Que signifie, aujourd’hui, la référence à Karl Marx  ?

vendredi 27 février 2009.
 

Au lendemain du 200e anniversaire de la naissance du penseur révolutionnaire allemand, la signification de ses œuvres et de ses concepts interpelle le champ philosophique. Avec les contributions des philosophes Slavoj Zizek, Étienne Balibar et Alain Badiou.

Répéter son geste d’ancrage par Slavoj Zizek, philosophe

« Il y a une vieille et délicieuse blague soviétique sur radio Erevan : un auditeur demande "Est-il vrai que Rabinovitch a gagné une nouvelle voiture à la loterie ?", et la radio répond : "En principe oui, c’est vrai, seulement ce n’était pas une nouvelle voiture mais une vieille bicyclette, et il ne l’a pas gagnée mais elle lui a été volée. » N’est-ce que le même sort que celui de l’enseignement de Marx aujourd’hui, 200 ans après sa naissance ?

Demandons à radio Erevan : "Marx est-il toujours actuel ?" On peut deviner la réponse : en principe oui, il décrit merveilleusement la danse folle de la dynamique capitaliste qui n’a atteint son apogée que plus d’un siècle et demi plus tard, mais ...

Gerald A. Cohen (1) a énuméré les quatre caractéristiques de la notion marxiste classique de la classe laborieuse :

1. elle constitue la majorité de la société ;

2. elle produit la richesse de la société ;

3. elle est constituée des membres exploités de la société ;

4. ses membres sont les personnes dans le besoin dans la société.

Lorsque ces quatre caractéristiques sont combinées, elles génèrent deux autres caractéristiques :

5. la classe laborieuse n’a rien à perdre de la révolution ;

6. elle peut et va s’engager dans une transformation révolutionnaire de la société.

Aucune des quatre premières caractéristiques ne s’applique à la classe laborieuse d’aujourd’hui, ce qui explique pourquoi les caractéristiques 5. et 6. ne peuvent pas être engendrées. (Même si certaines caractéristiques continuent de s’appliquer à certaines parties de la société actuelle, elles ne sont plus unies en un seul agent : les personnes dans le besoin dans la société ne sont plus les travailleurs, etc.)

L’impasse historique du marxisme réside non seulement dans le fait qu’il comptait sur la perspective de la crise finale du capitalisme et qu’il ne pouvait donc pas saisir comment le capitalisme sortait renforcé de chaque crise. Il y a une erreur beaucoup plus tragique au travail dans le corpus classique du marxisme, décrit en termes précis par Wolfgang Streeck - Le marxisme a raison sur la « crise finale » du capitalisme, nous y entrons clairement aujourd’hui, mais cette crise est juste un processus prolongé de décomposition et de désintégration, sans facile « Aufhebung » hégélienne en vue, et sans agent pour donner à cette désintégration une torsion positive et la transformer en passage à un niveau supérieur d’organisation sociale :

"C’est un préjugé marxiste - ou mieux : moderniste - que le capitalisme en tant qu’époque historique ne prendra fin que lorsqu’une nouvelle et meilleure société sera en vue et qu’un sujet révolutionnaire sera prêt à l’appliquer pour le progrès de l’humanité. Cela présuppose un certain contrôle politique sur notre destin commun dont nous ne pouvons même pas rêver après la destruction de l’action collective et, en fait, l’espoir, dans la révolution néolibérale-mondialiste. » (2)

La vision de Marx était celle d’une société approchant peu à peu de sa crise finale, situation dans laquelle la complexité de la vie sociale est simplifiée en un grand antagonisme entre les capitalistes et la majorité prolétarienne. Cependant, même un rapide coup d’œil sur les révolutions communistes du XXe siècle montre que cette simplification n’a jamais eu lieu : les mouvements communistes radicaux ont toujours été contraints à se constituer en une minorité d’avant-garde, et pour l’hégémonie, ils ont dû attendre patiemment une crise (généralement la guerre) qui a fourni une fenêtre d’opportunité étroite. Dans de tels moments, une avant-garde authentique peut profiter de l’instant présent, mobiliser les gens (même si ce n’est pas la majorité réelle) et prendre la relève. Les communistes ont toujours été au plu haut point « non dogmatiques », prêts à parasiter une autre question : la terre et la paix (Russie), la libération nationale et l’unité contre la corruption (Chine) ... Ils ont toujours été conscients que la mobilisation serait bientôt terminée et qu’il leur fallait préparer l’appareil de pouvoir pour les maintenir au pouvoir. (Contrairement à la Révolution d’Octobre qui traitait explicitement les paysans comme des alliés secondaires, la révolution chinoise ne prétendait même pas être prolétarienne : elle s’adressait directement aux paysans comme base.)

