L’OMC recule, la finance vacille (par Christophe Ventura, BN du Parti de Gauche)

lundi 22 décembre 2008.
 

Le 12 décembre restera une date référence dans la chronique de la crise économique et financière la plus grave que le monde ait connue depuis 1929. Dans la même journée, en effet, deux événements significatifs ont eu lieu à quelques heures d’intervalle.

Tout d’abord, et dans un relatif silence médiatique, le « socialiste » Pascal Lamy recommandait sobrement de "ne pas convoquer les ministres pour finaliser les modalités (du cycle de Doha sur la libéralisation du commerce, le mal nommé « Programme de Doha pour le développement ») d’ici à la fin de l’année", considérant qu’il n’avait "pas détecté l’élan politique" nécessaire. Derrière ces formulations diplomatiques, le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a tout simplement admis qu’il devait renoncer à son souhait le plus cher : convoquer une nouvelle conférence ministérielle de l’OMC le 15 décembre, avant la prise de fonction du nouveau président des Etats-Unis, pour avancer dans l’approfondissement du libre-échange mondial.

Ce nouveau recul de l’OMC s’inscrit dans la dynamique d’échec observée lors des réunions organisées à Genève du 21 au 30 juillet dites du « paquet de juillet ». Il confirme que cette institution perd chaque jour un peu plus sa capacité et sa légitimité à encadrer l’activité commerciale internationale. Le diktat des puissances du Nord est désormais remis en cause par des nations du Sud. Celles-ci ne sont plus disposées à obéir aux injonctions du centre d’un capitalisme international en crise. On fera remarquer que certains pays ou groupes de pays s’opposent désormais frontalement aux dogmes du libre-échange imposés par l’OMC tandis que d’autres les invoquent afin de tirer plus de profits du commerce mondial. Reste que le grippage du principal instrument de libéralisations et de privatisations des économies à l’échelle mondiale constitue une preuve supplémentaire que le cours néolibéral de la mondialisation est en crise.

Au même moment, dans un grand effroi médiatique, le monde découvrait un nouveau scandale financier dont personne ne peut encore mesurer les conséquences : 50 milliards de dollars (37,1 milliards d’euros) grugés par Bernard Madoff, ancien patron du Nasdaq et gestionnaire du fonds d’investissement Madoff Investment Securities.

A n’en pas douter, l’ensemble des responsables financiers et politiques et leurs relais médiatiques tenteront, dès les prochains jours, d’expliquer à l’opinion publique et aux milliers de salariés déjà fauchés par les conséquences de la logique prédatrice du capitalisme financier que Benard Madoff n’est qu’un élément déviant d’un système vertueux qui sera bientôt « moralisé . Déjà, Le Monde s’écrie « Merci, monsieur Madoff » (16 décembre 2008).

Pourtant, l’essentiel est ailleurs. La base du système Madoff est la « pyramide de Ponzi » (du nom de Charles Ponzi, escroc des années 1920). Celle-ci consiste à honorer les intérêts de fonds placés par des clients grâce aux capitaux de nouveaux arrivants attirés par la promesse de prodigieux taux de rendement (entre 8 et 11 %). Or ce mécanisme est un des clés du système financier actuel. Les bulles financières et immobilières reposent sur des mécanismes de cavalerie financière voisins : la finance capte un part croissante des richesses produites pour assurer sa soif de profit à court terme au détriment de l’économie réelle. Qu’un retournement de conjoncture apparaisse, et la pyramide s’effondre, celle de Madoff comme celle des subprimes ou encore celle du CAC 40.

L’édifice du capitalisme se lézarde et sa nature destructrice pour nos sociétés et notre planète se révèle chaque jour un peu plus sous nos yeux. Chacun à leur manière, ces deux évènements confirment, une nouvelle fois, que le temps est venu de « tourner la page du capitalisme ».

Mardi, 16 Décembre 2008


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