Base-Élèves, un outil du coup d’état permanent (par Gdalia Roulin, Saint-Affrique)

jeudi 26 février 2009.
 

Bonjour,

Je suis membre du Collectif Saint-Affricain contre B.E.

Je ne suis ni enseignante, ni actuellement parent d’élève, ce qui n’empêche absolument pas que je me considère comme un membre du Collectif à part entière, étant donné que le sort fait à la jeunesse intéresse tous les adultes d’une société et caractérise cette société, et parce que je suis d’avis que le fichage des enfants est l’un des aspects d’un problème qui nous concerne tous, à savoir quel est le type de contrat social que nous voulons instaurer entre nous, entre tous les membres de la société dans laquelle nous vivons. Autrement dit, le fichage de tous les citoyens, en commençant dès le plus jeune âge, qui se met en place au mépris de toute démocratie, nous entraîne de gré ou de force vers un certain type de société que nous n’avons certes pas choisi, mais qui avance, d’un fait accompli à un autre fait accompli...

J’ai toujours été indignée que tout le travail réalisé en psychologie et en pédagogie par de grands chercheurs ou pionniers humanistes ne soit absolument pas utilisé à grande échelle pour favoriser l’épanouissement et le développement optimum des enfants, des jeunes, et pourquoi pas de tous.

Quelques grands noms sont connus, certes, tels que "Montessori","Freinet", "Illitch" ou "Neill" par exemple. Mais l’institution "Éducation Nationale" n’a jamais accepté de se confronter sérieusement à ces méthodes. Elle a au contraire mis des bâtons dans les roues tant qu’elle a pu contre ceux qui ont cherché à fonder leur pédagogie sur ces conceptions plus ou moins libertaires, axées sur le respect et le développement de l’individu et de sa sociabilité responsable, c’est-à-dire sur la formation de citoyens capables d’auto-organisation. (L’autonomie est même en passe de devenir un délit dans la propagande officielle !!!).

Ce qui me fait dire au passage que si je défends l’école publique et laïque, je crois aussi que pour permettre l’épanouissement des enfants qui lui sont confiés, et préparer une société plus heureuse, il faut la refonder radicalement, dans l’optique de favoriser le développement optimum des potentialités de chacun. État d’esprit complètement différent de la logique de la haute finance qui anime nos édiles actuels, laquelle est complètement égocentrique et prédatrice.

Les "réformes" du gouvernement actuel se font au mépris complet des besoins humains. Cela est très clair vis-à-vis de l’école, c’est tout aussi clair vis-à-vis du démantèlement généralisé des services publics. Que ce soit l’hôpital, la sécu., la poste, les transports, les tribunaux, etc..., ainsi que les délocalisations, tout ne tend qu’à un seul but : produire des profits financiers, pour ceux qui ne savent déjà pas quoi faire de leur argent. (En nous dépossédant hypocritement de ce qui nous appartient collectivement, et que nous devrions pouvoir gérer nous-mêmes directement).

Et par-dessus le marché, on nous explique que cela va beaucoup nous aider, que l’argent des contribuables serve à verser des milliards aux banques (devenues privées comme il se doit !), ou que l’on exonère les entreprises de leurs "charges"... parce que bien sûr, nous, les humbles "travailleurs" et/ou précaires, nous n’apportons pas de chance de relance à cet ordre capitaliste malade (excusez le pléonasme !), et nous devrions uniquement passer notre temps à demander un travail à genoux, sans nous poser la question de son utilité, n’importe quel boulot pour survivre par pitié, et en comprenant bien la grande misère des entreprises réellement affrontées à une compétition effrénée et délirante où sévit la loi des profits monétaires débridés, ce pour quoi il faut laisser démanteler le code du travail et les conseils de prudhommes, en se laissant fragiliser chaque jour un peu plus, isoler, culpabiliser, surveiller et punir...

Ce qui n’empêchera nullement de nous resservir dans quelques temps la thèse comme quoi, sans l’apport du capital (renfloué aux frais de la princesse sans aucun titre de propriété correspondant), nous n’aurions rien, pas d’emplois, pas de salaires.

