Notre première République sociale, démocratique, laïque et écologique

mercredi 27 juillet 2016.
 

Aujourd’hui, les citoyens ont le sentiment de n’exister qu’au moment de l’élection présidentielle. Ils sont déclarés hors-jeu dans l’intervalle. Mais ils constatent aussi qu’ils sont plutôt invités à écarter tel ou tel candidat qu’à choisir un projet politique et l’homme ou la femme susceptible de l’incarner et d’en impulser la mise en œuvre. Dans ces conditions, on comprend leur peu d’empressement à voir rejouer en 2017, avec les mêmes acteurs, le film de 2012 alors que le scénario qui leur avait été promis a été profondément bouleversé en cours de route sans qu’ils puissent intervenir. Leur demande de respect des engagements pris ne devient qu’un cri perdu qui se fracasse sur le mur froid du pouvoir exécutif. Dans un système parlementaire combiné à de nouvelles pratiques démocratiques, il n’y aurait vraisemblablement pas eu de loi « travail ».

Nos institutions à bout de souffle pervertissent le concept même de démocratie. Il devient urgent de remettre tout cela d’aplomb, c’est-à-dire, avoir comme point de départ et d’arrivée, les citoyens eux-mêmes grâce à la combinaison harmonieuse de la démocratie directe et de la démocratie représentative, à laquelle n’échapperait aucun domaine de la vie en société, à commencer par celui du travail, aujourd’hui zone interdite.

Le chantier est immense et appelle invention et créativité avec la pleine utilisation des outils nouveaux de communication et de participation. Sans attendre, redonner au Parlement le primat politique devrait devenir un objectif prioritaire qui supposerait de cesser d’ensevelir l’élection des députés sous le présidentialisme.

Avec les mouvements sociaux et citoyens, des députés libérés de la tutelle présidentielle seraient les garants de l’expression des rapports de forces réels dans le pays. Avec la possibilité de porter au Parlement, puis de contrôler, des représentants, élus proportionnellement au nombre de voix recueillies, qui mèneront la lutte contre la prédation financière, décidés à affronter les logiques du capital, pour la souveraineté populaire et contre les actuels traités européens, deviendrait crédible l’ambition de renouer avec un progressisme de notre époque, aussi attentif au sort de la planète qu’à celui des individus qui la peuplent. Dès lors, pourrait s’imposer un droit nouveau qui sécurise le travail et anticipe ses métamorphoses, la défense des services publics comme des collectivités territoriales et des biens communs.

Notre pays pourrait sans détour se prononcer pour l’arrêt des négociations sur le grand marché transatlantique, engagerait une nouvelle réflexion sur le changement de la construction européenne et les députés seraient maîtres des décisions d’engager la France dans des guerres. Autant de choix de nature à faire reculer l’ultralibéralisme ambiant et à couper l’herbe sous le pied d’une extrême-droite qui se nourrit de ses méfaits. Il s’agit ni plus ni moins que d’inventer et de construire la première République sociale, démocratique et écologique. Et chacun est à même de mieux mesurer en ce moment combien les choses auraient été différentes si des députés, libres de leurs choix, s’étaient opposés à la loi El Khomri. Imaginons un groupe Front de gauche et communiste plus important ! L’exécutif n’aurait pas eu l’espace politique pour ces mesures, les plus réactionnaires depuis quatre ans. Ces enjeux appellent à considérer avec le plus grand sérieux l’élection des députés. Bref, pour changer de politique, tout indique qu’il faudra la transformer elle-même jusqu’à changer de régime.

(Patrick Le Hyaric, eurodéputé Front de Gauche)


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