« RASSEMBLER A GAUCHE" (texte en ligne de la motion socialiste d’orientation présentée par Laurent Fabius, Jean Luc Mélenchon, Marie Noelle Lienemann, André Laignel, Alain Vidalies...)

samedi 1er octobre 2005.
 

Introduction : Rassembler à gauche .

I - Comprendre : pour sortir du libéralisme, le socialisme de transformation

Les « deux France » dans les urnes

Tirer les leçons du 29 mai

A l’écoute de notre base sociale

Dans le monde, l’impasse du libéralisme ; en France, l’échec de la droite

Le capitalisme financier veut coloniser la planète

L’Europe malade du libéralisme

La droite met la France en échec, nous sommes en état d’urgence politique

De nouveau, convaincre que le socialisme est pleinement utile

Notre socialisme : la transformation plutôt que le simple accompagnement

II - Vouloir : les chemins du changement

Face à la mondialisation libérale, l’Europe sociale, puissante et démocratique

2007, rendez-vous avec l’Europe et la mondialisation L’Europe est confrontée aujourd’hui à plusieurs crises

Notre projet pour l’Europe

Nous battre pour un monde plus solidaire

Face à l’urgence : le progrès social

Le plein-emploi est possible ; la hausse du pouvoir d’achat est nécessaire

Face au chômage, agir pour la croissance

Soutenir la consommation par les salaires et le pouvoir d’achat

La réduction du temps de travail doit profiter à tous les salariés

Des protections renforcées contre la précarité

Soutenir nos entreprises, lutter contre les délocalisations

Déployer notre économie vers les industries de pointe et les services

Défendre la sécurité sociale ; conquérir de nouveaux droits

Un égal accès à des soins de qualité pour tous, une présence médicale plus équilibrée sur le territoire

Un niveau décent pour les retraites

Pour une prise en charge solidaire des dépendances

Une politique familiale redistributive, une enfance mieux protégée

Le logement est un droit, rendons-le effectif

Enrayer la hausse des loyers

Construire 120 000 logements locatifs sociaux par an

Instaurer une garantie mutuelle locative

De meilleurs logements pour construire la ville du développement durable

Sauver l’école publique ; remettre notre université et notre recherche au premier rang

Répondre aux défis de l’Ecole : démocratisation, massification et refus de la marchandisation

Avec les enseignants

Un « plan universités 2010 »

Mobilisation nationale pour la recherche

Contre le moins d’Etat, la puissance publique au service de l’intérêt général

La solidarité et l’égalité passent par les services publics

Nous sommes partisans d’un Etat volontariste

Porter un coup d’arrêt au démantèlement des services publics

Pour une société durable, la social-écologie

Une fiscalité juste et redistributive

Contre le libéral-communautarisme, la République pour tous

Refonder le pacte républicain

Vive la laïcité, halte aux discriminations

L’égalité réelle pour l’Outre-Mer

Réaliser les espoirs des jeunes

Clarifier notre politique d’immigration

Faire vivre la mixité et la parité

Les sécurités, c’est d’abord la sécurité des personnes, des biens et du pays

Pour une nouvelle République

La démocratie jusqu’au bout

Contre le démantèlement de l’État républicain, une vraie démocratie territoriale

Une grande loi sur la démocratie sociale

Démocratie culturelle et audiovisuelle

III - Rassembler : pour gouverner à gauche, un parti fort, des alliances claires

Les dangers qui pèsent sur notre Parti socialiste

Les engagements non tenus

Nos propositions pour un Parti populaire, fort, rénové et ouvert

Etre clairs sur le choix de nos alliances pour bâtir un pacte de changement

Nous voulons construire l’alternative avec toutes les forces de progrès

Conclusion : le rassemblement est la condition du changement

Répondre à l’espérance

Sortir la France et l’Europe de la crise

Un grand dessein de progrès

La social-écologie : un nouvel horizon pour tous les socialistes

Produire et innover pour remettre la France en marche


Introduction : rassembler à gauche

Le rôle des socialistes n’est pas de disserter sur le désespoir des Français, il est de répondre concrètement à leur espérance.

Notre motion commune s’appelle « rassembler à gauche ». Ce titre indique clairement l’analyse qui est la nôtre et les choix que nous proposons à tout le parti socialiste pour le Congrès du Mans. Ils peuvent se résumer en quelques lignes. La France est en panne. La France est en crise. La vie est dure pour beaucoup de nos concitoyens  : chômage, précarité, logement hors de prix, transports et énergie de plus en plus chers, services publics démantelés, environnement dégradé. La droite au pouvoir est en train de démolir systématiquement notre socle social et républicain (retraites, sécurité sociale, code du travail, éducation nationale, impôt progressif sur le revenu, etc.). Pour de nombreux Français, le présent est morose et l’avenir bouché : c’est la notion même d’un progrès possible qui est mise en doute, pour soi, pour ses enfants, pour son pays. L’Europe ne va pas mieux, impuissante dans la mondialisation libérale et sans projet alternatif. Il faut agir et agir vite !

En lisant les contributions préparatoires à ce Congrès, en participant aux premiers débats, nous constatons que beaucoup d’éléments de pensée et d’action - heureusement - nous rassemblent. Notamment, la conviction que, face à la droite et aux régressions qui l’accompagnent, la France a besoin d’un nouveau grand dessein de progrès. Autour de nos valeurs qui s’appellent justice, égalité, démocratie, laïcité, culture. C’est au socialisme de tracer ce projet. Un socialisme qui, malgré des déceptions et parfois des échecs, continue de porter l’espérance d’une vie meilleure pour des millions de femmes et d’hommes en France et dans le monde.

Parmi les points d’accord que nous avons entre nous, citons-en tout de suite deux, essentiels. D’abord, l’importance et l’urgence de la question écologique. Les dérèglements climatiques, la multiplication des problèmes de santé liés aux pollutions, les effets dévastateurs de l’agriculture intensive, la réduction de la biodiversité, tout cela ne relève pas de films catastrophes : c’est devant nous ou plutôt déjà là, et cela va encore se détériorer si nous ne changeons pas profondément la donne. L’origine de cette course folle est le mode de développement libéral productiviste. Il sacrifie le long terme au court terme, le durable au tout-jetable, célèbre la marchandisation plutôt que le service public, pratique (et encore pas toujours) la réparation plutôt que la prévention. Cette mécanique destructrice pénalise d’abord les plus faibles et les couches populaires ; elle frappe désormais aussi une large part des couches moyennes. Nous ne pouvons pas l’accepter. Nous ne devons pas l’accepter. C’est la question cruciale de la solidarité en France, dans le monde, et avec les générations futures, qui est posée. Une nouvelle synthèse entre le social et l’écologie, un nouveau mode de développement, est devenu vital. Pour notre part, nous avons depuis longtemps insisté sur cette social-écologie indispensable. Mais nous soulignons que, pour être tout à fait crédible, le PS doit être plus clair qu’il ne l’a été, y compris dans la dernière période, sur des questions essentielles comme les OGM ou le nucléaire. Nous considérons que l’écologie et l’environnement doivent être parmi les fondements du projet des socialistes, sur la base d’une social-écologie intégrant vraiment l’objectif du développement humain. Cela entraîne des propositions précises recensées plus loin.

L’autre aspect sur lequel l’accord entre nous tous est probable, c’est l’importance de la production, de l’innovation, de l’entreprise, dans notre projet pour la France. On présente souvent du socialisme une vision caricaturale. Nous voudrions, prétend la droite, répartir ce qui n’a pas été produit, multiplier les réglementations inutiles, paralyser plutôt qu’entraîner. Nous ne comprendrions rien à la société moderne. C’est une caricature, une mauvaise caricature ! Pour nous tous, l’avenir s’appelle éducation, formation, recherche, investissement, création. Nous connaissons les réalités de l’entreprise. Nous savons son rôle décisif. Nous mesurons tout ce qu’il faudra modifier pour appuyer son développement, en particulier dans les petites entreprises. Pour autant - et nous insistons en ce qui nous concerne sur cet aspect - nous ne séparons pas l’économique du social, la production de la répartition, le souci d’efficacité et la nécessité d’être justes. Nous n’oublions à aucun instant le déséquilibre criant du partage entre travail et capital, ni les conséquences de la mondialisation libérale actuelle, c’est-à-dire une gigantesque machine à démanteler les avancées sociales, les règles sanitaires et environnementales, les identités nationales et finalement le pouvoir des Etats et des peuples eux-mêmes. Socialistes français, nous n’avons pas une vision passéiste de la France, de l’Europe et du monde. Au contraire, nous portons une vision dynamique, moderne, du contexte dans lequel agir et des changements à mettre en œuvre. Sur ces domaines, nous pensons que nous sommes largement d’accord entre nous tous. En revanche, sur les points qui suivent, il existe, croyons-nous, des différences d’approche, voire des divergences, qui ne menacent cependant pas notre unité. C’est le rôle d’un Congrès de les vérifier et, si nécessaire, de les trancher.

1. Si nous avons choisi comme titre de cette motion « rassembler à gauche », c’est d’abord parce que nous voulons un PS ancré résolument à gauche dans sa critique contre le libéralisme et contre le gouvernement. Certes, tous les socialistes sont opposés aux orientations réactionnaires de la droite, mais nous pensons que le PS doit faire entendre sa voix de premier opposant du pays beaucoup plus fortement. Nous sommes un parti qui a vocation à gouverner et à tenir au pouvoir ce que nous avons promis avant d’y accéder. Mais, face à cette droite de démolisseurs, il nous faut être clairs, c’est ce que nos électeurs nous demandent : le PS doit adopter une ligne d’opposition frontale.

2. « Rassembler à gauche », cela doit se traduire aussi dans les propositions du PS. Pour l’instant, celles-ci sont parfois floues, en tout cas perçues ainsi. Nous proposons de fixer quatre objectifs prioritaires à notre projet, et pas quarante, correspondant aux quatre principales préoccupations concrètes des Français. Ce sont : l’emploi et le pouvoir d’achat ; le logement ; la formation et la recherche ; les protections (sociale, sanitaire, environnementale et de sécurité publique) et le service public. Nous proposons que l’ensemble de notre projet soit tourné vers ces priorités, que nous voulons mettre en œuvre progressivement autour des choix d’une Europe sociale, d’une République nouvelle et d’un développement humain. C’est ainsi que nous serons en phase avec notre électorat au lieu d’en apparaître souvent isolés.

3. Nous voulons rassembler le plus grand nombre de militants socialistes sur cette ligne. Et les rassembler vraiment. Certes, nous n’ignorons pas le poids des habitudes au sein de notre Parti et parfois même des pressions, mais nous croyons possible ce rassemblement nouveau. La démarche de rassemblement, nous l’avons suivie nous-mêmes, puisque notre motion commune a été élaborée à partir de différentes « contributions », générales et thématiques, et à partir de « sensibilités » diverses. Parmi nous, il y a beaucoup de camarades qui étaient partisans du « non » au référendum sur la Constitution européenne le 29 mai, mais il y en a aussi beaucoup qui ont voté « oui ». Il y a des camarades qui ont appartenu à l’ancienne majorité du PS comme aux anciennes minorités. Il faut savoir dépasser les clivages anciens. Nous voulons aller au-delà de ce premier rassemblement. Cela signifie que nous refusons de pratiquer ce qu’il faut bien appeler un chantage à la scission du PS ou de lancer des exclusives. Nous voulons à la fois clarifier la position à gauche du PS et opérer un rassemblement autour de cette orientation nouvelle. Cela doit déboucher sur une majorité nouvelle.

4. Stratégiquement, nous pensons qu’on ne peut battre la droite qu’en rassemblant la gauche, et rassembler la gauche que sur une ligne de gauche. Les élections allemandes viennent de confirmer que cette analyse ne concerne pas que les socialistes français. C’est évidemment le PS qui doit définir la ligne du PS. Ce serait un mauvais procès de prêter à des socialistes une logique différente. Comme s’il s’agissait d’aller demander à d’autres de décider à notre place, ou d’encourager la division de la gauche ! Mais pour nous, la ligne politique du PS ne doit pas être coupée de notre base sociale et des formations qui l’incarnent, sinon elle entraînera la déception et la défaite. Or ce risque de coupure existe, on l’a bien vu dans plusieurs scrutins, en France et chez nos partenaires européens. Nous voulons, là aussi, rester à l’écoute de nos électeurs, tirer les leçons de l’expérience et continuer, si nous accédons au pouvoir, à pratiquer cette écoute, ce dialogue, qui, reconnaissons- le, n’a pas toujours eu lieu dans le passé. Nous refusons aussi toute conception hégémonique du PS et nous ne nous retrouvons pas dans le projet parfois évoqué d’un parti unique de la gauche. Nous rejetons la répétition de pratiques antérieures consistant à soustraiter à chaque formation politique un rôle en fonction d’une « dominante » (aux Verts l’écologie, aux communistes le social, aux radicaux la laïcité, etc.) ; ce serait une erreur !

Nous voulons établir avec toutes les formations de gauche qui l’accepteront un contrat de majorité pour gouverner ensemble, un contrat où les droits et les devoirs de chaque partenaire seront définis. Nous excluons que le PS gouverne avec des Partis de droite ou du centre. Nous souhaitons que ce soit un engagement explicite du Congrès.

5. Le Congrès du Mans doit respecter les militants et les électeurs. Le premier respect, c’est la clarté du projet. Nous pensons qu’on doit être à la fois audacieux et responsable. Il n’y a pas de rassemblement possible à gauche sans un projet clairement à gauche. Dans cet esprit, nous avons recensé plusieurs mesures importantes que nous proposons, pour lesquelles il existe, semble-t-il, des différences entre socialistes. Il faut donc trancher. C’est aux militants, et à personne d’autre à leur place, d’en décider librement.

•Le pouvoir d’achat. Quelle est la situation liée à la politique de la droite ? Faute de pouvoir d’achat suffisant pour les revenus du travail, la consommation stagne ; faute de consommation, la croissance est faible ; faute de croissance, le chômage reste massif. Nous voulons rééquilibrer le partage des revenus entre capital et travail. La question du pouvoir d’achat est centrale. Nous avons, sur ce plan, déçu un certain nombre de nos soutiens dans le passé. Elle ne doit pas être éludée. Nous proposons, parmi d’autres décisions soumises à concertation avec les partenaires sociaux, une augmentation sensible du SMIC. Il est aujourd’hui à 1217 Euros pour 35 heures. Il devrait se situer autour de 1270 Euros en 2007. Par une revalorisation régulière, nous proposons de porter le SMIC avant la fin de la prochaine législature entre 1400 et 1500 Euros. C’est à la fois une condition de la justice sociale et de la relance économique. Cette revalorisation devra s’accompagner d’une réforme des impôts et des cotisations sociales, liée aussi à une refonte de la prime pour l’emploi. Certains envisagent une augmentation de la TVA. Nous refusons, nous, cette augmentation de la TVA parce qu’elle amputerait de façon injuste le pouvoir d’achat des plus pauvres. Revaloriser le pouvoir d’achat comme nous le proposons, c’est aussi donner tout son sens à la « valeur travail » : nous sommes attachés à cette valeur et c’est dans cet esprit que nous luttons fermement contre la politique de la droite, qui raréfie le travail et rabote sa rémunération.

• Les retraites. Les gouvernements de droite, sous prétexte de « réformer » les retraites, les ont gravement mises en cause sans régler à long terme les problèmes financiers. Dans les permanences, sur les marchés, partout, chacun constate une préoccupation grandissante de nos concitoyens : quel sera le niveau de ma pension ? Pour les plus modestes et pour ceux qui ont exercé les métiers les plus durs, retraité risque de signifier pauvreté. Nous ne pouvons pas accepter une telle régression qui nous ramènerait finalement à ce qu’était la situation des retraités pauvres dans les années 1960 ! Nous n’ignorons évidemment pas les problèmes de financement et nous pensons qu’il faut, en responsabilité, les aborder. Nous proposons d’être clairs sur nos priorités. Notre objectif sera de soutenir le pouvoir d’achat des retraités les plus modestes. S’agissant de la durée des cotisations, il faudra mieux prendre en compte la pénibilité des emplois occupés au cours de la vie active et les inégalités d’espérance de vie entre les différentes catégories socioprofessionnelles. Nous abrogerons la loi Chirac - Fillon, ouvrirons la négociation, revaloriserons les petites retraites et financerons les besoins nouveaux par une cotisation assise sur tous les revenus. Nous devrons être conscients des lourdes conséquences du passage aux 25 annuités sur le niveau des pensions liées à l’application des décrets Balladur, en particulier pour les retraités ayant connu une carrière professionnelle marquée par le chômage et la précarité. La question du calcul des pensions sur les 10 meilleures années, d’abord pour ces salariés, devra être abordée dans la discussion que nous engagerons avec les partenaires sociaux. C’est cette position, garantissant vraiment la pérennité des retraites par répartition, que nous proposons au PS dans les discussions à venir avec les autres formations politiques et avec les syndicats.

• Le logement. La situation relève de l’état d’urgence. Relégués souvent dans les immeubles insalubres des grandes villes, les plus pauvres sont exposés à l’insécurité du logement. Les terribles incendies de l’été dernier l’ont montré. Mais c’est l’ensemble de la France populaire et des couches moyennes pour qui il devient chaque jour plus difficile de se loger : loyers et foncier trop chers, offre trop rare, charges qui explosent. Comme nous l’avons demandé depuis longtemps, nous souhaitons que le logement soit au cœur de nos propositions. De retour au gouvernement, nous mobiliserons tous les moyens de la puissance publique, de la Caisse des dépôts et consignations, des collectivités locales, des bailleurs, des acteurs privés, afin de faire du droit effectif au logement une grande cause nationale. Nous limiterons la hausse des loyers à celle des prix à la consommation. En échange de facilités de financement pour les bailleurs HLM, nous plafonnerons les loyers sur plusieurs années. Nous revaloriserons les aides individuelles. Nous fixerons à la nation l’objectif de 120 000 logements sociaux nouveaux construits chaque année afin de lutter contre la crise du logement et contre le chômage - un logement bâti, ce sont trois emplois créés. Nous agirons contre la spéculation foncière notamment par la mise à disposition de terrains publics. Nous réaffirmerons la nécessité d’une véritable mixité sociale. Afin que cet engagement ne soit pas un vœu pieux, nous proposons notamment de supprimer toute subvention publique, quel que soit le projet d’équipement concerné, aux communes qui refuseront de s’engager dans la construction de 20 % de logements sociaux contrairement à la loi. La fiscalité immobilière obéira à un principe clair : pas d’avantage consenti sans contrepartie sociale précise. Un système de garantie mutuelle locative permettra de remettre sur le marché un plus grand nombre de logements inoccupés et de mieux défendre les locataires tout en garantissant les propriétaires. Avec une telle mobilisation, les choses bougeront !

• Les services publics. A la lumière de notre expérience et de notre analyse des évolutions actuelles, nous sommes probablement tous d’accord pour réclamer un Etat puissant, efficace et qui lutte contre les injustices territoriales et les inégalités. Nous croyons au rôle stratégique et régulateur de l’Etat. Nous voulons rétablir, au sens vrai, l’autorité de l’Etat et de ceux qui le servent. La catastrophe de Louisiane, aux Etats- Unis, vient de montrer, une fois de plus, les ravages d’une politique d’Etat minimal que la droite française prend pour modèle. Encore faut-il traduire cette conviction concrètement. Là où la droite privatise EDF et GDF, nous considérons, nous, que le secteur de l’énergie sera de plus en plus stratégique, avec des exigences de sécurité particulières liées au nucléaire et une exigence vitale de diversification et d’économie des énergies. Nous stopperons donc immédiatement l’ouverture du capital dans l’énergie. Notre objectif sera ensuite une reconquête, nécessairement progressive compte tenu des données financières, de la propriété publique d’EDF. Une partie des bénéfices de l’entreprise sera consacrée au rachat des actions. Pour l’eau, autre bien public vital, nous pensons que ce secteur devra faire l’objet d’une régulation publique et d’une vraie transparence de gestion et nous nous engageons à agir ainsi. Dans cet autre domaine essentiel qu’est la santé publique, les inégalités sociales et territoriales dans l’accès aux soins se creusent ; nous proposons, parmi d’autres dispositions évoquées plus loin, que pendant les cinq premières années d’exercice de sa profession, tout médecin débutant soit tenu de respecter l’équilibre du territoire (zones rurales, petites villes, quartiers difficiles, etc.) dans le choix de son lieu d’installation. Ces propositions illustrent l’importance fondamentale que nous attachons à un meilleur équilibre du territoire et au rôle clé des services publics. Certains ne les partagent sans doute pas : nous les soumettons aux militants pour décision.

• L’Éducation, l’Université et la Recherche. Nous voulons bâtir une société éducative et laïque, car c’est la clé d’un avenir de progrès. Nous n’y parviendrons pas sans les enseignants mais au contraire avec eux. La marchandisation des savoirs a commencé en France comme dans le monde. Le combat pour défendre l’école publique est permanent et la droite n’a nullement renoncé à privilégier le privé. Nous faisons de l’école publique la clé de l’égalité, qui pour nous est le cœur même de la République. Contre un certain conformisme facile, nous apportons notre soutien aux enseignants et à la communauté éducative parce que nous mesurons la difficulté de leur mission et nous récusons l’attitude de mépris envers la communauté éducative qui a pu être ressentie à certains moments dans le passé et qui nous a fait tant de mal. Nous affichons des objectifs précis et prioritaires : la loi Fillon sur l’école sera immédiatement abrogée, le budget de l’éducation nationale redeviendra le premier de la nation, un « plan universités 2010 » sera mis en œuvre, une loi-programme sur la recherche scientifique sera adoptée en accord avec le Collectif national de la recherche. L’effort de la nation en faveur de la recherche et de l’innovation devra être porté à 3 % du PIB. Une autre loi-programme sur l’organisation et le développement des enseignements professionnels et technologiques sera mise en débat dans les Régions et présentée devant le Parlement.

• Les mesures que nous proposons ont un coût. Nous en sommes d’autant plus conscients que la droite laissera en 2007 nos finances publiques dans un état catastrophique. Le financement de nos priorités constitue donc un enjeu important. Le retour de la croissance pour l’emploi, objectif numéro un de notre politique économique, devra permettre de dégager des marges de manœuvre. Ce sera aussi le but de l’annulation des baisses d’impôts Villepin-Sarkozy et de la remise en cause d’avantages fiscaux et d’exonérations sociales. Des recettes nouvelles seront dégagées par la réforme de l’impôt sur le revenu, du financement de la sécurité sociale et des mesures ciblées de taxation (comme par exemple l’abus des contrats précaires). Comme nous l’avons indiqué, plusieurs de nos mesures seront nécessairement étalées dans le temps. Ainsi, nous pourrons financer nos priorités sans reporter la charge sur les générations futures. Nous devons être responsables, nous devons aussi être ambitieux et volontaristes pour notre pays. Ne présentons pas comme un gage de sérieux le renoncement à toute démarche volontariste. Soyons à la hauteur du contexte dans lequel nous devrons agir : une France en état d’urgence sociale.