Tiens, pendant que j’écrivais, la bonne nouvelle est tombée : Total a fait plus de bénéfices que jamais : 14 milliards d’euros. Merveilleux, non ? De là à ce qu’ils créent des postes de techniciens de surface sur les plages, faut pas rêver, hein !

La pensée dominante veut donc que sans le capital prétendument apporté par les dirigeants, nous ne soyons qu’une bande de bons à rien, incapables de savoir de quoi nous avons besoin et comment faire pour réaliser les biens correspondants et les partager.

Depuis quand l’or se mange-t-il ? Et depuis quand l’or donne-t-il à ses thésauriseurs plus de lucidité qu’aux autres ? Ce qu’il donne, dans notre système social, et ce qu’il permet d’acheter, outre les marchandises, c’est le pouvoir. Et même le pouvoir d’essayer de tout transformer en marchandises, préséances et privilèges.

Tout est là. Comment fait-on ? Quelles initiatives nous laisse-t-on ? Quelle liberté prenons-nous ?

Non, je ne me suis pas éloignée du sujet "base-élèves".

Le choix est bien entre une société sous contrôle ultra centralisé, où chaque grouillot de base est traité comme un fautif en puissance et cerné en permanence, et entre une société réellement démocratique, où chaque citoyen a voix au chapitre à égalité avec chaque autre individu.

Base-Élèves, dans un ordre établi où le pouvoir appelle à la délation, elle aussi monnayable of course, c’est la "délation soft", la "délation préventive" anonyme comme la lettre du même nom puisque généralisée, et insipide...

J’ajouterai que les directeurs, sommés de renseigner BE, sont justement dans la situation où ils doivent choisir entre le misérabilisme, la position "échine convenablement courbée", ou un positionnement clair et mobilisateur en leur âme et conscience, sans oublier que le mimétisme existe, et qu’il s’agit de faire boule de neige en évoluant plutôt vers "l’homo érectus", tant que possible.

Je remarque aussi que, pour mettre en place ces outils hautement performants, tout cet équipement à travers lequel on veut gouverner machinalement les personnes humaines, on trouve les moyens que l’on prétend ne pas avoir pour maintenir des postes ou des classes...

Et puis, certes, l’administration nous informe aussi peu que possible, et édulcore tant qu’elle peut ce qui est en train de se passer, mais un certain nombre de citoyens ne pourront quand même pas dire, comme en 40 : "On ne savait pas !". Tous les éléments sont sous les yeux de qui veut bien regarder la réalité et ses responsabilités en face.

Malgré mon indulgence quasi légendaire, je ne suis pas prête à trouver excusable n’importe quelle compromission au prétexte qu’on serait "obligé" de conserver son poste etc..., etc...

Il est un certain nombre d’emplois que je n’aurais accepté sous aucun prétexte, et vraiment, il y en a une longue liste dont les occupants, s’ils avaient bien voulu se reposer de préférence, vaquer à leurs "loisirs", et en tout cas s’en abstenir, nous auraient rendu un fameux service. Entre les travailleurs de l’armement, ceux des pesticides, du nucléaire, les publicitaires, et j’en passe et des meilleurs, vous vous rendez compte de tout le temps libre que ça dégagerait !

Oui, mais nous risquerions d’avoir le temps et l’énergie de réfléchir, et de devenir trop intelligents, peut-être même contestataires ! Nous risquerions de nous mêler de ce qui nous regarde ! À éviter à tout prix ! Donnez-moi donc plutôt des calmants aux enfants trop turbulents, les labos ont besoin de prospérer !... Ah bon !

Un fonctionnaire est normalement, ordinairement zélé et obéissant.

Un fonctionnaire d’exécution n’a certes pas pour habitude de se poser des questions sur la légalité des ordres transmis par sa hiérarchie. Étant donné que toute l’institution est supposée fonctionner dans le cadre du respect strict de la loi, un simple fonctionnaire n’a même pas à imaginer qu’un ordre illégal puisse lui être donné. Pourtant, depuis l’irrésistible ascension du petit Nicolas, c’est ce qui arrive à peu près journellement. Du fait pourtant du pli d’avoir à "faire confiance" à sa hiérarchie pour l’interprétation et l’application des textes, un directeur est supposé obéir à ses "supérieurs", et bien évidemment un gendarme ou un policier obéiront strictement aux ordres venus d’en haut. Ce qui se comprend si l’on ne veut pas avoir affaire à de multiples arbitraires, mais ce qui devient très problématique lorsque l’arbitraire s’exerce au plus haut niveau, au point que nous assistons à un coup d’état permanent.

