La gauche du PS est candidate à peser sur le cours tumultueux de l’histoire

mardi 30 septembre 2008.
 

Avec le dépôt mardi dernier des motions d’orientation soumises au vote des militants, le Congrès du Parti socialiste entre dans sa phase décisive. Bientôt ce sera le tour des Verts, du PCF, du NPA. En neuf mois, du PRG en mai dernier au NPA en janvier prochain, toute la gauche aura tenu Congrès. Elle l’aura fait dans un moment qu’elle n’avait pas prévu : une crise du capitalisme d’une ampleur jamais vue depuis plusieurs décennies. Ce contexte inouï commande tout le reste. Il change le sens de tous nos débats. Il oblige la gauche à parler pour le plus grand nombre, pour la masse désemparée qui subit les coups de la crise et ne peut attendre à l’abri d’un mandat local l’alternance de 2012. Il ramène sur la table parfois encombrée de pinaillages abscons la rude controverse sur ce que la déclaration de principes du PS appelle pudiquement le « rapport critique au capitalisme ». Bref il force à aller à l’essentiel.

C’est dans cet esprit que les animateurs de la sensibilité Trait d’Union au Parti socialiste ont engagé ce Congrès. Nous n’avons pas pris comme boussole l’aiguille affolée des dérèglements internes, vendettas obscures et autres batailles de groupuscules qui caractérisent le paysage éclaté des courants et sous-courants socialistes, gauche du PS incluse. Nous avons pris le vent hors de ce huis-clos confiné. La crise actuelle est une bifurcation. Le naufrage du vieux monde n’annonce pas toujours les lendemains qui chantent. Il peut aussi annoncer la guerre. C’est cela une bifurcation : plus de « juste milieu » mais un chemin à prendre qui n’est pas déterminé à l’avance. Voie des guerres ou voie des révolutions ? L’action des hommes fera la différence. Voilà le défi qui s’abat sur la gauche !

Un défi gigantesque. Car la gauche est à terre, lourdement battue par Sarkozy, divisée, incapable pour l’heure d’entraîner la société. Mais aussi parce que la crise prend à revers une direction socialiste qui a perdu depuis belle lurette toute habitude de penser une alternative au capitalisme. Le bateau de la mondialisation libérale sombre au moment où deux socialistes français, Pascal Lamy et Dominique Strauss-Kahn, sont montés dans la cabine de pilotage. Le système explose à l’heure où la majorité des partis sociaux-démocrates européens, alignés peu ou prou sur la ligne démocrate à l’italienne, abjurent toute volonté de le dépasser. Le risque est donc immense que la principale force de gauche soit classée du côté des tenants du système, empêchant toute alternative progressiste à la crise actuelle.

Ce risque ne sera pas évité par des habiletés rhétoriques ni des demi-mesures. Ainsi toutes les motions socialistes se prononcent pour davantage de régulation. Or Bush aussi ! Et Sarkozy de même qui jure de faire respecter les règles. Mais quelles règles et fixées par qui ? La gauche du PS a une réponse à cette question : l’intervention publique comme moyen de faire prévaloir l’intérêt général. Elle défend le rôle de l’Etat, refuse l’indépendance de la Banque centrale européenne, tout en inscrivant l’action publique dans le cadre d’une Sixième République enfin démocratique et d’une Europe respectueuse de la souveraineté populaire. S’y ajoute la prise en compte nouvelle de la crise écologique. C’est le début d’une alternative. Il faut qu’elle se fasse entendre. C’est pourquoi il était si décisif que la gauche du PS se rassemble. Tel a été notre combat des derniers mois et des dernières heures. C’est chose faite. Pour la première fois depuis trente ans, la gauche du PS a fait motion commune. Dès lors la face du Congrès socialiste est changée.

Dans le passé, la division de la gauche du PS l’a si souvent condamné à être inutile ! « Courant de témoignage », « butte témoin » pour les uns lorsque nous campions dans la minorité. « Caution de gauche » pour les autres lorsque nous acceptions des synthèses floues dont la majorité du Parti ne tenait aucun compte. Au final, deux facettes d’une même impuissance. Le rassemblement enfin réalisé de la gauche du PS lui permet cette fois de jouer les premiers rôles. Et le choix d’un premier signataire de 41 ans symbolise cette volonté de tourner la page des échecs passés.

Bien sûr telle n’est pas la manière dont la presse a rendu compte de cet événement. Pour elle, il n’y a que trois grandes motions dans le Congrès socialiste, celles de Royal, Delanoë et Aubry. La motion de gauche est créditée de 15% des voix et présentée comme une force d’appoint. Quelles sont les bases de tels calculs ? Ils ne correspondent en rien aux signatures recueillies qui nous placent largement en tête de tous les blocs. Ils ne correspondent pas davantage aux résultats des derniers Congrès. Au Congrès de Dijon, les deux motions de la gauche du parti totalisent 38% des voix. Au Congrès du Mans, elles atteignent 45%. Et la gauche du PS cette fois rassemblée descendrait à 15% ?

Ce paysage médiatique n’a qu’un seul sens : réduire le Congrès à une compétition à trois pour le poste de premier secrétaire. C’est pourquoi Benoît Hamon a rendu publique sa candidature au poste de premier secrétaire en même temps qu’il annonçait la motion commune. La gauche du PS rassemblée peut terminer le Congrès en tête. Elle n’est pas candidate à figurer. Elle est candidate à peser sur le cours tumultueux de l’histoire. Et elle se donne les moyens de le faire.


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