• Une République laïque. Dans la Constitution, elle l’est, bien sûr. Mais dans les faits, que de remises en cause ! A droite, certains demandent que l’Etat consacre autant de moyens à l’enseignement confessionnel qu’à l’école publique et d’autres - ou les mêmes
- nomment des préfets non pour leur compétence, mais pour leur appartenance religieuse. Face au communautarisme, au racisme, à l’antisémitisme, aux intégrismes, au fanatisme sectaire, la laïcité doit redevenir une grande cause nationale et le combat vigilant des socialistes. Au congrès de Dijon, nous avions rappelé qu’elle était au cœur de notre projet d’émancipation et vu juste en demandant puis en soutenant la loi de 2004 interdisant le port de signes religieux à l’école. De nouvelles conquêtes sont possibles. Nous instaurerons une charte rappelant les principes laïcs dans les services publics, à l’hôpital et dans l’entreprise. Nous ne séparons pas laïcité et citoyenneté : c’est le sens du projet civique que nous proposerons aux jeunes pour découvrir et servir l’intérêt général. L’égalité entre les cultes, la lutte contre les discriminations
- et d’abord à l’emploi ou l’accès au logement - et le respect des droits des femmes seront au cœur de notre engagement pour le vivre ensemble. Notre société a besoin de valeurs et de repères. Un siècle après la loi de séparation de l’Etat et des églises, nous disons : Vive la laïcité !

• Une République nouvelle : pour nous, c’est une vraie ambition et un vrai pilier du changement. Nous faisons le choix d’une République parlementaire stable et non pas, comme d’autres, de la toute puissance présidentielle ou d’une conviction à géométrie variable hésitant entre le renforcement du rôle du Premier ministre et sa suppression. Nous proposons que le PS s’engage à soumettre à référendum, dès les 6 premiers mois de la législature, un projet comprenant notamment : le renforcement du rôle du Parlement et du Premier ministre, l’inclusion d’une part de proportionnelle dans le scrutin législatif, le droit de vote aux élections locales pour les étrangers résidant régulièrement sur notre sol depuis au moins 5 ans, la participation obligatoire au vote et la reconnaissance du vote blanc. Des dispositions prévoiront aussi la parité entre hommes et femmes pour tous les exécutifs et pour la composition du Gouvernement ainsi que l’adoption du principe majoritaire pour les accords syndicaux dans une grande loi de démocratie sociale que nous mettrons en œuvre. En revanche, pour des raisons tenant à notre conception de la République, nous récusons expressément les projets évoqués récemment en faveur de lois régionales, que nous jugeons dangereuses pour l’égalité républicaine, ainsi que les « quotas » d’immigrés. Nous redonnerons sa pleine place à la démocratie territoriale. À force de transferts de charges non financés et de services publics démantelés, la droite a porté un coup sévère à la confiance et aux finances des collectivités locales. C’est pourquoi, après avoir remis en cause les lois Raffarin-Villepin-Sarkozy sur la pseudo-décentralisation, nous renforcerons l’autonomie financière des collectivités et veillerons à la mise en œuvre d’une véritable péréquation. Nous encouragerons la participation démocratique et la simplification du cadre d’action et de décision des élus.

• L’Europe : après plusieurs mois de discussions et de débats, les Français se sont prononcés sur le texte de Constitution européenne. Leur choix a été clair. Il devra être évidemment respecté. Là où certains semblent faire comme si le vote populaire n’avait pas eu lieu, nous jugeons indispensable l’avancée d’une Europe sociale, démocratique, puissante. Elle ne sera pas facile, nous le savons bien. Mais elle sera concrétisée par une opposition catégorique aux projets de directives dangereuses (Bolkestein, etc.), ainsi que par un texte beaucoup plus court, plus lisible, portant sur le fonctionnement des institutions et les droits notamment sociaux : un processus Constituant doit le permettre. Nous engagerons une action de fond pour avancer sur les dispositions concernant notamment : la coordination économique au sein de l’Eurogroupe et l’impulsion budgétaire, industrielle et scientifique, la réorientation de la Banque Centrale Européenne vers la croissance et l’emploi, l’harmonisation sociale et fiscale, ainsi que la préférence communautaire et la défense des services publics. Nous favoriserons le lancement de projets européens concrets (recherche, environnement...) susceptibles d’aider au développement de l’Union ou d’un groupe d’Etats membres. Sur tous ces points, nous mènerons la discussion en particulier avec le PSE. Pour dépasser le clivage entre le oui et le non parmi les socialistes, et puisque désormais le peuple français a tranché, une Convention Nationale définira pour l’avenir les propositions européennes de l’ensemble de notre Parti. • Notre Parti. Une nouvelle fois, tout dépend de lui. Pour transformer demain la société, il a besoin aujourd’hui de se transformer lui-même. Débattons ! Imaginons ! Parlons avec d’autres qui nous font part de leurs pensées et auxquels nous faisons partager les nôtres : nous renforcerons notre projet et nous y puiserons davantage de fraternité. Cela suppose de mettre fin à certaines dérives qui nous affaiblissent. Notre vie interne ne doit plus être si souvent déconnectée de la vie des Français : nos débats doivent correspondre à leurs attentes, et non répondre à de tout autres considérations repeintes sous le bel emblème de l’unité. L’échange et la confrontation des points de vue doivent être libres. La passion partagée du Parti ne doit pas disparaître au profit de l’obsession clanique et parfois sectaire. N’oublions jamais - c’est le message de Jean Jaurès et de François Mitterrand - que le Parti est un moyen au service de nos idées politiques, pas une fin en soi. De Dijon au Mans, le nombre des adhérents n’a malheureusement pas augmenté ; notre Parti a besoin d’une nouvelle impulsion. Nous proposons de diversifier notre base militante. Nous proposons que l’adhésion et l’accès aux responsabilités dans nos rangs des jeunes, des femmes, des salariés de toutes origines soient facilités. Nous devons consacrer un effort beaucoup plus soutenu en faveur de la formation politique des cadres et des militants. Nous devons organiser des campagnes de mobilisation en phase avec les préoccupations quotidiennes. Les moyens du Parti doivent être justement répartis parmi nos fédérations afin de le faire rayonner sur l’ensemble du territoire et Outre- Mer. Emploi et pouvoir d’achat, logement, école, recherche et enseignement supérieur, protections et services publics - notre Parti doit faire écho à la vie de nos concitoyens. En 2007, le Parti socialiste doit porter le changement. D’ici là, il doit lui aussi savoir changer pour progresser. En définitive, les questions essentielles posées à chaque militant dans ce Congrès sont relativement simples : quelles leçons tirons-nous de nos succès et de nos échecs ?

Considérons-nous que le libéralisme a définitivement gagné et qu’on peut seulement essayer d’en corriger certains dégâts, ou bien croyons-nous qu’il est possible de transformer vraiment les choses dans le sens du progrès collectif et individuel ? Le choix entre un socialisme d’accompagnement et un socialisme de transformation est décisif. Décidons-nous de nous écarter de nos électeurs ou de les écouter ? Nous faisons le choix de lutter contre les dérives libérales et d’écouter nos électeurs. Lors des prochaines échéances, il ne s’agira pas seulement de conquérir le pouvoir, mais de l’exercer d’une façon nouvelle. Nous voulons, face à la droite des démolisseurs, réussir dans l’unité l’alternance et l’alternative. Cela implique le choix clair auquel nous appelons en responsabilité chaque militante et chaque militant : « rassembler à gauche ».

I - Comprendre : pour sortir du libéralisme, le socialisme de transformation

• Tirer les leçons du 29 mai

Le Congrès du Mans se déroule entre deux échéances : le référendum du 29 mai et les élections présidentielles et législatives de 2007. Une fois encore, c’est du Parti socialiste que tout dépend. De notre volonté de rassembler. De notre faculté d’imaginer. Avant toute chose, de notre capacité à écouter. Pour gagner demain, il faut comprendre ce qui s’est passé hier. Pour proposer une perspective majoritaire, il faut entendre ce qui a été dit par les Français. Le référendum est derrière nous, le Congrès est devant nous. Nous avons pu diverger entre socialistes sur les moyens, mais nous devons être unis sur l’objectif. Sans esprit de « revanche » au niveau local ou national. Ensemble, nous devons réconcilier les électeurs du « non » de gauche et ceux du « oui » de gauche pour bâtir l’Europe que nous souhaitons. Le Parti socialiste doit proposer ce trait d’union à toute la gauche pour rendre possible son unité. C’est ce qu’attendent nos électeurs, partagés eux aussi. Ce n’est possible que par le débat. C’est pourquoi nous proposons que la nouvelle direction du Parti et le Conseil National issu du Congrès s’engagent à organiser une Convention nationale pour définir nos propositions européennes pour l’avenir. Cette initiative est susceptible d’emporter l’adhésion de tous les socialistes. Notre projet pour l’alternance sera à coup sûr un programme de relance européen. Pour dépasser le clivage entre ceux qui, dans nos rangs et avec une même passion de convaincre, ont voté « oui » et ceux qui ont voté « non », nous disposons d’un point d’appui  : le respect du message des électeurs et les leçons qu’il nous faut collectivement en tirer. Le 29 mai, nos concitoyens ont exprimé un besoin urgent de politique. Le haut niveau de participation (70 %) prouve que les Français ne sont pas « dépolitisés », contrairement à ce qu’on a souvent dit. Le référendum a été marqué par le retour massif aux urnes des catégories populaires. Il a suscité un débat citoyen, d’une intensité inédite sur les lieux de travail, dans les quartiers, en famille, sur Internet. C’est une réalité dont nous socialistes devons nous réjouir. Un véritable vote social s’est exprimé. 80 % des ouvriers, près de 70 % des employés et des chômeurs, 65 % des salariés du public, 55 % des salariés du privé, une majorité des jeunes ont voté « non ». La France des quartiers en difficulté et des campagnes en panne d’espérance a majoritairement refusé le traité constitutionnel. Le « non » est arrivé en tête dans 510 des 577 circonscriptions nationales. Il a convaincu deux électeurs de gauche sur trois, alors que 73 % des sympathisants UMP-UDF ont approuvé la Constitution. C’est une réalité qu’on ne peut nier, sauf à vivre de nouvelles déconvenues. Comme ils l’avaient fait en 2004 en sanctionnant massivement la droite, les Français ont exprimé un rejet puissant du libéralisme. Les thématiques sociales, qui ont dominé la campagne, correspondent aux exigences portées par le PS depuis sa naissance. Le vote du 29 mai ne témoigne pas d’un rejet de l’Europe, à laquelle les Français sont fortement attachés. Il traduit le refus d’une Europe diluée dans la mondialisation financière, sans projet fort, sans calendrier clair, ni règles du jeu adaptées à l’hyper-concurrence. L’issue du référendum n’est donc pas un accident électoral. Pas plus que ne l’a été l’élimination au premier tour de notre candidat à l’élection présidentielle de 2002. Le 21 avril, un décrochage électoral s’était, déjà, opéré avec notre base sociale. Quand le Parti socialiste n’est pas suivi, c’est qu’il a perdu en chemin une partie de la France populaire. Notre Congrès du Mans sera utile si nous prenons collectivement conscience de cette situation dangereuse pour la cause que nous défendons et si nous décidons de nous donner les moyens d’inverser la tendance et de reconquérir notre base sociale.

• A l’écoute de notre base sociale

Au fil des scrutins, une partie grandissante des Français disent leur refus d’être tenus à l’écart de l’avenir et interdits d’espoir. Cette colère frappe les chômeurs, les travailleurs pauvres et les salariés précaires dont le nombre a explosé sous l’effet de la politique de la droite. Mais elle mine aussi toute la France populaire, celle des ouvriers, des employés, des petits agriculteurs et artisans qui voient leur statut et leur existence se dégrader. Elle frappe de plus en plus les classes moyennes, ainsi que les cadres. C’est la France qui est confrontée à la baisse du pouvoir d’achat et à la remise en cause des droits sociaux. Une France qui a toutes les raisons de redouter que les conditions de vie de ses enfants soient de plus en plus difficiles - pour étudier, pour travailler, pour se loger, pour se soigner, pour faire des projets. C’est d’abord à cette France que le Parti socialiste doit penser, c’est d’abord pour elle qu’il doit se battre. Face à la « rupture » avec le modèle social français promis par le trio UMPUDF- Medef, nous devons porter l’ambition d’un vrai changement, porteur d’un progrès retrouvé, et non vecteur de régression, voire de déclin. C’est ce qu’attend la France en panne d’espérance. Elle prend, pour chacun de nous, le visage de femmes et d’hommes que nous connaissons dans nos quartiers, sur les marchés, dans nos villes et nos villages. A l’heure de débattre et de choisir nos orientations, pensons d’abord à eux. La cassure vient de loin. La politique de la droite, de 1995 à 1997 et depuis 2002, a contribué à l’approfondir. Sans doute avons-nous tardé à en prendre la mesure. Récemment encore, notre diagnostic préférait n’évoquer qu’une « société fragmentée » plutôt que de regarder en face le véritable fossé social à combler. Que le monde du travail soit aujourd’hui moins homogène que par le passé, c’est une évidence. Que les dégâts du libéralisme en soient l’une des causes est une autre évidence. C’est la course systématique à la rentabilité et à la flexibilité qui détruit les solidarités au travail, et non l’éventuelle montée automatique des égoïsmes stigmatisés par les conservateurs depuis Mai 68. L’unité du salariat n’a jamais été le résultat spontané de l’évolution économique et sociale. Elle a toujours été produite, construite par l’action politique et idéologique de la gauche. C’est la précarité qui fait dire à un ouvrier menacé de licenciement ou de délocalisation qu’un employé du secteur public est un « protégé » - voire un « privilégié » - alors que la fonction publique est elle-même soumise au gel des salaires, à des pensions faibles, à une flexibilité grandissante. C’est souvent le marché qui divise et stigmatise. Aujourd’hui, il appartient à notre Parti d’assumer ce travail d’unification des catégories populaires et moyennes. Nous ne le pourrons pas si nous nous contentons de disserter sur les peurs de la société ou si nous renonçons à construire de nouvelles solidarités. Nous ne le pourrons pas si nous renonçons à porter un projet de transformation sociale. Pour reconquérir notre base sociale, nous devons lui proposer un nouvel idéal mobilisateur. Dans le monde, l’impasse du libéralisme, en France, l’échec de la droite Depuis la chute du mur de Berlin et la fin des dictatures en Amérique latine, la démocratie politique dans le monde a progressé. En même temps, le capitalisme est devenu plus dur pour les salariés et le monde du travail. Il exige de notre part une action plus déterminée. Si les responsables politiques eux-mêmes pensent qu’ils ne peuvent pas grand-chose pour améliorer la situation, qu’on ne s’étonne pas que le peuple se détourne d’eux ! Plus que jamais, nous devons faire preuve de volontarisme.

• Le capitalisme financier veut coloniser la planète La gauche a d’abord été surprise par la mondialisation qu’elle n’avait pas vraiment anticipée. Puis elle s’est interrogée sur sa signification. Beaucoup ont cru de bonne foi que cette mondialisation « heureuse », selon l’expression de Tony Blair, entraînerait d’elle-même un progrès pour l’humanité. Mais aujourd’hui, nous savons que sans réponse politique et sans mobilisation sociale, la mondialisation n’ira pas dans le sens de nos valeurs.

La domination de la finance s’est accentuée. La mondialisation des capitaux, de la production et des entreprises entraîne une remise en cause des compromis sociaux établis au cours de la période de la guerre froide et des « Trente Glorieuses ». Le partage de la valeur ajoutée avantage de plus en plus les actionnaires et les managers. Les intérêts du consommateur finissent souvent par se retourner contre ceux du travailleur. Les marchés défient les Etats. Le capital domine le travail. La concurrence l’emporte sur la solidarité. Une nouvelle division internationale du travail s’est affirmée, marquée notamment par le développement rapide de la Chine et de l’Inde tandis que les Etats-Unis poursuivent leur course en tête dans les nouvelles technologies et les services à haute valeur ajoutée. La France et l’Europe sont prises en tenaille par cette concurrence.

La désindustrialisation et les délocalisations sont, pour une part, les conséquences de la montée en puissance des pays émergents. Alors que l’accès au développement d’une fraction croissante du monde devrait être en soi une très bonne nouvelle, ces évolutions mal maîtrisées accroissent partout les inégalités, menacent notre base économique et déstabilisent les salariés.

Mais l’alliance du monde, du marché et du « modem » n’a pas seulement changé la dimension du capitalisme, elle a bouleversé son projet. Désormais - c’est la grande nouveauté et la grande difficulté - le marché veut coloniser des pans entiers de la vie humaine qui, jusqu’ici, échappaient au règne de l’argent. Le contrôle des ressources vitales telles que l’eau, l’énergie, les sols ou l’air est désormais le principal enjeu économique de la planète. La diversité culturelle est remise en cause par la concentration des multinationales du divertissement et des télécommunications. L’école est en concurrence avec des entreprises d’enseignement à distance cotées en Bourse. La privatisation du vivant est déjà une réalité - comme en témoigne la bataille du décryptage et de la brevetabilité du génome humain. Il est temps de revenir à l’essentiel : être socialiste, c’est refuser que le capitalisme gouverne les rapports sociaux et qu’il régente nos vies. En même temps que le capitalisme financier, l’unilatéralisme de l’hyper puissance américaine s’est confirmé. Guerre en Irak, refus du protocole de Kyoto ou de la Cour Pénale Internationale : l’empire américain veut défendre unilatéralement ses intérêts, y compris par les armes. Face à sa volonté hégémonique, il est indispensable que l’Union européenne se renforce et propose au monde un autre projet. Dans un tel contexte, comment entretenir l’espoir d’une « mondialisation heureuse » alors que nous savons désormais à quels reculs sociaux, démocratiques, écologiques conduit la mondialisation néolibérale : faut-il rappeler les leçons politiques de l’ouragan Katrina ? Ce n’est pas uniquement une catastrophe naturelle qui s’est abattue sur la Louisiane. Avec ce drame, qui a d’abord frappé les pauvres et les Noirs, le libéralisme a montré la violence de son inefficacité, de son injustice, de son absurdité. C’est la société du moins d’Etat et du moins de services publics, du chacun pour soi et du communautarisme, de la ségrégation sociale et de l’impuissance publique, qui a amplifié l’horreur du cyclone. Parce qu’il offre une réponse aux impasses du libéralisme, le socialisme a un avenir. Les stratégies qui se proposent seulement d’adoucir à la marge les maux du système sont devenues inefficaces. Le réalisme commande de changer la donne. Et cela commence en Europe.

• L’Europe malade du libéralisme

Confrontée à la nouvelle division internationale du travail et aux nouveaux rapports de puissance, l’Union européenne n’a pas su apporter les réponses qu’attendaient ses citoyens et ses salariés. Elle s’est enlisée dans la croissance molle et le chômage élevé, tandis que la Commission de Bruxelles, directive après directive, s’efforçait d’acclimater sur le continent le modèle anglo-saxon de capitalisme. Sa dérive libérale s’est malheureusement poursuivie. Le Conseil européen s’est lancé dans une politique d’élargissement continu, sans consultation populaire ni réforme préalable des institutions. Même si différents facteurs ont joué, c’est largement cette crise de l’Europe - économique, sociale, démocratique, identitaire
- qui a entraîné le résultat des référendums français et hollandais, après avoir nourri l’abstention aux dernières élections européennes. La social-démocratie européenne doit passer à l’offensive !

Face à une idéologie libérale structurée, disposant de solides relais, la social-démocratie européenne n’oppose pas globalement un modèle social vraiment alternatif, à la fois suffisamment efficace et juste. À côté de vrais succès, elle réforme parfois à vue. Parfois, elle accompagne les politiques libérales en vogue depuis près de 20 ans. Elle peine à redonner du sens à son rôle historique - un meilleur partage des richesses, un approfondissement de la démocratie, une hausse générale du niveau de culture de la population
- au profit d’une « gouvernance » sociale libérale qui la coupe, progressivement, de sa base sociale. Les récentes élections législatives en Allemagne l’ont montré : quand elle échoue à satisfaire l’électorat populaire par des « réformes » qui accompagnent le processus libéral, la social-démocratie perd une partie de cet électorat, donc les élections.

Tel n’est pas le chemin que nous proposons. Réorienter la construction européenne dans le sens d’une Europe plus sociale, plus politique, plus volontaire, creuset d’une civilisation humaniste et levier d’une autre mondialisation, prenant en compte la diversité culturelle de ses Etats, telle était jusqu’ici la ligne choisie par les socialistes français. Elle s’est exprimée dans les sept conditions posées à notre approbation de la Constitution lors du Conseil national du PS d’octobre 2003. Elle s’est incarnée, à l’unanimité, dans notre plateforme électorale aux élections européennes du printemps 2004. C’est aussi le choix de beaucoup de nos alliés de gauche. L’Europe sociale et innovante, puissante et indépendante, créatrice et rayonnante, doit à nouveau nous rassembler.

• La droite met la France en échec, nous sommes en état d’urgence politique

Depuis juin 2002, la droite applique dans notre pays une purge libérale. Fin des emplois jeunes ; remise en cause des emplois aidés et des 35 heures ; coupes sombres dans les dépenses publiques pour l’école, la recherche, la culture ; augmentation des contributions à la Sécurité sociale et des déremboursements ; amputation de la protection sanitaire et sociale ; démantèlement du droit du travail ; privatisation des services publics ; réforme injuste et non financée des retraites ; explosion du prix des loyers ; réduction injuste de l’impôt sur le revenu ; transferts de charges non compensés vers les collectivités territoriales
- le triptyque de la droite est bien morosité, précarité, inégalité. Et pour quels résultats  ! Une croissance faible, inférieure d’un point à la moyenne européenne ; plus de 200 000 chômeurs supplémentaires, 1,2 million de Rmistes ; un pouvoir d’achat en berne pour les salariés et les retraités. Pas question de juger Villepin « plus social » que Sarkozy quand tous deux partagent la même volonté de supprimer l’impôt sur la fortune et de mettre en cause les syndicats. Ne commettons pas l’erreur qui consisterait à arbitrer les querelles de personnes de l’UMP pour atténuer notre opposition à son idéologie. Lors du Congrès de Dijon, nous avions été nombreux à affirmer que la droite façon UMPMedef était la plus dure depuis 50 ans. À l’époque, certains de nos camarades avaient trouvé l’affirmation excessive. Hélas, les Français en ont eu depuis la confirmation. Portée par la vague libérale en Europe et dans le monde, la droite met en œuvre une stratégie globale de démolition du pacte social issu de la Libération. Avec méthode :

- remise en cause de la retraite par répartition en 2003 ;

- démantèlement de la Sécurité sociale en 2004 ;

- attaques contre le code du travail en 2005. Quelles seront les prochaines étapes ?