Le problème du marxisme occidental (et même du marxisme en tant que tel) était l’absence de sujet révolutionnaire : comment se fait-il que la classe laborieuse n’accomplit pas le passage de l’en-soi au pour-soi et ne se constitue-t-elle pas en agent révolutionnaire ? Ce problème a fourni la principale raison d’être de sa référence à la psychanalyse qui a été évoquée précisément pour expliquer les mécanismes libidinaux inconscients qui empêchent la montée de la conscience de classe inscrite dans l’être même (situation sociale) de la classe ouvrière. De cette façon, la vérité de l’analyse socio-économique marxiste a été sauvée, il n’y avait aucune raison de donner raison aux théories révisionnistes sur la montée des classes moyennes, etc. Pour cette même raison, le marxisme occidental a aussi été dans une constante recherche d’autres agents sociaux qui pourraient jouer le rôle d’agent révolutionnaire, comme les classes subalternes remplaçant la classe ouvrière indisponible : les paysans du tiers monde, les étudiants et les intellectuels, les marginaux exclus ... La dernière version de cette idée concerne les réfugiés : mais seulement l’afflux d’un très grand nombre de réfugiés pourrait revitaliser la gauche radicale européenne. Cette ligne de pensée est complètement obscène et cynique : nonobstant le fait qu’un tel développement donnerait un coup de fouet immense à la brutalité anti-immigrée, l’aspect vraiment fou de cette idée est le projet de combler le fossé des prolétaires disparus en les important de l’étranger, afin que nous obtenions la révolution par un agent révolutionnaire de substitution et délocalisé.

L’échec de la classe ouvrière en tant que sujet révolutionnaire est déjà au cœur même de la révolution bolchevique : l’art de Lénine a été de détecter le « potentiel de rage » (Sloterdijk) des paysans déçus. La Révolution d’Octobre a gagné en raison du slogan « terre et paix », adressé à la vaste majorité paysanne, saisissant le court moment de leur insatisfaction radicale. Lénine pensait déjà dans ce sens une dizaine d’années avant 17, c’est pourquoi il était horrifié par la perspective du succès des réformes agraires de Piotr Stolypin, qui visaient à créer une nouvelle classe d’agriculteurs indépendants - il écrit que si Stolypin réussit, l’occasion d’une révolution était perdue pour des décennies. Toutes les révolutions socialistes réussies, de Cuba à la Yougoslavie, ont suivi ce modèle, saisissant l’opportunité dans une situation critique extrême, cooptant la libération nationale ou autres « capital de rage ». Bien sûr, un partisan de la logique de l’hégémonie pointe ici que c’est la logique très "normale" de la révolution, que la "masse critique" est atteinte précisément et seulement par une série d’équivalences entre des demandes multiples qui sont toujours radicalement contingentes et dépendantes d’un ensemble de circonstances spécifiques et uniques en leur genre. Une révolution ne se produit jamais quand tous les antagonismes s’effondrent dans un grand, mais quand ils combinent synergiquement leur puissance.

Il ne s’agit pas seulement de dire que la révolution ne suit plus le train de l’histoire, suivant ses Lois, puisqu’il n’y a pas d’histoire, puisque l’histoire est un processus ouvert et contingent ; le problème est différent : c’est comme s’il y AVAIT une Loi de l’histoire, une ligne principale prédominante plus ou moins claire du développement historique, et que cette révolution ne peut se produire que dans ses interstices, « à contre courant ».

Les révolutionnaires ont à attendre patiemment le moment (généralement très bref) où le système dysfonctionne ouvertement ou s’effondre, pour saisir la fenêtre d’opportunité offerte, prendre le pouvoir qui, à ce moment-là, se trouve dans la rue et EST à prendre, puis fortifier leur prise le pouvoir, construire des appareils répressifs, etc., pour que, une fois le moment de confusion passé, la majorité dégrisée et désappointée par le nouveau régime, il soit trop tard pour s’en débarrasser, leur position fermement enracinée.

