" Dans peoplisation, il y a peuple, mais aussi pipeau" (Jean Luc Mélenchon)

jeudi 31 août 2006.
 

Après la Rochelle : comment le Parti socialiste va-t-il se définir ?

Interview de Jean-Luc MELENCHON, publiée dans France Soir le mardi 29 août 2006

Quel bilan tirez-vous de la Rochelle ?

On s’en est plutôt bien sorti. Il y avait un vrai risque que ça tourne au vinaigre car jamais le parti socialiste n’a été dans une telle situation : avec 4 candidats officiels, plus deux autres qui ont quasiment annoncé leur candidature sur place. Ca aurait pu vraiment mal tourner ! D’autant que Strauss-Kahn et Jospin ont organisé des réunions à part, à l’intérieur même de l’université. Certes, il il y a eu parfois un côté « Festival de Cannes », avec les caméras et les émotions, mais on est restés dignes en mettant d’abord en avant tout ce que nous avons en commun.

Quels sont les inconvénients de cette « présidentialisation » ?

Une grande confusion. Tout est ramené à la personne rien aux idées. Du même coup, la principale élection est progressivement totalement dépolitisée. Le sexe ou le physique du prétendant compte davantage que son programme ! C’est fou, non ?

Vous dénoncez la peoplisation qui entoure la candidature de Ségolène Royal ?

Je constate que dans peoplisation, il y a peuple, mais aussi pipeau ! Ce n’est pas Ségolène Royal qui l’a créée, ce sont des médias médiocres et la surenchère de leur confrère. Elle, simplement, elle l’utilise. C’est habile. Cela lui permet de surfer sur la vague. Mais est ce respectueux de l’intelligence des citoyens ? Et je crains qu’on n’ait pas encore touché le fond. Même si avec les photos volée en maillot de bain, les médias voyous sont déjà allés bien loin !

N’atteint-on pas les limites de la démocratie ?

Oui, car on délaisse finalement les graves enjeux du moments. Au-delà de la personnalisation des débats, il y a un enjeu politique majeur : comment le parti socialiste va-t-il se définir ? Va-t-il rester fidèle à la tradition du parti socialiste français, ou va-t-il s’aligner sur d’autres modèles, comme le blairisme en Angleterre ou le SPD en Allemagne, qui mènent des politiques de droite et participent au démembrement de l’Etat social ? Laurent Fabius, au contraire, est sur la ligne traditionnelle originale du parti socialiste français. Ségolène, elle, parle comme Zapatero et Blair. C’est très discutable sur le plan social. Et elle a pensé surfé sur la sécurité pour faire plaisir à un électorat anxieux. Mais ce qu’elle a proposé est absolument irréaliste et injuste. D’ailleurs le Projet du PS l’a rejeté.

Y aura-t-il des alliances entre candidats ?

Les débats vont être tumultueux. Le retour de Jospin va avoir des conséquences. Il est le père tutélaire de beaucoup, et il n’acceptera pas que l’on casse tout ce qui a été fait par le passé. Il va y avoir des explications. Mais ce n’est pas les « éléphants contre la gazelle ». Le féminin d’éléphant ce n’est d’ailleurs pas gazelle... Et son entourage compte quelques hommes d’appareil très peu poétique...

Vous soutenez Laurent Fabius. Quelles sont ses chances ?

Je ne suis pas un fabiusien et je me suis souvent opposé à lui. Mais il défend les valeurs du socialisme français et c’est important d’avoir un tenant du non à l’Elysée lorsque la France présidera l’Europe en 2008. Car le président devra avoir les épaules larges, à ce moment-là, pour résister aux pressions des autres pays de l’Union qui chercheront nous imposer à nouveau la Constitution. Au PS il est le seul, comme Ségolène Royal à rassembler au-delà de son camp. J’en suis la preuve !

Combien aurons nous de candidats à la fin ?

Entre deux, puisque Fabius ira jusqu’au bout, et six... Sans doute trois. Il y a une possibilité de regroupement entre Ségolène, Hollande et Jospin. Je pense que ce dernier a vraiment envie d’y aller, s’il en a la possibilité. Malheur donc à celui ou celle qui empêchera Jospin d’être candidat, car il les a tous faits.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message