Au lendemain de la défaite des Tigres tamouls au Sri Lanka Trois articles pour comprendre

jeudi 29 janvier 2009.
 

1) Au Sri-Lanka, l’armée s’empare du dernier bastion des Tigres tamouls LEMONDE.FR 25.01.09

L’armée sri-lankaise a annoncé, dimanche 25 janvier, la capture du port de Mullaittivu, dernière ville aux mains de la guérilla séparatiste des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE). "Après un mois de combats, nous avons totalement libéré la ville de Mullaittivu", a annoncé à la télévision nationale le chef de l’armée sri-lankaise, le général Sarath Fonseka.

La chute de cette localité est une défaite cuisante pour les rebelles qui ont déjà perdu le 2 janvier leur "capitale" politique, Kilinochchi, dans le le nord, après avoir été éjectés de leurs bastions de l’est à l’été 2007. La prise de Mullaittivu, dont les LTTE avait pris le contrôle en 1996, coupe à la guérilla sa dernière voie d’approvisionnement en armes. Cette défaite accule désormais les séparatistes à se replier dans la jungle.

LE DÉBUT DE LA FIN POUR LES LTTE ?

Par ailleurs, les organisations humanitaires internationales s’inquiètent depuis des semaines du sort de 150 000 à 300 000 civils coincés dans la région de Mullaittivu et que les Tigres utiliseraient comme boucliers humains. Les échanges de tirs d’armes lourdes des derniers jours ont fait une centaine de victimes civiles, ont déclaré les autorités, qui accusent les séparatistes de ne pas avoir respecté le périmètre de sécurité établi par l’armée pour la population prise entre deux feux.

Pour autant, toutes ces défaites militaires ne signent pas la mort des LTTE. Mais elles sonnent peut-être "le début de la fin", avancent des experts locaux, après 37 ans de conflit dans l’ex-Ceylan, une île de 20 millions d’habitants située au sud-est de l’Inde et colonie britannique jusqu’en 1948. Depuis 1972, les Tigres tamouls, hindouistes, se battent pour l’indépendance du nord et de l’est de ce pays peuplé à 75 % de Cinghalais bouddhistes. Au moins 70 000 personnes ont perdu la vie dans cette guerre civile, dont des milliers depuis le regain des violences fin 2005.

2) Sri Lanka : des bouddhistes cinghalais peu pacifiques

Des bouddhistes font pression sur 300 familles catholiques de la paroisse de Kotugoda, à une quinzaine de kilomètres au nord de Colombo, capitale du Sri Lanka. Ils ont annoncé que si les catholiques maintenaient leur intention de construire une église, « ils perdraient 10 à 15 vies » par jour. Le moine responsable du temple bouddhiste affirme que la majorité de la population locale est bouddhiste et ne veut pas de la présence d’une église catholique :

"Nous ne leur permettrons pas de finir la construction. Si elle reprend, le village tout entier se soulèvera contre eux".

L’église incriminée a été construite en 2003 et son extension a débuté le 3 février 2007. Les bouddhistes ont protesté contre les travaux d’extension lors de la visite du vicaire épiscopal de la Région nord du diocèse, le 28 septembre dernier. L’affaire a été portée devant les tribunaux et la cour a décidé de régler le litige à l’amiable par la suspension temporaire de l’extension de l’église et en accordant la permission de célébrer les offices religieux, messes et catéchismes du dimanche. La police a l’ordre de maintenir la paix et de procéder à l’arrestation de toute personne troublant les services religieux.

3) De la résistance tamoule au néo-socialisme indo-pakistanais

par Christian Delarue Altremondialiste

Le Sri Lanka, (ex Ceylan avant 1972) connait aussi un conflit inter-ethnique qui perdure mais il fait moins l’objet d’attention des médias et de la communauté internationale. Dans cette île plus grande que la Suisse (65000 km2), environ un cinquième de la population (16 millions d’habitants) est formé de Tamouls, alors qu’un peu moins des trois quarts représentent les Cinghalais. Les deux peuples qui cohabitent sur l’île depuis très très longtemps (1) parlent chacun une langue différente et pratiquent deux différentes religions. Un très grand nombre de Tamouls pratiquent la religion hindoue, alors que l’écrasante majorité du peuple cinghalais est bouddhiste. Mais cela n’empêchait pas les alliances en cas d’agressions étrangères et même une certaine cohabitation.

*Une colonisation de longue durée.