Le ministre de l’Éducation nationale a vendu la mèche : quitte à rallumer la guerre scolaire éteinte depuis 1984, le gouvernement rêve d’accroître les moyens accordés aux écoles confessionnelles, après avoir sacrifié ceux de l’école publique. Comme il évoque désormais la remise en cause du code de la nationalité et du droit du sol, fondement de notre tradition républicaine depuis la Révolution ! Et la mise en cause de l’impôt sur le revenu et de l’ISF est programmée pour compléter le tableau ! A cette régression sociale, s’ajoute la régression démocratique. Jacques Chirac n’a tenu aucun compte des désaveux populaires, pourtant massifs, exprimés en 2004 aux élections régionales, départementales, puis européennes. Au terme d’une présidence sans vision ni bilan, il laissera des phrases et des ardoises. Notre Parti doit répondre à la colère, mais aussi à l’espérance, en ouvrant le chemin de l’alternance et en créant les conditions d’une véritable alternative.

Après 10 ans de présidence Chirac, la France est entrée en état d’urgence politique.

Celui-ci se constate lorsque les crises qui habitent la société convergent et entrent ainsi toutes ensemble en zone critique. Pour en sortir, que lui propose-t-on ? Sous couvert de « rupture », la voie libérale au karcher de Nicolas Sarkozy ? Sous couvert de « nation », l’ethnicisme de Le Pen et des communautarismes ? Ou bien, face à ce bloc des droites, une dérive libérale de plusieurs social-démocraties européennes inspirées par l’expérience britannique ? Pour répondre à l’urgence, nous ne pouvons nous contenter d’un réformisme minimal.

Assumons ce que chacun perçoit de plus en plus nettement dans sa vie quotidienne : le libéralisme n’est pas seulement injuste, il est inefficace. Plus que jamais, nous devons être ambitieux pour notre pays et ambitieux pour nos électeurs. Nous devons incarner une alternative claire au néo-libéralisme. Si ce n’est pas le cas, notre démocratie courra un grave danger. L’Histoire le montre : la détresse sociale finit toujours par trouver un débouché politique. Si la France en désespérance jugeait que le Parti socialiste ne l’entend pas et ne lui parle plus, elle ferait d’autres choix. Le refuge dans l’abstention est possible, avec le risque d’un scénario à l’américaine où moins de la moitié des électeurs se rendent aux urnes !

Mais la préférence pour les extrêmes, et d’abord pour Le Pen, est la plus probable - et la plus terrible ! - des options. Comment penser que l’audience du Front national, de ses idées, de ses leaders, aurait définitivement reculé dans notre pays depuis 2002 ? Plus de chômeurs et moins de pouvoir d’achat, moins d’Etat et plus de marché, n’ont jamais renforcé mécaniquement les démocraties. Le Parti socialiste doit être fort, en particulier pour faire barrage à l’extrême droite qui, bien qu’elle participe aux élections, rejette les valeurs fondamentales de la République. Comment aimer la liberté quand le seul culte du chef fait office de ligne de conduite ? Comment garantir l’égalité quand on pense que les individus naissent inégaux en droit, que la race, la génétique ou la religion fait l’identité ? Comment faire vivre la fraternité si la haine de l’autre fonde le lien entre les personnes, les territoires ou les Etats ? Comment défendre la laïcité quand on affirme en permanence que l’Europe est un « club chrétien ». A nous de combattre par notre action politique résolue ses idées et ceux qui les propagent.

• De nouveau, convaincre que le socialisme est pleinement utile

C’est notre principal défi collectif. Aux responsabilités, les socialistes et leurs alliés ont toujours agi, rencontré beaucoup de résistances, réussi de grandes choses dont nous sommes fiers, mais ils ont aussi commis des erreurs et... parfois déçu. Pour nos aînés : le passage au pouvoir fut rare et bref. Une année en 1924 pour le Cartel des gauches, à peine davantage en 1936 pour le Front populaire, trois ans à peine à la Libération et quelques éclipses durant la IVème République. Depuis 1981, l’obstacle de la durée pour faire ses preuves est levé. Nous avons gouverné à trois reprises durant cinq ans et par trois fois ces législatures se sont soldées par un retour de la droite. Pourquoi ? Cette question, chaque socialiste doit se la poser et tenter d’y répondre. Nous ne croyons pas à la fatalité du mariage impossible entre la gauche et le pouvoir. Derrière François Mitterrand puis avec Lionel Jospin, nous avons fait accomplir à la France de grands pas vers le progrès politique, économique, social, culturel. De l’alternance de 1981-1986, il reste - ce n’est pas rien ! - l’abolition de la peine de mort, la réduction du temps de travail, la cinquième semaine de congés payés, la création de l’impôt sur la fortune, la liberté accrue des médias, la décentralisation. C’est entre 1988 et 1993 que la paix est revenue en Nouvelle-Calédonie, que la CSG est née, que le RMI et le crédit-formation ont été créés. Entre 1997 et 2002, la gauche a créé les emplois jeunes, les 35 heures, la CMU, l’APA, l’Euro, voté la parité et le PACS. Ces conquêtes sont bien réelles, même si certaines ont été abîmées ou détruites par la droite. Et pourtant, c’est un sentiment d’inachevé qui domine dans le peuple de gauche. « Vous avez corrigé le système libéral, vous n’y avez pas mis un coup d’arrêt » - qui n’a jamais entendu cela, parmi nous ?

Maintenant, il faut avancer et retrouver la confiance de notre base sociale traditionnelle.

Pour cela, nous devons tirer les leçons de nos expériences. Quand la gauche s’est-elle affaiblie ? Quand la crise économique internationale et l’absence de croissance l’ont empêchée de mener à bien l’intégralité de son programme, comme en 1982. Quand la baisse quantitative du chômage ne s’est pas traduite par une amélioration suffisante des conditions de travail et d’existence, comme nous l’avons souvent entendu durant la campagne de 2002. Un chômeur de moins, c’est excellent. Mais si ce nouveau salarié perçoit un salaire juste en dessous du Smic et juste au-dessus du RMI, qu’il est en CDD et qu’il n’arrive plus à se loger correctement - alors c’est humainement insuffisant. Or, c’est l’humain qui compte.

Comprendre et dire cela, ce n’est pas une faiblesse, mais une force. D’autant qu’entre 1997 et 2002, les succès et les échecs ont été collectifs et ont été largement partagés tout au long de la législature : la crise morale avec le monde enseignant ; l’affaiblissement de l’autorité de l’Etat face aux manifestations corporatistes ; le flottement sur l’avenir de la Corse ; le sommet de Barcelone. Ce sont quelques exemples parmi d’autres. Comme l’ensemble de la social-démocratie européenne, le socialisme français a parfois donné le sentiment de subir la réalité plus que de parvenir à la changer. Mais en France comme en Allemagne ou ailleurs sur le continent, les peuples manifestent une volonté croissante de résistance et d’alternative à la violence du libéralisme. Tout en restant évidemment un parti de gouvernement, le PS doit redevenir pleinement le parti du mouvement. Si nous voulons reconquérir l’électorat populaire, nous devons lui adresser un message fort dès notre Congrès puis, une fois au pouvoir, lui donner des preuves tangibles que nous sommes bien décidés faire ce que nous avons dit et à résister à l’offensive du tout-marché. Pour convaincre, bâtir et réussir, la gauche ne peut se réduire à une politique du moindre mal dans la mondialisation.

Notre socialisme : la transformation plutôt que le simple accompagnement

Dans ce contexte, le clivage au sein du PS n’oppose pas révolutionnaires et réformistes, protestataires et gestionnaires, comme certains veulent le faire croire. Nous avons tous tiré les leçons de la faillite du totalitarisme à l’Est, nous avons tous participé aux responsabilités des vingt dernières années en France.

Le débat au sein de notre parti fait apparaître en réalité deux conceptions : transformation ou simple accompagnement. Il existe un socialisme d’accompagnement, voire parfois de résignation, face au libéralisme et à ses dégâts. Il faudrait s’estimer heureux si, déjà, nous parvenions à préserver, pour l’essentiel, les acquis de ces dernières décennies... Cette approche considère que les rapports de force sont devenus tellement défavorables aux salariés, dans notre société, qu’il faut malheureusement réduire nos ambitions. Pour ce « réformisme », la nécessité de l’adaptation aux « réalités du monde et de l’économie de marché » a fini par prendre le pas sur l’exigence d’un progrès partagé. Comme la droite se proclame aujourd’hui également « réformiste  », on peine alors à différencier les uns des autres, pour la plus grande confusion - et déception - de nos électeurs. C’est ce qui se produit quand certains dans nos rangs hésitent sur la laïcité tout en faisant l’apologie des quotas d’immigrés, parlent de volonté mais ajoutent que l’Etat doit s’auto-limiter. C’est ce qui se produit chez certains de nos partenaires européens, quand on démantèle l’Etat-providence et que l’on précarise la condition des salariés. Le socialisme de transformation, lui, tout en se voulant lucide, reste convaincu que les rapports de force peuvent être infléchis par la volonté politique, l’action publique et la mobilisation sociale. Il pense que la division, la démobilisation et la démoralisation des salariés peuvent détériorer encore plus les rapports de force au profit de la droite. Il veille à être crédible mais ses objectifs et son projet procèdent d’une analyse plus exigeante des attentes de nos électeurs et des maux d’un capitalisme non régulé.

Cette exigence de transformation commande aussi de se donner vraiment les moyens pour engager les réformes. À quoi bon proclamer des objectifs généreux si on ne se donne pas les moyens de leur réalisation ? Un exemple : le projet de Constitution européenne interdisait à l’Union européenne de recourir à l’emprunt, de lever un impôt spécifique, en même temps qu’elle exigeait l’unanimité des 25 membres pour augmenter le budget communautaire alors que les principaux d’entre eux réclamaient un budget à la baisse. Se donner pour objectif, dans ces conditions, la relance des grands travaux en Europe, un plan Marshall pour le rattrapage des pays de l’Est, des investissements massifs dans la recherche et les industries d’avenir, relève de la tâche impossible. A repousser sans cesse la traduction dans les faits de ses objectifs, le socialisme d’accompagnement se coupe de l’action et risque de décevoir les électeurs. Pour le socialisme de transformation, il n’y a pas de politique progressiste durable sans soutien et mobilisation populaires. Et il n’y a pas de mobilisation efficace sans rassemblement de toute la gauche. La force de la gauche, c’est la mobilisation de sa base sociale : ouvriers, salariés, classes moyennes. Sa faiblesse, c’est sa division, sa tendance au découragement, au défaitisme devant les obstacles que le système met sur sa route. Il est donc vital pour les socialistes d’entretenir la dynamique qui les porte au pouvoir.

Pour cela, nous devons faire écho à la réalité sociale, à la confrontation sociale. Nous avons tous été, à des titres divers, associés dans le passé à l’exercice des responsabilités. Ce n’est pas tenir un double discours, mais faire preuve de bon sens, que reconnaître que le 21 avril 2002 a eu lieu et qu’il faut éviter qu’il ne se reproduise. C’est être lucide que d’admettre que tout ce que nous avons collectivement accompli dans le passé, entre 1997 et 2002 et avant, a connu des succès et des échecs. C’est être réaliste de reconnaître que le contexte dans lequel nous agissons a changé, et que nous ne pouvons pas reproduire exactement les solutions du passé. C’est affirmer une évidence de dire que le vote du 29 mai 2005 a également eu lieu, qu’il faut le respecter tout en cherchant désormais à dépasser certains clivages pour agir. Celles et ceux qui se reconnaissent dans cette motion commune tirent les leçons de l’expérience, refusent l’autosatisfaction et font le choix, pour l’avenir, de la transformation plutôt que du simple accompagnement.

II - Vouloir : les chemins du changement

Nos concitoyens ont aujourd’hui plusieurs attentes fortes. Ils nous demandent de :

- Donner un cap clair à notre action. Cela nous a collectivement manqué en 2002 : nous avons proposé des mesures dont le détail était pertinent, mais sans vision globale assez convaincante. Sachons donner aux valeurs qui fondent l’engagement socialiste depuis plus d’un siècle une jeunesse nouvelle. L’échec du libéralisme montre que le capitalisme contemporain n’écrit pas la fin de l’histoire. Il nous revient d’actualiser et de prolonger les idéaux de la République, de la justice sociale, de la laïcité.

- Tirer les leçons de notre propre expérience. Nous avons collectivement rencontré des succès et des échecs entre 1997 et 2002. Assumons-les de façon collective. Mais ne proposons pas aux Français de refaire à l’identique ce que nous avons déjà fait...il y a une décennie ou deux.

- Proposer une vraie alternative. Notre politique devra se démarquer nettement de celle menée par la droite depuis 2002 et par son Président depuis 1995. Nous remettrons en cause les décisions de ces dernières années qui ont porté atteinte à notre pacte social. Les Français ne veulent pas d’une alternance sans alternative. Ils attendent un vrai changement. Ils comprennent la nécessité des adaptations, mais ils ne veulent pas que ces adaptations soient des régressions. C’est le sens de la démarche que nous engageons avec cette motion. Décliner non pas un programme exhaustif de gouvernement - ce n’est ni le moment ni lieu - mais dire quelles seront nos priorités et commencer à préciser les solutions que nous mettrons en œuvre pour les inscrire dans le réel.

Oui à l’Europe, oui à l’internationalisme, non à la mondialisation libérale L’Europe a besoin d’une volonté nouvelle 2007 : respecter le vote des citoyens Pour une Constitution vraiment démocratique

Face à la mondialisation libérale, l’Europe sociale, puissante et démocratique

2007, rendez-vous avec l’Europe et la mondialisation

Dans la fidélité à Jaurès, Blum et Mitterrand, nous sommes européens et internationalistes.

Aujourd’hui, l’enjeu de l’internationalisme se pose dans des termes nouveaux. Nous ne pouvons pas accepter, au nom de notre engagement européen et de notre internationalisme, une mise en concurrence généralisée et brutale des salariés, des systèmes sociaux et des modèles économiques. Les Français, notamment les jeunes, sont pro-européens, mais ils veulent que l’Europe change. Au lendemain des choix sur la Constitution, c’est à nous
- responsables politiques, partis, associations et citoyens engagés - qu’il appartient de redonner une perspective à l’Europe.

• L’Europe est confrontée aujourd’hui à plusieurs crises. L’Europe est en crise. La cause de cette crise n’est pas dans l’expression souveraine des citoyens. Mais parce que les gouvernements ont laissé l’Europe dériver sur le chemin de la stagnation économique, du libéralisme doctrinaire et de l’absence de projet politique.

• Une crise économique et sociale. Avec un taux de croissance en 2005 autour de 1,6 % pour la zone euro, alors que la croissance mondiale adopte un rythme soutenu de 4 %, notre économie piétine. Avec plus de 20 millions de chômeurs, nos sociétés souffrent. Avec un phénomène de délocalisations à la fois interne et externe, notre tissu économique est fragilisé. La prospérité et le progrès social ont toujours été une promesse de l’Europe. S’ils ne sont pas là, les peuples se détournent du projet européen.

• Une crise politique et de projet. Nous ne sommes pas parvenus à réformer nos institutions communes au moment même où l’élargissement les rendait inadaptées. Les politiques de l’Union n’ont pas été suffisamment approfondies et le principe du pays d’origine a souvent supplanté la recherche de l’harmonisation des normes. Les frontières sont de plus en plus floues. La démocratie est en panne. Comment en sommes-nous arrivés là ? Plusieurs logiques coexistent en Europe depuis dix ans : la démarche britannique d’une Europe libérale réduite à un grand espace de libreéchange sans règles communes ; la démarche chiraquienne d’une Europe soi disant « à la française », mais qui n’a en réalité ni moyens ni solidarité. Disons-le clairement : nous ne suivons aucune de ces démarches, il faut une volonté nouvelle pour l’Europe.

• Notre projet pour l’Europe

La renégociation du traité constitutionnel sera un enjeu de l’élection présidentielle, puisque les gouvernements européens ont fixé à mi-2007 les décisions concernant l’avenir de ce projet. Le prochain Président de la République ne pourra pas apposer sa signature à un texte rejeté par les Français. La construction européenne devra s’appuyer sur la volonté des peuples d’Europe et s’attacher à répondre vraiment aux attentes du plus grand nombre. Forts du mandat des Français exprimé le 29 mai 2005 et dans la fidélité à nos engagements lors des élections européennes de 2004, nous proposerons l’ouverture d’un processus Constituant. Notre objectif sera de parvenir à une Europe démocratique, une Europe sociale et une Europe prospère et puissante.

• Une Europe démocratique. Pour remettre l’Europe au service des citoyens, nous avons besoin d’un cadre institutionnel plus démocratique et plus efficace. Le projet devra être simple, court, lisible et centré autour des institutions, des valeurs et d’une déclaration des Droits. Les politiques elles-mêmes n’ont pas leur place dans un texte constitutionnel. L’Europe devra être différenciée : les « coopérations renforcées » doivent être assouplies pour permettre la formation d’un groupe moteur. Comme c’est le cas pour tous les parlements du monde, le Parlement européen doit être doté d’un droit d’initiative législative. Il n’est plus acceptable que la Commission de Bruxelles ait seule l’initiative des lois. D’autant plus que l’influence libérale s’exerce avec force sur elle, faisant peser un danger sur la poursuite et le sens de la construction européenne.

• Une Europe sociale. Nous demanderons le retrait des directives libérales (Bolkestein, transports, etc.). Nous militerons en faveur d’une directive protégeant les services publics. Nous exigerons un moratoire sur toutes les dérégulations avant l’adoption d’un cadre protecteur. Une stratégie d’harmonisation fiscale et sociale par le haut au sein de l’Union sera proposée par la France. Elle devra être consacrée par le Traité social qu’attendent les salariés de toute l’Europe.

• Une Europe prospère et puissante. Notre priorité, c’est la réforme du pilotage économique et monétaire de la zone euro dans un sens favorable à la croissance et à l’emploi. Il faudra revoir le statut et les objectifs de la Banque Centrale Européenne (BCE) dans le cadre d’une véritable articulation avec l’Eurogroupe ; doter la zone euro d’une politique de change afin d’éviter l’euro cher ; accorder à l’Europe de moyens budgétaires accrus et une stratégie industrielle, une politique de recherche ainsi que des grandes infrastructures à l’échelle du continent. Notre objectif, ce doit être la croissance et l’emploi, pas seulement la stabilité des prix. Parallèlement, nous proposerons une revalorisation globale du budget européen. La solidarité avec les nouveaux Etats membres devra être accrue, tout en maintenant les fonds structurels pour les zones urbaines et rurales en difficulté des Etats de l’ancienne Union à 15. L’aide aux paysans et au monde rural n’interdit pas des évolutions internes à la PAC, qui sont nécessaires pour la rendre plus juste et plus solidaire. Cette action doit permettre un développement équilibré des territoires ruraux, adapté à chaque région, préservant l’environnement et ne menaçant pas le développement des pays pauvres. Il convient aussi de relancer l’ambition de l’Europe puissance. Puisque 25 Etats-membres ne pourront ni ne voudront avancer tous à la même vitesse, l’Europe des trois cercles constitue une réponse adaptée. Des initiatives seront proposées aux pays eurovolontaires (essentiellement la zone euro) afin de former un premier cercle agissant dans des domaines de coopérations renforcées (défense, recherche, technologies, fiscalité, social...). Ce cercle, à vocation fédérale, permettra un progrès décisif vers une Europe intégrée politiquement. Il restera ouvert aux autres pays. La France et l’Allemagne pourraient donner l’exemple en s’associant plus vite et plus étroitement, y compris dans une armée et une défense communes. Le deuxième cercle - l’Europe élargie - agrégera les membres de l’Union qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas s’engager aussi loin aussi vite, mais constituera une communauté de solidarité économique et de projets partagés : les Etats actuels de l’Union et ceux destinés à adhérer en 2007 pourraient le constituer. Le troisième cercle - l’Europe associée - rassemblera les autres pays de l’Est et du pourtour méditerranéen, associés étroitement à l’Union pour construire avec elle un espace de prospérité, de paix et de démocratie. Tant que cet approfondissement institutionnel n’aura pas été obtenu et que les frontières de l’Union n’auront pas été définies, un moratoire sur de nouveaux élargissements est souhaitable. L’Europe associée pourra être lancée sans attendre vers les pays de la Méditerranée. L’ensemble de ces propositions doit permettre d’avancer. Il faudra en débattre dans le cadre du Parti Socialiste Européen (PSE). Les citoyens veulent s’emparer du débat européen, audelà des consignes et des frontières nationales. Les militants socialistes de toute l’Europe doivent montrer l’exemple de cette nouvelle participation démocratique.

• Nous battre pour un monde plus solidaire

En plus des périls environnementaux, la mondialisation pose, et posera encore plus à l’avenir, un défi social gigantesque. Une course contre la montre est engagée : laissée à ellemême, la mondialisation dévasterait la planète, abaisserait les droits sociaux et multiplierait les conflits. Orientée, maîtrisée, gouvernée, elle peut être une chance pour tous. Pour nous, la mondialisation est un combat : en 2007, nous porterons notre engagement de socialistes à l’échelle du monde. Cela exige une Europe qui nous défende vraiment dans la mondialisation et non une Europe « cheval de Troie » de l’ultra-libéralisme planétaire.