Très concrètement, nous assistons d’ailleurs à la criminalisation de la jeunesse, et de la pauvreté qui se répand comme une lèpre, aux descentes de police musclées, avec chiens, qui se répètent dans les collèges ! J’attends de voir sans y croire, et sans l’espérer non plus, quand les chiens et les gendarmes débarqueront-ils dans les collèges huppés, et pourquoi pas privés, d’ailleurs ? La drogue ne circulerait-elle que dans des milieux défavorisés, dans la basse classe ? Ah, ce n’est pas ce qu’on m’avait dit, au temps où l’on cherchait à comprendre !

Que devient le droit français et sa présomption d’innocence ? C’est ça, la nouvelle pédogogie moderne ? Le règne de la "bonne insécurité", l’humiliation, la culpabilisation, l’imposition de la force brute, la transformation de chacun en élément anonyme et suspect a priori ? (Quand on fait partie de la "France d’en bas", bien sûr, celle dont la racaille vole les mobylettes des fils de la Haute !).

C’est ça, la nouvelle pédagogie moderne qui va inspirer les programmes des ordinateurs de gestion des "cohortes" d’élèves ?

Qui va enfin, au moins, recadrer les prérogatives d’abord du chef de l’État, lequel devrait être exemplaire, non ? Rappeler les limites ?

Les soi-disant "grands" partis soi-disant de gauche n’ont-ils rien à en dire ?

Saisissons les magistrats au sujet des nombreux abus de pouvoir que nous subissons, le plus tôt sera vraiment le mieux !

Quand allons-nous enfin, au plan collectif, nous situer comme des adultes à part entière ? Nous mettre à dire ensemble ce que nous voulons vivre et par quel moyens, entre nous, d’égaux à égaux, en refusant toute délégation et représentativité illusoire et mensongère.

C’est extraordinaire la capacité manipulatoire de ceux qui nous gouvernent et de leurs valets, la capacité à sempiternellement renverser la réalité, et ceci y compris à travers tous les euphémismes et détournements de sens des mots, et les habiles tournures de phrases admirablement creuses employées dans les discours politiques et les "grands" médias par ex.

Langue de bois fort bien maîtrisée aussi par des IEN que je ne nommerai pas, et par tant d’autres "grands commis de l’État", pour nous aider à avaler les pilules amères. Ce qui est merveilleux, c’est que c’est toujours pour notre bien qu’ils agissent et qu’ils s’emploient à nous faire craquer, ces bons samaritains, un bien que nous sommes incapables de discerner, idéologues que nous sommes !

Quelqu’un qui défend une opinion indépendante est aussitôt taxé d’être sous influence, de subir une "pression psychologique". Il ne s’agit même plus d’idées, d’opinions, mais la voix de son maître nous explique que nous avons des problèmes, des questions, des inquiétudes, jamais des indignations, des colères et nos propres solutions.

Nous ne sommes pas loin de l’étiquetage "maladie" de la divergence. La confrontation et le débat démocratique, forcément conflictuels, sont amalgamés au désordre, et ce triste concept est intériorisé jusque dans les rangs de la gauche !

Quel était ce régime déjà où les dissidents se retrouvaient à l’H.P. à l’isolement ?

Tandis qu’un gendarme qui annonce (c’est du vécu) qu’il va rendre compte à un IEN que des directeurs choisissent librement de ne pas assister à une formation BE, et que leur responsabilité est donc engagée, lui, il ne fait bien sûr aucune pression, il ne fait que son boulot !

Vous avez remarqué, dès que l’on sort de la pensée unique, du conformisme réellement dogmatique ambiant, et de la résignation et de la soumission attendues, on se voit affublés des joyeuses épithètes de "idéologues", "dogmatiques", "doctrinaires", "irréalistes" ou "archaïques", c’est selon, "sectaires", "droit de l’hommistes" etc..., et être "autonomiste" devient quasiment infamant ! Bientôt, ce sera synonyme de dangereux terroriste potentiel !

