Les dessous du pacte germano-soviétique

samedi 22 mars 2008.
 

DANS l’entreprise en cours de révision de l’histoire du XXe siècle, qui concerne en particulier le communisme, la question des rapports entre l’Union soviétique et l’Allemagne nazie occupe une place centrale. Pour certains, Staline aurait suivi, dès les années 30, une politique d’alliance, conflictuelle mais déterminée, avec Hitler. A preuve le pacte germano- soviétique, expression, selon eux, d’une stratégie offensive et non défensive. Diffusé en décembre 1996 par France 3, le film Hitler-Staline : liaisons dangereuses, réalisé par Jean-François Delassus et Thibaut d’Oiron et conseillé par l’historien Stéphane Courtois, défendait cette thèse jusqu’à la caricature. Cette nouvelle cuisine, qui a souvent recours à de vieux ingrédients, n’est pas du goût de tous les chercheurs. Par Gabriel Gorodetsky

Tard dans la nuit du 23 août 1939, au Kremlin, le commissaire du peuple aux affaires étrangères, Viatcheslav Molotov, et le ministre allemand des affaires étrangères, Joachim von Ribbentrop, signèrent un pacte de non-agression. Les protocoles secrets adoptés au cours de la seconde visite de Joachim von Ribbentrop à Moscou, le 28 septembre, divisèrent l’Europe orientale en sphères d’influence. Il est généralement admis que, en signant le pacte, les Russes ont volontairement scellé le destin de la Pologne et des pays baltes, partageant ainsi la responsabilité du déclenchement de la seconde guerre mondiale.

Certains - comme les promoteurs du film Hitler-Staline : liaisons dangereuses (lire page 23) - partent de l’idée que l’alliance avec les nazis aurait toujours été présente, implicitement, dans les plans de Staline, tandis que la politique de sécurité collective n’était, pour le dictateur, qu’un masque destiné à cacher ses desseins à l’Occident. Le film souligne les prémices idéologiques de la stratégie stalinienne : dès 1927, le secrétaire général du PC soviétique était déterminé à manoeuvrer avec les puissances capitalistes pour les entraîner dans une guerre de destruction interimpérialiste. L’URSS en serait sortie indemne et en position d’étendre son territoire. Et c’est prétendûment pour provoquer cette guerre que Staline aurait contribué à l’accession au pouvoir de Hitler en poussant la politique du Komintern et du Parti communiste allemand sur une voie suicidaire.

A la vérité, les sentiments et les sympathies idéologiques pesaient peu sur l’orientation de la politique étrangère de Staline. En dépit de son système despotique de gouvernement, sa stratégie apparaît, avec le recul, comme relativement rationnelle et équilibrée : une Realpolitik dénuée de scrupule. Sa doctrine, qui aurait eu l’aval de Machiavel, avait pour seul objectif la mise en oeuvre de sa conception des intérêts de la sécurité nationale de la Russie.

A la recherche d’une aiguille dans une botte de foin, le documentaire évoqué enfle démesurément, par exemple, les négociations sans réelle portée menées par David Kandelaki, chef de la mission commerciale à Berlin en 1937-1938 (1). L’ambassadeur russe à Berlin assurait pourtant à Maxime Litvinov, commissaire aux affaires étrangères jusqu’en mai 1939, que « les rumeurs d’un rapprochement éventuel avec l’Allemagne [étaient] dénuées de fondement ». « Nous n’avons conduit ni ne conduisons aucune négociation avec les Allemands (2) », ajoutait-il. Et rien ne prouve que Staline ait agi dans le dos de son ministre des affaires étrangères. En fait, ces contacts secrets ont été, dans une large mesure, suscités par le lobby allemand - gros industriels et fonctionnaires de la Wilhelmstrasse -, toujours soucieux de ressusciter l’Ostpolitik. Du côté russe, ils constituèrent une pitoyable tentative de contrer les éléments antisoviétiques au ministère allemand des affaires étrangères (3).

Il est plus tentant d’attribuer le changement à la désillusion soviétique à l’égard de l’Occident après la conférence de Munich, en septembre 1938. L’exclusion de l’URSS de cette conférence et la liberté d’action donnée à l’Allemagne en Tchécoslovaquie étaient de nature à confirmer le sérieux soupçon soviétique selon lequel Neville Chamberlain et Edouard Daladier étaient déterminés à détourner le danger allemand en encourageant Hitler à une expansion à l’est. Mais cette interprétation ne prend pas en compte un fait : en dépit du coup sévère porté à la politique de sécurité collective, Staline ne considérait pas Munich comme irréversible. De plus, il n’avait pas d’autre réponse, alors que Hitler, lui, pouvait miser sur une soumission accentuée de l’Occident. Même le fameux avertissement lancé aux démocraties occidentales en mars 1939 = selon lequel l’URSS n’avait aucune intention de « tirer les marrons du feu » pour leur compte = ne marqua pas un changement de position soviétique. Une analyse superficielle du texte complet de ce discours suffirait à montrer que Staline rejetait l’idée de Lénine de la guerre révolutionnaire et craignait qu’une guerre mondiale ne constituât une menace pour la Russie.