Pour cela, nous réclamons une nouvelle politique commerciale européenne. Notre modèle social ne pourra pas résister par rapport notamment à la Chine et à l’Inde si nous acceptons le libre-échangisme dogmatique. Comme elle l’avait fait dans les années 1980 pour sauver notre industrie automobile, l’Union doit pouvoir recourir aux instruments légaux de sa défense commerciale et sociale (sauvegarde, mesures antidumping), chaque fois que nécessaire. Dans les grandes négociations commerciales à venir - en particulier dans le cadre de l’AGCS - l’Union doit affirmer clairement que la défense des services publics, de la santé, des droits des travailleurs, de l’environnement, de l’identité culturelle et de la diversité linguistique prime sur les exigences du seul commerce et de la concurrence. Si elle ne le fait pas, nous devrons nous opposer à la ratification d’un nouvel accord. Dans la réussite du « round » commercial actuel, ce qui compte, c’est que la solidarité internationale soit vraiment au rendez-vous et que l’Europe parvienne à faire valoir aussi ses intérêts et ses préférences collectives. Enfin, il faut créer un Fonds européen de compensation sociale et d’aide au réemploi des travailleurs victimes de la mondialisation, destiné à compléter les régimes sociaux nationaux. Nous battre pour un monde plus solidaire, c’est mener la guerre contre la pauvreté sur tous les continents. Dans le cadre d’un agenda social mondial, l’objectif doit être clair : réduire de moitié la pauvreté, le déficit d’éducation primaire, la mortalité maternelle et infantile, et faire reculer l’inégalité entre les sexes et d’accès aux services sociaux de base. Y parvenir réclame de doubler l’Aide Publique au Développement à l’échelle mondiale, soit 50 Milliards d’Euros supplémentaires par an. Afin d’aboutir à l’objectif de 0,7 % du PIB en faveur de l’aide au développement, nous augmenterons significativement l’aide française. Il faudra aussi assigner de nouveaux objectifs à notre politique africaine. Il est indispensable que notre aide soutienne plus fortement les régimes démocratiques et contribue plus efficacement à lutter contre la corruption. La rupture avec les méthodes Chirac sur le continent africain doit être nette. Au-delà de l’Hexagone, nous plaiderons pour l’adoption d’une taxation universelle pour le développement. L’agenda social de la mondialisation, c’est aussi promouvoir un travail décent pour tous. Pour cela, nous militerons pour placer les règles de l’OIT à égalité avec celles de l’OMC. Il s’agit de faire respecter des droits fondamentaux à un travail décent pour tous les travailleurs, quels que soient le continent et le pays. Pour mieux défendre le travail et les droits sociaux à l’échelle mondiale, le régime de responsabilité civile et pénale internationale des sociétés multinationales devra être élargi. Il n’est pas admissible que certains groupes vendent dans des boutiques du Nord des produits fabriqués au Sud par des esclaves, qu’ils se déclarent irresponsables quand un de leurs navires pollue des centaines de kilomètres de côtes ou qu’ils refusent d’indemniser les salariés quand une unité de sous-traitance ferme du jour au lendemain. Un monde plus solidaire, ce sont aussi des institutions internationales qui permettent de gouverner la mondialisation. Nous devrons y travailler de manière résolue - à l’inverse de Jacques Chirac, adepte des discours généreux mais souvent sans suite. Impulsons de larges alliances pour tenter d’infléchir la politique américaine unilatéraliste. Continuons de proposer à nos partenaires une vraie rénovation des instances des Nations-Unies. Le monde du XXIème siècle n’est plus celui de 1945 ! Beaucoup doit évoluer : le Conseil de sécurité de l’ONU, les institutions financières internationales (Banque mondiale, FMI), le G8. Plaidons sans relâche pour la création d’un conseil de sécurité économique et social et d’une Organisation Mondiale de l’Environnement, structure multilatérale permettant d’instaurer une véritable hiérarchie des normes en faveur du social et de l’écologie dans le commerce mondial. Le mot d’ordre est : meilleure prise en compte des cinq continents, plus grand contrôle démocratique, vraie mobilisation pour le développement, justice sociale et intégrité environnementale. Evidemment, la France ne pourra pas tout toute seule. Mais ses prochains dirigeants devront être des Européens exigeants et des internationalistes conséquents. Une chose est certaine : escamotées en 2002, l’Europe et la mondialisation seront au cœur des débats de 2007. Alors travaillons ensemble pour qu’elles soient au centre de notre projet.

Face à l’urgence : le progrès social

La France sera d’autant plus écoutée à l’extérieur, si elle montre que son modèle social rencontre des succès dans l’hexagone même. L’actuel Président et son Premier ministre s’en réclament en paroles, mais c’est pour mieux le casser dans les faits. Cependant que pour le chef de l’UMP, le social, c’est l’ennemi et l’ultra-libéralisme le modèle. Nous, socialistes, devons remettre en marche la machine à fabriquer du progrès et de la justice pour tous. Notre objectif doit être clair : redonner à tous un emploi, un logement, un savoir, une protection. Agir pour le progrès, c’est bâtir une France plus confiante. Une France plus solidaire, ce sera de nouveau une France en tête. Le plein-emploi est possible ; la hausse du pouvoir d’achat est nécessaire

• Face au chômage, agir pour la croissance Une société de plein-emploi est possible. Plus que jamais, nous devons revendiquer la valeur économique, sociale, intégratrice du travail et porter l’exigence du bon emploi. Face à la droite qui précarise l’emploi et démantèle le code du travail, c’est un message fort que les socialistes peuvent adresser aux Français. Nous-mêmes avions accompli un pas important en ce sens entre 1997 et 2002. Les sociaux-démocrates y sont parvenus dans les pays scandinaves. À l’inverse, la politique de la droite a aggravé le chômage. Renouer avec le plein-emploi, c’est d’abord retrouver le chemin de la croissance. Nous pensons que la croissance peut être plus forte à condition que la politique économique aille dans la bonne direction. Des initiatives majeures seront nécessaires au niveau européen. Nous devrons agir, nous l’avons dit, pour un gouvernement économique de la zone euro, pour une BCE travaillant enfin au service de la croissance et de l’emploi, pour la mise en place d’une politique de change adaptée, pour un vrai tarif extérieur commun et un vrai budget, pour une stratégie industrielle offensive.

• Soutenir la consommation par une augmentation des salaires et du pouvoir d’achat

En France, agir pour la croissance et pour le plein-emploi, c’est d’abord soutenir la consommation. La première demande de nos concitoyens est une demande de pouvoir d’achat. Cette demande est d’autant plus légitime que le partage de la valeur ajoutée s’est déformé au profit des entreprises. En 2007, nous devrons y répondre par des initiatives fortes.

Nous proposons de :

- augmenter significativement le SMIC. Il est aujourd’hui à 1217 Euros pour 35 heures. Il devrait se situer autour de 1270 Euros en 2007. Par une revalorisation progressive, nous proposons de porter le SMIC avant la fin de la prochaine législature entre 1400 et 1500 Euros. Sa remise à niveau devrait intervenir tous les six mois. L’indice des prix chargé de mesurer l’évolution du pouvoir d’achat du SMIC serait calculé à partir d’un panier de consommation réellement représentatif des achats effectués par les personnes ayant de faibles revenus.

- réunir une Conférence nationale salariale et sociale comprenant Etat, syndicats, patronat au début de la législature. Avec des objectifs prioritaires : obtenir que tous les minima conventionnels des branches atteignent enfin le SMIC pour permettre la revalorisation de l’ensemble des salaires de la grille ; relancer la négociation salariale de branche ; assurer aux salariés des filiales et des unités de sous-traitance des grands groupes les mêmes avantages salariaux que ceux de la société mère. La Conférence se réunira ensuite chaque année et fera le point sur la situation et sur le suivi des engagements de la nouvelle majorité, dans la concertation et devant les Français.

Relancer la négociation sur les 35 heures

Mettre fin aux exonérations patronales sans contreparties sociales

Agir pour l’emploi et la formation des jeunes, des seniors et des femmes

Représenter les salariés dans les conseils d’administration des entreprises

Instaurer une sécurité sociale professionnelle

- modifier la structure des prélèvements sur les salaires de façon à accroître le salaire net pour les plus bas salaires.

- revaloriser les allocations logement et de rentrée scolaire, dépenses qui grèvent lourdement les revenus des ménages les plus modestes.

• La réduction du temps de travail doit profiter à tous les salariés

En s’attaquant aux 35 heures, la droite n’a pas seulement remis en cause une avancée sociale. Elle a aussi aggravé les inégalités de temps de travail entre les salariés. Notre objectif doit être, au contraire, d’étendre à tous les bénéfices de la réduction du temps de travail. Ce sera à la négociation sociale interprofessionnelle de permettre cette généralisation. Dans les branches et dans les entreprises, la négociation devra aussi aborder lucidement certaines des modalités ressenties négativement pas les salariés concernés (annualisation, flexibilité, modération salariale...) et s’attaquer à la question des conditions de travail, qui se sont dégradées depuis plusieurs années dans de trop nombreuses entreprises.

• Des protections renforcées contre la précarité

Considérablement augmentées par la droite, les exonérations de charges aux entreprises atteignent désormais 20 Milliards d’Euros par an. Pour l’Etat, la dépense est considérable. Pour les salariés, la contrepartie est douteuse. Ces exonérations ont même fini par freiner la progression des bas salaires sans pour autant montrer leur efficacité dans la lutte contre le chômage. Une réorientation majeure s’impose. Plus d’exonérations sans contreparties en termes d’embauche et de progression salariale. Elles devront notamment être davantage ciblées sur l’embauche des publics les plus en difficulté. Dans notre politique de l’emploi, priorité sera accordée aux exclus du marché du travail, les plus jeunes et les plus âgés, ainsi qu’à l’amélioration de la situation des femmes, encore fortement discriminées. Tout jeune qui a quitté précocement le système scolaire devra disposer d’un « droit de tirage » sur les années de scolarité qu’il n’a pas accomplies dans le cadre de sa formation initiale. En cas d’échec précoce, il disposera d’un accès garanti à la formation professionnelle continue. Pour favoriser le maintien dans l’emploi des salariés les plus âgés, il faudra leur permettre un accès effectif à la formation professionnelle.

Nous demanderons aux partenaires sociaux de négocier l’obligation pour chaque entreprise de proposer un bilan professionnel à tous les travailleurs âgés de 45 ans. L’expérience est une chance pour la nation : alors, arrêtons le gâchis qui consiste à écarter les seniors de l’entreprise. L’accès des femmes à la formation professionnelle sera amélioré ; les sanctions pour non-respect des lois sur l’égalité seront renforcées. Pour que le point de vue des salariés soit entendu et que leurs intérêts soient pris en compte dans les décisions stratégiques, nous généraliserons leur représentation dans les conseils d’administration ou conseils de surveillance des entreprises.

Dans une économie de plus en plus instable et incertaine, l’alternance se traduira notamment par une avancée sociale forte : la création d’une sécurité sociale professionnelle. En concertation avec les partenaires sociaux, il s’agira de faire reculer la précarisation des emplois et de prévoir des transitions protectrices pour chaque salarié entre les périodes de formation, d’emploi et éventuellement de chômage. Ceci appellera notamment d’aller vers l’extension à tous les salariés du bénéfice de dispositifs aujourd’hui réservés aux seuls salariés des grands groupes. Cette volonté se concrétisera par une mesure forte : la généralisation à tous les licenciés économiques, dans toutes les entreprises, d’un congé de reclassement. Cette disposition garantira aux salariés qu’aucune modification défavorable de sa situation personnelle ne pourra intervenir pendant une période suffisamment longue, afin qu’il puisse se consacrer à se former et à rechercher un emploi. Le financement de ce dispositif pourrait être assuré par l’entreprise, intégralement pour celles qui font des bénéfices, avec une contribution de l’assurance chômage et du Fonds National pour l’Emploi pour celles qui sont en difficulté.

La lutte contre la précarité se fondera aussi sur la responsabilisation des entreprises. Une surcotisation à l’assurance chômage sera instaurée pour celles qui recourent de manière excessive aux contrats à durée déterminée et à l’intérim, alors qu’elles possèdent les moyens de créer de l’emploi durable. L’instauration d’un taux maximal de contrats précaires, fixé par la négociation collective dans chacune des branches professionnelles, doit aussi être envisagée. Disons-le nettement : l’objectif est de redonner au CDI une place primordiale dans le contrat de travail des salariés. À l’inverse, le Contrat nouvelle embauche (CNE) Villepin-Sarkozy sera abrogé. Ces mesures s’accompagneront d’un renforcement du nombre et du rôle des inspecteurs du travail qui est aussi indispensable pour lutter plus vigoureusement contre le travail au noir.

• Soutenir nos entreprises, lutter contre les délocalisations

Nous socialistes avons contribué à réconcilier les Français et l’entreprise durant le premier septennat de François Mitterrand. Plus que jamais nous devons être à leur côté dans la mondialisation. Mais il faut reconnaître que la situation actuelle est choquante : pour les grandes entreprises, souvent des profits records, mais un investissement en berne. Cette situation devra être corrigée. Les profits de quelques-uns - comme les rémunérations exorbitantes et les « parachutes dorés » de certains dirigeants - seront plus lourdement taxés. À l’inverse, les bénéfices de tous les acteurs de la croissance - donc l’investissement et la distribution juste des fruits de la croissance - seront encouragés.

Notre action visera à restaurer un climat de confiance dans l’avenir. Oui, la France est attractive ! Oui, elle réussit ! Oui notre pays a des atouts : le dynamisme de notre démographie, la qualité de notre main-d’œuvre, l’excellence de nos infrastructures et de nos services publics, notre puissance touristique et agricole, notre savoir-faire industriel dans des filières clés pour notre avenir et le développement durable, la réussite de nos grands groupes. Dans ce contexte, notre politique industrielle visera à mettre en place un cadre favorable aux entreprises, non pas en démantelant la législation sociale comme la droite, mais en valorisant nos atouts et en mettant à leur disposition des outils nécessaires à leur développement  : infrastructures et services publics, systèmes d’information, parcs immobiliers d’entreprises, facilités de trésorerie et accès renforcé à la commande publique pour les PME innovantes. Des investissements publics seront mis en œuvre en faveur de grands programmes d’avenir et ambitieux au regard du développement durable.

Certains secteurs industriels stratégiques où nous sommes déjà puissants seront déclarés « secteurs d’intérêt national » (énergie, transports et automobile, chimie - pharmacie, agro alimentaire et télécommunications)  : le maintien des sièges sociaux et des capacités de recherche en France sera encouragé et nous travaillerons à des dispositions de protection de ces filières contre les OPA hostiles extra-européennes. Nous mènerons une action déterminée contre les délocalisations. L’essor de l’Inde et de la Chine peut menacer l’économie européenne d’un décrochage, dont les délocalisations sont l’expression. L’inquiétude des salariés est évidente. Nous devons y répondre. Pour cela, il faut mettre en place une stratégie d’ensemble, à la fois offensive et défensive, à tous les niveaux de l’action. A l’échelle européenne, plusieurs initiatives fortes devront être prises : l’équivalent d’un plan Marshall en direction des nouveaux Etats membres afin de financer l’élargissement et de lutter contre le dumping ; la mise en place d’un Fonds européen pour aider les salariés des entreprises qui délocalisent leur activité, à se reconvertir ou se reclasser ; de grands travaux d’infrastructures et un investissement massif dans la recherche scientifique pour stimuler l’activité en Europe et pour préparer l’avenir. Le comportement des chefs d’entreprises devra être responsabilisé : les délocalisations sauvages seront sanctionnées. Les salariés seront mieux protégés face aux conséquences de la mondialisation  : c’est le sens de la sécurité sociale professionnelle. La coopération entre les Régions sera encouragée afin de freiner en amont les délocalisations et de coordonner les interventions pour mettre fin aux concurrences néfastes entre territoires. Une politique commerciale européenne volontaire (tarif extérieur commun) devra compléter cette stratégie d’ensemble.

• Déployer notre économie vers les industries de pointe et les services A moyen et long terme, la lutte contre les délocalisations et la reconquête du plein-emploi exigent une meilleure spécialisation de notre économie dans la nouvelle division internationale du travail : entre le saupoudrage et le soutien aux secteurs qui tireront demain nos emplois et nos exportations, il est temps de choisir ! Les pays émergents sont des concurrents, mais aussi des clients. Leurs besoins sont immenses dans les secteurs où nous excellons. Dans le cadre d’une mondialisation vraiment régulée, nos économies peuvent trouver les voies de la complémentarité et nos échanges devenir profitables à tous.

Pour cela, nous devons nous tenir à la pointe des innovations technologiques, conserver et accroître notre avance dans l’offre des biens et des services à haute valeur ajoutée. Ce n’est pas en concurrençant la Chine, l’Inde sur le coût du travail que nous éradiquerons le chômage. Cette meilleure spécialisation économique passe par une augmentation qualitative de notre effort de recherche, en France et en Europe ; un plan « Université 2010 » prolongeant et amplifiant le plan « Université 2000 » ; le soutien à la création et au développement des entreprises innovantes ; le resserrement des liens entre entreprises, université et recherche ; la création d’une « Silicon Valley » et d’une « route 128 » à la française ; l’accès de tous les Français aux nouvelles technologies. En 2010, tous les Français devront être connectés à l’Internet, comme ils le sont aujourd’hui au téléphone. Avec les collectivités territoriales, nous prendrons les mesures nécessaires pour y parvenir grâce à un grand plan « Internet pour tous ». En particulier nous appuierons l’effort des conseils régionaux et généraux pour mieux équiper les foyers et les territoires. Ce redéploiement de notre système productif vers les secteurs de la frontière technologique, fortement créateur de richesses et d’emplois, permettra par ailleurs le développement d’un vaste secteur des services aux personnes, non délocalisable et pourtant sous-dimensionné. C’est une source d’emplois considérable, encore insuffisamment exploitée. Nous mettrons l’accent sur ce secteur pour lequel la France a un énorme retard à rattraper en privilégiant le développement de services à la personne accessibles au plus grand nombre, grâce à la diffusion de l’innovation. Il ne s’agit pas pour nous de développer les services des plus pauvres aux plus riches, mais de permettre la démocratisation de l’accès aux savoirs et aux services de demain. Défendre la sécurité sociale ; conquérir de nouveaux droits La droite a aggravé les inégalités d’accès à la santé et à la retraite. Elle organise l’insolvabilité de notre protection sociale pour mieux préparer son démantèlement et sa privatisation. Elle crée les conditions du recul, voire de la disparition du mouvement mutualiste au profit de l’assurance privée. Or, la sécurité sociale, n’est pas un fardeau. C’est un élément fondateur de notre contrat social. Nous prendrons des mesures qui permettront de la défendre et même d’accroître les droits.

• Un égal accès à des soins de qualité pour tous, une présence médicale plus équilibrée sur le territoire

En matière de santé, il revient à l’Etat de fixer les priorités que les partenaires sociaux mettront en œuvre, sous le contrôle du Parlement. Notre objectif sera d’offrir des soins de qualité à tous, pour toutes les pathologies et sur l’ensemble du territoire. Nous viserons à améliorer la couverture maladie notamment dans des domaines aujourd’hui mal pris en charge, comme les soins dentaires et ophtalmologiques. Nous mobiliserons l’ensemble des professionnels de santé pour mettre en œuvre une véritable politique de prévention et lutter contre les inégalités territoriales. En contrepartie de la prise en charge par l’assurance maladie des consultations médicales et de l’investissement de la collectivité dans la formation des médecins, il est légitime que la puissance publique garantisse un égal accès aux soins sur tout le territoire, en zone rurale comme dans les quartiers en difficulté. Ce n’est pas le cas actuellement, la présence des médecins libéraux étant très inégale sur notre territoire. Ce problème va s’aggraver à partir des années 2008, avec les départs massifs en retraite de la génération nombreuse de l’après-guerre.

Pour que les choses évoluent vraiment, nous proposons que pendant les cinq premières années d’exercice de sa profession, tout médecin débutant soit tenu de respecter l’équilibre du territoire dans le choix de son lieu d’installation. Plusieurs modalités sont envisageables pour mettre en œuvre cette évolution : l’une d’entre elles consisterait, à l’image de ce qui existe en Allemagne, à refuser le conventionnement à l’assurance maladie de tout médecin s’installant dans une zone bénéficiant déjà d’une présence médicale suffisante. De même, la création de maisons médicales sera encouragée en fonction des besoins des territoires délaissés. Les inégalités d’accès aux soins ne sont pas seulement territoriales, elles sont aussi sociales. En reconnaissant les dépassements d’honoraire non remboursés, la réforme de l’assurance maladie (loi Douste-Blazy d’août 2004) mène vers une médecine à deux vitesses : à ceux qui pourront se le payer, l’accès direct, aux autres, la file d’attente. Cette situation devra être corrigée. L’hôpital public est confronté à une véritable crise. Il manque aujourd’hui 15 000 personnels infirmiers et 3 000 médecins, particulièrement dans les zones à faible densité démographique. Nous organiserons des états généraux de l’hôpital public, dont les décisions se substitueront au plan « hôpital 2007 » de la droite.

• Un niveau décent pour les retraites

Concernant les retraites, nos concitoyens sont légitimement inquiets. Les gouvernements de droite, sous prétexte de « réformer » les retraites, les ont gravement mises en cause sans régler à long terme les problèmes financiers. Dans les permanences, sur les marchés, partout, chacun constate une préoccupation grandissante de nos concitoyens : quel sera le niveau de ma pension ? Pour les plus modestes et pour ceux qui ont exercé les métiers les plus durs, retraité risque de signifier pauvreté. Nous ne pouvons pas accepter une telle régression qui nous ramènerait finalement à ce qu’était la situation des retraités pauvres dans les années 1960 ! Nous n’ignorons évidemment pas les problèmes de financement et nous pensons qu’il faut, en responsabilité, les aborder. Certains estiment que le flou est souhaitable ou du moins inévitable. Nous proposons d’être clairs sur nos priorités. Notre objectif sera de soutenir le pouvoir d’achat des retraités les plus modestes. S’agissant de la durée des cotisations, il faudra mieux prendre en compte la pénibilité des emplois occupés au cours de la vie active et les inégalités d’espérance de vie entre les différentes catégories socioprofessionnelles. Nous abrogerons la loi Chirac - Fillon, ouvrirons la négociation, revaloriserons les petites retraites et financerons les besoins nouveaux par une cotisation assise sur tous les revenus. Nous devrons être conscients des lourdes conséquences du passage aux 25 annuités sur le niveau des pensions liées à l’application des décrets Balladur, en particulier pour les retraités ayant connu une carrière professionnelle marquée par le chômage et la précarité. La question du calcul des pensions sur les 10 meilleures années, d’abord pour ces salariés, devra être abordée dans la discussion que nous engagerons avec les partenaires sociaux. C’est ce cadre général, garantissant vraiment la pérennité des retraites par répartition, que nous proposons au PS dans les discussions à venir avec les autres formations politiques et avec les syndicats.

• Pour une prise en charge solidaire des dépendances Dans le champ du handicap et de la dépendance, nous sommes résolus à trouver de nouvelles sources de financement plus efficaces et plus justes que la suppression d’un jour férié. Les personnes en situation de handicap ont droit à l’autonomie et au plein exercice de leur citoyenneté. Une mobilisation de l’Etat, des collectivités locales, des organismes de sécurité sociale et d’allocations familiales, des mutuelles, des organismes collecteurs du 1 % logement sera nécessaire pour débloquer les moyens indispensables à la concrétisation du droit à compensation. En dépit de ses annonces, l’actuel Président de la République n’a pas pris les mesures nécessaires en faveur de l’intégration des handicapés. Nous agirons pour faciliter leur accès à l’emploi et leur vie quotidienne grâce à des équipements collectifs adaptés.

L’accroissement de l’espérance de vie est un formidable progrès pour nos sociétés modernes, mais aussi un considérable défi : comment préserver la solidarité pour les populations très âgées victimes de perte d’autonomie, comment conserver le lien social pour des hommes et des femmes de plus en plus seuls, comment préserver au maximum le maintien à domicile ou dans un environnement familier ? Pour répondre réellement au défi du vieillissement, les maisons de retraite seront modernisées et l’offre de services sera améliorée, notamment pour l’aide à domicile en assurant une réelle professionnalisation des carrières. Nous mobiliserons tous les moyens de la solidarité nationale pour relever l’immense défit de santé publique que constitue l’augmentation du nombre de patients atteints d’une maladie neuro-dégénérative (Alzheimer, Parkinson...). Beaucoup reste à faire pour améliorer l’accueil et la prise en charge des malades.