Moi, j’avais cru jusque là que l’autonomie était la marque d’une éducation réussie !

Je trouve insupportable d’être sommés de se situer en mineur incapable toute sa vie .

Bien sûr, une vraie démocratie, ça suppose l’égalité des droits.

Ça signifie : une personne = une voix.

C’est très gênant pour les intérêts de ceux qui ont tellement plus d’intérêts que d’autres à faire durer ce système, quelle que soit la crise (prévisible et redondante, comme les logiciels BE), et quelles que soient son injustice et sa dangerosité pour la vie elle-même, pour nous tous, et en particulier pour nos enfants et petits-enfants.

Mais les découvertes de la psychologie ne restent pas inutilisées. À part bien sûr quelques praticiens parfaitement honnêtes qui réalisent en psychothérapie un travail de fourmi et néanmoins considérable pour aider la personne à advenir en tant qu’individu libre, au niveau collectif, ce qui domine, c’est une espèce de management, apparenté au marketing ou à la pub, autrement dit une entreprise de bourrage de crâne permanente dont il est d’ailleurs difficile de se désengluer, probablement parce que tant de vocables voient leur sens perverti qu’on a du mal soi-même à revenir à la racine et à la clarté, et qu’en outre lorsqu’on dialogue chacun ne met pas forcément le même sens derrière les mots.

Et puis, le comportementalisme n’est pas resté lettre morte et a des applications florissantes dans les entreprises. Avez-vous entendu l’émission de Zoé Varié vendredi 13 février sur France Inter, à propos d’un livre : "L’open space m’a tuer".

Du harcèlement au travail à la surveillance intégrée et à la culpabilisation réciproque entre pairs... C’est consternant, et révoltant.

Réveillons-nous, c’est le cas de le dire !

Vous allez protester : « Mais là, tu es hors sujet, qu’est-ce que ça vient faire dans une liste de discussion sur base-élèves ? »

Eh bien, justement, c’est la même problématique globale d’abrutissement du bon peuple. Et ça a tout à voir. Il nous faut un jour ou l’autre regarder l’ensemble de la question si nous voulons avoir une chance de trouver une réponse juste, qui résolve réellement le problème qui se pose à nous tous.

BE, c’est justement un outil qui va permettre de traiter les élèves automatiquement, comme des séries statistiques, comme des catégories étiquetées, cataloguées, que les statisticiens et initiés ne se choquent pas d’appeler "cohortes" !!! C’est le "dispositif" qui va permettre de "gérer" d’en haut, de contrôler de façon autoritaire, sans échanges humains, les jalons posés dans le cursus scolaire des élèves. Et qui va transformer les individus en pions, les élèves, et tout autant les enseignants. Si nous laissons tout ce fichier se mettre en place, celui-là et tous les autres qui évidemment sont faits pour se compléter et se croiser, les directeurs eux-mêmes en tant que directeurs n’auront plus aucune utilité, ils seront remplacés par de simples gratte-papiers peut-être même vacataires et bien alignés, parce que, n’est-ce-pas, c’est ça, le progrès, leur foutu "modernisme" !

Je ne suis d’ailleurs absolument pas d’accord pour dire que bon, si un parent ne s’oppose pas à base-élèves, le directeur peut renseigner le fichier sans état d’âme. Si un parent n’est pas ou mal informé, ou s’il a une mentalité d’esclave, cela ne justifie en aucun cas la collaboration du directeur au fichage d’un enfant incapable de se défendre face à ces pratiques totalitaires. Chacun, nous avons notre part de responsabilité, et nul ne saurait nous exonérer d’avoir notre propre conscience, et de poser nos propres actes.

Les statisticiens eux non plus ne sauraient être absous sous le prétexte fallacieux qu’ils ne font que des applications techniques. Ils participent, ou alors qu’ils s’expriment, au fichage généralisé de la population. Je souhaite vivement qu’ils s’expriment !

Les régimes tyranniques se repaissent des contributions de toutes les petites mains qui ne produisent qu’un tout petit morceau insignifiant en lui-même. Oui, mais quand on voit l’image du puzzle dans son entier, ça fait froid dans le dos !

Depuis quand serait-ce par hasard que l’on installe un outil si performant et onéreux ?

