite de quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 14 664 € en 2023. Le taux de cotisation patronale est de 4,05 % en 2023.

Depuis 2019, la cotisation sociale pour l’assurance-chômage a été supprimée pour les salariés du secteur privé. Elle a été transférée sur la CSG à raison d’un taux de 1,47 %.

La contribution sociale généralisée (CSG) est une contribution sociale prélevée sur l’ensemble des revenus, y compris les allocations chômage. Le taux de CSG applicable aux allocations chômage est de 6,2 % en 2023.

En 2022, les recettes de l’assurance chômage s’élevaient à 39,8 milliards d’euros.

Source : Unédic, "Rapport annuel 2022"

5 2. Le montant des allocations chômage attribuées en France

Le montant des allocations chômage attribuées en France est calculé en fonction de la durée d’affiliation du demandeur d’emploi, de son salaire antérieur et de son âge.

La durée d’indemnisation est de 18 mois pour les personnes de moins de 55 ans, et de 27 mois pour les personnes de 55 ans et plus. Cette période d’indemnisation a été réduite de 25 % par le gouvernement Macron.

Le salaire journalier de référence (SJR) est calculé sur la base des 12 derniers mois d’activité ou sur la moyenne des trois derniers mois d’activité, si elle est plus favorable.

Le taux d’allocation chômage est de 57 % du SJR pour les personnes de moins de 55 ans, et de 65 % pour les personnes de 55 ans et plus.

En 2022, le montant moyen des allocations chômage versées était de 1 230 € par mois.

Source : Unédic, "Rapport annuel 2022"

5.3 Le coût moyen d’un chômeur en France : allocations + formation

Le coût moyen d’un chômeur en France est estimé à 1 870 € par mois en 2023. Ce coût comprend les allocations chômage, les dépenses de formation et les frais administratifs.

Les dépenses de formation représentent environ 20 % du coût total d’un chômeur. Elles comprennent les frais de formation, les frais de déplacement et les frais de garde d’enfants.

Les frais administratifs représentent environ 10 % du coût total d’un chômeur. Ils comprennent les frais de gestion des dossiers, les frais de communication et les frais de contentieux.

Source : Unédic, "Rapport annuel 2022"

En conclusion, les ressources financières de l’assurance chômage en France s’élèvent à 39,8 milliards d’euros en 2022. Le montant moyen des allocations chômage versées est de 1 230 € par mois. Le coût moyen d’un chômeur en France est estimé à 1 870 € par mois en 2023. Rappelons que selon pôle emploi et la CGT, un chômeur sur deux, environ, n’est pas indemnisé.

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III – Les rapports de force entre les propriétaires du Capital et les détenteurs de la Force de travail pour le partage des richesses produites, c’est-à-dire de la valeur ajoutée.

Les capitalistes mettent en œuvre plusieurs stratégies pour que le partage des richesses se fasse en leur faveur.

D’abord, en augmentant leur marge bénéficiaire, qu’il s’agisse d’un profit industriel, commercial ou financier. Dans le cas d’une entreprise produisant des biens et des services, l’objectif est de diminuer le coût de production, c’est-à-dire le coût du capital constant C (matières premières, énergie, coût des infrastructures,…) et le coût du travail, plus précisément de diminuer le prix de la valeur de la force de travail, c’est-à-dire le capital variable v.

En d’autres termes, dans l’écriture du prix d’un bien ou d’un service : Px = C + V + pr, pour un prix donné, on diminue autant que faire se peut C + v pour accroître le profit PR. Cela revient autrement dit à augmenter le taux de profit pr / (C + v).

Comment réaliser cet objectif ?

En achetant les matières premières et l’énergie le moins cher possible, en jouant sur la concurrence entre entreprises au niveau national ou au niveau international. Cela peut favoriser les importations au détriment des exportations.