• Une politique familiale redistributive, une enfance mieux protégée

Pour préparer l’avenir, le dynamisme démographique de la France est un atout massif. En matière de fécondité et d’espérance de vie, notre pays se situe parmi les meilleurs en Europe. Nous le devons à la qualité de notre système de santé et au volontarisme de notre politique familiale. Tirant les leçons de la législature précédente, nous proposons de préserver l’universalité de notre politique familiale. Toutefois, tout en conservant à la politique familiale sa spécificité, deux orientations devront être privilégiées dans un souci de justice sociale : augmenter les prestations pour les familles les plus modestes et fiscaliser les allocations. Des progrès significatifs doivent aussi être accomplis dans la prise en charge de la petite enfance. En collaboration avec les collectivités locales, nous multiplierons les modes de garde et nous les améliorerons grâce à l’augmentation du nombre de places en crèches et leur adaptation aux nouveaux horaires de travail dans le cadre de la création d’un service public de la petite enfance. Nous mettrons aussi en place une vraie politique de soutien à l’enfance. En France, un million et demi d’enfants et d’adolescents souffrent en raison de problèmes sociaux, psychologiques ou familiaux. La réponse des pouvoirs publics à cette souffrance manque souvent de lisibilité pour les familles, de coordination entre les intervenants (école, services de santé, services sociaux, police, justice...), et de moyens suffisants. Nous proposons de créer un contrat familial pour l’enfant. En mobilisant l’ensemble des acteurs concernés, nous aiderons mieux les familles et organiserons un suivi plus efficace des enfants en danger ou souffrant de troubles psychiques. Dans ce cadre, nous relancerons la scolarisation précoce, l’éducation populaire, les activités périscolaires et l’accès de tous les enfants aux vacances. Avec le soutien des collectivités territoriales et de l’ensemble du secteur, nous lancerons en particulier une grande opération « Vacances-Famille » pour que toutes les familles puissent partir au moins une semaine par an en vacances. Le logement est un droit, rendons-le effectif La situation du logement relève de l’état d’urgence. Les tragiques incendies de l’été 2005 l’ont encore montré. Les plus pauvres sont relégués dans des immeubles insalubres. Pour tous, logement rime aujourd’hui souvent avec angoisse : explosion des prix et des loyers, pénurie de l’offre, augmentation des charges. Les clivages territoriaux, la ghettoïsation et ces profondes inégalités financières pour l’accès au logement viennent détruire le tissu social. La politique de la droite contribue à aggraver le mal-logement. La gauche a inscrit dans la loi le droit au logement. Il faut maintenant l’inscrire dans les faits. Un logement pour chacun - actifs, étudiants, familles, personnes âgées.

• Enrayer la hausse des loyers

Une première mesure à prendre rapidement pour stopper les dérives actuelles est une nouvelle régulation des loyers. Concrètement, nous entendons limiter la hausse des loyers à celle des prix à la consommation. Quant au logement social, nous devrons plafonner les loyers pour plusieurs années, en échange de facilités de financement au bénéfice des organismes HLM. Il faudra aussi revaloriser les aides personnelles, sacrifiées par la droite.

• Construire 120 000 logements locatifs sociaux par an Pour répondre à la pénurie, fixons-nous comme objectif de construire 120 000 logements locatifs sociaux nouveaux chaque année. Un logement construit, ce sont 3 emplois créés ; 120 000 logements ce sont donc plus de 300 000 emplois ! Soutenir le logement, c’est contribuer à la croissance, à l’emploi, à la qualité de la vie, à la réussite scolaire, à la dignité et à la sécurité. Nous en ferons un choix majeur. Nous relancerons aussi l’accession sociale à la propriété par le versement d’une prime de démarrage aux familles modestes et aux jeunes couples qui s’installent.

Il faudra lutter contre la spéculation par la mise à disposition de terrains publics et par une réaffirmation de la politique de mixité sociale. L’État s’engagera à céder aux organismes HLM gratuitement ses terrains disponibles, au lieu de les vendre, comme c’est le cas actuellement, à des bailleurs privés. Il participera financièrement à la création d’établissements publics fonciers locaux. Nous nous donnerons les moyens légaux de faire respecter l’obligation qui incombe aux communes d’un minimum de 20 % de logements sociaux. Toute commune concernée devra s’engager sur un échéancier précis à réaliser les logements sociaux manquants : sinon, elle perdra droit aux subventions publiques pour ses autres projets d’équipement. Chaque opération immobilière publique ou privée d’envergure devra comporter au moins 20 % de logements sociaux. Nous agirons sur les politiques d’attribution des logements sociaux : c’est là que se concrétisent les discriminations au quotidien. L’Etat, par le biais des préfets, retrouvera une véritable place à côté des élus locaux et des bailleurs (droit de réservation modernisé et effectif). Pour doter ce vaste plan des moyens nécessaires, un fonds de financement de la renaissance urbaine sera créé et géré par la Caisse des Dépôts et Consignations. Il concernera aussi les communes rurales. Il fera appel à l’épargne et sera constitué notamment de nouveaux titres d’épargne populaire. Les exonérations fiscales injustes, comme l’avantage De Robien, seront revues. La fiscalité immobilière sera réexaminée à partir d’un principe simple : pas d’avantage consenti sans contrepartie sociale précise. Nous renforcerons la taxation des plusvalues immobilières des sociétés et celle des particuliers - en dehors de leur résidence principale qui demeurera exonérée.

• Instaurer une garantie mutuelle locative

Un système de garantie mutuelle locative sera mis en place. Sur le modèle du « Locapass » pour les jeunes, il permettra de remettre sur le marché un plus grand nombre de logements inoccupés et d’inciter à l’investissement locatif privé. Comment ? En instaurant une double garantie « gagnant-gagnant » : une garantie pour le bailleur, des avantages pour le locataire. La majorité des logements locatifs privés appartient à de petits propriétaires, qu’il faut aider en leur garantissant le maintien du loyer pour une certaine période en cas de défaillance du locataire. Cette garantie peut aussi couvrir les frais de remise en état en cas de dégradation importante du logement. En contrepartie, il sera possible de réduire les garanties exorbitantes qui sont souvent exigées aujourd’hui des locataires. Il faudra limiter, c’est une urgence, le nombre de loyers versés d’avance ou le nombre de cautions solidaires exigées, qui excluent, de fait, de l’accès au logement, des familles, des jeunes salariés peu fortunés, même s’ils ont un emploi. Inversement, les logements restés vacants sans justification seront soumis à une « taxe d’inhabitation » vraiment efficace.

• De meilleurs logements pour construire la ville du développement durable

Nous devons construire plus de logements qu’aujourd’hui, mais nous devons aussi construire mieux. Cela implique de construire des logements accessibles et adaptés aux handicapés. Des logements adaptés au vieillissement de la population afin de permettre le maintien à domicile des personnes âgées qui le souhaitent. La lutte contre les changements climatiques passe par un habitat où la haute qualité environnementale est généralisée. Un plan bois et un plan solaire devront être lancés. Un programme national de renaissance urbaine sera développé,au-delà de l’indispensable rénovation des cités HLM, d’une envergure comparable à celui des « villes nouvelles », dans le cadre de contrats avec les agglomérations. Cette renaissance urbaine sera aussi l’occasion d’implanter des équipements éducatifs, culturels et sportifs neufs dans les territoires qui en sont dépourvus, de concevoir des immeubles de nouvelle génération multifonctionnels, de développer cette approche de mixité spatiale sans laquelle aucune mixité sociale n’est envisageable. Ce modèle de la ville du développement durable que nous voulons défendre, c’est une ville qui lutte contre la pollution, favorise une utilisation économe des ressources, promeut les transports collectifs, généralise la haute qualité environnementale dans les constructions. C’est une approche aussi du droit de cité où les « citadins-citoyens » ont la parole (élection au suffrage universel direct des autorités d’agglomération, développement de la démocratie participative), où la promotion de l’égalité des chances pour tous les jeunes habitants constitue un impératif. Sauver l’école publique ; remettre notre université et notre recherche au premier rang Parmi les victimes de la politique de la droite : l’Ecole, l’Université et la recherche. Fidèle à ses habitudes, la droite a eu en matière scolaire comme en matière de recherche une idée maîtresse : faire des économies au mépris de l’avenir. Elle laisse l’école publique se dégrader, désireuse, comme vient de l’affirmer le ministre actuel de l’Education nationale, d’accorder plus de moyens à l’enseignement confessionnel au détriment de l’école de la République. Nous savons ce qui s’annonce par ce moyen : l’ouverture de l’enseignement au marché.

Nous socialistes rétablirons une vraie ambition scolaire et universitaire pour le pays. La démocratisation de l’école, l’avenir du métier d’enseignant, le renforcement de nos universités et de notre recherche seront au cœur de notre action. Le budget de l’Education devra redevenir le premier de la Nation.

• Répondre aux défis de l’Ecole : démocratisation, massification et refus de la marchandisation Démocratiser l’école, c’est lutter contre l’échec scolaire, qui frappe d’abord les enfants des milieux modestes. Pour agir contre les inégalités familiales, la prise en charge de la petite enfance sera améliorée. Nous faciliterons un véritable droit garanti de garde des enfants. Le rôle de la maternelle sera réaffirmé par la scolarisation obligatoire à 3 ans. A l’école, au collège et au lycée, l’encadrement scolaire et péri-scolaire sera renforcé dans les ZEP et les quartiers en difficulté : moins d’élèves par classe, davantage d’enseignants, d’infirmières et de médecins scolaires pour les enfants qui rencontrent plus de difficultés, c’est non seulement juste, mais aussi efficace en termes de résultats. De même, le maintien de l’école en milieu rural sera assuré. Pour atténuer la rupture entre l’école élémentaire et le collège, des expérimentations seront menées, avec une polyvalence accrue des enseignants en classe de 6ème et de 5ème. Le rôle éducatif et culturel de l’école
- transmettre un savoir mais aussi préparer à l’exercice de la citoyenneté et ouvrir sur le monde - sera réaffirmé. Nous développerons les enseignements artistiques à l’école. Cessant de confondre échec scolaire et diversité des parcours, nous affirmerons l’objectif de professionnalisation et de qualification durables de chaque jeune. Face aux pénuries de maind’œuvre qualifiée qui s’annoncent et aux défis de l’élévation incessante des qualifications requises dans le travail, la réorganisation, le développement et les mises en synergie de l’ensemble des enseignements professionnels et technologiques sont une priorité. Une loiprogramme sur l’organisation et le développement des enseignements professionnels et technologiques sera mise en débat dans les Régions et présentée devant le Parlement. Une politique ambitieuse de promotion des meilleurs accompagnera cette mobilisation  : nous instaurerons des bourses en faveur des élèves modestes les plus méritants, dès la sixième. Nous mettrons en place des internats pour offrir des conditions de travail satisfaisantes aux enfants qui en sont privés à la maison.

• Avec les enseignants

On n’améliorera pas le fonctionnement de notre école, et notamment sa démocratisation, sans la confiance des enseignants. Le mépris envers les enseignants exprime toujours un mépris pour l’école. Cette attitude est fréquente à droite. Mais des propos inutilement agressifs ont été tenus au début de la législature précédente, nous éloignant un temps de ceux que nous aurions dû soutenir. En 2007, nous aurons un vrai rendez-vous avec les professeurs. Ne le manquons pas. Au moment où il nous faut recruter environ 40.000 nouveaux maîtres par an, c’est un véritable contrat de confiance que nous devons établir avec tous les maîtres. Le métier d’enseignant est devenu très difficile à tous les niveaux, et plus particulièrement à l’école primaire et au niveau du collège. On ne peut refuser de prendre en compte cette réalité humaine lorsqu’on aborde les problèmes d’effectifs par classe ou celui des adultes présents dans les établissements. Oui, l’école a un coût mais chaque fois que le service public recule, les services marchands avancent. Il faut accorder une attention particulière aux enseignants débutants. Il n’est pas normal de les envoyer dans les quartiers les plus difficiles alors qu’ils n’ont encore aucune expérience du terrain. Les professeurs volontaires pour enseigner dans les secteurs les plus exposés pourraient bénéficier de progressions indiciaires leur permettant ultérieurement de choisir une autre affectation. Le moment est aussi venu de stabiliser les fonctions d’aide aux enseignants et de ne plus laisser cela aux aléas de la vie politique et des alternances. Ces adultes font partie intégrante de la vie des établissements. Il faut permettre durablement à de jeunes étudiants d’accompagner les enseignants dans l’ensemble de leurs missions et prévoir la possibilité de prérecrutement d’enseignants parmi ces étudiants, notamment pour les disciplines et les régions dont il faut élargir les viviers de recrutement. L’école de la République a pu se construire car de nombreux instituteurs issus des classes populaires lui devaient leur propre promotion sociale. La formation des maîtres aujourd’hui n’a plus autant cette fonction. Pour permettre aux enfants dont les parents n’ont pas les moyens d’assumer le coût des études supérieures, de poursuivre leurs études et d’enseigner, nous mettrons en place un prérecrutement des enseignants au sortir du lycée. Des passerelles seront aussi offertes aux enseignants qui souhaitent exercer durant un temps d’autres fonctions au sein de l’Etat : comme l’ensemble des fonctionnaires, les enseignants doivent avoir un vrai droit à la mobilité professionnelle.

• Un « plan universités 2010 »

Les comparaisons internationales sont nettes : la France ne consacre pas assez de moyens à son enseignement supérieur. Nous mettrons en œuvre un nouveau « Plan universités ». Rien ne sera possible sans une amélioration de la situation matérielle des étudiants : actuellement, la République consacre 6 000 euros par an en moyenne à chaque étudiant ; nous devrons tendre vers un doublement de cet effort au cours de la législature pour assurer à chaque jeune en formation un statut qui garantisse leur autonomie. Nous ferons reculer l’échec dans les premiers cycles universitaires par une meilleure orientation des étudiants et un encadrement renforcé : le tutorat deviendra la règle. Un effort particulier sera accompli pour encourager les jeunes et en particulier les jeunes filles à se diriger vers les filières scientifiques. Il faudra aussi faire redémarrer la méritocratie républicaine dans les grandes écoles qui recrutent de moins en moins des enfants du peuple. Pour cela, nous offrirons un accès garanti à au moins 5 % des meilleurs bacheliers de chaque lycée aux classes préparatoires et aux filières sélectives, comme les instituts d’études politiques. Cette perspective redonnera confiance aux meilleurs élèves des ZEP et des zones en difficulté. L’ouverture de nouvelles classes préparatoires y compris dans les zones défavorisées sera nécessaire. Il est grand temps de décentraliser l’excellence.

• Mobilisation nationale pour la recherche

L’effort en faveur de nos universités sera accompagné d’une mobilisation nationale pour la recherche, traduite par une loi d’orientation et de programmation sur la recherche et l’enseignement supérieur. Elle comportera une programmation pluriannuelle de l’emploi scientifique. Redevenue une priorité budgétaire, la recherche publique sera renforcée et modernisée à partir des propositions faites par les Etats généraux de la recherche. L’attractivité des carrières de chercheurs sera améliorée, notamment en élevant les rémunérations. L’équilibre entre la recherche fondamentale, la recherche industrielle et l’innovation sera affirmé. Le rapprochement entre les universités, les grandes écoles et les organismes de recherche sera favorisé. L’objectif des 3 % du PIB consacré à la recherche devra être fortement affirmé.

Contre le moins d’Etat, la puissance publique au service de l’intérêt général. La solidarité et l’égalité passent par les services publics

• Nous sommes partisans d’un Etat volontariste

Les Français sont attachés à l’Etat. En particulier, parce que, chez nous, c’est l’Etat qui a forgé la Nation et qui, bien souvent, a donné le signal de la modernisation économique et sociale. La demande d’Etat est d’autant plus forte qu’une partie croissante de la population ne se sent pas assez soutenue, défendue, protégée par la collectivité. Salariés victimes des délocalisations, habitants des quartiers en difficulté ou des zones rurales en recul, jeunes en quête d’avenir, seniors qui souhaitent savoir quelle France ils laisseront à leurs enfants, tous d’une façon ou d’une autre ont besoin de l’Etat. Vingt ans après les contre-révolutions thatchériennes et reaganiennes, la demande d’Etat n’est plus une exception française. Chacun se rend compte que la mondialisation livrée à elle-même, les marchés sans contrepoids, les atteintes à l’environnement sans sanction, les communautés sans repères supérieurs, constituent un facteur de déstabilisation et de destruction de notre bien être collectif et de notre vivre ensemble planétaire. Les populations pauvres de Louisiane en ont été récemment les tristes victimes. Nos amis nordiques ont fait la démonstration qu’un Etat actif et moderne, fondé sur un niveau adapté de prélèvements et de redistributions, pouvait représenter un vrai atout pour la croissance économique. Alors, nous socialistes, assumons nettement notre attachement à l’autorité et au rôle de l’Etat. N’en doutons pas, l’Etat sera un enjeu fort de clivage avec la droite en 2007. Face à nous, nous risquons de trouver les partisans d’un étrange cocktail : un Etat spectacle pour la sécurité, un Etat communautariste pour la citoyenneté, un Etat passif pour l’économie, un Etat précaire pour le social et un Etat partisan pour les institutions et la justice. Cette conception n’est pas la nôtre. Nous nous y opposerons terme à terme. Nous défendrons un Etat protecteur : garant de la sécurité extérieure et intérieure des citoyens, agissant vraiment pour la sécurité sociale et professionnelle des salariés. Nous proposerons un Etat stratège : aiguillon pour la croissance économique, producteur pour les grands services publics, facilitateur et partenaire pour les PME, défricheur d’avenir pour notre compétitivité, nos industries et notre recherche. Nous voulons un Etat laïc à l’égard des cultes, dans la fidélité à notre conception républicaine de la Nation. Nous exigeons un Etat impartial pour la justice, le fonctionnement des institutions et les nominations. Défendre notre Etat, c’est bien sûr valoriser le travail de ses agents, quand la droite ne cesse de les dénigrer. C’est améliorer vraiment la qualité du service rendu, quand la droite s’en soucie peu : pour elle, moins l’Etat fonctionne, plus sa privatisation est légitime. Ecole, hôpital, police, justice, administrations sociales, tout cela a un prix, auquel notre collectivité doit être prête. En échange, le service doit être à la hauteur : continu et accessible - en ayant recours à toutes les possibilités ouvertes par les nouvelles technologies -, simple et efficace. Avec les agents, avec les usagers, avec les collectivités locales, nous nous engagerons pour que notre Etat et nos administrations soient à la hauteur des attentes de tous.

• Porter un coup d’arrêt au démantèlement des services publics

Les services publics sont un instrument essentiel pour faire reculer les inégalités et pour préparer l’avenir. Ils participent à l’aménagement et à l’équilibre de nos territoires. Ils ne peuvent pas être soumis à une stricte obligation de rentabilité. Malheureusement, dans les faits, la paupérisation, la privatisation, la dérégulation, sont souvent la réalité du service public, après les attaques menées par la droite.

• En 2007, nous commencerons par établir un audit des grands services publics (EDF, La Poste, SNCF, approvisionnement en eau, etc.) et des conséquences des politiques de libéralisation dans ces secteurs : évolution des tarifs, niveau d’investissement, cohésion sociale, couverture territoriale. A partir de ce diagnostic, nous engagerons un plan d’investissement et de modernisation.

• Dans chaque secteur, un nouveau cahier des charges sera établi pour actualiser les obligations des entreprises publiques et privées assurant une mission de service public. Ces cahiers des charges sectoriels exprimeront les grands principes qui fondent notre pacte républicain : la cohésion sociale, l’universalité d’accès aux services, la cohésion territoriale fondée notamment sur la péréquation tarifaire, la transparence tarifaire. Ces nouveaux cahiers des charges, créés par la loi, s’imposeront aux différentes autorités de régulation des secteurs des télécommunications, de l’énergie, des transports, de l’eau et de la poste. Une société des participations publiques sera créée pour accompagner les besoins de développement des entreprises majoritairement détenues par l’Etat et lever les capitaux nécessaires. Afin à la fois de garantir le contrôle public et de donner aux grandes entreprises en charge de missions de services publics, les moyens de se développer, une société des participations publiques sera créée. Son capital initial sera constitué par les apports faits par l’Etat de ses participations. Elle aura pour objet de lever des fonds pour accompagner les besoins d’investissement et de croissance des entreprises publiques et de favoriser les partenariats stratégiques et industriels en France et à l’étranger des entreprises dont elle détiendra les participations. Cette société des participations publiques fera appel à l’épargne publique notamment en émettant des parts sociales, non cotées, à revenu garanti.

• Nous porterons un coup d’arrêt à la privatisation des grands services publics industriels et commerciaux. Là où la droite privatise EDF et GDF, nous considérons, nous, que le secteur de l’énergie sera de plus en plus stratégique, avec des exigences de sécurité particulières liées au nucléaire et une exigence vitale de diversification et d’économie des énergies ; nous sommes donc déterminés à stopper immédiatement l’ouverture du capital dans l’énergie. Pour EDF, notre objectif est de revenir progressivement à la pleine propriété publique de l’entreprise. Cette mesure a un coût, elle sera donc réalisée par étapes pour tenir compte des autres priorités à financer. Une partie des bénéfices de l’entreprise sera consacrée au rachat des actions. Dans le même temps, la hausse des tarifs du gaz et de l’électricité sera limitée.

• Nous instaurerons une « couverture énergie universelle », telle que l’ont proposée plusieurs de nos camarades élus du Pas-de-Calais et du Nord, avancée populaire qui sera une nouvelle conquête de la gauche.

• En matière de transports collectifs, une politique ambitieuse de l’Etat sera mise en œuvre en soutien aux agglomérations. Il s’agira de clarifier les compétences des différentes collectivités territoriales afin d’éviter des ruptures entre transports urbains et transports inter-urbains. Un effort particulier sera engagé pour une meilleure desserte des zones rurales et des quartiers. L’accès aux transports et, plus largement, aux services publics (école, hôpital, police-gendarmerie, poste) est un élément majeur du droit de cité pour tous que nous souhaitons promouvoir.

• Sur le terrain, notamment dans les zones rurales, le service public sera vigoureusement défendu et un dialogue interviendra avec les habitants et les élus visant à mieux définir les besoins et à proposer les évolutions qui préservent chaque territoire.

• Nous nous mobiliserons pour un cadre juridique protégeant les services publics au niveau de l’Union européenne. Nous proposerons d’inscrire le service public parmi les objectifs mêmes de l’Union ; dans les traités existants, nous agirons pour rééquilibrer le couple concurrence-service public en faveur de ce dernier. Pour une société durable, la social-écologie Notre modèle de développement arrive à un point de rupture. Si tous les pays du Sud adoptaient les modes actuels de production et de consommation des pays occidentaux, il faudrait utiliser les ressources de trois planètes ! En France comme dans le monde, ce sont d’abord les ouvriers, les employés, les chômeurs qui sont les plus pénalisés par le bruit, par l’étouffement urbain, par le renchérissement des prix de l’eau et du pétrole, conséquence de l’épuisement des ressources et de leur gaspillage.

Aucun socialiste ne peut faire l’impasse sur la crise écologique. L’heure n’est plus à la politique des grands mots destinés à masquer l’inaction. Il faut agir beaucoup plus fort que jusqu’ici. Utiliser ensemble tous les instruments disponibles : le budget, la fiscalité, la réglementation, la régulation internationale. Montrer une nouvelle conscience citoyenne. Prendre en compte les besoins plus larges que la seule demande marchande. Privilégier la prévention plutôt que la réparation source de profits. Penser aux enjeux de l’avenir plutôt qu’au court terme. C’est cela la social-écologie, c’est-à-dire la prise en compte simultanée des exigences sociales, économiques et environnementales pour bâtir un développement vraiment durable et équitable, durable parce qu’équitable, un développement humain. C’est le défi que la droite et son libéralisme ne pourront jamais relever ; c’est le défi que nous devrons relever.