Faut-il nous faire un dessin ? Depuis quand un si bel outil pourrait-il rester inutilisé ? Depuis quand une si belle possibilité d’exercer un pouvoir sur autrui serait-elle laissée de côté par ceux-là même qui ont dédié leur vie à la conquête du pouvoir ?

Quant à savoir quel genre de philosophie sous-tendrait les programmes engrangés dans les ordinateurs, il n’y a qu’à se rappeler la loi dite de "prévention" de la délinquance, et les rapports Benisti et Varinard...

Quand nous serons tous bien intégrés à ce système, nous serons tous prêts à nous excuser d’exister, et nous chanterons tous en chœur à tous propos : "oui, oui, oui, excusez-moi de vous demander pardon, not’ bon maître !"

Et nous rentrerions tous les données exigées dans les fichiers, car il faut, pour notre bien, que les gens compétents, les supérieurs hiérarchiques, puissent avoir les renseignements qui leur permettent de nous diriger en "bons pères de famille", et éliminer les fauteurs de troubles et autres déviants, pas vrai !

Quand on se rappelle l’idée simple mais juste que la violence prospère sur le manque d’échanges de paroles, une seule conclusion s’impose : quel cynisme ! C’est l’ordre dominant qu’ils veulent sécuriser. Si les faits divers violents devaient se multiplier dans les classes par exemple, ça serait autant de bouches en moins à nourrir, non ? et ça ferait de beaux sujets pour occuper "l’opinion", pour discréditer l’école publique, et pour justifier la politique dite "sécuritaire". Tout bénef !

J’entends juste à l’instant à la radio un syndicaliste de Mittal exiger que les ouvriers ne soient pas traités comme des objets.

C’est justement la question : acceptons-nous d’être traités comme des objets sur lesquels on tient un discours, que l’on sonde et sur le dos desquels on parle, dont on prétend qu’ils ont choisi tout le paquet cadeau en élisant pour cinq ans un beau parleur qui nous a fait miroiter le miroir aux alouettes et nous emmène tout droit là où nous ne voudrions pas aller, sous prétexte de légitimité, ou bien revendiquons-nous d’être capables de réfléchir et d’ailleurs de changer peut-être d’avis après information HONNÊTE, réflexion et débats libres et contradictoires, expérimentation, et en tout cas de porter nous-mêmes notre propre parole ?

Prendre nous-mêmes la parole est évidemment antinomique avec tout procédé anti-démocratique de fichage et d’interprétation via experts cooptés, qui ne peuvent être objectifs en aucun cas, la "neutralité" étant toujours illusoire, et le cadre fixé conditionnant de par lui-même les réponses possibles dès que l’on s’interdit de sortir du cadre donné. Et l’usage montre à quel point il est difficile de déborder un cadre donné. La norme est de rester dans le cadre, même si ce cadre est artificiel.

Nous savons tous que BE s’est mis en place depuis 2004 d’une façon insidieuse, à l’insu des parents qui n’ont été informés qu’à partir des luttes des Collectifs contre BE, que cette prétendue expérimentation a fait l’objet, non pas de débats, d’évaluations et de bilans, mais de pressions, de harcèlements, de menaces de sanctions et de sanctions déjà effectives contre ses objecteurs de conscience, ceci bien avant la signature de l’arrêté ministériel d’octobre 2008.

Cet arrêté nie les droits prévus par la loi, en particulier concernant la protection de la vie privée, et cependant les inspecteurs de l’Éducation Nationale s’appuient naturellement sur l’arrêté pour expliquer benoîtement que le fichier BE doit impérativement être renseigné, et que les parents ne sauraient s’y opposer. Il s’agit là d’un abus de pouvoir caractérisé, mais, puisque cela vient d’en haut, n’est-ce pas, les fonctionnaires d’exécution se contentent d’appliquer...

Ils sont hors-la-loi, parce que même un ministre ou un président de la République doit fonctionner dans le cadre de la loi, et, dans un régime démocratique, les lois sont votées par le pouvoir législatif et non proclamées par l’exécutif. Et dans un régime où chacun se situerait enfin en adulte, les différentes propositions seraient largement débattues par l’ensemble des citoyen(ne)s.

