La Méditerranée face aux assauts de la mondialisation néolibérale : l’urgence de la résistance (par Attac France)

vendredi 20 juin 2008.
 

Sommaire

* Les migrations en Méditerranée : enjeux politiques, sociaux et humains

* Agriculture et monde rural : construire la souveraineté alimentaire

* La question de l’eau

* Environnement : mettre un terme aux pratiques agressives et prédatrices

* L’Union européenne et le monde méditerranéen : du processus de Barcelone à la politique (...)

* Les États-Unis en Méditerranée : Israël d’abord, le Golfe ensuite

Le Partenariat euro-méditerranéen, encore appelé processus de Barcelone, est fondé sur un déséquilibre flagrant dans les relations entre l’Europe et les pays du pourtour sud et est de la Méditerranée.

La promotion du libre-échange et le contrôle des migrations accaparent l’essentiel des préoccupations de l’Union européenne. Loin de favoriser la démocratie, pour mener à bien le projet néolibéral, l’UE soutient les régimes les plus autoritaires et répressifs, et ferme les yeux sur la violation permanente par Israël des droits des Palestiniens.

Si, aujourd’hui, le processus de Barcelone est intégré dans la politique européenne de voisinage (PEV), la zone méditerranéenne n’a pas perdu de son importance géostratégique. Certes, les approvisionnements en hydro-carbures ne passent plus seule-ment par là, mais la Méditerranée reste une base arrière pour les interventions américaines au Moyen-Orient. La mise en place de l’agence Frontex pour contrôler les frontières au nom de la lutte contre le terrorisme et contre l’immigration clandestine, la multiplication des centres de rétention criminalisant les migrants transforment la Méditerranée en barrière de plus en plus difficile à franchir du sud vers le nord pour les personnes - tandis que toute entrave à la circulation des marchandises et des capitaux est levée.

La poursuite de la politique coloniale israélienne, les bombardements massifs du Liban durant l’été 2006 et la négation renouvelée du droit à l’existence d’un État palestinien signent l’échec du projet de faire de la Méditerranée la « zone de paix et de prospérité » annoncée à Barcelone en 1995.

La militarisation de la mondialisation est évidente en Méditerranée et au Moyen-Orient. La guerre à outrance contre le peuple palestinien est une menace permanente pour la paix dans la région. La lutte contre la guerre, contre l’occupation américaine en Irak, contre l’expansionnisme colonial de l’État d’Israël est un combat central pour le mouvement altermondialiste.

La Méditerranée du processus de Barcelone n’est pas la nôtre. Notre Méditerranée ne peut être que celle des mouvements sociaux qui se mobilisent dans la lutte contre le néolibéralisme et la guerre, celle des luttes communes pour les droits politiques, économiques, sociaux et culturels, une Méditerranée solidaire, respectueuse des hommes et des femmes et de leur environnement.

Mère Méditerranée

Cela fait plusieurs siècles que la Méditerranée n’est plus la Mare Nostrum, la matrice de civilisations qu’elle fut à l’époque antique. Après la réorientation des routes commerciales vers l’Atlantique, puis la révolution industrielle, elle a cessé d’être au centre de l’économie-monde, et l’expansion coloniale a soumis les rives du sud et de l’est aux intérêts du capital et des puissances dominantes.

Rive nord : l’Europe, un des montants du monde trilatéral « surdéveloppé », globalisé, néo-libéralisé, inégalitaire. Rives sud et est : un monde périphérique, dominé et déformé, colonisé puis décolonisé, qui ressent profondément l’état de dépendance. Sur la terre de Palestine, l’agressivité de l’État israélien - colonisation de peuplement et terrorisme d’État - l’illustre au quotidien, en contrevenant à toutes les résolutions onusiennes. Et, en arrière-plan, on a l’Afrique que l’on dit subsaharienne, avec les « pays les moins avancés », les « pays pauvres très endettés » dans la terminologie du FMI.

La ligne de faille est impressionnante : la mer Méditerranée marque le plus grand différentiel de niveaux de vie au monde entre deux régions contiguës. En même temps, les dynamiques démographiques font plus que se contredire ; à l’horizon 2050, on prévoit :

- en Europe : stagnation démographique, et même légère régression, de 488 à 472 millions d’habitants ;

- en Afrique : croissance démographique exponentielle de 906 à 1 900 millions d’habitants. De ces deux séries de facteurs résultent la pression massive à l’émigration - exutoire à la pauvreté -, la dépendance alimentaire et la bidonvillisation, autant d’impacts de la déstructuration accélérée des sociétés rurales.