• La social-écologie supposera dans notre pays un véritable service public de l’environnement.

Il garantira à tous une protection contre les nuisances et les dangers industriels. L’accès aux biens publics naturels, au premier rang desquels l’eau, sera aussi au cœur de ses missions. Des écarts scandaleux existent sur les prix de l’eau : sous des formes diverses, l’intervention publique devra protéger, réguler, améliorer, égaliser l’accès à ce bien précieux. N’attendons pas que l’eau soit au prix du pétrole pour agir.

• Concernant les transports, la flambée du prix du pétrole nous oblige à repenser en profondeur nos habitudes. Il faut avoir le courage de remettre en cause l’utilisation de la voiture en centre-ville et le tout-camion pour le transport de marchandises. De nouveaux instruments sont indispensables, comme des contrats « villes avec moins de voiture », un réexamen des conditions de transit des camions sur notre territoire et le développement du ferroutage. Des initiatives seront prises pour aider à l’émergence des « voitures propres » (bio-carburants, voitures électriques, à moteur hybride, demain peut-être à pile à l’hydrogène).

• Nous devrons viser le maintien de la diversité biologique de la nature. Nous rendrons public un diagnostic des espèces en voie de disparition, des sites gravement pollués et des milieux biologiques menacés. Commençons par appliquer les directives européennes, que nous n’avons jamais mises en œuvre à Paris après les avoir adoptées à Bruxelles. Retrouvons notre crédibilité européenne et internationale en matière d’environnement pour soutenir un programme de dépollution de la Méditerranée, en vue de retrouver d’ici dix à quinze ans une mer propre.

• Alors que la répétition de catastrophes naturelles destructrices - canicule, feux de forêt, tempêtes, inondations - montre la nécessité de pouvoir faire face efficacement à tous les risques qui pèsent sur les populations, nous renforcerons les moyens de la sécurité civile et nous améliorerons la capacité de coordination et d’intervention de l’Etat.

• La social-écologie doit aussi nous guider dans la défense et la valorisation de notre patrimoine. Par sa géographie, la richesse de ses paysages et de ses terroirs, de son patrimoine historique et culturel, la France est la première destination touristique du monde. C’est pour notre pays un atout et c’est une chance : 6,5 % du PIB et près d’un million d’emplois sont concernés. Or, ce secteur économique est insuffisamment reconnu et soutenu. L’industrie du tourisme doit devenir un axe fort de la politique économique et sociale de la France. Nous mettrons en œuvre une politique incitative, conjuguant moyens de la puissance publique, des collectivités territoriales et des acteurs privés, pour investir sur un foncier ou un immobilier très convoité par les investisseurs étrangers afin de développer l’hébergement (patrimoine ancien notamment) dans le respect de la qualité de nos paysages et de nos espaces. Le cœur de l’activité touristique sera ainsi maîtrisé. Nous ferons aussi en sorte que les travailleurs saisonniers disposent d’un logement et de conditions de travail décents.

• Nous mobiliserons l’effort de la Nation pour une agriculture durable. Pour donner un nouvel élan à une agriculture moderne, mais en plein désarroi, nous chercherons à lui redonner la place qui lui revient dans la société : nourrir les hommes, valoriser et sauvegarder la nature. Rien de cela ne sera possible si nous ne menons pas une politique résolue reposant sur la régulation des marchés au niveau européen et sur la relégitimation des moyens publics en faveur de la petite et de la moyenne exploitation. Dans cette perspective, une réforme des structures et des organismes de l’agriculture sera indispensable pour préserver l’emploi agricole. Seule une agriculture durable peut redonner sa fierté au monde paysan. Nous développerons l’agriculture biologique et soutiendrons les modes de production durables de nos terroirs et l’agriculture périurbaine. Nous multiplierons les mesures agro-environnementales et rétablirons les contrats territoriaux d’exploitation supprimés par la droite. Nous assurerons le développement des espaces ruraux sur le long terme : diversification des pratiques agricoles, développement raisonné du tourisme vert.

• Le moratoire sur les OGM devra être prolongé tant que l’incertitude subsiste sur leurs conséquences en matière de santé et d’environnement.

• La lutte contre le changement climatique deviendra une vraie priorité. La création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement et la prise en compte de l’environnement par l’OMC en seront les garants. La politique européenne des transports doit être réorientée vers cet objectif, avec une harmonisation fiscale et sociale du transport routier vers le haut. Un programme national massif d’économies d’énergie dans les logements et en faveur des énergies renouvelables prendra le relais du pathétique « Plan climat » préparé par le gouvernement Raffarin. Il s’agira de retrouver l’esprit de la stratégie nationale de développement durable élaborée en 2001 avec nos alliés Verts.

• S’agissant du nucléaire, nous récusons le tout nucléaire et nous pensons que sa part devra diminuer. Une diversification des sources d’énergie est impérative. Elle devra être conduite en priorité avec des producteurs et des opérateurs publics. EDF et GDF, maintenues dans le giron public, seront des acteurs majeurs du développement de ces énergies nouvelles. Une fiscalité juste et redistributive Pour les socialistes, l’impôt est la contrepartie des services collectifs. Il permet le financement de l’action publique en même temps qu’il constitue un levier de redistribution de la richesse. En 2007, nos chantiers prioritaires nécessiteront des moyens financiers. Or, MM. Chirac, Villepin, Sarkozy laisseront les finances publiques dans une situation catastrophique. La situation sera donc difficile : le souligner est nécessaire lorsqu’on souhaite être lucide et crédible. Ce n’est pas une raison pour refuser toute avancée et renoncer à tout progrès.

Notre première réponse consistera à recréer de la richesse collective en favorisant le redémarrage de la croissance et de l’innovation. Le cycle récessif ouvert par la droite entraîne des effets en chaîne : la hausse du chômage plonge les comptes sociaux dans le déficit ; la baisse de la croissance débouche sur l’effondrement des recettes fiscales. Comme nous avons su le faire de 1997 à 2002, il faudra inverser cette spirale par une politique économique orientée vers la croissance et l’emploi. Des redéploiements seront opérés dans les dépenses et dans les avantages consentis. Les niches fiscales les plus coûteuses seront revues et plafonnées. Le coût représenté par les diverses exemptions ou exonérations d’impôts s’élève à environ 50 milliards d’euros par an : il équivaut au produit de l’impôt sur le revenu. Pour conquérir de marges de manœuvre, pour renforcer la justice fiscale et améliorer le caractère redistributif de notre système de prélèvements, il faudra instaurer un plafonnement des avantages fiscaux. Les recettes fiscales procurées par un tel plafonnement pourraient atteindre jusqu’à 10 milliards d’euros. Des moyens seront aussi dégagés par la remise en cause des exonérations de charges actuellement consenties aux entreprises. Dans le contexte de forte croissance de la législature précédente, nous avions cherché à alléger la fiscalité sans porter atteinte aux services publics ni renoncer à notre objectif de redistribution par l’impôt. La situation en 2007 sera très différente. Les finances publiques seront en grave déséquilibre et les services publics devront être remis en état. Les allégements fiscaux ne seront donc pas d’actualité. Notre fiscalité sera revue dans le sens de l’efficacité économique, de la justice sociale et du soutien à la consommation populaire. Nous sommes attachés au principe de l’impôt progressif. Nous remettrons en cause le plan Villepin-Breton qui vise à détruire la progressivité de l’impôt sur le revenu et l’ISF. Nous sommes en désaccord avec ceux, y compris dans nos rangs, qui suggèrent une augmentation de la TVA. Un rééquilibrage entre fiscalité directe et fiscalité indirecte devra être recherché, ainsi qu’entre fiscalité du travail et du capital. Le démantèlement en cours de la fiscalité du patrimoine sera stoppé. Au niveau européen, priorité sera donnée à une démarche d’harmonisation de la fiscalité sur les entreprises, afin d’enrayer le grignotage de l’impôt sur les sociétés et l’alignement sur les taux minimaux.

Nous remettrons à plat le financement de la sécurité sociale : fiscalisation sur l’ensemble des revenus dans le cadre d’une fusion entre l’IR et la CSG et, pour les entreprises, instauration d’une cotisation sur la valeur ajoutée, à taux faible, se substituant progressivement aux actuelles cotisations sociales patronales. Cette réforme devrait alléger le poids des prélèvements qui reposent presque exclusivement sur les revenus du travail et renforcer l’assise financière de la sécurité sociale. C’est dans ce cadre que nous déciderons du devenir de la Prime pour l’emploi en concertation avec les organisations syndicales. Nous ne pouvons pas accepter, comme l’a décidé la droite, qu’elle serve désormais à encourager le temps partiel subi et qu’elle se substitue à la fiche de paye. Des ressources nouvelles seront également mobilisées : plutôt que de dormir, les réserves de la Banque de France contribueront à financer la préparation de l’avenir, la recherche et l’innovation ; la reconstruction des banlieues sera facilitée grâce à la mobilisation de l’épargne des Français avec l’appui de la Caisse des dépôts. Ces différentes mesures nous permettront de financer nos priorités - dont la réalisation sera étalée dans le temps - sans détériorer l’état des finances publiques et sans reporter la charge sur les générations futures. Elles nous permettront de relancer les mécanismes de redistribution aujourd’hui grippés et sans lesquels progrès et protection ne sauraient se concilier.

Contre le libéral-communautarisme, la République pour tous

Refonder le pacte républicain

Pour nous socialistes, la République n’est pas seulement un idéal. C’est aussi une exigence.

Liberté, égalité, fraternité : ces valeurs n’ont de sens que si nous nous mobilisons pour les rendre chaque jour plus fortes et plus effectives.

• Vive la laïcité, halte aux discriminations

Au congrès de Dijon nous avons rappelé que la laïcité est au cœur du projet d’émancipation des socialistes et de la République. La laïcité constitue l’architecture du vivre ensemble. Elle est tournée vers ce qui unit les hommes. Face aux intégrismes, son actualité est plus forte que jamais. On le voit avec l’impasse des modèles multiculturalistes en Europe. Alors, face à la droite et au communautarisme de l’UMP, assumons-la franchement. Ne soyons pas hésitants, comme certains, tentés par une forme de « droit à la différence » : faisons clairement le choix d’une société laïque. Et portons l’exigence d’une laïcité étendue comme un axe transversal de nos politiques et une référence permanente de nos valeurs. Laïcité à l’Ecole et dans les services publics, mixité partout. Notre devoir est de conserver à l’école, « asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas » (Jean Zay), sa mission : former les futurs citoyens en laissant leurs différences à l’extérieur. Le « ni-ni »
- ni voile à l’école, ni interdiction du voile dans les écoles, prôné par certains de nos responsables
- ne faisait qu’alimenter la confusion. Nous avons vu juste en réclamant la loi de 2004 interdisant le port de signes religieux à l’école.

Prolongeant la réaffirmation de la laïcité à l’école, nous instaurerons une charte rappelant les principes laïcs dans tous les services publics, à l’hôpital et dans l’entreprise. La mixité dans les lieux publics doit être réaffirmée. En effet, sous la pression des intégrismes, la mixité gagnée par les luttes émancipatrices est attaquée jusque dans la sphère publique : nous soutiendrons toutes celles et ceux qui se battent pour les droits des femmes, l’égalité des sexes et contre toutes les formes de violence.

Egalité entre les cultes. La laïcité assure à chacun la liberté de conscience, celle de croire ou de ne pas croire. La laïcité, c’est l’égalité entre tous les cultes. Parce qu’il est d’implantation plus récente sur notre territoire, l’Islam mérite une attention spécifique. Les municipalités et les intercommunalités ne doivent pas craindre d’autoriser la construction de mosquées ou de salles de prières. Sans remettre en cause la loi de 1905, il est possible de favoriser la construction de ces édifices en ayant recours à des associations cultuelles et à des baux emphytéotiques.

La République contre les discriminations. Nous défendrons mieux la diversité de la France en luttant contre toutes les discriminations qui touchent bon nombre de nos concitoyens, notamment à raison de leur origine ou de la couleur de leur peau. Egaux en droits, certains de nos compatriotes « sont moins égaux que les autres » dans les faits. La tentation de la discrimination positive et de son cortège de mesures destructrices pour le pacte républicain (recensement des individus en fonction de leurs origines, quotas, communautarisme), ne se combat pas dans la proclamation mais par l’action concrète pour l’égalité. En priorité, toute discrimination doit être sanctionnée. Les parquets doivent être dotés de moyens à cet effet. Un corps d’inspecteurs spécialisés dans la lutte contre toutes les discriminations devra être créé. La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour la promotion de l’Egalité devra être renforcée et ses missions clarifiées. Les actions de sensibilisation, d’information et d’éducation populaire seront systématisées. L’Etat devra se montrer exemplaire. Nous favoriserons l’accès aux responsabilités de tous les enfants de la République, quelle que soit la couleur de leur peau, leur religion, leur origine, de métropole, d’Outre-Mer ou d’ailleurs : ce n’est pas une affaire de quotas juridiques, mais de comportement et de volonté politique. Laïcité des mœurs et des modes de vie. En matière de mœurs et de modes de vie, nous sommes favorables à une société tolérante, qui reconnaisse à chacun sa place, des droits et une égale dignité à chacun. Le couple et la parentalité homosexuels sont des réalités, déjà reconnues par la loi dans nombre de pays européens. Dans notre Parti comme dans la société, nous savons bien que les réponses à apporter ne vont pas de soi, mais une chose est certaine : après avoir créé le PACS, nous, socialistes, devrons porter de nouvelles évolutions allant dans le sens de l’égalité des droits.

• L’égalité réelle pour l’Outre-Mer

Français théoriquement à part entière, nos compatriotes d’Outre-Mer demeurent, selon la célèbre formule d’Aimé Césaire, traités comme des « Français entièrement à part ». Aussi l’action publique outremer devra t-elle, à l’avenir, reposer sur deux principes fondamentaux :

- La levée de toute hypothèque institutionnelle : autrement dit, permettre à chacune des collectivités de disposer dans la République du cadre statutaire adapté à ses réalités et à ses aspirations. Une fois posé ce principe, les aspirations de chaque collectivité appellent un égal respect qu’il s’agisse, là où elle se fait jour, d’une demande d’autonomie accrue ou, au contraire, de resserrement sur le droit commun comme le souhaitent les Réunionnais ou les Mahorais. Au demeurant, une condition impérative à toute évolution : le consentement préalable des populations recueilli par la voie du référendum local. Ce principe sera étendu, par la voie d’une révision constitutionnelle, au statut européen des collectivités d’Outre-Mer.

- La recherche d’une égalité réelle, c’est-à-dire une égalité économique et sociale, entre l’Outre-Mer et la métropole. L’objectif assigné aux politiques publiques sera clairement de rompre avec une situation où le revenu disponible par habitant se révèle partout Outre-Mer très inférieur à la moyenne métropolitaine.

Sur la base de ces principes, il sera proposé pour chacune des collectivités d’Outre-Mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna) un contrat de législature. Affirmer l’importance de l’Outre-Mer dans la République n’est pas seulement une question d’équité. C’est aussi essentiel pour la rénovation de notre pacte républicain. Encore faut-il reconnaître l’apport historique de l’Outre-Mer à une République à laquelle, pour sa part, il n’a jamais fait défaut. Refuser d’occulter les pages sombres de notre histoire, qu’il s’agisse de la traite négrière et de l’esclavage, crimes contre l’humanité, ou de l’injustice absolue qui a toujours caractérisé les sociétés coloniales, n’est nullement affaire de culpabilisation collective. C’est rappeler que la République n’est forte que lorsqu’elle est fidèle à ses principes et à ses valeurs et que le sort fait à l’Outre-Mer en a toujours été l’un des premiers révélateurs. Là est notre différence avec la logique néo-coloniale de la droite qui, de la négation du suffrage universel en Polynésie à la remise en cause du droit du sol à Mayotte, n’a de cesse de placer l’Outre-Mer hors la République. Pour nous au contraire, non seulement l’Outre-Mer est partie intégrante de la République, mais nier la République Outre-Mer, c’est la nier tout court.

• Réaliser les espoirs des jeunes Beaucoup de jeunes sont en difficulté. La formation ? Trop nombreux sont ceux qui échouent au lycée et à l’université. Trop nombreux, ceux qui vivent comme une sorte de relégation sociale leur trajectoire dans l’enseignement professionnel. Le travail ? 1 jeune actif sur 4 est au chômage. Les loisirs ? Difficile d’entrer « en boîte » quand on n’a pas la « bonne » couleur. L’accès au cinéma, au théâtre, à la musique, à la danse, à la lecture, aux arts plastiques ? Réservés souvent aux enfants des centres villes. Dans les quartiers ? Les jeunes sont fréquemment stigmatisés. Dans les campagnes, ils sont souvent délaissés. Toutes ces barrières, tous ces échecs, encouragent le repli sur soi et les phénomènes communautaires. Cette situation, que Chirac, Sarkozy et Villepin et leurs soutiens feignent de découvrir, est grave. Nous devons témoigner notre confiance aux jeunes. En complément des actions entreprises pour l’école, l’emploi et pour le logement, (service public de l’orientation, revalorisation de l’enseignement professionnel, allocations de formation, suppression des cautions pour les logements, etc.) nous devrons agir en faveur de leur intégration sociale, professionnelle et civique dans la société. Dans cet esprit :

• L’Etat accompagnera l’effort accompli par les régions et les départements dans le cadre des emplois tremplins alors que la droite a supprimé les emplois jeunes, avant de chercher en catastrophe à les « recréer » dans l’Education nationale à la veille de la rentrée.

• Nous favoriserons l’autonomie des jeunes. Pour les étudiants, il s’agira d’augmenter le nombre de bourses, alors qu’aujourd’hui 70 % des étudiants doivent travailler pour financer leurs études. Il faudra créer un statut du stagiaire lui garantissant une vraie rémunération. Pour ceux qui sont chargés de famille, nous développerons notamment des aides familiales simplifiées, orientées vers plus de justice sociale et de redistribution et la création de places de crèches.

• Nous susciterons l’implication des jeunes dans la vie publique en instaurant un projet civique obligatoire permettant à chaque jeune de découvrir et de servir l’intérêt général en consacrant une part de son temps à l’action associative, à la médiation sociale, à l’engagement humanitaire, à la préservation de l’environnement. D’une durée de six mois à un an, soutenu par la collectivité, il se déroulera au sein de la société civile, en France ou l’étranger. Il sera ouvert à tous, garçons et filles, facilitant l’unité d’une génération et la solidarité de la Nation.

• En partenariat avec les collectivités locales, nous aiderons les associations et les clubs qui accueillent les jeunes qui pratiquent une activité physique ou sportive à former leurs éducateurs, à en recruter de qualifiés, à permettre aux jeunes de pratiquer l’activité de leur choix quel que soit leur lieu de résidence et à y persévérer pour limiter l’abandon à l’adolescence de l’activité qu’ils pratiquaient jusque-là.

Un plan d’investissement et de rénovation des équipements sportifs de proximité sera lancé pour permettre la pratique physique et sportive de tous, en particulier des jeunes.

• Clarifier notre politique d’immigration La droite propose des quotas d’immigrés, alors que partout où ce dispositif a été mis en place, il s’est révélé inefficace et nocif. Nous ne pouvons pas envisager l’immigration sous le seul angle économique, au détriment de toute considération de l’humain. Nous sommes en désaccord avec les responsables issus de nos rangs qui font l’apologie des quotas et se sont même hasardés à proposer d’interdire la double nationalité. Notre parti doit refuser cette logique de mise en concurrence toujours accrue des hommes et des territoires. Ne transigeons pas sur nos valeurs. Nous devons nous engager pour une politique sereine et responsable de l’immigration qui articule la nécessaire régulation des flux avec le respect de la dignité humaine et la prise en compte de l’urgence humanitaire.

• Nous garantirons le droit d’asile qui est l’honneur de la France patrie des droits de l’homme et que la droite a remis en cause. Nous réviserons la loi de 2004 qui porte atteinte à ce droit.

• Une politique progressiste et efficace de l’immigration suppose une coopération accrue entre ses différents acteurs : le migrant, l’Etat d’origine, l’Etat de destination. Elle impliquera un nouveau droit « d’aller et de venir », une circulation facilitée pour l’immigré qui veut maintenir des liens entre son pays d’origine et le pays de destination.

La loi RESEDA de 1998 prévoit déjà que les personnes ayant eu quinze ans de vie professionnelle en France et ayant pris leur retraite dans leur pays peuvent, avec une carte retraite, revenir en France sans avoir besoin de visa. Ce droit à la libre circulation entre pays d’origine et pays de destination devra à l’avenir concerner des travailleurs saisonniers et qualifiés, ainsi que les étudiants, que nous devons mieux accueillir. Parallèlement, nous renforcerons les droits des immigrés légaux, en accélérant l’attribution de la carte de résident et en abaissant les délais de résidence nécessaires pour obtenir la nationalité française. En revanche, ceux qui organisent des filières d’immigration clandestine seront sanctionnés durement.

• Faire vivre la mixité et la parité

Malgré l’évolution des 50 dernières années en matière d’égalité hommes-femmes, les résultats ne sont toujours pas à la hauteur des ambitions. Qu’il s’agisse de l’emploi, de la parité politique, de la persistance des violences spécifiques ou de l’emprise des intégrismes, les femmes constatent toujours que le poids des inégalités et des discriminations est lourd. Nous devrons relever de nouveaux défis pour l’égalité en actes : favoriser l’accès des femmes à la formation professionnelle ; mettre en place des indicateurs sexués des politiques publiques assortis d’objectifs d’égalité ; renforcer les sanctions pour non-respect des lois sur l’égalité salariale et l’égalité professionnelle ; pénaliser financièrement le travail à temps partiel contraint. Pour accompagner les avancées législatives, le Parti socialiste doit retrouver son rôle d’éducation populaire et investir pleinement le champ de la bataille culturelle contre le sexisme. Il doit aussi être exemplaire dans la mise en œuvre de la parité politique.

• Les sécurités, c’est d’abord la sécurité des personnes, des biens et du pays Là où la droite érige l’insécurité économique et sociale en règle, les sécurités constituent une aspiration forte de la gauche : sécurité dans l’emploi (droit du travail et protection des travailleurs), sécurité face aux aléas de la vie (protection sociale), sécurité face à l’avenir (l’école et l’égalité). Mais d’abord, nous assurerons le droit à la sécurité des personnes et des biens.