Ce sont en fait les garanties unilatérales données par la Grande-Bretagne à la Pologne, le 31 mars 1939, qui ouvrirent la voie au pacte Ribbentrop-Molotov et au déclenchement de la seconde guerre mondiale (4). Il s’agissait d’une réaction émotionnelle et spontanée à l’humiliation que Hitler infligea à Chamberlain en s’emparant de Prague, le 15 mars 1939. Paradoxalement, en garantissant la sécurité de la Pologne, Londres provoqua l’Allemagne et perdit la position, qu’elle détenait jusque-là, de pivot de l’équilibre des forces en Europe. Ces garanties offertes à Varsovie pouvaient avoir deux conséquences. Soit elles avaient un effet dissuasif, et Hitler devait revenir à la table de négociations. Soit, s’il maintenait ses revendications territoriales sur la Pologne, et pour respecter l’axiome militaire découlant des leçons des guerres précédentes - la nécessité d’éviter une guerre sur deux fronts -, le chancelier devait impérativement neutraliser l’Union soviétique.

Du coup, une option allemande, jusqu’ici inexistante, s’ouvrait à Moscou. Inversement, lorsque Chamberlain commença à comprendre que le chemin vers un second Munich était incertain et que le déclenchement de la guerre demeurait une possibilité réelle, il dut, à contrecoeur, s’assurer, au moins en apparence, de l’engagement - vital pour l’application des garanties - de l’armée soviétique. Ainsi, c’est l’Union soviétique qui devint, sans l’avoir voulu, le pivot de l’équilibre des forces en Europe.

Surfant sur la vague de notre mémoire collective hésitante, certains historiens révisionnistes ne présentent ce pacte inattendu que sous sa nature perfide. Or les mythes du coup de poignard dans le dos et du plan prémédité ont été construits autour de lectures simplistes des événements ayant conduit au pacte. Conformes au modèle totalitaire dominant dans les années 50, ces visions cherchèrent à établir l’existence d’une communauté d’intérêts et d’affinités politiques entre les régimes nazi et communiste, tous deux menaçant gravement la démocratie et la civilisation occidentale.

En réalité, le Foreign Office reconnut, dès avril 1939, les conséquences logiques des garanties britanniques. L’ambassadeur de Sa Majesté à Moscou, Sir William Seeds, par exemple, leur reprocha d’avoir suscité chez Staline la tentation, tout à fait compréhensible dans les circonstances nouvelles, de « se tenir à l’écart et, en cas de guerre, de limiter son soutien au commerce fructueux de matériels aux victimes de l’agression ». Et d’anticiper l’accord de l’Allemagne et de la Russie sur l’avenir des Etats baltes et de la Bessarabie. A l’instar du sous-secrétaire d’Etat français aux affaires étrangères, Vansittart, qui admit à contrecoeur : « Maintenant que le gouvernement de Sa Majesté a donné ses garanties, le gouvernement soviétique va s’asseoir et se laver les mains de toute cette affaire (5) . »

Dès ce moment, face à l’attitude de Londres, Staline aurait donc pu théoriquement se compromettre avec les Allemands. Mais il ne faut pas perdre de vue que la constante de la politique étrangère soviétique pendant l’entre-deux-guerres plonge ses racines dans l’intervention militaire alliée en Russie en 1920-1921. D’où une profonde méfiance à l’égard de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne, qui pourraient faire bloc et lancer une croisade contre la Russie communiste.

Depuis le 31 mars, Staline faisait face à un grave dilemme qui n’avait pas grand-chose à voir avec ses penchants idéologiques : prudent et pragmatique dans la conduite des relations internationales, le maître du Kremlin était hanté par la crainte que Londres, en dépit de ses garanties, n’abandonnât la Pologne comme elle l’avait fait pour la Tchéco-slovaquie, facilitant ainsi une agression allemande sur le front oriental. En même temps, il avait pleinement conscience que, en cas d’incapacité de la Grande-Bretagne à répondre à une invasion allemande de la Pologne, l’Allemagne pouvait violer un éventuel accord et poursuivre sa poussée vers l’est. Ce pronostic le conduisit à tenter désespérément de convaincre la Grande- Bretagne de remplacer les garanties unilatérales accordées à la Pologne par une alliance militaire contractuelle entre la Russie et l’Occident. Ce qui ne l’empêcha pas de sonder l’Allemagne.