Les communistes ont toujours soigneusement calculé le bon moment pour arrêter la mobilisation populaire. Prenons le cas de la Révolution culturelle chinoise qui contenait sans aucun doute des éléments d’une utopie en procès. À la toute fin, avant que l’agitation ne soit bloquée par Mao lui-même (puisqu’il avait déjà atteint son objectif de rétablir toute sa puissance et de se débarrasser du sommet de la nomenklatura), il y eut la « Commune de Shanghai » : un million de travailleurs prenant les slogans officiels au sérieux, exigeant l’abolition de l’Etat et même du Parti lui-même, et l’organisation communautaire directe de la société. Il est significatif que c’est à ce moment-là que Mao a ordonné à l’armée d’intervenir et de rétablir l’ordre. Le paradoxe est celui d’un dirigeant qui déclenche un bouleversement incontrôlé, tout en essayant d’exercer son plein pouvoir personnel - le chevauchement de l’extrême dictature et l’extrême émancipation des masses.

La question de la pertinence de la critique de Marx de l’économie politique à notre époque de capitalisme globalisé doit être résolue de façon dialectique : non seulement la critique de Marx de l’économie politique, ses grandes lignes concernant la dynamique capitaliste, reste toujours actuelle mais on devrait même aller plus loin et affirmer que c’est seulement aujourd’hui, avec le capitalisme mondial, que, pour le dire en hégélien, sa réalité rencontre concept. Cependant, un renversement proprement dialectique intervient ici : à ce moment précis, la limite doit apparaître, le moment du triomphe est celui de la défaite. Après avoir surmonté les obstacles externes, la nouvelle menace vient de l’intérieur, signalant une incohérence immanente. Quand la réalité atteint pleinement son concept, ce concept lui-même doit être transformée. Là réside le paradoxe proprement dialectique. Marx n’avait pas tort, il avait souvent raison, mais plus encore qu’il ne l’aurait cru lui-même

Alors, qu’en résulte-t-il ? Faut-il radier les textes de Marx comme un document intéressant du passé et rien de plus ? Dans un paradoxe proprement dialectique, les impasses mêmes et les échecs du communisme du XXe siècle, impasses clairement fondées sur les limites de la vision de Marx, témoignent en même temps de son actualité : la solution marxiste classique a échoué, mais le problème subsiste. Le communisme n’est pas aujourd’hui le nom d’une solution, mais le nom d’un problème, le problème des communs dans toutes ses dimensions - les biens de la nature comme substance de notre vie, le problème de nos biens communs biogénétiques, le problème de nos biens communs culturels – la "propriété intellectuelle" - , et, last but not least, les communs comme l’espace universel de l’humanité duquel personne ne devrait être exclu. Quelle que soit la solution, il faut faire face à cesproblèmes.

Dans les traductions soviétiques, la déclaration bien connue de Marx à Paul Lafargue, « Ce qu’il y a de certain, c’est que je ne suis pas marxiste », a été rendue par : « Si c’est du marxisme, je ne suis pas marxiste ». Cette mauvaise traduction rend parfaitement compte de la transformation du marxisme dans un discours universitaire. Dans le marxisme soviétique, Marx lui-même était un marxiste, participant à une même connaissance universelle qui constituait le marxisme ; le fait qu’il ait créé l’enseignement connu plus tard sous le nom de « marxisme » ne déroge pas à la règle. Sa dénégation fait référence à une mauvaise version spécifique qui se proclame faussement « marxiste ». Ce que Marx voulait dire était quelque chose de plus radical : un écart séparait Marx lui-même, le créateur qui a une relation substantielle avec son enseignement, des « marxistes » qui suivent cet enseignement. Cet écart peut également être rendu par la célèbre blague des Marx Brothers : "Vous ressemblez à Emmanuel Ravelli. - Mais je suis Emmanuel Ravelli. - Ce n’est pas étonnant que vous lui ressembliez. "Le type qui est Ravelli ne ressemble pas à Ravelli, il est simplement Ravelli, et, de la même manière, Marx lui-même n’est pas un marxiste - un parmi les marxistes -, il est le point de référence dispensé de la série - c’est la référence à lui qui fait d’autres marxistes. Et la seule façon de rester fidèle à Marx aujourd’hui est de ne plus être un « marxiste », mais c’est répéter le geste d’ancrage de Marx d’une manière nouvelle. »

(1) G.A.Cohen, If You’re an Egalitarian, How Come You’re So Rich ?, Cambridge (Ma) : Harvard University Press 2001.

(2) Wolfgang Streeck, How Will Capitalism End ?, London : Verso Books 2016, p. 57.

