Débat : La gauche, c’est qui ? quoi ? comment ? Vers où ? (2 Par Elie Arié, ancien Secrétaire national à la Santé du Mouvement républicain et citoyen)

mercredi 16 juillet 2008.
 

Le débat lancé par Delanoë sur les rapports entre gauche et libéralisme relance le vieux problème de la définition de la gauche...

Rien de plus difficile que de définir aujourd’hui ce qu’est la gauche. Nous avons toujours tendance à penser le passé en fonction des catégories d’aujourd’hui, à raisonner dans l’anachronisme. Notons, en passant, que, d’emblée, la gauche a hérité d’un nom étymologiquement péjoratif : « être gauche », c’est être maladroit, « se lever du pied gauche », etc. Contrairement à « être adroit », à droite. En italien, « gauche » se dit « sinistra », de même étymologie que « sinistre ».

On sait que le terme remonte au Parlement britannique, puis a été repris par les États généraux de 1789, en fonction de l’endroit où s’asseyaient les groupes. À l’époque, la gauche représentait le parti du mouvement, du changement (par la réforme ou la révolution), de l’action. Alors que la droite représentait le parti de la conservation (conservatisme) de l’ordre établi, de la réaction au changement (réactionnaires).

Une gauche plus conservatrice

Aujourd’hui, à l’inverse, on peut dire que la droite a, avec la mondialisation et la globalisation imposées par Reagan et Thatcher, effectué une vraie révolution, un vrai changement économique et politique de la planète, face auquel la gauche, qui n’a toujours pas trouvé de parade efficace, se retrouve dans une position de défense des avantages acquis qui sont progressivement grignotés, de conservation de l’état du monde d’il y a 30 ans.

Autre critère : la gauche, en France, à ses origines (Révolution Française), s’est identifiée au nationalisme, parce qu’attaquée par toutes les monarchies européennes : levée en masse, conscription, soldats de l’an II, la Marseillaise (« Allons enfants de la Patrie »), etc.

Puis, avec le socialisme, virage à 180 degrés : la gauche défend l’« internationalisme » prolétarien : « prolétaires de tous les pays, unissez-vous ». La droite s’identifiant, au contraire, à la défense du patriotisme, de la xénophobie, de la lutte contre l’« anti-France » (expression qui désigne la gauche et l’étranger). Nouveau virage à 180 degrés avec la mondialisation : c’est la droite qui devient l’internationaliste, la gauche qui défend ses acquis par le seul outil politique capable de le faire, la Nation. Les prolétaires des pays riches et ceux des pays pauvres ont des intérêts radicalement divergents, l’amélioration de la condition des seconds se faisant aux dépens de celle des premiers (délocalisations). Un tel phénomène, à moindre échelle, avait déjà existé avec cette autre forme d’internationalisme qu’était la colonisation.

LA gauche n’existe pas

Sous la Révolution Française, la gauche défendait « les libertés » : d’expression, d’opinion, de la presse, de vote au suffrage universel... face à l’absolutisme royal (mais pas la liberté d’association : loi le Chapelier, interdisant les corporations et les syndicats). Avant de changer une nouvelle fois radicalement, avec une certaine conception du marxisme où ces mêmes libertés sont condamnées par une partie de la gauche, qui les qualifiera de « bourgeoises » : dictature du prolétariat, parti unique en URSS, etc., dont on trouve encore des relents dans les appels aux manifestations de rue contre les décisions des gouvernements issus du suffrage universel.

Enfin, rappelons le vieil antagonisme entre républicanisme (en France : Chevènement) et démocratie (en France : Rocard), qui se réclament tous deux de « la gauche ».

Bref, la notion de « gauche », qui semble aller de soi, renvoie à des positions radicalement différentes selon les époques et les pays.

Elie Arié


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message