La dérive continentale entre les plaques Nord et Sud est flagrante. L’instauration du libre-échange et de la dérégulation, qui forment l’horizon indépassable de l’OMC, du FMI et de la Banque mondiale, comme du Partenariat euro-méditerranéen (PEM) et des accords de partenariat économique (APE) promus par l’Union européenne, ne peut que l’accentuer.

L’aggravation des inégalités et de la pauvreté, les politiques répressives, les agressions militaires, suscitent des sentiments de frustration, de désespoir, d’humiliation, qui font le lit de la violence politique et d’un radicalisme islamiste sans issue. Contre les menaces de « clash des civilisations », contre la « sanctuarisation » des pays riches, nous nous devons d’intervenir par la dénonciation du néolibéralisme et par l’affirmation des solidarités et des droits humains.

Les migrations en Méditerranée : enjeux politiques, sociaux et humains

Dès le XIXe siècle, l’industrie capitaliste naissante recourt à l’immigration pour répondre à ses besoins en main-d’œuvre à bon marché. Elle recrute des travailleurs venus des pays pauvres d’Europe, et bientôt des colonies. Après la Deuxième Guerre mondiale, c’est du Maghreb et de Turquie qu’ils arrivent en grand nombre. Ils sont souvent parqués dans des bidonvilles, dans des conditions particulièrement difficiles, loin de leurs familles restées au pays.

Aujourd’hui, dans un contexte de chômage durable et de paupérisation des pays du Sud, les politiques européennes restrictives favorisent l’immigration clandestine, et la situation des migrants est de plus en plus précaire. Celle de la main d’oeuvre agricole, en Andalousie ou dans le midi de la France, embauchée sur des contrats saisonniers, corvéable à merci, est particulièrement dure.

Dans les années 1970 et 1980, la hausse des prix du pétrole a favorisé l’émigration vers les pays producteurs : Libye, péninsule Arabique, Irak. Les étrangers représentent jusqu’à 80 % de la population dans certains petits États. La gestion de l’immigration est privatisée, entre les mains des employeurs ou des trafiquants de main-d’œuvre. Aujourd’hui, en Algérie, 40 000 Chinois travaillent sur les chantiers de construction, dans des conditions d’une dureté extrême.

Le durcissement des politiques néolibérales dans les années 1990 aggrave la pauvreté dans les pays d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Asie et suscite toujours plus de candidats à l’émigration. À l’inverse, le développement d’une économie de services, financiarisée, spéculative, consumériste, favorise le recours à une main-d’œuvre étrangère dans des secteurs nouveaux, en particulier dans les services à la personne, où la part des femmes est de plus en plus grande. Enfin, la marchandisation du monde touche toutes les dimensions de la vie et entraîne une intensification du trafic des êtres humains, particulièrement des femmes et des enfants. Les Balkans sont aujourd’hui un haut lieu de la traite des femmes.

Dans ce contexte, les politiques européennes d’immigration sont particulièrement hypocrites : sous prétexte de sécurité et de protection de l’emploi, les conditions d’entrée en Europe sont de plus en plus sévères. Les accords d’association avec les pays de la rive sud imposent de lourdes contraintes de réadmission. Ainsi, la « forteresse » Europe, avec l’agence FRONTEX [2] créée en 2005, externalise le contrôle des frontières et transforme les pays du sud en centres de rétention où sont bafoués les droits humains élémentaires (Maroc, Libye).

Agriculture et monde rural : construire la souveraineté alimentaire

L’agriculture et l’élevage, comme l’artisanat, ont fourni la base des diverses civilisations méditerranéennes. Les structures se sont à peu près maintenues jusqu’au XIXe siècle et l’irruption du capitalisme colonial. Avec le « pacte colonial », les pays méditerranéens sont devenus des marchés pour l’industrie européenne, au prix de la ruine de l’artisanat, et leur agriculture est devenue une source d’approvisionnement des métropoles : le coton (Égypte) ; l’huile d’olive (Tunisie) ; le vin, les céréales et les agrumes (Algérie, Maroc). Ces cultures de rente ont introduit le rapport salarial tandis que la paysannerie était expulsée des meilleures terres, marginalisée dans les montagnes et/ou prolétarisée pour fournir de la main-d’oeuvre pour les mines et les quelques industries. Ainsi est né un déséquilibre entre une population rurale maintenue à l’écart et une agriculture « moderne » dépendante des marchés extérieurs. En même temps se développait l’urbanisation provoquant un autre déséquilibre entre les zones côtières et les régions intérieures délaissées.