Évidemment, les fonctionnaires d’exécution sont couverts par leur hiérarchie, puisqu’ils ne font qu’obéir aux ordres. Un agent de l’État doit obéir aux ordres. Pourtant, nul n’est censé ignorer la loi...

Quel que soit l’emploi que nous occupons dans une société, cela ne nous exonère pas de nos responsabilités et d’avoir une conscience personnelle.

Sinon, il fallait innocenter Papon, Eichmann, et tant d’autres qui ne faisaient, bien sûr, que leur boulot !

Il y a toujours plusieurs façons de considérer un problème, tout comme les maladies. Il semble de bon ton de lutter pied à pied contre des symptômes successifs, de lutter contre des conséquences avérées, l’une après l’autre.

Parce que ce serait à nous, les victimes, de démontrer la réalité des attaques que nous subissons pourtant de tous côtés, et que nous pouvons constater amplement tous les jours. Et tant que l’ennemi avance masqué, nous n’aurions pas le droit de nous opposer à ses méfaits, pourtant reconnus !

Pourquoi devrions-nous nous justifier sans cesse face à ce que nous comprenons parfaitement bien, et chaque fois que nous voulons choisir ?

En réalité, nous savons bien que l’attaque est globale, même si on voudrait nous faire croire que tout se passe en ordre dispersé, parfois même il s’agirait d’une erreur ou d’un excès de zèle ou de parole ministériel, d’un manque de pédagogie. Pauvres de nous, qui avons besoin de leçons de rattrapage !

Le résultat le plus clair de ce genre de propagande, c’est de servir à fragmenter nos luttes et les diviser dans l’espace et le temps.

Une idée reçue est qu’il faut se défendre d’être "parano". Encore une fois, on amalgame une catégorie psychiatrique pathologique avec une attitude parfaitement saine et lucide qui consiste à dénoncer les procédés réellement dangereux et malintentionnés de certains.

Non vraiment, si ce n’est à l’état de jeune enfant, tout le monde il est pas beau, tout le monde il est pas gentil. Et ce n’est pas parce que le temps passe que nous deviendrions moins "barbares", nous, les humains.

Faut-il, pèle-mêle, citer les différentes exterminations, qu’on les appelle génocides ou massacres : génocide nazi contre les Juifs, les Tziganes, les opposants politiques, les homos et handicapés, Arménie, Tchétchénie, Rwanda, Bosnie, Argentine, Chili, ghetto de Varsovie, goulags, Sabra et Chatila, "plomb durci", etc... etc...

Je ne parle même pas des dictatures qui sont légion !

Les régimes totalitaires, qui règnent par la loi du plus fort et le crime organisé (à mon avis les guerres ne sont pas autre chose, et elles sont au service d’intérêts eux aussi fort peu honnêtes, et tout sauf solidaires), sont les plus nombreux, et je ne les énumérerai même pas, mon message serait beaucoup trop long, pas vrai !

Serions-nous donc assurés, au XXI° siècle n’est-ce-pas, que "la civilisation", "la démocratie" – toujours occidentale ! - ont évidemment triomphé partout ?

Évidemment non !

Évidemment nous en sommes très loin.

Et en France, dans notre beau pays des droits de l’homme, où en sommes-nous ? Sommes-nous immunisés contre la dictature ? D’où nous pourrions nous rassurer que tous les fichiers n’existent et n’existeront bien entendu que pour nous rendre service ? (Ce serait bien le seul exemple de défense d’un service au "public" exigé par ce gouvernement !).

C’est ce que j’appelle jouer à la roulette russe.

N’assistons-nous pas, depuis l’élection de Mr. Sarkozy, à un coup d’état permanent ?

Il est pourtant fallacieux de dire qu’une majorité de Français a voté pour ce monsieur, car c’est ne pas tenir compte des abstentionnistes. Il ne représentait, au plus, et au moment du vote, que moins d’un tiers de l’électorat. Si nous voulons à toutes fins toutes forces vivre dans un régime représentatif, qui donc représente, honnêtement, tous les autres ?

Et surtout, quand et comment aurions-nous voté pour un programme franchement débattu, sur la base d’informations libres et contradictoires, et après mûres réflexions, en détaillant les sujets ?

