11 octobre 1972 , le procès de Bobigny

mardi 17 octobre 2023.
 

Le 11 octobre 1972, Marie-Claire Chevalier, 17 ans, jugée pour avortement suite à un viol, est relaxée.

Enceinte après s’être fait violer par un garçon de son lycée, Marie-Claire, refuse de garder l’enfant. Sa mère Michèle Chevalier, modeste employée de la RATP qui élève seule ses trois filles trouve une femme, non-formée à la médecine, qui accepte de pratiquer l’avortement, alors illégal en France. Mais le violeur inquiété par la police pour une affaire de vol de voiture dénonce l’avortement de la jeune fille. Les policiers inculpent rapidement Marie-Claire, sa mère et trois de ses collègues qui l’ont aidée.

L’affaire devient politique. Gisèle Halimi, avocate franco-tunisienne engagée dans la cause des femmes, accepte d’assurer leur défense. Et, en accord avec Simone de Beauvoir qui préside l’association féministe « Choisir », elle décide de mener un procès politique de l’avortement. Déjà l’année précédente (avril 1971) est paru le manifeste des 343 Françaises qui ont le courage de dire « Je me suis fait avorter » et de braver les poursuites pénales pouvant aller à l’époque jusqu’à l’emprisonnement. Elles sont déterminées à lutter en faveur de l’interruption volontaire de grossesse et de la contraception gratuite. La défense attaque l’injustice de la loi de 1920, et dénonce le fait que Françaises qui le peuvent partent en Suisse ou en Grande-Bretagne pour avorter, tandis que les plus pauvres doivent le faire dans la clandestinité et des conditions sanitaires souvent déplorables. Et devant le juge d’instruction, Michèle C. proteste : « Mais, monsieur le juge, je ne suis pas coupable ! C’est votre loi qui est coupable ! ».Le procès a lieu devant et à l’intérieur du tribunal de Bobigny. Marie-Claire est mineure, l’audience se tient donc à huis clos. Et alors que la foule amassée dehors clame « L’Angleterre pour les riches, la prison pour les pauvres ! » le tribunal relaxe Marie-Claire. Pour la première fois, une jeune fille qui a pratiqué un avortement n’est pas condamnée. Et le 8 novembre, les quatre inculpées restantes sont relaxées ou condamnées à des peines minimes et non appliquées, démontrant définitivement que la loi interdisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG) n’est plus applicable et dépassée.

La pratique de l’IVG sera légalisée quelques années plus tard en France. Mais ce droit reste aujourd’hui encore fragile.

Aigline De Causans


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