Malgré quelques tentatives de développement autocentré et de réformes agraires (Égypte, Algérie), les États ont plutôt compté sur les marchés internationaux pour nourrir la population urbanisée et orienté leurs agricultures vers l’exportation. Ils ont ainsi maintenu une dépendance structurelle à l’égard de la mondialisation. Aujourd’hui, les paysanneries méditerranéennes qui subsistent sont menacées de disparition par un triple mécanisme : expulsion de leurs terres au profit de l’agriculture industrielle ; exclusion des marchés intérieurs saturés de produits importés ; incapacité des États à investir pour l’alimentation, l’éducation, la santé. Les jeunes paysans dynamiques sont ainsi poussés à trouver un avenir en ville ou à l’étranger.

Le libéralisme entraîne un véritable déménagement des agricultures méditerranéennes, vidées de leurs paysans sur certains territoires laissés en friche, tandis que d’autres sont par contre surexploités, pollués par les engrais et les pesticides, soumis à de graves érosions. Les ouvrages accumulés par des centaines de générations tels que les terrasses, les chemins, les réseaux d’irrigation, les savoir-faire adaptés aux situations locales, la biodiversité des plantes et des animaux méditerranéens, tout cela est en passe de disparaître sous l’effet d’une normalisation productiviste.

Ce modèle néolibéral est en crise. Pour résister à ces désordres et construire une agriculture capable de nourrir la population, il est essentiel que chaque peuple compte d’abord sur ses propres forces, ce qui suppose de se protéger de la domination des marchés mondiaux, de stopper l’accaparement des terres par une agriculture industrielle orientée vers l’exportation et polluante, enfin de soutenir les sociétés paysannes, seules capables localement de fournir des aliments selon un équilibre maîtrisé et équitable entre campagnes et cités, principes qui valent pour tous les pays méditerranéens, du Nord comme du Sud ou de l’Est.

La question de l’eau

L’eau est une ressource fragile et inégalement répartie dans tout le bassin (Nord 74 %, Est 21 %, Sud 5 %), en raison des faibles volumes des précipitations et plus encore de leur irrégularité. L’évolution climatique, la croissance démographique, les fortes concentrations urbaines dans les zones côtières, conduiront en 2025 plus de 90 % de la population du Maghreb et du Moyen-Orient à une situation critique. Actuellement, ces régions sont les plus soumises au « stress hydrique » avec une disponibilité des ressources souvent inférieure au seuil de pénurie tel que défini par les organisations internationales (1 000 m3/hab/an, pour un seuil critique à 500 m3/hab/an). Gaza est un cas extrême où la population ne dispose que de 84 m3/hab/an - l’eau des territoires occupés étant massivement accaparée par Israël. L’agriculture est de loin la première consommatrice de l’eau. Le développement d’une agriculture d’exportation (particulièrement de fruits et légumes), privilégiée par les politiques néolibérales, aggrave la situation, au détriment des cultures vivrières.

Or l’eau est un bien vital pour les populations. C’est pourquoi son partage est source de graves tensions régionales. Certains pays (Turquie, Israël, Soudan) réalisent des captages et des barrages en amont de cours d’eau internationaux, ce qui réduit parfois drastiquement les ressources des pays situés en aval (Syrie/Irak, Palestine, Égypte). Sur un autre plan, l’insuffisance des ressources pérennes (précipitations, nappes phréatiques, cours d’eau) suscite des pratiques dangereuses pour l’environnement, comme le pompage dans les nappes profondes non renouvelables (Libye, Jordanie, Israël/Palestine, Arabie) ou le dessalement de l’eau de mer (Espagne, Maghreb, Arabie, Israël...) dont la consommation énergétique est particulièrement élevée.

N’est-ce pas une fuite en avant pour éviter de mettre en question les graves conséquences des modes de consommation et de gestion des ressources dont le seul but est de fournir de nouvelles occasions de profits aux capitaux privés ?

Le développement des villes nécessite des aménagements importants qui devraient être pris en charge par la puissance publique. Mais, pour la Banque mondiale et l’OMC (dans le cadre de l’AGCS), l’eau est un « bien marchand » dont il faut privatiser la gestion et dont le coût doit être supporté par le consommateur. Les grandes entreprises françaises sont les leaders mondiaux sur ce marché, Veolia (ex Vivendi) et Ondeo (ex Suez-Lyonnaise des eaux) en tête. À partir de leurs positions en Europe, elles cherchent à imposer « leur » modèle dans le monde entier. Elles sont déjà implantées dans les grandes villes, Casablanca, Rabat, Tanger, Alger, Alexandrie, Ashkelon, etc., et elles fixent des prix souvent insupportables aux populations urbaines.