Or, cet élu hyperactif et omniprésent ne chôme pas, lui (ni ses dévoués collaborateurs). Ils abattent un rude travail au pas de charge, pour gagner des centaines de milliers de fois plus, eux et leurs copains, c’est de plus en plus évident !

En vrac : concentration de tous les pouvoirs aux mains du pouvoir exécutif.

Réduction des pouvoirs du Parlement, qui n’en avait déjà pas beaucoup.

Subordination de la Justice avec la suppression des juges d’instruction, instruction dorénavant confiée à des magistrats dont l’avancement dépend directement du gouvernement !

Mise au pas des médias, qui étaient pourtant déjà bien tenus par le pouvoir économique. Quelle que soit notre conception d’une organisation démocratique de la société - et moi je pense qu’il ne s’agit ni de donner, ni de prendre le pouvoir, mais qu’il faut absolument empêcher qu’il soit pris par certains sur les autres - bref, quelle que soit la façon dont on imagine la structure démocratique de la société pour garantir le maximum de liberté à tous, on peut au moins être d’accord sur la nécessité de la séparation des pouvoirs.

C’est ce qu’on m’avait appris à l’école, quand j’étais petite, comme une règle fondamentale indispensable à un fonctionnement démocratique.

Or, ces principes sont foulés au pied sans aucun débat, et on n’entend pas beaucoup de voix s’élever pour dénoncer ces violations du droit. Les lois cadre existent, pourtant. Que fait-on de la déclaration universelle des droits de l’homme, de la convention internationale des droits de l’enfant, toutes deux ratifiées par "la France", et que fait-on de la constitution française ? Par exemple aussi, quid de la loi de 1905 sur la laïcité et la séparation de l’église et de l’État, qui est violée régulièrement sans que grand monde proteste ! Cela n’a pourtant rien d’anodin. Dans le même temps où la contestation radicale en politique est criminalisée, le chef de l’État se permet de nous dire où se situe la bien-pensance : les enseignants religieux seraient tellement meilleurs que les laïques, pardon, les laïcards, pour dire à chacun quel sens donner à sa vie ! L’école de la République est laïque, mais le "premier magistrat de France" se permet de nous indiquer quelle philosophie serait meilleure qu’une autre ? Mandaté par qui ? Dans quel cadre légal ? Faut-il demander : "Que fait la police ?", ou plus platement : "Que fait donc l’opposition au pouvoir en place, dans ce pays ?".

Parmi les partis supposés être crédibles pour nous gouverner, on cherche vainement une analyse de fond, et je ne vois personnellement dans leurs communiqués que des réponses parcellaires, d’une inconsistance et d’une mollesse ahurissantes, qui ne dénoncent jamais la cause de toutes ces dérives gravement dangereuses pour l’ensemble de la population.

Je parlais du principe de base de respect de la séparation du pouvoir.

Je parlais de tout ce qui se met insidieusement en place de partout, si bien qu’en usant nos énergies à batailler d’une école à une autre, d’une fermeture de classe ici à une suppression de poste là, d’une fermeture de maternité à la disparition d’un hôpital de proximité, d’un tribunal à un bureau de poste éliminés, etc, etc..., toujours au nom de la sacro-sainte rentabilité financière (la rentabilité au plan humain, "quèque" c’est que ça ? c’est juste quand les "ressources humaines" produisent des trucs qui rapportent, tiens !), en laissant en notre nom faire la chasse aux immigrés et ruiner des vies en saccageant des relations qui sont humaines, elles, en laissant délocaliser, en n’interdisant pas de suite tout ce qui pourrit la planète et la vie sur la planète, en ne faisant pas nettement obstruction à base-élèves et à tous les fichages réellement orwelliens quels que soient les précautions de langage et d’attitudes que nous "sauvegardions" tandis que le piège se referme sous nos yeux, je pense que si nous en restons à des actions dispersées, fragmentées, à ces divisions dans les luttes et à un défaut d’objectif suffisamment large et radical, conséquent, nous sommes dans ce cas voués à l’échec, ou à des victoires partielles qui seront sempiternellement remises en cause. Parce qu’il est dans la nature du système foncièrement injuste et inégalitaire qui nous exploite de vouloir perpétuer ces inégalités et la domination qui les permet.