Notre discours et notre pratique devront être fermes vis-à-vis du crime et implacables face aux nouvelles menaces terroristes. Ne laissons pas la droite refaire le « coup » qu’elle a pratiqué pendant la campagne de 2002, en tentant de confondre socialisme et laxisme. Car là aussi la droite échoue dans les faits, comme en témoigne la progression des violences contre les personnes et la stigmatisation verbale des populations des quartiers. En matière de sécurité, nous refusons la politique au kärcher. Le projet socialiste pour la sécurité, c’est la protection : protéger contre les violences, contre le terrorisme. Il traduira la détermination ferme et tranquille de l’Etat. Pour assurer la protection publique, nous prendrons des décisions très concrètes :

• Organiser un grand service de la protection publique qui, sous l’autorité de l’Etat, en association étroite avec les maires, coordonnera la police nationale, la gendarmerie nationale et les polices municipales : ce service public de proximité sera rempli de façon effective sur l’ensemble du territoire. Sans police spectacle mais avec détermination, notre objectif sera de restaurer la paix et la confiance partout, par une présence continue du service public de protection publique, aux côtés des élus, des services pour l’emploi, des services sociaux et médicaux, et en relation étroite avec l’autorité judiciaire.

• Il n’y a pas de police vraiment efficace sans en même temps l’éducation, la formation et l’amélioration des conditions de vie quotidienne dans les quartiers. Des « pactes éducatifs » seront mis en place pour les familles en difficulté et des prises en charge immédiates des jeunes en danger et des victimes seront assurées. L’Etat veillera, par la création de conseils départementaux d’action judiciaire, à mieux coordonner les politiques de prévention, de répression et d’aide aux victimes. Pour mieux lutter contre la délinquance des mineurs, il faudra aussi redonner une impulsion aux travaux d’intérêt général et mettre en place de véritables contrats de prévention de la récidive. Il s’agira de ruiner le sentiment d’impunité répandu chez certains mineurs tout en privilégiant la réparation et en réservant la sanction pénale aux cas les plus graves. Dans les quartiers, nous devons montrer aux jeunes que la réinsertion paie davantage que la récidive. L’accueil, l’accompagnement et le suivi des victimes seront améliorés. Nous proposons de créer un « point unique de l’urgence », guichet unique des forces de sécurité intérieure autour d’un numéro d’appel unique. Dans le cadre des Maisons du droit et de la justice et de contrats territoriaux d’aide aux victimes, nous mettrons en place une prise en charge médicalisée pluridisciplinaire (avec un fort soutien psychologique), ainsi qu’un protocole avec les assurances et les collectivités locales partenaires. Cela accélérera l’indemnisation. L’accompagnement de la victime sera effectif jusqu’au jugement (aide par des avocats, d’anciens magistrats ou policiers volontaires ...).

• Dans un monde instable, la sécurité des individus et des Etats passe par une lutte sans relâche et sans faiblesse contre le terrorisme. Les tragédies survenues à New York en septembre 2001, à Madrid en mars 2004 ou à Londres en juillet 2005, ont montré la folie criminelle d’extrémistes qui allient le fanatisme religieux et la technologie. Face à un ennemi sans visage ni frontières, nos démocraties ne peuvent riposter efficacement par le biais militaire - l’échec de l’intervention de l’administration Bush en Irak en témoigne. Nous devons bâtir de nouveaux outils fondés sur la coopération et la coordination avec nos partenaires européens et dans le cadre des Nations Unis, à travers le « comité du contre-terrorisme » : assécher les sources financières du terrorisme en neutralisant les liens que certains réseaux entretiennent avec des paradis fiscaux ; renforcer et moderniser les services de renseignements ; mutualiser et accroître les moyens de la police et de la justice ; contrôler les mouvements d’armement et de matières dangereuses, notamment chimiques et bactériologiques. Attention ! La lutte contre le terrorisme ne doit pas devenir un alibi pour remettre en cause les libertés publiques et les droits fondamentaux. Parallèlement, nous favoriserons le dialogue entre les cultures et la compréhension entre les peuples à tous les échelons, du local au global. Ils constituent aussi des moyens de faire reculer l’extrémisme et l’intolérance.

Pour une nouvelle République

Jacques Chirac et la droite ont conduit notre pays vers une véritable crise de régime. Les citoyens doutent de leurs élus. Les élus doutent de l’Etat. Et l’Etat ne croit plus en luimême. Il faudra affronter cette crise et la surmonter. Nous sommes déterminés à rétablir l’autorité de l’Etat. Oui, il y a urgence à redonner une espérance démocratique à la France en replaçant le citoyen au cœur de la vie publique. Il est temps de proposer à nos concitoyens une nouvelle République. C’est le but des réformes que nous proposons. Elles donneront lieu à un référendum sur les institutions dans les six mois qui suivent l’élection du prochain président de la République.

• La démocratie jusqu’au bout

• Parce que les citoyens attendent des politiques qu’ils tiennent leurs engagements, le pouvoir devra être davantage contrôlé et les pouvoirs mieux équilibrés. Le président de la République cessera d’être une sorte de monarque pour devenir un arbitre aux pouvoirs réels mais encadrés. Un acte fort sera de ne rendre le quinquennat renouvelable qu’une fois. La responsabilité civile comme pénale du chef de l’Etat sera réformée dans le sens du droit commun.

Le Premier ministre sera conforté dans ses attributions.

L’ Assemblée nationale verra son rôle accru. Les règles qui permettent au Gouvernement de « passer en force » seront limitées : par exemple, en supprimant l’article 49-3 de la Constitution et interdisant le recours aux ordonnances en matière de libertés fondamentales et de droits sociaux. Les engagements militaires devront être systématiquement autorisés par le Parlement. Le nombre des commissions permanentes sera constitutionnellement augmenté pour mieux contrôler l’action du gouvernement. Dans un souci d’équilibre, la présidence de la Commission des finances de l’Assemblée nationale sera confiée à l’opposition. Cette dernière aura un droit de tirage pour créer une commission d’enquête. La maîtrise de l’ordre du jour prioritaire des assemblées sera partagée entre le Parlement et le Gouvernement. Les nominations aux plus hautes fonctions publiques feront l’objet d’une audition publique préalable par le Parlement. Le Sénat deviendra une véritable chambre de représentation des territoires. Son mode d’élection sera revu pour permettre une représentation équitable des forces politiques au sein de cette assemblée. Son pouvoir de veto en matière de révision constitutionnelle sera limité par le recours au référendum en cas de blocage entre les deux assemblées, le dernier mot revenant alors au peuple. Nous renforcerons la représentation des deux millions de Français vivant à l’étranger en permettant l’élection au suffrage universel direct de députés chargés de faire entendre leur voix et relayer leurs attentes à l’Assemblée nationale.

• L’Union européenne deviendra partie intégrante de notre architecture constitutionnelle.

Un Vice-Premier ministre chargé des affaires européennes sera nommé et chaque assemblée disposera d’une commission permanente pour les questions européennes. L’agenda de travail de la Commission européenne sera soumis à un débat public suivi d’un vote devant le Parlement. L’anticipation et le contrôle en amont des projets de directive ou des décisions communautaires seront accentués. Le déficit démocratique européen doit aussi se combler au quotidien de la vie publique nationale.

• Nous favoriserons la participation à la vie publique en facilitant l’accès de tous aux responsabilités. Il faudra en finir avec l’exception française du cumul des mandats. L’élu doit pouvoir se consacrer à temps plein à sa mission aidé par un vrai statut protecteur. Un mandat national ou européen ne pourra plus être cumulé avec la responsabilité d’un exécutif local de plus de 20 000 habitants. Cette évolution devra inclure les intercommunalités dès que leur président sera élu au suffrage universel direct. Afin de réduire les déséquilibres liés au scrutin majoritaire et de renforcer la parité et la mixité de l’Assemblée Nationale, une dose significative de proportionnelle sera instaurée pour les élections législatives. Lors de toutes les élections locales - municipales, cantonales, régionales - le droit de vote devrait être accordé - enfin ! - aux étrangers établis durablement sur notre sol. Dans l’équilibre des droits et des devoirs qui définit la citoyenneté, la participation obligatoire au vote devrait être introduite en même temps que la comptabilisation des votes blancs. Innovation importante, la composition du gouvernement et des exécutifs locaux devra strictement respecter la parité hommes-femmes. Un droit de pétition civique sera créé et permettra à nos concitoyens de faire inscrire une question susceptible de devenir une loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Les nouvelles technologies de l’information seront utilisées comme un outil de démocratie participative. Chaque projet ou proposition de loi devrait faire l’objet d’une consultation publique en ligne. Au XXIème siècle, l’expertise ne peut rester le privilège d’un pouvoir pyramidal, alors que notre pays à tout à gagner de l’émergence d’une démocratie en réseaux, dynamique, critique, créative.

• Le service public de la justice devra être rendu plus accessible, notamment dans le cadre d’un redéploiement de la présence judiciaire sur le territoire et par le développement d’une politique d’accès aux droits et de protection des victimes. L’indépendance et la responsabilité des magistrats ainsi que le contrôle démocratique de l’institution judiciaire seront renforcés. La carte judiciaire sera redéfinie. Des commissions couvrant le ressort de plusieurs cours d’appel, en articulation avec les services décentralisés du Médiateur de la République, seront chargées d’examiner les plaintes des justiciables sur les dysfonctionnements ou les comportements individuels, dans le respect des principes de l’indépendance et de la séparation des pouvoirs. Le président de la République et le ministre de la Justice ne siégeront plus au Conseil supérieur de la magistrature, qui sera réformé et dont les avis s’imposeront à l’exécutif pour les nominations de magistrats. Le statut du parquet sera clarifié : il devra mettre en œuvre la politique pénale définie par le pouvoir politique, mais il sera mis à l’abri de ses pressions, notamment par un strict encadrement des instructions individuelles et par une meilleure élaboration des instructions générales. La réforme des tribunaux de commerce devra aboutir pour que ce juge de l’économie réponde aux principes de neutralité, de transparence et de sécurité juridique. Une loi pénitentiaire sera mise en œuvre avec un objectif clair : rendre nos prisons, souvent encore dans un état indigne, plus humaines et mieux adaptées pour favoriser la réinsertion des condamnés et donc diminuer le nombre de récidivistes à la sortie des prisons. Les lois Perben seront abrogées dans leurs dispositions portant atteinte aux libertés et aux droits de la défense. Plus globalement, sera envisagée une rénovation de la procédure pénale, orientée vers une refonte du dispositif de traitement de la délinquance, en même temps que sera valorisée la justice civile, en particulier grâce à la création d’un juge d’instruction civil. Chaque année, le Parlement débattra du rapport de politique judiciaire présenté par le Garde des Sceaux. La saisine, fut-elle indirecte, du Conseil constitutionnel par les justiciables sera enfin organisée et les modes de nomination de ses membres revus : la compétence l’emportera sur le fait du prince.

• Contre le démantèlement de l’État républicain, une vraie démocratie territoriale Notre pays a besoin d’un Etat fort, présent sur ses missions, efficace, et non d’un Etat en retrait, voire en recul. Cela n’est nullement contradictoire avec le développement des responsabilités locales. Dans ce domaine aussi, la droite a échoué au point que la notion même de décentralisation est devenue parfois synonyme de régression ! Ne lui emboîtons pas le pas en proposant, comme certains dans nos rangs, d’aller vers l’autonomie régionale et des lois locales. Aux côtés des élus locaux, et notamment des maires, nous porterons une autre vision du développement des collectivités. C’est le sens que nous donnons à la démocratie territoriale.

Il faudra remettre en cause les atteintes à la décentralisation voulues par Chirac- Raffarin-Sarkozy. C’est dévoyer une grande idée que de faire rimer décentralisation avec défausse de l’État sur les collectivités locales. Nous remettrons en cause la loi du 13 août 2004, imposée outre l’avis même du Parlement par l’utilisation de l’article 49-3 et adoptée sans concertation avec les associations d’élus. La répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités locales sera clarifiée.

Nous clarifierons l’organisation des territoires et les niveaux de décision. Une collectivité doit agir dans le cadre des compétences qui lui sont fixées par la loi. Là où une coopération entre collectivités est nécessaire, un chef de file devra être clairement désigné - la Région pour le développement économique et la préparation de l’avenir, le Département pour l’action sociale et les solidarités. Le rôle des intercommunalités sera mieux reconnu, notamment pour le transport urbain et le logement. Ce qu’attendent les citoyens, c’est de savoir vraiment quelle collectivité fait quoi et qui le fait au plus près et au mieux de leurs besoins. En ce sens, nous donnerons à la République parlementaire sa pleine dimension locale en assurant une plus forte séparation des fonctions exécutives et délibératives au sein des Conseils municipaux, régionaux et généraux, qui y gagneront en autonomie. La participation et la citoyenneté seront soutenues afin de renouer avec l’esprit républicain et le souffle démocratique de la décentralisation telle que nous l’avions entreprise. Plusieurs mesures y contribueront : la distinction entre les fonctions exécutives et délibératives pour chaque niveau de collectivité, l’ouverture d’une partie du budget communal au budget participatif, l’obligation pour chaque responsable de collectivité territoriale d’effectuer un compte rendu de mandat, la création de conseils d’usagers des services publics sur le modèle des conseils de quartiers ou d’écoles, l’élection des intercommunalités au suffrage universel direct, le rapprochement du mode d’élection des conseillers généraux de celui des communes et des régions, l’harmonisation à cinq ans de la durée des mandats locaux, ou encore - avancée toujours évoquée mais qui devra cette fois-ci être réalisée  ! - la mise en place d’un véritable statut et d’une formation continue de l’élu. Faire vivre la démocratie participative, c’est aussi soutenir la vie associative. La France compte 800 000 associations, soit plus de 10 millions de bénévoles. Leur action doit être favorisée car elle est au cœur de notre pacte civil et social. Nous soutiendrons les très petites associations grâce à la simplification administrative et la mutualisation des moyens alloués, en lien avec les collectivités territoriales. Nous encouragerons le mécenat afin de participer massivement au financement de la vie associative. Nous répondrons à la crise du bénévolat en permettant une juste indemnisation des responsables d’association et la validation des acquis de l’expérience pour l’obtention des diplômes et l’accès à la fonction publique nationale et territoriale. Ces avancées pourraient servir de socle à un « statut associatif européen ». La justice fiscale et la péréquation financière seront au cœur de notre ambition pour les territoires. L’architecture de la fiscalité locale est illisible pour les citoyens, inéquitable pour les collectivités locales et ingérable pour l’Etat. L’autonomie fiscale des collectivités locales se réduit trop souvent pour les communes ou les départements les plus pauvres à la faculté d’alourdir un peu plus la facture du contribuable local, alors que « l’expérimentation  » donne aux plus riches la possibilité de creuser à leur profit les inégalités territoriales. Nous proposerons une refonte profonde des dotations de l’Etat et de la fiscalité locale assurant des ressources pérennes et équitables aux collectivités locales. Nous demandons également que soit réaffirmée l’importance des contrats de plan Etat-Régions, que la droite est en train d’abandonner, en insistant sur le rôle de chef de file des Régions et leurs responsabilités en matière d’aménagement du territoire. La République, c’est aussi évidemment la Corse. L’unité de l’une est compatible avec la reconnaissance de la spécificité de l’autre. L’insularité et l’identité culturelle sont des réalités fortes que l’Etat doit reconnaître. En prenant acte de l’échec du référendum Sarkozy, nous privilégierons trois axes prioritaires : soutenir le développement économique, social et culturel de la Corse par le déblocage du Plan d’investissement (P.E.I.), aujourd’hui entravé par l’inadaptation des règles nationales ; en concertation avec les élus de l’île, engager une démarche de simplification administrative et de modernisation des structures publiques ; assurer la sécurité publique et la paix civile par une lutte sans aucune faiblesse contre la violence politique et toutes les dérives mafieuses qui entravent le développement : pas question de dialoguer avec des personnes qui cautionnent l’assassinat d’un Préfet de la République.

• Une grande loi sur la démocratie sociale

Pour être vivante, la démocratie doit être aussi sociale. La loi Fillon sur le dialogue social de janvier 2004 prévoit que toute évolution de la législation sociale doit être précédée d’une concertation avec les organisations syndicales. Pourtant, jamais les syndicats n’ont été autant exclus de l’élaboration des lois : remise en cause des 35 heures, nouvelles règles sur les licenciements économiques, et même mise en place par ordonnance d’un nouveau contrat de travail avec période d’essai de deux ans. Ce mépris de la droite pour les partenaires sociaux ne doit cependant pas nous faire oublier nos insuffisances passées. Les syndicats nous ont souvent reproché un manque de concertation et de dialogue préalables à nos initiatives. Nous devrons rapidement mettre en œuvre une grande loi sur la démocratie sociale, dont l’objectif sera de faire émerger une véritable citoyenneté sociale. Elle prévoira une refonte des règles déterminant la représentativité syndicale, qui doit désormais être fondée directement sur le vote des salariés. Une telle évolution impliquera que tous les salariés, quelle que soit la taille de leur entreprise, soient appelés à élire leurs représentants dans les branches professionnelles. Le résultat de ces élections, organisées le même jour, déterminera les organisations représentatives au plan national et dans chacune des branches. Un financement public des syndicats sera institué. Les accords majoritaires seront généralisés à tous les niveaux de la négociation collective. Les accords collectifs ne seront désormais valides que s’ils ont été signés par les organisations syndicales représentant la majorité des salariés. Seules les dérogations prévues par la loi, ou par accord de branche, devront être autorisées. Plus largement, il conviendra de redonner à la convention collective de branche le rôle de « loi générale de la profession » qui lui revient car la négociation d’entreprise doit conserver un rôle de complément et de précision de la négociation de branche, mais pas de cadre dérogatoire. La convention de branche retrouvera sa fonction d’unification des conditions de travail, garantie d’égalité entre les salariés et de concurrence loyale pour les entreprises. La loi organisera des modalités de représentation syndicale et du personnel dans les entreprises de moins de cinquante salariés, afin de donner corps au principe de participation inscrit dans le préambule de la Constitution de 1946, dont sont aujourd’hui exclus les salariés de nombreuses PME et très petites entreprises. Le renforcement du droit d’alerte et de l’accès à une expertise indépendante, ainsi qu’un droit d’opposition en matière d’hygiène et de sécurité, sont aussi des pistes qui méritent d’être approfondies.

Dans les grandes entreprises, les salariés seront représentés dans les conseils d’administration ou les conseils de surveillance. L’entreprise est une communauté humaine, dont les principales décisions ne peuvent être réservées aux seuls actionnaires. Le rôle des mandataires salariés permettra aux forces du travail d’éviter certaines dérives, notamment dans les fermetures et les déménagements sauvages. Nous favoriserons une citoyenneté sociale à côté et en complément de la citoyenneté politique.

• Démocratie culturelle et audiovisuelle

La culture ne se réduit pas à un supplément d’âme. A bien des égards, elle est même le cœur d’un monde sans cœur. Elle donne à la vie sens et valeur. Elle englobe toute pratique favorisant le développement personnel, l’épanouissement et l’émancipation. Face au temps de travail, elle est mieux qu’un temps libre : un temps de libération. Aussi tout enjeu culturel recoupe-t-il un enjeu social et politique décisif : éducation, insertion collective, qualification professionnelle, cohésion sociale, identité européenne, rayonnement international, etc. Voilà pourquoi l’ambition culturelle doit être au cœur de notre projet socialiste. Nous soutiendrons la création artistique et cinématographique. Nous garantirons un statut aux créateurs et défendrons le droit d’auteur. Nous démocratiserons l’accès aux œuvres et aux pratiques culturelles. Le patrimoine artistique de l’humanité appartient à tous. Or, pour un tiers de nos concitoyens, les équipements culturels restent trop lointains ou trop chers. Pour lutter contre ces inégalités et pour encourager l’accès de tous à la culture, nous instaurerons des journées gratuites par semaine dans les principaux musées nationaux. Nous encouragerons les pratiques artistiques amateurs. Nous parachèverons l’aménagement culturel du territoire et la décentralisation culturelle afin qu’aucun Français ne soit trop éloigné d’une source culturelle (bibliothèque, cinéma, théâtre...).

Nous prévoirons d’inscrire une obligation de présence d’équipement culturel dans tout programme immobilier et urbain significatif. Nous généraliserons la formation aux arts et aux médias, à travers un crédit création (initiation à un art ou réalisation d’une œuvre). Nous inscrirons à l’école l’éducation artistique et l’éducation audiovisuelle, afin d’éveiller sens esthétique et esprit critique. Contre l’e-@nalphabétisme, facteur d’exclusion sociale, nous étendrons la formation à Internet, que deux tiers des Français ignorent encore. Sans idées ni images, la voix de la France ne portera pas suffisamment dans le monde. Nous encouragerons notre rayonnement diplomatique culturel et notre langue. Fidèles à l’universalisme humaniste, nous défendrons le droit à l’identité et à la diversité culturelle dans toutes les instances internationales. Forts d’une civilisation partagée, nous agirons pour une Europe de la Culture, ferment de l’union politique. Nous proposerons un socle culturel commun pour l’UE (prix unique du livre, financement public de l’audiovisuel, aide à la création cinématographique). Nous soutiendrons la création d’un Centre Européen de la Cinématographie. Nous encouragerons la constitution de métropoles culturelles européennes à la croisée des peuples. Nous renforcerons aussi le pluralisme médiatique. C’est la démocratie même qui est en jeu. Or, faute de moyens, notre presse perd trop souvent son indépendance au profit d’intérêts financiers et industriels. Le service public audiovisuel souffre d’une pénurie de moyens et du brouillage de ses objectifs. Pour une information et un débat citoyens authentiques, nous doterons l’audiovisuel public de missions claires (qualité, formation, information, proximité, etc.), d’un cadre juridique transparent et de financements conséquents afin d’assurer son rayonnement. Nous préserverons un équilibre serein avec le secteur audiovisuel commercial, limiterons la concentration audiovisuelle et écarterons de nouvelles privatisations. Réelle chez nos voisins, la proximité audiovisuelle demeure chez nous malheureusement résiduelle : l’Espagne compte dix fois plus de chaînes locales que la France. Pour faire primer le pluralisme démocratique sur les monopoles, nous multiplierons les télévisions locales grâce au numérique terrestre.

III - Rassembler : pour gouverner à gauche, un parti fort, des alliances claires

Nous aimons tous notre Parti et nous sommes fiers d’y appartenir. Il est l’héritier du mouvement ouvrier et de ses conquêtes. Il porte l’espérance de millions de femmes et d’hommes qui n’en peuvent plus de la politique de la droite. Il représente l’espoir de l’alternance dans le pays. Est-il toujours à la hauteur du patrimoine politique dont François Mitterrand, lors du Congrès d’Epinay voilà plus de trente ans, a jeté les bases ? Poser la question, c’est déjà y répondre. Nous mesurons le travail énorme des militants, bénévoles de leur temps et de leur énergie. Quand notre Parti remporte de grandes victoires électorales, c’est d’abord à eux qu’il les doit. Mais pour avancer et préparer les défis de demain, nous devons reconnaître aussi ses fragilités, les insuffisances de son fonctionnement et les progrès qu’il faut accomplir.

Les dangers qui pèsent sur notre Parti socialiste Celui de l’uniformisation de sa composition sociale est évident : notre Parti compte moins de 5 % d’ouvriers et moins de 5 % de jeunes au-dessous de trente ans. Cette réalité statistique déjà ancienne pose, pour l’avenir, un problème politique de première ampleur. A terme, un parti peut difficilement représenter les aspirations de tous ceux qui ont intérêt à la transformation de la société si sa base militante ne reflète plus sa base sociale. Comment reconquérir l’électorat populaire si ses attentes et ses inquiétudes ne sont pas suffisamment prises en compte, faute d’être exprimées et relayées, quand vient le temps de rédiger nos tracts ou d’élaborer nos propositions ? Il y a urgence à ouvrir réellement le Parti socialiste à la diversité de la société, des générations, des parcours, des origines.