L’intérêt des peuples exige une autre approche : l’eau, besoin vital au même titre que l’air, doit être considérée comme un bien public et placée sous le contrôle des usagers citoyens. Une telle gestion pourra seule rationaliser les techniques d’irrigation, veiller à un entretien efficace des réseaux et développer le recyclage, supprimer les prélèvements abusifs, les gaspillages et les usages irresponsables. Elle est incompatible avec la marchandisation de ces ressources entre les mains des grandes firmes privées multinationales uniquement préoccupées par le montant de leurs profits.

Environnement : mettre un terme aux pratiques agressives et prédatrices

L’environnement naturel du bassin méditerranéen a fourni des conditions très favorables aux établissements humains depuis des millénaires. C’est dans les grandes plaines du croissant fertile, entre la Mésopotamie et la vallée du Nil, que l’agriculture et l’élevage sont apparus, ce qui a conduit à la sédentarisation et à l’apparition des cités et des États. Dès l’origine, ces activités humaines ont profondément transformé le cadre naturel initial, pour l’irrigation, le développement des pâturages, et l’urbanisation. Mais depuis l’Antiquité et jusqu’au XIXe siècle, ces transformations, produites par un travail humain principalement manuel, n’ont pas gravement mis en péril le climat ou les ressources naturelles (eau, sols, végétation). Mis à part la déforestation importante à l’époque romaine, elles ont conduit à une reproduction élargie des ressources, par l’amélioration des plantes de culture et des animaux d’élevage, ou par des modes de gestion des ressources en eau adaptées au climat et aux reliefs.

Cet équilibre a été en revanche ébranlé depuis le XIXe siècle, en Méditerranée comme ailleurs, par le développement de l’industrie et l’expansion du capitalisme, d’abord sous sa forme coloniale, puis actuellement dans sa phase de mondialisation néolibérale. Les effets de ces évolutions ont été multiples. Elles ont d’abord été marquées par une destruction du tissu rural qui a provoqué l’exode vers les zones côtières sur-urbanisées et industrialisées, puis de forts courants migratoires vers les « nouveaux mondes » (Amériques du Nord et du Sud, Europe du Nord). Un exemple actuel de cette destruction : l’implantation des colonies israéliennes en Palestine, avec l’arrachage de centaines de milliers d’oliviers. Ensuite, ces évolutions ont entraîné une surexploitation des ressources naturelles (sols, eaux, forêts, poissons), avec les cultures de rente et les moyens techniques agressifs de l’agriculture productiviste et de la pêche industrielle. Enfin, elles s’accompagnent d’une pollution dangereuse de l’atmosphère, des sols et des eaux, en particulier de la Méditerranée elle-même par les grands fleuves européens qui y déversent leurs effluents, par les dégazages sauvages d’hydrocarbures, la prolifération du tourisme massif en zones littorales ou encore l’agriculture industrielle.

Ces déséquilibres sont aggravés par les effets du réchauffement climatique qui menace tout l’écosystème méditerranéen d’une progressive désertification : les hauts plateaux du Maghreb ne pourront bientôt plus produire de blé. Pour sortir de ce cycle négatif, il est urgent de mettre un terme aux pratiques agressives et prédatrices et de reconfigurer le système énergétique en s’appuyant sur la ressource au fort potentiel qu’est l’énergie solaire.

L’Union européenne et le monde méditerranéen : du processus de Barcelone à la politique européenne de voisinage

Le processus de Barcelone (les accords euro-méditerranéens de 1995) s’est construit à l’époque dans l’ambiance des accords d’Oslo, lesquels semblaient ouvrir la voie vers une solution apaisée en Palestine. En quelques mots, il s’agit officiellement pour l’UE de contribuer au développement socio-économique des pays de la rive sud, les pays partenaires méditerranéens (PPM [3]), et d’inciter aux progrès de la démocratie et des droits de l’homme. L’objectif est clairement affiché : une zone euro-méditerranéenne de libre-échange en 2010. Les méthodes aussi, avec le programme opérationnel et financier MEDA (mesures d’accompagnement) : démarches bilatérales avec les accords d’association passés par l’UE avec chacun des PPM, démarches multilatérales (programmes EuroMed sur des thèmes communs comme l’eau, l’environnement marin, les échanges de jeunes, les cultures et les patrimoines...)