En exerçant une pression sur les salaires et en stimulant la concurrence entre les travailleurs sur le marché du travail national et international. Pour ce faire, les délocalisations et l’immigration peuvent permettre de payer une main-d’œuvre moins chère

Une stratégie radicale pour accroître les profits consiste à s’approprier légalement par les privatisations ou par la force des armes (colonisation, guerre, coup d’état) des ressources naturelles et des moyens de production. N’ayons pas peur de dire que la privatisation de grandes entreprises publiques vitales pour le fonctionnement de la nation sans référendum préalable constitue une forme de banditisme politique qui s’apparente bien à un vol, un racket de biens appartenant à la collectivité nationale.

Si l’on veut connaître le mécanisme de cette prédation sur le plan juridique et ses conséquences économiques, on peut utiliser le lien suivant : https://journals.openedition.org/py...

. Rappelons que c’est le gouvernement Jospin qui a le plus privatisé pour un montant de 31,2 milliards d’euros

La variable salaire joue un rôle fondamental dans le partage salaire/profit.

Outre la stratégie précédente, les capitalistes mettent en œuvre d’autres stratégies :

diminuer la valeur de la force de travail et le capital variable v investi en augmentant la productivité du travail par la mécanisation, l’intensification et la rationalisation de l’organisation du travail.

affaiblir les syndicats en les criminalisant et en divisant l’action syndicale.

Favoriser un certain taux de "chômage structurel" pour exercer une pression sur les salaires et contraindre les travailleurs à l’obéissance, c’est-à-dire à l’acceptation de conditions de travail à la limite du supportable en outre, le chômage permet de diminuer la masse salariale payée par le capitaliste.

Le chômage se traduit aussi par une diminution des recettes en impôts et en cotisations sociales nécessaires à la protection sociale.

Une autre stratégie consiste à maintenir un pouvoir d’achat insuffisant pour contraindre les ménages à emprunter à une banque ou à une société financière. Cette situation rend plus difficile l’action syndicale des travailleurs pour des raisons financières et pour des menaces sur leur emploi.

Le capitalisme financier accroît ses profits en augmentant les taux d’intérêt et autres frais financiers. (Voir notre article sur les profits financiers en France.

https://www.gauchemip.org/spip.php?... )

Mener une lutte idéologique avec l’aide des médias dominants pour convaincre que les augmentations de salaire mettent en danger les entreprises, notamment en raison d’un excès de "charge sociale patronale".

Utiliser ses relais politiques à l’Assemblée nationale et au gouvernement pour freiner ou empêcher une augmentation du salaire minimum interprofessionnel (SMI).

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Une autre stratégie pour les capitalistes consiste à minimiser les diverses taxes intervenant dans le prix final de vente des biens et services produits. Les délocalisations et l’utilisation des prix de transfert permettent de produire dans les pays où les différentes taxes sociales, environnementales, etc., sont les plus faibles possibles, ou encore de s’opposer, grâce à des relais politiques, à l’imposition de nouvelles taxes (écologiques, par exemple).

Une autre stratégie importante est de minimiser la fiscalité : impôt sur la production, impôts sur les sociétés. Dans un cadre légal, on pratique alors l’optimisation fiscale et on fait pression sur le personnel politique pour obtenir des exonérations ou des diminutions d’impôts. Dans un cadre illégal, on utilise les paradis fiscaux.

Une autre stratégie similaire consiste à faire pression sur le personnel politique pour obtenir des exonérations ou des diminutions des cotisations sociales patronales. Les exonérations fiscales et sociales de toutes sortes pour les employeurs s’élèvent à environ 250 milliards d’euros par an. Ces exonérations peuvent faire partie d’une stratégie plus vaste sur le plan économique et politique : l’aide financière aux entreprises. Ces aides peuvent provenir non seulement de l’État mais aussi des collectivités territoriales. La Cour des Comptes a dénoncé à plusieurs reprises le manque de transparence de ces politiques d’aide et l’absence de bilan en termes d’efficacité au niveau de l’emploi et de l’innovation.