Nous étions 2 millions 1/2 de personnes dans les rues le 29 janvier.

Ce n’était pas uniquement pour réclamer plus de pouvoir d’achat et une place de salarié-serpillière. De qui se moque-t-on ?

Ceux qui favorisent actuellement l’éparpillement et l’essoufflement des luttes, objectivement, nous trahissent parce qu’ils préparent notre échec alors que nous avons les moyens de gagner.

Nous laisserons-nous transformer en Sisyphes impuissants et pleurnicheurs ?

Et ceux qui veulent que nous épuisions nos énergies d’une élection à l’autre dans le cadre du système tel qu’il fonctionne, qui phagocyte et dénature tout ce que nous voulons et qui nous sacrifie sur l’autel des profits scandaleux de quelques-uns, ceux qui voudraient se faire prendre pour nos sauveurs à venir, passeurs de lendemains qui chantent toujours au futur bien entendu, ceux qu’il faudrait se contenter d’élire sans se demander pourquoi et comment, ils nous trahissent aussi, de fait.

Car c’est d’une refondation radicale de notre organisation sociale dont nous avons besoin.

A nous de la prendre en main.

Je tiens à affirmer que la responsabilité des morceleurs de grève et de luttes est énorme.

La Guadeloupe, la Martinique, La Réunion sont en grève générale illimitée.

De toute évidence, comme d’habitude, ce sont des Collectifs de citoyen(ne)s qui mènent la lutte, les bureaucraties syndicales ou partidaires prenant le train en marche, et se disposant comme en 68 à répéter sans doute qu’il faut savoir arrêter une grève, et se contenter des dérisoires accords de Grenelle, et reprendre sagement le collier....

Parce que tant que nos dirigeants auto-proclamés et autorisés par le pouvoir (et je parle bien ici de la politique habituelle des directions, et non pas des adhérents de base engagés à fond dans les luttes avec nous), confondront l’intérêt soi-disant supérieur de leur organisation, pour ne pas dire la perpétuation de leur propre statut social, avec l’intérêt de la société en général, et donc tant qu’ils se battront pour développer leur parti ou syndicat et asseoir leur "représentativité" apparemment incontournable, plutôt que de garder toujours présent à l’esprit qu’il s’agit de changer l’ordre social, et non de se focaliser sur un parti ou un syndicat, dans ce contexte nos luttes sont vouées à être freinées et affaiblies par ceux qui sont supposés les mener.

Il s’agit de refonder toute la société sur des bases solidaires et d’auto-organisation, et non de rassembler autour d’un des nombreux nombrils du monde qui se donnent à admirer.

Honte à ceux qui laisseraient pourrir les luttes sur les terres créoles.

Honte à ceux qui n’appellent pas à la solidarité active avec les manifestants antillais et réunionnais, qui nous montrent l’exemple.

L’heure n’est pas à se laisser réduire à la débandade.

L’heure est à la solidarité populaire.

Leur lutte est aussi la nôtre.

Il est temps de se donner une stratégie gagnante !

En face, la stratégie est camouflée, mais elle est très élaborée.

Nos façons de se situer seront lourdes de conséquences, et si nous laissons seuls ceux qui agissent actuellement en première ligne, nous aurons été complices de la répression qui ne manquera pas de s’exercer en cas d’affaiblissement du mouvement.

Ce n’est plus le moment de "résister" dos au mur, à reculons ! Nous étions 2 millions 1/2 à manifester le 29 janvier, non ?

Un peu d’ambition, que diable !

Et si nous "positivions", comme on nous le conseille si volontiers à tort et à travers ?

Positivons en posant des exigences, en affirmant tous ensemble, sans occulter nos divergences, tout ce que nous voulons et pouvons.

Je ne crois vraiment pas avoir été hors sujet. Pourquoi devrions-nous nous astreindre à regarder ce qui nous tombe dessus par le petit bout de la lorgnette ?

Je me doute bien que les idées que je viens d’exposer circulent déjà largement. Cependant j’ai trouvé intéressant de les rassembler noir sur blanc. De nous prendre au sérieux, quoi !

Cordialement à tous,

Gdalia Roulin (le 15 février 2009)


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