Cependant, sous couvert « de paix et de prospérité partagée », il apparaît bien que le partenariat euro-méditerranéen (PEM) est « avant tout un accord « de défense » et de protection de l’UE contre de possibles « débordements » sociaux politiques et culturels des pays de la rive sud de la Méditerranée. » [4] : débordements de l’émigration de masse vers l’Europe, et l’on va demander aux partenaires de garder les frontières ; débordements plus récents du terrorisme.

Quelque dix ans après, l’UE dilue et délite le PEM dans la politique européenne de voisinage et de partenariat (PEV). Cela correspond à la prise de conscience de l’échec du processus de Barcelone. Échec par rapport aux objectifs affichés : la Méditerranée comme zone de paix, de démocratie et de prospérité partagée, alors que les écarts de développement et de niveau de vie se sont accrus entre les deux rives et que les régimes autoritaires prospèrent.

Échec, surtout, par rapport aux objectifs réels : les migrations venues du Sud ont pris une ampleur dramatique depuis les événements de Ceuta et Melilla à l’automne 2005 jusqu’aux naufrages d’embarcations chargées de migrants clandestins - 2 784 noyés depuis fin 2002 [5] - qui cherchent à rejoindre Lampedusa, l’Andalousie, les Canaries, ou les îles grecques de l’Égée.

Les États-Unis en Méditerranée : Israël d’abord, le Golfe ensuite !

Les États-Unis ambitionnent d’étendre leur domination sur l’ensemble de la planète. L’OTAN est le principal instrument de cette volonté. Les interventions militaires ne sont que l’outil et le volet armé d’un projet hégémonique au service de leurs intérêts économiques.

L’effondrement de l’Union soviétique a été le prélude à un élargissement de l’OTAN à de nouveaux pays à l’est de l’Europe, et à sa transformation d’organisation de défense en outil d’intervention : intervention de l’OTAN au Kosovo, projet d’installation de missiles anti-missiles en Pologne et en Tchéquie, tentative d’intégrer dans l’OTAN l’Ukraine et la Géorgie, sans omettre l’extension du champ de l’alliance « atlantique nord » jusqu’en Afghanistan ou la réintégration sarkozyste de la France dans l’appareil militaire intégré.

La Méditerranée et le Moyen-Orient sont des espaces privilégiés des interventions états-uniennes. La VIe flotte américaine, dont le commandement est basé à Naples, compte 40 navires et 175 avions et ne cesse de renforcer ses bases militaires. Elle croise en permanence dans la grande mer intérieure - même si le dispositif en est redimensionné (fermeture de la base de sous-marins nucléaires de l’île de la Maddalena). Les manœuvres récentes au large des côtes libanaises sont venues rappeler la volonté d’imposer partout l’ordre états-unien. L’occupation de l’Irak se prolonge, malgré les difficultés et les revers, ainsi que l’intervention militaire en Afghanistan, sous l’égide de l’OTAN.

L’importance stratégique de la région est largement liée au poids du pétrole dans l’économie des États-Unis : le Moyen-Orient fournit la moitié de ses besoins, et le trafic pétrolier en Méditerranée représente encore près du tiers du trafic maritime mondial.

Les dirigeants américains successifs ont noué des alliances fortes dans certains pays. La Turquie, en premier lieu, dont la contiguïté avec l’Irak et l’Iran rend l’appartenance à l’OTAN d’autant plus stratégique. L’Arabie Saoudite et les États du Golfe avec leurs énormes gisements d’hydrocarbures. Le Maroc, allié modèle. L’Égypte, qui occupe une position centrale, du fait de sa situation géographique et de son poids démographique, dans l’ensemble arabe.

Mais l’hégémonie états-unienne passe aussi par une stratégie de multiplication des accords de libre-échange bilatéraux : avec Israël en 1996, la Jordanie en 2000, le Maroc en 2002, l’Égypte en 2008. Accords qui s’accompagnent de la mise en place de zones franches spéciales, accueillant les investissements israéliens.

La présence américaine met ainsi en relief la faiblesse de l’Union européenne, incapable d’avoir une position unique par rapport à la guerre en Irak, unifiée seulement lorsqu’elle est alignée dans et par l’OTAN, et mise hors-jeu en Palestine.


Le sommet de l’Union pour la Méditerranée à Paris le 13 juillet 2008, c’est la relance de la « frontiérisation » et de la « néo-libéralisation » au sud de l’UE. Ce sont autant de raisons de relancer la mobilisation altermondialiste et d’intervenir contre ce sommet 2008, dans la lignée des manifestations contre le sommet de Marseille en 2000 ou contre le sommet B+10 de Barcelone en 2005.



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