Le peuple « d’en bas » est beau ! (par Majead, poète et slameur antillais)

jeudi 19 février 2009.
 

Le peuple « d’en bas », « les gueux », « les indigents », « les parasites » se réapproprient le droit légitime et inaliénable, à la résistance, à l’indignation et à la révolte. C’est un tournant, un virage à 90 degrés que le LKP nous a invité à négocier depuis le 20 janvier dernier. Il s’agit de freiner sec avec le frein à main, en dérapage contrôlé, et de s’arrêter sur le bas-côté.

Pour comprendre un système, il faut s’en extraire. Sans quoi, nous sommes condamnés à obéir à ses mécanismes et ses rouages inhérents qui consistent à être dans un mouvement infernal et perpétuel. On sait que l’on va droit dans le mur, mais on y va quand même ! Il faut relever la tête du volant. Faire une pause est salvateur et indispensable dans une société qui vit et pense à dix mille à l’heure, qui va vite, tellement vite, que les conducteurs ne voient même plus les blessés et les morts qui jalonnent la route, des victimes d’un système ultra libéral, coercitif et injuste, dans sa compétition féroce au prestige, aux richesses et aux profits exorbitants.

Il s’agit maintenant de rouler au pas, tranquillement, « gentiment », afin de réfléchir à la manière de sortir des sentiers battus, des chemins balisés par l’intelligentsia impérialiste, des autoroutes de la consommation à outrance, des sens uniques de la pensée médiatique et des droits chemins capitalistes, dont je résume le but à : travaille, consomme, amuse-toi et… tais-toi ! Il s’agit de sortir des impasses existentielles et des culs de sac pécuniers, il s’agit de ne plus respecter les sens interdits élitistes et les stops intempestifs de l’ascenseur social, il s’agit de brûler les feux rouges des discriminations et de ne plus céder les priorités à droite pour les poids lourds du pouvoir financier ! Il s’agit de comprendre les pannes intempestives et récurrentes, que les mécaniciens de l’état nous font passer pour des pannes inhérentes, rédhibitoires et viscérales. Une fatalité en somme, à être condamné à l’échec, à laquelle le noir, l’arabe, l’Africain, ne peuvent se soustraire ! C’est pourquoi, plus que jamais, il s’agit de mettre la main dans le cambouis, et de rentrer la tête sous le capot, faute de quoi, les garagistes gouvernementaux se chargeront, une fois de plus, de nous proposer leurs prestations inappropriées, car paternalistes et infantilisantes !

Mais il faut rester vigilants et éveillés, car l’homme oublie vite, trop vite… les injustices du passé et du présent. Faut dire que les idéologies en place participent largement à son amnésie partielle ou totale en l’incitant vivement à vivre sans réfléchir. Elles l’assomment et le noient dans une profusion d’images, de publicités, de divertissement, de produits, de biens, de services, de livres, d’informations… Le mal de ce siècle : l’embarras des choix nous met dans le choix de l’embarras, choix qui monopolise notre énergie et nos facultés de jugements et de discernements, en les réservant de manière quasi-exclusive, obsessionnelle et impulsive à satisfaire nos appétits, nos instincts et nos besoins crées artificiellement. Pas le temps pour les débats d’idées ou autres réflexions sociétales ! Le temps, c’est du plaisir, de l’assouvissement et du soulagement ! Au diable l’effort de compréhension, d’analyse et de pensée. On laisse le soin aux lois mercantiles et autres, de nous dire ce qu’il faut penser ou ne pas penser, faire ou ne pas faire, aimer ou détester. C’est ce que certains appellent la servitude librement consentie.

Au-delà des revendications sociales, c’est surtout, de mon point de vue, la remise en cause sans équivoque des dominations colonialistes, des servitudes mentales et intellectuelles, des aliénations matérialistes et des assujettissements psychologiques que sont les complexes et les frustrations hérités de génération en génération.

C’est aussi une démonstration sans appel que l’individu n’est pas formatable et contrôlable s’il fait le choix de la liberté de penser et d’agir par lui-même. En effet, quelle est notre capacité a la critique, à l’indignation, à la dénonciation, et a provoquer des changements… Beaucoup plus que certains veulent bien le croire et l’admettre. « Yes we can ! », est un écho qui résonne encore dans les oreilles qui bourdonnent de pleins d’espoirs et de possibles ! Mais pour combien de temps ?

Il faudrait, pour reprendre une expression de Ballargeon, qui lui-même reprend ce terme à Chomsky, donner aux gens des cours « d’autodéfense intellectuelle », pour se prémunir des manipulations à peine voilées des grandes puissances médiatico politiques et économiques. Se défendre de manière intelligente et raisonnée, argumentée et organisée, disciplinée et méthodique. Car le pouvoir d’influence d’une minorité agissante n’est possible que si la majorité est faible, désorganisée et passive. La peur du lendemain, la peur du licenciement, la peur de la peur est la carotte qui fait avancer les masses en les rendant dociles et serviles.

Relever la tête et se tenir debout face aux géants qui n’ont de géant que leur compte bancaire et leur bêtise ! Le cœur, lui, est mineur, minuscule et mesquin. Comme le dit La boétie, « Si ils sont grands, c’est que nous sommes à genoux ! »

À bon entendeur…

Majead (Poète & Slameur)


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