Les inégalités devant la santé précaire

samedi 23 décembre 2006.
 

Le 26 octobre, le Parti socialiste a entendu les associations, organisations et syndicats liés au milieu sanitaire pour parvenir à un état des lieux de la santé en France, cibler les défauts du système et présenter ses propositions. Les acteurs de terrain ont dressé un bilan assez alarmant et souhaitent une politique de la santé en adéquation avec l’évolution de la société.

L’inégalité de l’accès aux soins : une réalité

Le thème choisi par le Parti socialiste pour débattre avec les différentes organisations de santé n’est pas anodin et n’a pas manqué de faire réagir les interlocuteurs. UFC-Que choisir rappelle que les inégalités devant la santé sont sociales, économiques, géographiques, éducatives ou liées à un handicap physique ou mental. Lorsqu’elles se cumulent, le droit à la santé pour tous devient une utopie. C’est notamment le cas pour les personnes porteuses du VIH. D’après l’association de lutte contre le Sida, Aides, « ces personnes ont une qualité de vie qui ne cesse de chuter et souffrent d’une paupérisation extrêmement marquée ». « Face au risque de contamination, les inégalités sociales deviennent des inégalités de risque », ajoute Act up. L’immigré ou le SDF, plus exposés aux inégalités, sont aussi plus vulnérables.

Si les socialistes ont mis en place, lors de la législature précédente, la Couverture médicale universelle (CMU) pour les personnes en situation régulière, et l’Aide médicale d’Etat (AME) pour les sans-papiers, les conditions d’accès à ces deux dispositifs ont été sérieusement restreintes et complexifiées par la droite, depuis 2002. De plus, certains médecins refusent de recevoir les patients bénéficiaires de la CMU.

Face à la maladie, celui qui ne dispose pas d’une couverture santé doit, ou bien renoncer aux soins, ou bien se rendre aux urgences avec la crainte de retrouver les huissiers chez lui car il ne pourra pas payer la facture. Et nombreux sont dans ce cas. Le rapport 2005 de Médecins du monde rappelle que 22% des personnes se présentant à l’association n’ont droit à rien. D’autres ne peuvent être bénéficiaires d’une couverture santé totale, comme les jeunes, les familles monoparentales ou les personnes atteintes de maladie longue durée, et sont aujourd’hui victimes d’une précarisation face à la santé. Ainsi, comme le souligne la Mutuelle des étudiants après une enquête sur 10000 jeunes, 13% d’entre eux n’ont pas de complémentaire par manque de moyens. Les soins dentaires ou ophtalmiques, peu ou pas remboursés par la sécurité sociale, deviennent donc un luxe que beaucoup de jeuns ne peuvent pas se payer. À ces inégalités s’ajoute celle du territoire puisque le France compte de plus en plus de zones désertifiées d’un point de vue sanitaire.

L’absence d’une politique globale de la santé

Alors que la CMU et l’AME ont été peu à peu détournées de leur fonction première, le gouvernement en 2004 en facilitant le dépassement d’honoraires pour les médecins a creusé un peu plus les inégalités d’accès aux soins. Lorsqu’un généraliste demande 50 euros ou plus pour une consultation, il est certain que peu de gens ont la possibilité de payer le supplément de leur poche. De plus, comme le souligne la Mutuelle des étudiants, ce n’est pas aux complémentaires d’assumer constamment la hausse du coût de la santé.

Ainsi, l’accès aux soins a changé. « Le pauvre est vu comme un feignant détenteur de minima sociaux ; il est assimilé à un fraudeur en puissance », explique Didier Ménard, du Syndicat de la médecine générale (SMG). Les organisations de santé présentes demandent donc une refonte globale du système actuel d’accès à la santé. La prévention, l’aménagement du territoire, le droit des étrangers et la formation des médecins sont des éléments qui doivent impérativement être repensés. « L’innovation et le droit à la santé ne doivent pas être plombés par la maîtrise comptable », estime encore l’association Aides.

Tous les interlocuteurs présents ont été intéressés par les propositions socialistes pour une déconcentration du système de santé, visant à améliorer les données sanitaires locales tout en préservant une garantie d’accès pour tous au niveau national.

Fanny Costes


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