Marx métamorphosé par Étienne Balibar, philosophe

On nous dit  : Marx est de retour… Comme s’il était jamais parti  ! Mais ce qui est vrai, c’est que sa compréhension et son usage se sont métamorphosés. Et c’est des choix qu’impose cette métamorphose, des possibilités qu’elle ouvre, des révisions qu’elle demande, que je voudrais dire ici quelques mots.

Dans les manifestations auxquelles donne lieu le bicentenaire, deux surtout me semblent révélatrices du changement de conditions dans lesquelles s’effectue aujourd’hui la lecture de Marx, et de la conjoncture inattendue dans laquelle nous sommes maintenant. La plus voyante, c’est l’inauguration en grande pompe, dans la ville natale de l’auteur du Manifeste communiste, d’une statue géante offerte par la République populaire de Chine  : dernier grand pays au monde à être gouverné par un «  parti communiste  », et puissance tendanciellement dominante du nouveau capitalisme mondialisé. Il n’est pas sûr qu’on lise beaucoup le Capital en Chine, mais il n’est pas certain qu’on ne le lise pas. De toute façon, cette référence ne peut être écartée d’un revers de la main sous prétexte que ce Marx-là ne serait pas «  le vrai  ».

Non moins révélatrice est la touchante unanimité des grands organes de presse où se forge le consensus néolibéral, The Economist de Londres et The Financial Times, pour nous expliquer que, sans doute, la mise en œuvre des «  politiques marxistes  » a débouché sur la catastrophe et sur l’horreur, mais le diagnostic portant sur les contradictions du mode d’accumulation, et donc l’inévitabilité des crises, doit plus que jamais être pris au sérieux. Cela suppose qu’on puisse découper Marx en tranches  : l’économie par-ci, la politique et la philosophie par-là, ce que je ne crois pas, mais qui témoigne du fait que la puissance analytique de sa pensée et le principe de sa critique du capitalisme ont survécu à la tragédie des révolutions et contre-révolutions du XXe siècle.

Le capitalisme dans lequel nous vivons aujourd’hui, dont la logique pénètre désormais tous les aspects de la vie quotidienne, n’est pas seulement un capitalisme mondialisé et financiarisé, c’est un capitalisme qui vient après le socialisme historique sous ses différentes formes, dont le marxisme a été l’une des composantes. Pour une part, il s’en démarque violemment  ; pour une part, il s’en nourrit, au risque du déséquilibre permanent. La lecture de Marx dont nous avons besoin aujourd’hui (et qui, bien sûr, est plus qu’esquissée de divers côtés, sous la forme d’une réjouissante multiplicité d’interprétations) doit elle aussi se concevoir et s’organiser comme une lecture «  post-socialiste  », y compris dans un rapport critique au socialisme de Marx. Ce qui impose un rapport critique à son communisme  : le communisme de Marx ne se confond pas avec son socialisme, car il vient de beaucoup plus loin dans l’histoire des idéaux de l’humanité. Mais il ne peut en être séparé par une simple décision, puisque Marx avait précisément trouvé dans la «  loi de socialisation  » inhérente au capitalisme les fondements de sa conception du communisme.

De ce que Marx a écrit et pensé (désormais bien plus largement accessible qu’à l’époque où, sous l’inspiration d’Althusser, nous nous proposions de «  lire le Capital  »), je pense qu’il faut tout garder des questions et tout repenser des réponses. Cela vaut pour la critique de l’économie politique, en surmontant les limitations que lui avait imposées sa dépendance par rapport aux économistes de la révolution industrielle, et en levant l’obstacle que constitue sa conviction du caractère purement «  apologétique  » de l’économie bourgeoise. Cela vaut pour les schémas du processus révolutionnaire au moyen desquels il avait cherché à inscrire la révolution prolétarienne dans la continuité des révolutions bourgeoises, au prix d’une dénégation de son universalisme potentiel et d’une sous-estimation de ses propres contradictions. Et cela vaut, bien sûr, pour la lutte des classes  : il est évident à la fois qu’aucune relation sociale n’échappe à sa détermination et qu’elle ne constitue que l’une des structures de domination et de résistance, dont les idées de «  transformer le monde  » et de «  changer la vie  » tirent leur actualité permanente. On pourrait résumer cela en disant que Marx, deux cents ans après sa naissance, est entré dans une conversation où il a autant à apprendre qu’à enseigner. C’est la démocratie des idées révolutionnaires. Je crois qu’il en eût été satisfait. À tout de suite, vieille barbe  !