Le danger de la bureaucratisation n’est pas moins réel. Avec des effectifs militants en stagnation, la tentation est grande de se replier sur soi-même, de croire que des questions idéologiques ou stratégiques peuvent se résoudre par des réponses réglementaires ou des réflexes disciplinaires. A force d’ajouts, les statuts du PS sont devenus quasiment illisibles ! Le temps est venu de les simplifier et de les rénover. Un parti ne peut évidemment pas se réduire à un appareil. En précipitant l’organisation de notre Congrès, qui devait avoir lieu normalement en mai prochain, la direction actuelle a décidé de concentrer - une fois de plus ! - notre énergie collective sur notre vie interne plutôt que de la consacrer à combattre la droite et à nous tourner vers les Français dont les urgences s’appellent le pouvoir d’achat, l’emploi, le logement, l’école, les services publics. Nous devons éviter de nous couper du peuple.

Nous devons aussi lutter contre le danger, paradoxal, d’une certaine dépolitisation dans nos rangs. Un parti politique de gauche doit être un éducateur collectif avant d’être un instrument de sélection de candidats. Il doit agir pour faire vivre dans les cœurs de nos concitoyens l’esprit civique de solidarité et d’engagement sans lesquels la gauche ne peut rien construire. Nous ne sommes pas d’accord lorsqu’on laisse entendre que les formations politiques ne servent plus à grand-chose, que les campagnes militantes coûtent trop cher, que la bataille politique se gagne essentiellement sur les plateaux de télévision ou sur les couvertures des magazines. Avec l’abandon de l’exigence de formation, trop de militants ne sont plus initiés à l’histoire de notre parti, aux textes théoriques qui ont fondé ses combats, aux débats d’idées qui l’ont traversé et qui le traversent encore. Des outils existent, mais sont sous-utilisés : la Revue Socialiste, l’OURS, la fondation Jean Jaurès. Pas étonnant dès lors que la communication fasse souvent office de doctrine, que le slogan ou le bon mot serve de positionnement, que tout débat d’orientation qui pointe soit sitôt dénaturé en combat entre des sensibilités ou entre des personnes. Débattre, ce n’est pas se diviser, c’est s’enrichir mutuellement et c’est renforcer le Parti dans la gauche et aux yeux des Français.

Uniformisation bureaucratisation, dépolitisation - ces caractéristiques étaient précisément celles de la SFIO dans sa dernière période. Ce n’est pas le modèle à reproduire. Les engagements non tenus Au congrès de Dijon, le premier secrétaire s’était fixé des objectifs ambitieux en vue de rénover et de renforcer notre parti. Malheureusement, beaucoup ne sont pas au rendez-vous. Dire ce que l’on fait, faire ce que l’on dit, ce n’est pas seulement une règle pour l’action gouvernementale, c’est un devoir pour la direction de notre Parti socialiste. La barre des 300 000 adhérents n’a pas été franchie, ni même seulement approchée : à Dijon, 129 500 militants avaient participé aux opérations de vote du congrès, 120 127 adhérents à jour de cotisation ont pris part au référendum interne sur la Constitution européenne.

Pour « bâtir un grand parti socialiste », une campagne nationale d’adhésion aurait dû être lancée dans le prolongement de nos victoires régionales, départementales et européennes en 2004. Tel n’a pas été le cas. La « conférence militante annuelle » promise n’a jamais eu lieu, pas plus que les conventions nationales prévues pour « une autre mondialisation » ou sur « la sécurité sociale professionnelle  », l’emploi ou « la conférence sociale ». Le soutien à la création de sections d’entreprises et l’organisation de forums décentralisés de la gauche sont restés lettre morte. Le budget annuel du Parti doit être de nouveau porté à la connaissance de l’ensemble des militants par sa publication annuelle dans « L’Hebdo du PS ». La Commission de contrôle financier, qui veille à la bonne exécution du budget, doit pouvoir se réunir de façon régulière. Depuis le Congrès de Dijon, cette instance garante de la transparence n’a pas exercé sa mission. Ces objectifs n’ont pas été atteints, non parce qu’ils sont irréalistes, mais parce qu’il faut sans doute les aborder différemment.

Nos propositions pour un Parti populaire, fort, rénové et ouvert

Léon Blum voulait que « le Parti soit digne du socialisme ». Nous voulons tous être à la hauteur de son message. Pour nous, les questions d’organisation ne sont pas des questions administratives mais des questions politiques majeures. Nous pensons que le Parti est un moyen pour servir nos valeurs et nos électeurs, pas une fin en soi. Une telle vision serait en effet contraire à l’esprit et à l’histoire du mouvement socialiste français dont nous célébrons cette année le centenaire. A partir de là, nous proposons de :
- agir pour accroître et diversifier notre base militante afin de la mettre davantage en résonance avec notre électorat. Pouvons-nous nous contenter durablement d’un parti qui compte à peine plus de 100 000 adhérents ? Bien souvent, notre Parti donne l’impression de vouloir jouer à guichets fermés plutôt que d’ouvrir ses portes et ses fenêtres à de nouvelles énergies. Nous avons besoin d’un Parti fort pour mener la bataille des idées contre la droite. Concrétisons l’objectif d’atteindre 300 000 adhérents d’ici trois ans. Mais donnons- nous, enfin, les moyens de relever le défi. Attention, le PS n’est pas l’UMP et on ne doit pas y adhérer par hasard, sur la plage ou par « texto » ! Rejoindre la famille socialiste est une démarche politique et citoyenne, pas un coup de tête. C’est pourquoi la priorité doit aller à l’arrivée dans nos rangs et à l’accession aux responsabilités des jeunes, des femmes, des salariés. Faciliter l’adhésion et la rendre moins coûteuse devrait y aider. L’argent ne saurait justifier l’impossibilité de rejoindre le PS. Nous proposons aussi que la double appartenance au Parti et à un syndicat ou une association - prévue par nos statuts - soit une nécessité pour la désignation des camarades souhaitant exercer un mandat électif. En même temps que l’expression de la diversité de notre Parti, cette mesure favorisera le nécessaire renouvellement des serviteurs de l’intérêt général. Plus simple, l’adhésion devra aussi être plus transparente afin d’éviter, lors des scrutins internes, toute controverse. Le Mouvement des Jeunes Socialistes (MJS), dont l’autonomie doit être garantie au quotidien, sera au cœur de la bataille pour la reconquête de notre base sociale. Il signera avec le Parti un contrat d’objectifs et de responsabilité. De nouveaux espaces de dialogue seront instaurés et un financement transparent et pluriannuel du MJS sera assuré.

- limiter le cumul des responsabilités au sein du Parti. A l’image de nos propositions institutionnelles pour le pays, nous souhaitons que la respiration démocratique et l’accès de tous les militants aux postes de responsabilités soient garantis en notre sein. En particulier, le cumul, avec des mandats d’exécutifs peut peser sur le débat collectif et décourager tel camarade de prendre la parole, tel autre de s’impliquer davantage. Par exemple, peut-on être, en même temps, maire et secrétaire de section ? Tant vis-à-vis de la population que des militants, nous ne pensons pas que cela soit souhaitable.

- engager un effort massif en faveur de la formation politique. Chaque section devrait avoir accès à des lieux de formation pour tous ses adhérents. Consolidons le secteur formation du parti autour de l’Université permanente des cadres fédéraux. Organisons deux fois par an, dans chaque fédération, une journée de formation sur une question ouverte à tous les militants sur la base d’un dossier élaboré par le National. Faisons émerger une nouvelle génération de cadres issus de toutes les couches sociales. L’éducation populaire doit redevenir un véritable objectif pour le PS.

- organiser des campagnes de mobilisation en phase avec les préoccupations quotidiennes des Français. Le Parti doit accompagner la vie de nos concitoyens. Ces dernières semaines par exemple, une campagne nationale sur le pouvoir d’achat nous aurait permis de montrer aux ménages modestes et aux « classes moyennes jusqu’au 15 du mois » que le PS était concrètement à leurs côtés alors que tous les prix - du loyer, du caddie, de l’essence - sont à la hausse. Au lieu de cela, on annonçait presque chaque semaine un nouveau candidat à la candidature pour 2007... Nous ne sommes pas sûrs que cet ordre des priorités convienne à nos électeurs. Il faut orienter nos campagnes en direction de notre base sociale. L’intérêt légitime pour les questions dites « de société » ne doit pas faire oublier le social. D’où la nécessaire hiérarchisation des thèmes à mettre en avant par notre Parti : emploi, logement, démocratie, école, santé, écologie, etc. C’est ainsi que notre projet sera susceptible de convaincre une majorité.

- valoriser notre réseau d’élus. Ils sont les Poing et la Rose au plus près de nos concitoyens, et d’abord dans les communes, échelon de proximité par excellence dans notre République. Nous devons recenser et diffuser les expériences locales car elles sont l’illustration concrète de notre volonté politique. Des efforts ont été accomplis avec la création de la Maison des Elus du Parti qui regroupe, autour de la Fédération Nationale des Elus Socialistes et Républicains (FNESR), les outils pour former et informer les élus locaux. Son fonctionnement devra être développé et ses moyens étendus. A l’échelon fédéral, une commission permanente pourrait être créée afin d’associer les militants et les élus chargés d’élaborer et d’expliquer la politique mise en œuvre au niveau local et dont les travaux seront adressés au National afin de constituer une banque de données des pratiques innovantes et des politiques publiques de gauche dans les territoires. Le principe du compte rendu de mandat annuel, par lequel un élu fait part aux militants et aux sympathisants de son action, devrait être étendu.

- renouer avec la tradition des conventions thématiques. Aucune n’a été organisée depuis trois ans. Renouer avec ces temps forts de la réflexion militante est nécessaire. Encore faudra-t-il veiller à ce que les conventions thématiques pèsent sur le contenu des propositions du Parti et qu’elles accordent un véritable droit d’amendement.

- retrouver la règle de la proportionnelle au niveau national et fédéral. Le Conseil National comme le Conseil Fédéral doivent être l’émanation du vote sur les motions, qui constitue le fondement de la démocratie militante depuis le Congrès d’Epinay. De la même façon, les ressources dont dispose notre Parti grâce au financement public doivent être justement réparties entre les Fédérations, avec un effort spécifique en direction des plus petites ou de celles qui, faute d’un nombre suffisant d’élus, manquent de moyens pour agir au quotidien. Notre Parti doit rayonner sur l’ensemble du territoire, en métropole comme en Outre-mer.

- renforcer la fonction intellectuelle du Parti. Nous devons resserrer les liens avec le monde universitaire et des chercheurs en les associant systématiquement aux conventions thématiques et à l’élaboration du projet. Autour de la Revue socialiste et grâce à l’Internet et aux nouvelles technologies, nous devons nous doter d’une structure permanente dédiée à la veille théorique et scientifique afin d’anticiper les mouvements d’idées en France et dans le monde. Le PS doit retrouver aussi sa fonction polémique, abandonnée depuis dix ans, pour mener le combat des idées contre la droite.
- renforcer le rôle du Conseil National. Comme l’Assemblée nationale dans nos institutions, le Parlement de notre Parti doit retrouver une place centrale dans notre vie collective. Cela suppose qu’il interpelle, propose et décide. Chaque réunion du Conseil National devrait inscrire à l’ordre du jour au moins une question d’orientation à trancher par un vote.

- faire entendre la voix du socialisme de transformation au sein du Parti Socialiste Européen (PSE) et de l’Internationale Socialiste (IS). N’ayons pas peur du débat d’idées ! Ne redoutons pas de porter notre identité de socialistes et de républicains dont les spécificités s’appellent la laïcité, les services publics ou encore l’Etat stratège. Si certains partis de gauche ne s’y retrouvent pas, tous les peuples d’Europe y aspirent ! En évitant de porter une autre voix au sein du PSE et parfois au sein de l’IS, en présumant d’entrée de jeu que nous y serions toujours minoritaires, on conduit à renforcer le poids du social-libéralisme. Le socialisme français a une grande histoire : il ne doit évidemment pas être arrogant, mais il peut être influent et écouté. Pour cela, nous devrons militer pour la transformation du PSE en un vrai parti transnational. Cet organisme fonctionne en effet aujourd’hui sur le mode intergouvernemental à l’œuvre dans les institutions de l’Union européenne. Les quelques discussions qui s’y mènent conduisent à des conclusions en général coupées des militants. Un nouveau PSE devrait permettre aux militants du mouvement socialiste européen, lors de Congrès organisés sous leur contrôle, de se prononcer sur les diverses orientations qui cohabitent au sein de la social-démocratie européenne. Un vrai débat idéologique, stratégique et programmatique pourrait s’engager. Le PSE ainsi transformé contribuerait à la repolitisation de l’espace public européen. Pour mener à bien cette ambition européenne et internationaliste, la participation accrue de la Fédération des Français de l’Etranger (FFE) à nos débats tout au long de l’année est nécessaire. L’Internet peut aussi y aider.

Etre clairs sur le choix de nos alliances pour bâtir un pacte de changement

Dans moins de deux ans, auront lieu normalement les échéances électorales décisives de 2007. C’est très court. François Mitterrand nous a indiqué le chemin stratégique à suivre : sans un Parti socialiste fort, rien n’est durable à gauche ; sans une gauche rassemblée, rien n’est possible pour les socialistes. Malgré un contexte différent, nous restons convaincus que cette démarche reste la bonne pour gagner les élections et changer la vie. Pour nous, le PS doit redevenir le cœur battant de la gauche, favoriser la synthèse des diverses cultures de la gauche, œuvrer au rassemblement des traditions qui la constituent.

Faire la clarté sur notre stratégie d’alliances est l’un des enjeux majeurs du Congrès du Mans.

Des clins d’œil sont parfois lancés en direction du centre. L’un affirme qu’« une voix prise au centre en vaut deux puisque c’est une voix prise à la droite », oubliant de préciser combien de voix de gauche seraient perdues dans l’intervalle. D’autres souhaitent publiquement un rapprochement entre le PS et... l’UDF ! Certains agitent la menace d’une « scission » quand on évoque le nécessaire ancrage à gauche du Parti ! Nous respectons les convictions de ces camarades, mais nous ne les partageons pas. Il ne faut pas se laisser abuser par les invectives antigouvernementales de tel dirigeant centriste, qui ne se traduisent pas dans les votes au Parlement. Les stratégies d’alliance de « troisième force » ne sont pas plus pertinentes aujourd’hui qu’hier. Pour nous, plus que jamais, c’est à gauche que se situent l’avenir du PS et la clef de l’alternance. Pas de vrai ancrage populaire sans clivage clair avec la droite.

Le Parti socialiste doit affirmer son identité et c’est évidemment en lui-même, et non à la remorque des autres formations, qu’il doit se définir. Sans sectarisme mais avec netteté, notre choix stratégique est celui-ci : le changement politique en France est indispensable et ce changement implique le rassemblement à gauche ; il n’y aura de rassemblement à gauche qu’avec des mouvements et sur des orientations politiques de gauche. Un parti ancré dans la société doit aussi continuer d’exister une fois arrivé au pouvoir. Gouvernement - Parlement - parti : chacun a sa partition à jouer pour la réussite commune. Au gouvernement et au Parlement d’élaborer et d’adopter les lois qui mettront en œuvre le programme défini en commun. Mais le vote d’une loi ne suffit pas à transformer la société. Le rôle du Parti socialiste, c’est d’aider à créer le rapport de forces, c’est de participer à la confrontation sociale et idéologique. C’est aussi de savoir évaluer, aux différentes étapes d’une législature, les effets concrets des grandes mesures mises en œuvre par la gauche. Le rôle du Parti ne s’arrête pas après la victoire électorale.

Nous voulons construire l’alternative avec toutes les forces de progrès Nous refusons de couper la gauche en deux blocs irréconciliables. Gauche gestionnaire contre gauche protestataire : cette grille de lecture est négative pour les socialistes. Elle revient à diviser électoralement et à affaiblir politiquement la gauche. Elle fait le bonheur des plus marginaux de l’extrême gauche. Surtout, elle assure un long bail au pouvoir à la droite. En réalité, la victoire de la gauche passe toujours par la synthèse entre deux cultures : la révolte et la réforme. Il faut reconnaître la complémentarité entre les différentes forces de gauche. En démocratie, le rapport de forces s’exprime dans les urnes, mais également dans la négociation sociale et dans la mobilisation populaire.

Nous respectons les autres forces de la gauche. Défendons nos convictions, mais évitons l’arrogance et la caricature : elles n’ont jamais été le ciment du rassemblement. Soyons cohérents : si on veut rassembler la gauche, mieux vaut ne pas insulter ses composantes. Pour bâtir et réussir l’alternance, nous proposons que le Parti socialiste entretienne des relations suivies, approfondies et sans subordination avec les autres forces qui veulent le changement.

Avec nos partenaires de la gauche parlementaire, l’union est un acquis indispensable même si ses formes doivent être renouvelées. D’ici 2007 et après, il faudra en finir avec la logique de sous-traitance qui caractérisait la gauche plurielle. A force de souligner que l’écologie serait réservée aux Verts, que le social reviendrait au PCF, que la laïcité serait la marque des Radicaux, etc., le Parti socialiste en est réduit au rôle de gestionnaire de...ce qui reste. Quant à nos partenaires, s’ils se réjouissent d’agir dans le domaine qui a pu faire leur succès, ils ne veulent pas être écartés d’une approche globale. Avant 1981, l’union de la gauche était un combat. Après 1995, la gauche plurielle fut plutôt un agrégat. La gauche rassemblée devra être un partenariat. Le Parti socialiste y jouera un rôle central, mais pas hégémonique. Après notre congrès de Novembre, des discussions devront s’ouvrir avec nos partenaires pour l’élaboration d’un pacte de gouvernement. Des engagements et un calendrier seront déterminés en vue de la mandature. Aux responsabilités, ils devront être respectés et évalués, grâce à un pacte de législature et de changement.

Vis-à-vis de l’extrême gauche, le Parti socialiste doit aussi avoir une stratégie. En s’en tenant aux faits : l’extrême gauche progresse électoralement lorsque nos concitoyens doutent de l’ancrage à gauche du PS. Les formations qui refusent toute perspective gouvernementale n’ont pas vocation, par définition, à préparer cette échéance - mais il faudra bien qu’elles disent si oui ou non elles veulent une véritable alternative politique. En tout état de cause, leurs électeurs sont des femmes et des hommes de gauche, ayant à exercer librement leur choix. Ils doivent nous respecter, nous devons les respecter. Avec les syndicats, le dialogue doit être permanent. A l’échelon fédéral, il passe par la tenue de forums sociaux. Au niveau national, nous devons consulter avec les forces vives du salariat pour préparer le contenu du contrat social que nous proposerons au pays. A la lumière de l’expérience, nous souhaitons que la concertation sur les questions à approfondir et les principales mesures de notre projet puisse s’engager avant l’échéance présidentielle et législative. Une fois aux responsabilités, cette concertation devra se poursuivre. Car on ne gouverne pas par décret et le gouvernement n’est pas toute la société : faute d’avoir intériorisé cette réalité, la gauche a eu tendance à sous-estimer le fait syndical et associatif. Chacune de ces instances est légitime et précieuse à la démocratie. Politiques, syndicats, associations, mouvement mutualiste et d’éducation populaire doivent travailler ensemble, sans confusion ni subordination, mais de façon continue. Avec les associations et ONG qui composent le mouvement altermondialiste, nous devons confronter les points de vue, dresser la liste de nos points de divergence et de convergence. Le dialogue doit être franc, mais aussi fraternel. L’émergence du mouvement alter-mondialiste est une novation dans le paysage de la gauche. A travers ces associations et bien souvent grâce au Net, des dizaines de milliers de citoyens contribuent à la critique du modèle néolibéral dominant et à la réflexion sur une alternative. Ces mouvements peuvent nous faire partager certaines de leurs analyses. En retour, nous pouvons les convaincre qu’il n’y a pas d’efficacité en démocratie sans institutions et sans élections. Cette jonction, qui n’est en rien une confusion, s’opère déjà souvent à la base, dans les collectifs citoyens et dans les luttes sociales - mobilisation contre les délocalisations avec les salariés, refus des fermetures de classes avec les enseignants et les parents d’élèves, rejet par des collectivités locales à direction socialiste de l’AGCS, défense des services publics. Pour le bien des femmes et des hommes qui attendent un changement, il faut la conforter, sans pour autant dévier de nos positions de fond, ni perdre notre identité.

Conclusion : le rassemblement est la condition du changement

Le Congrès est le moment le plus important de notre vie collective. Il se déroule à un moment clé pour notre Parti : après le référendum du 29 mai et avant les grandes échéances de 2007. Chacun de nous doit se déterminer en conscience et répondre librement à la seule question qui vaille : quelle est la ligne politique juste et gagnante ? Ou bien nous refusons de tirer toutes les leçons de l’expérience, d’écouter le message et la souffrance des Français qui, en 2002, 2004 et 2005, ont rejeté le libéralisme, d’admettre que, même si nous sommes les plus puissants, nous ne sommes pas seuls à gauche - alors nos idées auront beaucoup de mal et un long bail risque d’être garanti pour la droite au pouvoir. Ou bien - c’est le chemin que nous proposons dans cette motion commune - nous décidons d’opposer une résistance frontale à la droite Chirac-Sarkozy-Villepin-Bayrou, de faire prévaloir la volonté des hommes face à la mondialisation des choses, de travailler avec d’autres au rassemblement de la gauche (ça n’a jamais été facile, ni pour Léon Blum, ni pour François Mitterrand) - et alors, l’espérance et l’alternance deviennent possibles. Chaque militant détient, par son vote en novembre, une part de notre destin commun. En cette année du centenaire de notre Parti, réaffirmons qu’être socialiste, c’est vouloir le changement et donnons-nous en les moyens. En réaffirmant sa volonté de transformer la société et d’améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens, notre Parti gagnera plus que les élections : il gagnera le cœur des Français. Ils observent attentivement nos débats, qui ne doivent pas dégénérer en chicanes ou en attaques. Ne les décevons pas. Pas de changement sans rassemblement, voilà notre conviction. Le rassemblement ne doit pas être réduit à une simple tactique électorale. Il doit être compris et pratiqué dans toutes ses dimensions. Le rassemblement aide à politiser le grand nombre. Il contribue à dynamiser l’action populaire. Il favorise l’intervention citoyenne dans la préparation du programme gouvernemental, puis aide à garantir le succès lors de sa mise en œuvre. Nous faisons le vœu de faire partager à tous nos camarades cette conviction : face à la droite la plus dure depuis 50 ans, il faut le rassemblement de la gauche le plus fort depuis 1981. Rien n’est possible sans un Parti socialiste résolument ancré à gauche.

Et cela se décide au Mans.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message