Pendant les négociations, qui traînèrent presque cinq mois, Londres et Moscou explorèrent différentes possibilités d’accords. Au cours des années 30, l’Union soviétique voulait obtenir sa sécurité à travers l’établissement d’une zone tampon comprenant, du nord au sud, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne, la Roumanie et la Bulgarie, et ce par le biais d’accords d’assistance mutuelle avec ces Etats, soutenus par l’Angleterre et la France. Ces projets avaient pour caractéristique principale de définir sans ambiguïté les mesures militaires à prendre par chacun des belligérants une fois la guerre déclenchée. Et ils supposaient une véritable menace allemande et l’inévitabilité de la guerre.

Cette démarche reposait sur des renseignements fiables arrivés sur le bureau de Staline. L’information la plus importante apparut en août 1938 : une source sûre, implantée chez Hermann Göring, décrivait avec force détails les plans militaires de l’Allemagne présentés par le maréchal du Reich au maréchal Gerd von Rundstedt, le commandant du groupe d’armées qui allaient envahir la Pologne, et aux autres officiers supérieurs. La cible était clairement l’Est : « L’Allemagne, précisaient-ils, n’a pas besoin de colonies en Afrique, mais en Europe de l’Est ; elle a besoin d’un grenier = l’Ukraine (6). » « Effet apaisant » et dissuasion

A partir de mai 1939, Staline reçut un flot constant de renseignements sur les intentions de Hitler d’attaquer la Pologne sans se soucier des réactions occidentales. Les Allemands semblaient penser que la guerre resterait localisée, et cela dut inquiéter particulièrement Staline, qui ne comptait guère sur l’intervention de la Grande-Bretagne et de la France avant le déclenchement des hostilités (7).

Les garanties données par Londres à la Pologne, que Staline interprétait correctement, tentaient de préserver les principes fondamentaux de la politique d’« apaisement » à l’égard de Hitler en cherchant à dissuader les Allemands. Elles ne pouvaient donc satisfaire les besoins fondamentaux de la sécurité soviétique. Dès le début, Lord Halifax, le secrétaire au Foreign Office britannique, souhaita une coopération russe limitée à une fastidieuse déclaration selon laquelle, « en cas d’agression contre un voisin européen de l’Union soviétique et auquel ce pays résisterait, l’assistance du gouvernement soviétique serait accordée si le désir en était exprimé et serait fournie suivant le mode le plus approprié ». Il en attendait « un effet apaisant sur la situation internationale (8) », « effet apaisant » étant ici synonyme de dissuasion.

Lord Halifax évolua à pas comptés au cours de l’été 1939 pour tenir compte des demandes soviétiques. Mais une telle alliance se révéla difficile à conclure, en raison du refus des Polonais d’envisager ne serait-ce qu’un transit des troupes soviétiques sur leur territoire en cas de guerre, et de la répugnance de Londres à reconnaître l’Union soviétique comme son principal allié en Europe orientale.

La position rigide de la Grande-Bretagne conduisit Staline, par pur calcul, à explorer une autre voie à travers le dialogue avec les Allemands. La décision finale s’imposa pratiquement à lui le 19 août 1939, lorsqu’il reçut un remarquable rapport de renseignement sur les objectifs de Hitler à long et à court terme. Selon ce rapport, le Führer était déterminé à « résoudre » le problème polonais quel qu’en fût le coût, sans se soucier d’avoir à combattre sur deux fronts. Il comptait sur l’URSS pour « conduire des négociations avec [Berlin], puisqu’elle n’a aucun intérêt dans un conflit avec l’Allemagne et qu’elle n’est pas moins inquiète d’être vaincue au nom des intérêts de l’Angleterre et de la France ». Ceux qui entretiennent l’idée d’une communauté de destin nouvellement formée entre Moscou et Berlin devraient le noter : bien que préconisant « un nouveau Rapallo, étape d’un rapprochement et d’une collaboration économique avec Moscou », le rapport soulignait la nature éphémère de ce « second Rapallo », qui devait être poursuivi « pendant une période limitée » d’environ deux ans (9). Staline ne pouvait donc l’ignorer.

En fait, depuis Munich, les Allemands maîtrisaient manifestement les événements. Loin de pouvoir lancer une agression contre eux, Staline - comme d’ailleurs les Britanniques - devait répondre à des demandes allemandes équivalant à un ultimatum. De son épais crayon bleu, Staline souligna le « conseil » de Hitler d’accepter la proposition d’accord, car le comportement de la Pologne à l’égard de l’Allemagne était tel qu’ « une crise pouvait avoir lieu n’importe quand ». Hitler commentait plus loin qu’il serait prudent pour Staline de « ne pas perdre de temps (10) ». L’alliance trouva sa justification lorsque Staline comprit que la délégation militaire franco-britannique, arrivée à Moscou par bateau au cours de la deuxième semaine d’août, était dépourvue d’instructions et ne disposait d’aucun pouvoir. Elle devait, en permanence, consulter Londres et Paris.