Les formes neuves de l’appropriation collective par Alain Badiou, philosophe

Faute de se souvenir que le vrai titre du Capital est Critique de l’économie politique, on a souvent réduit Marx à une pensée analytique de l’organisation économique des sociétés. Il s’est finalement retrouvé, au milieu notamment de ses ennemis de toujours, comme un auteur des parcours académiques en sciences sociales. Cette académisation de Marx a permis de le séparer de ses vrais descendants  : Lénine, ou Mao, et donc de lui épargner leur sort de maudits «  totalitaires  ».

Mais la vie, l’action et les écrits de Marx témoignent du contraire. Le but qu’il poursuivait sans faiblesse était la naissance et le déploiement d’une organisation internationale des prolétaires. Il a été avec Engels, comme Lénine avec Trotski, Mao avec Chou En-lai, Castro avec Che Guevara, le militant, le dirigeant des efforts pour atteindre ce but dans les conditions de son époque, où l’Idée communiste faisait son apparition.

Je voudrais citer ici deux passages du Manifeste qui, à mes yeux, concentrent l’orientation fondamentale qui nous rattache encore à Marx. Ma première citation serait  : «  Les communistes ne forment pas un parti distinct opposé aux autres partis ouvriers. Ils n’ont point d’intérêts qui les séparent du prolétariat en général. Ils ne proclament pas de principes sectaires sur lesquels ils voudraient modeler le mouvement ouvrier. Les communistes ne se distinguent des autres partis ouvriers que sur deux points  : 1º Dans les différentes luttes nationales des prolétaires, ils mettent en avant et font valoir les intérêts communs du prolétariat. 2º Dans les différentes phases évolutives de la lutte entre prolétaires et bourgeois, ils représentent toujours et partout les intérêts du mouvement en général.  »

Et la deuxième  : «  En somme, les communistes appuient partout tout mouvement révolutionnaire contre l’ordre des choses social et politique existant. Dans tous ces mouvements, ils mettent en avant la question de la propriété, quelle que soit la forme plus ou moins développée qu’elle ait revêtue, comme la question fondamentale du mouvement.  »

En somme, le militant participe à tous les mouvements dans lesquels la subjectivité dominante semble être une opposition réelle à l’ordre dominant. Mais il y observe, et tente par tous les moyens d’y faire prévaloir trois principes  :

1. L’internationalisme, qui exclut que le mouvement laisse place au nationalisme, à la mention, par exemple, de «  la France  » et de ses intérêts, y compris sous la forme actuelle du fétichisme de «  notre République  ». Encore moins pourra-t-on tolérer tout ce qui relève des traces du colonialisme  : le racisme, l’islamophobie et autres ingrédients de la réaction contemporaine.

2. La subordination de ce qui est une nécessité tactique à la stratégie d’ensemble, le «  mouvement en général  », qui vise l’affaiblissement d’abord, la destruction enfin, de l’ordre capitaliste et bourgeois. On évitera toute forme de soutien constant, notamment électoral ou syndical, avec des forces dont il est évident que leur but n’est que de conquérir des positions de pouvoir à l’intérieur de l’ordre dominant. On ne fera en particulier nul usage de la catégorie sous laquelle se présentent toutes les trahisons, à savoir la catégorie de «  gauche  ».

3. La question de la propriété bourgeoise et de l’absolue nécessité de son abolition. Marx indique que ce principe doit prévaloir quelle que soit la forme plus ou moins développée qu’elle (la propriété) a revêtue. Aujourd’hui, cette forme est littéralement extrémiste  : dans le monde, une centaine de personnes possèdent autant que deux milliards d’autres. Le gouvernement Macron veut nous aligner sur ce genre de norme. D’où l’impératif militant  : dans tout mouvement, aujourd’hui, affirmer un rejet total, non seulement des privatisations en cours (de l’université, de la SNCF, des hôpitaux…), mais de toutes celles auxquelles la gauche comme la droite ont contribué depuis 1983, et proposer les formes neuves de l’appropriation collective de tout ce qui relève du bien public. Prioritairement  : enseignement, santé, transports autres que familiaux, communication (poste, téléphone et réseau Internet), énergie, eau potable.

Dans le cadre de la lutte entre la voie capitaliste aujourd’hui dotée d’une puissance sans précédent et la voie communiste à reconstruire, Marx nous indique non seulement ce que doivent être le cadre de notre pensée, mais plus encore l’orientation générale de nos actions.


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