Les Portugais s’installèrent dans le sud de l’Inde à la fin du XVème siècle et à Ceylan au XVIème siècle. Le XVIIème siècle vit l’arrivée des Anglais, des Hollandais et des Français dans le sous-continent indien. Quand l’île de Ceylan fut dominée par les Portugais et les Hollandais, le nord et l’est (régions tamoules) furent administrés comme entités séparées du reste du pays. Mais, avec la colonisation britannique de 1833, tout le pays fut ramené vers un système de gouvernement unitaire. L’indépendance est conquise en 1948. Mais pour répéter le propos d’un révolutionnaire srilankais Colvin R de Sylva "l’impérialisme britannique s’est retiré en arrière-plan, même s’il n’a en aucune façon abdiqué". Sur cet aspect on ne peut que remarquer une certaine unité de politique impérialiste puisque "pour exercer leur domination sur l’Inde, les dirigeants de la bourgeoisie britannique avaient créé une véritable poudrière sociale, ethnique et religieuse. Et parce que ce furent ces mêmes dirigeants qui présidèrent au processus de décolonisation, mettant au premier rang les intérêts de l’impérialisme, l’indépendance ne désamorça pas la poudrière mais au contraire renforça son pouvoir explosif". (cf UCI )

* Le chauvinisme cinghalais bouddhiste.

L’impérialisme britannique s’est appuyé sur la discrimination ethnique et le soutien des bouddhistes cinghalais contre les tamouls . Le site tamoul.net présente ainsi les origines du conflit entre cinghalais et tamouls : "Au Sri Lanka, le désir d’obtenir une identité nationale tamoule séparée a suscité la mise en place de différentes mesures par une majorité cinghalaise (1956 : loi faisant du cinghalais la seule langue officielle, 1972 : le bouddhisme seule religion d’Etat) qui considéra l’île comme Nation exclusive du bouddhisme cinghalais et les Tamouls comme des envahisseurs qui devaient être soit, renvoyés au Tamil Nadu, soit, soumis et assimilés à un état Cinghalais bouddhiste et unitaire". Cette politique nationaliste et ethnique menée à l’issue de l’indépendance n’a profité à aucun des deux peuples-classe acculés à la misère. Seule l’impérialisme et une bourgeoisie compradores en bénéficiaient. Mais les tamouls subissaient eux ,en plus, les vexations, les humiliations puis les éliminations physiques. Dans la démocratie du Sri Lanka, est-il ajouté, aucun Tamoul n’a jamais été élu dans une circonscription à prédominance cinghalaise et aucun cinghalais n’a jamais été élu dans une circonscription à prédominance tamoule. "La démocratie" servit, au sein d’un Etat unifié, à perpétuer le règne oppressif d’une majorité cinghalaise permanente. C’est une majorité cinghalaise permanente, qui, à travers une série de mesures législatives et administratives, allant du retrait de la citoyenneté et de la standardisation pour l’entrée dans les universités aux politiques discriminatoires linguistique et d’emploi, ainsi que la colonisation des terres du peuple tamoul par l’appareil de l’état, a voulu établir son hégémonie sur les Tamouls de l’Eelam.

En 1977, l’île adopte des réformes de type libre-marché et d’ouverture de l’économie aux capitaux étrangers. La misère s’approfondit tout comme la division communautariste à l’encontre des tamouls. En 1981, la bibliothèque de Jaffna fut entièrement brûlée, détruisant sa collection irremplaçable de manuscrits et de livres tamouls. En juillet 1983, des horribles émeutes racistes contre les Tamouls furent perpétrées dans toute l’île. Depuis le conflit peerdure. Le peuple-nation tamoul s’est organisé pour résister et revendiquer son auto-détermination

- Résolutions politiques Eelam tamoul

Elles sont appelées "Les résolutions de Vaddukotai". Nous citerons ici trois des plus importantes :

1. La République de l’Eelam tamoul : "nous nous consacrons à rétablir l’Eelam tamoul indépendant, souverain, laïc et socialiste selon les principes du droit d’autodétermination de tous les peuples. C’est le seul moyen de sauvegarder les intérêts du peuple tamoul de Ceylan".

2 Le territoire de l’Eelam tamoul : son territoire comprendra les provinces du Nord, de l’est et le district de Puttalam.

3. Les citoyens de l’Eelam tamoul : Seront citoyens : a. Tous ceux qui vivent sur son territoire ; b. Tout Tamoul résidant dans n’importe quel point du Ceylan, le réclamant ; c. Tout Tamoul vivant dans n’importe quel pays du monde ayant eu des ancêtres à Ceylan, le réclamant. Le Front Tamoul, après avoir voté la résolution sur l’Eelam tamoul, tenant compte des pressions que ne manquerait pas d’exercer le gouvernement sri lankais sur les plans militaires et politiques et de la nécessité de lutter contre le gouvernement cinghalais, prend la décision d’appeler désormais le Front Tamoul : Front Uni de Libération Tamoule (Tamil United Liberation Front).

*Geopolitique de l’émancipation

Aujourd’hui, à mon sens, la perspective d’un "néo-socialisme vert" ne semble viable que pour l’ensemble de la région Inde et le Pakistan et peut-être au-delà Afghanistan - Chine. Ce qui suppose la paix en Afghanistan et la résolution de la situation du Cachemire (2) qui chevauche trois pays l’Inde, le Pakistan et la Chine. On comprends qu’il faille procéder par des conquêtes proto-socialistes sectorielles (une certaine maitrise locale des grands choix économiques) servant de base à une extension dans d’autres zones des conquêtes sociales.

Christian Delarue

Altermondialiste


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