Staline exploita les occasions à chaque fois qu’elles se présentèrent. Pendant la majeure partie des années 30, cherchant ainsi à protéger la Russie d’une guerre désastreuse, il adhéra à la politique de sécurité collective jusqu’à ce que, à la fin de la décennie, il ne croie plus à son succès. Sachant que le maître du Kremlin soupçonnait en permanence - et de manière compréhensible - la Grande-Bretagne et l’Allemagne de vouloir se réconcilier, on peut douter qu’il ait considéré le pacte germano-soviétique comme une garantie sérieuse des frontières occidentales de la Russie. Loin de conduire à une fraternité « par le fer et le sang » avec l’Allemagne, ou à la renaissance du rêve depuis longtemps oublié d’une expansion sans limite, ce pacte reflétait surtout la relative faiblesse de la Russie et la claire conscience qu’elle serait forcée, au bout du compte, d’affronter l’Allemagne sur le champ de bataille. Staline opta pour le moindre des deux maux.

La condamnation des historiens révisionnistes est inspirée par un jugement moral sur les protocoles secrets qui permirent la division de la Pologne et l’occupation des pays baltes. Mais, dans leur jugement, les historiens se doivent de saisir l’esprit du temps. Comme l’a observé un spécialiste avisé, « le Kremlin menait une diplomatie qui n’était ni morale ni idéologique. La politique de Moscou, comme celle des démocraties, n’était ni pure et noble ni diaboliquement rusée (11) ».

Gabriel Gorodetsky (Le Monde diplomatique Juillet 1997)

Historien, directeur du Centre russe, université de Tel-Aviv, auteur du livre : Stalin and the German Invasion of Russia, Yale University Press (à paraître).

(1) Pour trouver une approche similaire à celle du film cité, voir Evgueni Gnedin, Katastrofa i vtoroe rozhdenie, Fond im. Gertsena, Amsterdam, 1977, et, dans une version plus subtile, Jiri Hochman, The Soviet Union and the Failure of Collective Security, 1934-1938, Ithaca : Cornell University Press, Londres, 1984, pp. 124 et 171. Voir aussi Vojtech Mastny, Russia’s Road to the Cold War : Diplomacy, Warfare and the Politics of Communism (1941-1945), Columbia University Press, New York, 1979, et Robert Tucker, Stalin in Power : The Revolution from Above, 1928-1941, Norton, New York, 1990, chapitres 10-21.

(2) Cité dans l’excellente analyse de ces contacts élaborée sur la base des archives russes in N. A. Abramov et L. A. Bezymensky, « The Special Mission of David Kandelaki », Voprosy Istorii, nos 4-5, 1991, Moscou, p. 152.

(3) Ingeborg Fleischauer, Der Pakt : Hitler, Stalin und die Initiative der deutschen Diplomatie, 1938-1939, Ullstein, Berlin, 1990, et Geoffrey Roberts, The Unholy Alliance : Stalin’s Pact with Hitler, Tauris, Londres, 1989, chapitre 5.

(4) Voir le travail, qui fait autorité, d’Anita Prazmowska, Britain, Poland and the Eastern Front, 1939, Cambridge University Press, 1987, et son article « The British Guarantee to Poland of March 1939 », European History Quarterly, no 14, 1984.

(5) E. L. Woodward (sous la direction de), Documents on British Foreign Policy, 1919-1939, 3e série, vol. V, Londres, 1952, p. 104.

(6) Archives privées de Dimitri Volkogonov, « The Estimate of the Intelligence Services of the General Staff on the Plans and State of the Armed Forces and the Possible Outbreak of World War II ».

(7) Archives militaires de la Fédération de Russie (AMFR), 9157/2/350-360, « Information de Proskurev à Staline sur les plans allemands d’agression obtenus par Kleist », 17 mai 1939.

(8) Documents on British Foreign Policy, 1919-1939, 3e série, vol. V, pp. 205-206.

(9) AMFR, 9157/2/418- 431. L’interception des télégrammes de Werner von Schulenburg, ambassadeur allemand à Moscou, qui étaient ainsi fournis à Staline confirma l’information. Voir par exemple 9157/2/447, 453-454.

(10) Dimitri Volkogonov, Stalin : Triumph and Tragedy, Grove Weidenfeld, New York, 1991. Voir aussi « Alternativy 1939-go », Izvestia, 21 août 1989. Une autre interprétation éclairante est « Ribbentrop- Molotov », Voprosy Istorii Kpss, no 8, 1988.

(11) Teddy J. Uldricks, « Evolving Soviet Views of the Nazi-Soviet Pact », in Richard Frucht (sous la direction de), Labyrinth of Nationalism : Complexities of Diplomacy, Slavica Publishers, Colombus, Ohio, 1992, pp. 331-360.


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