Religion mormonne et blessures morales infligées par les dérives sectaires

jeudi 22 janvier 2015.
 

Réponse à l’article "Nicolas, 25 ans, rescapé des Témoins de Jéhovah" Témoignage de Nicolas JACQUETTE

par François Morin, Montréal, Canada

Cher Nicolas,

Votre histoire m’a profondément touché. Je suis tout-à-fait d’accord avec toi à savoir que les Témoins de Jéhovah et leurs enseignement sont nuisibles à la société dominante et plus particulièrement envers les enfants adeptes.

J’ai vécu quelque chose de très similaire à toi seulement que moi j’ai été endoctriné au sein de la religion mormone durant toute mon enfance et mon adolescence puisqu’un tragique hasard des naissances a voulu que je vienne au monde avec des parents grandement carencés qui ont été piégés dans la religion mormone.

Pour raconter mon histoire, il me faudrait écrire un ou plusieurs livres. Je tenterai donc d’aller à l’essentiel.

Ayant aujourd’hui 33 ans et après quelques 500 rencontres en psychothérapie, je réalise progressivement l’impact qu’a eu sur moi l’endoctrinement éhonté de la religion mormone durant les 17 premières années de mon existence c’est-à-dire durant une période sensible et déterminante de mon développement humain. Le bilan aujourd’hui est catastrophique. Je m’explique.

L’aspect dont j’estime aujourd’hui m’ayant été le plus préjudiciable est celui de l’hypermoralité pathologique et plus spécifiquement celle véhiculée sous la forme de répression sexuelle.

En effet, le fait que je croyais en la véracité des enseignements mormons entourant le sexualité ou plutôt la chasteté pure et simple durant ma jeunesse alors que je n’étais pas suffisamment mature et intellectuellement indépendant pour faire des choix éclairés en cette matière, j’ai vécu une importante honte psycho sexuelle dans le cadre des enseignements et rituels mormons doctrinaires connus sous les appellations de ;

La Loi de la Chasteté, Les entrevues de dignité, et Les Baptêmes pour les morts.

Étant donné que je n’arrivais pas à l’âge de 12 ans à résister totalement à mes pulsions (pourtant normales) de pratiquer la masturbation, j’ai cru que j’avais empêcher le Salut Éternel de 46 de mes ancêtres décédés en les baptisant indignement.

Accablé par un puissant sentiment de honte, d’humiliation, de peur et de culpabilité, à l’âge de 16 ans, j’ai tenté de m’enlever la vie.

Aujourd’hui, je me retrouve avec des séquelles psychosomatiques extrêmement graves particulièrement sur le plan de ma sexualité.

Vingt ans plus tard et après avoir obtenu une aide professionnelle adéquate, j’ai décidé d’intenter une action légale contre la religion mormone.

J’ai d’ailleurs publier mon histoire sur un site web qui rassemble les ex adeptes mormons. Je vous invite à la lire si cela vous intéresse. Bien que le narratif soit en anglais, j’ai toutefois attaché la requête introductive d’instance laquelle est en français.

http://www.postmormon.org/exp_e/ind...

J’attends dans les prochaines semaines un jugement de la Cour Supérieure du Québec qui va se prononcer sur une question de droit en matière de recevabilité et qui risque de faire couler beaucoup d’encre étant donné que mon action légale est la première qui soit qui allègue un dommage lié à des dogmes et rituels religieux - expertises psychiatriques à l’appui - et qui tente d’établir la responsabilité civile des co-défendeurs.

Mes amis, j’estime que devant les cancers de société que représentent les sectes (la religion mormone, les Témoins de Jéhovah, l’Église de Scientologie, et les autres) les victimes de ces dernières ont le devoir moral de rassembler leurs énergies, faire front commun et ainsi sensibiliser la société dominante du danger que représente ces sectes. Privé de la force du groupe, le solitaire est condamné.

Les sectes sont des virus qui se propagent tels des métastases dans un corps social malade contaminant ses constituants les plus vulnérables que ce soit des adultes démunis et souffrants ou des enfants impressionnables, vulnérables et sans défense avec comme conséquence prévisible et évitable de mettre en péril la paix sociale et le bien commun.

Ces sectes ne disparaîtront pas d’elles mêmes. Elles disparaîtront seulement et seulement si la société dominante arrive à prendre conscience du danger imminent et avéré que représentent ces organisations maléfiques.

Or, ceci ne pourra se produire tant et aussi longtemps qu’une masse critique de victimes de ces sectes prête à se mobiliser ne sera pas constituée afin de pouvoir parler d’une seule voix au nom de la protection et de la promotion de la dignité humaine et du droit à chacun de découvrir librement la mesure de son réel potentiel humain.

Tel est le passage obligé afin d’espérer qu’un jour la société dominante puisse apporter des modifications importantes aux politiques sociales présentement existentes.

Bon courage à tout ceux et celles qui doivent composer avec les blessures morales infligées par les dérives sectaires de ce monde. L’important est de reconnaître ce qui nous a été volé afin que cette prise de conscience puisse opérer une mobilisation intérieure d’abord individuelle et ultimement collective.

- One’s dignity may be assaulted, vandalized and cruelly mocked, but can not be taken away unless it is surrendered. (Michael J. Fox.)

Sincèrement,

François Morin Montréal, Canada


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