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Résumons : afin que le partage de la valeur ajoutée, c’est-à-dire l’ensemble des richesses produites par la population active, se fasse au bénéfice des propriétaires du capital, les capitalistes ont recours aux stratégies suivantes : diminution du prix des matières premières et, de manière plus générale, des composantes du capital constant ; la "modération salariale" peut prendre la forme du blocage ou de la stagnation des salaires, ainsi que du freinage de la hausse des salaires ; augmentation des marges sous ses différentes formes ; minimisation de la fiscalité et des taxes ; réduction des cotisations sociales.

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Mais le tableau précédent n’est pas tout à fait complet car il nous reste à examiner les profits ne résultant pas de l’activité productive des capitalistes. Considérons les revenus locatifs appelés fiscalement revenus fonciers résultant de la location de logement d’habitation, de bureau, de locaux commerciaux, de terrain agricole ou autre.

L’INSEE évalue à environ 120 milliards d’euros le montant de ses revenus dans son étude sur le revenu des ménages.

Bien que la fiscalité foncière soit extrêmement variée, on évalue la fiscalité moyenne à 31 % de ce montant, environ 10 % des ménages ont un revenu locatif du faible au élevé.

Là encore différentes stratégies vont être utilisées par les propriétaires pour augmenter le montant de leur location et minimiser le montant de la fiscalité à payer. La raréfaction des logements bien évidemment augmentait le prix des locations

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pour ne pas alourdir exagérément cette étude, nous n’avons pas traité des profits financiers que nous examinons en détail dans un autre article : les profits financiers en France.

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Toutes ces stratégies contribuent à affaiblir les services publics et la protection sociale, comme nous l’avons détaillé dans le chapitre précédent. En effet, les services publics tels que l’assurance-maladie, l’assurance-chômage, l’aide sociale, la retraite, etc., dépendent entièrement du niveau des salaires, des cotisations sociales et des impôts.

Il est donc évident que le développement de stratégies visant à affaiblir ces différents paramètres contribue à l’affaiblissement voire à la destruction des services publics et de la protection sociale sous toutes ses formes.

Cette dégradation est observable depuis une quarantaine d’années dans tous les pays où le néolibéralisme s’est développé avec la complicité de la droite et de la social-démocratie. Les pays scandinaves n’ont pas échappé à cette dégradation qui se traduit, entre autres, par une décomposition du champ politique avec la montée de l’extrême droite.

Nous constatons donc que le problème de la hausse des salaires et d’une fiscalité plus juste dépasse de loin le seul problème du pouvoir d’achat mais ont un impact sur l’ensemble des problèmes écologiques et sociaux.

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Une stratégie globale permanente relayée par la mafia médiatique au service du Capital est de tout faire pour que ne soit pas abordé le problème central du partage de la valeur ajoutée c’est-à-dire des richesses produites par la population active. Les Agents de l’Action Idéologique Médiatique qui accompagnent les stratégies décrites précédemment utilisent toutes les diversions possibles pour diviser la population sur des thèmes sociétaux, identitaires et empêcher tout débat sur ce problème fondamental du partage des richesses qui conditionnent tout le fonctionnement de la société et l’existence d’inégalités sociales qui deviennent de plus en plus insupportables.

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Il faut alors se poser la question fondamentale : quels sont les formations politiques qui analysent les les stratégies précédemment décrites utilisées par la grande bourgeoisie pour que le partage de la valeur ajoutée se fasse au bénéfice de celle-ci ?

Certainement pas l’extrême droite qui, en réalité par le silence de ses analyses, accompagne ces stratégies.

Seule la gauche de rupture effectue ce travail d’analyse. C’est donc seulement sur elle qu’il faut compter pour non seulement « défendre le pouvoir d’achat » mais aussi préserver tous les services publics et la protection sociale.

Il serait nécessaire de créer un observatoire de la dégradation et de la destruction des services publics et de la protection sociale secteur par secteur. À cet observatoire serait jumelé un autre observatoire : celui des conséquences économiques, sociales et psychologiques désastreuses pour la population et son environnement.

Il constituerait un outil efficace dans la lutte politique pour un partage des richesses au service du peuple et non au service d’une oligarchie.

Hervé Debonrivage


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