Front de Gauche : Un nouveau front populaire (éditorial de l’Hebdomadaire A Gauche)

samedi 21 mars 2009.
 

Nous bouclons A Gauche alors que les derniers préparatifs de la mobilisation du 19 mars battent leur plein. Nous ne savons pas encore quelle en sera l’ampleur. Elle changera beaucoup de choses. La mobilisation des salariés est la première condition du rapport de forces contre le gouvernement et le patronat. Un succès le 19 mars éclaircirait l’horizon. Un échec l’assombrirait brutalement. Inutile à cette heure de faire des pronostics. Quand vous lirez ces lignes nous serons fixés.

Mais quel que soit le résultat du 19, nous n’oublions pas pour autant pas notre responsabilité singulière de parti de gauche. Nous ne sommes pas simplement le « débouché » de la lutte sociale comme se décrit le PS. Pour nous, les élections ne sont pas non plus une simple « tribune », selon les termes du NPA. Le rapport de forces que nous devons construire face à une droite qui s’appuie sur tous les pouvoirs, politique, économique, médiatique est par nécessité un rapport de forces global. Il est politique autant que social, culturel et idéologique. C’est pourquoi le terrain politique n’est pas un à-côté de la lutte. C’est l’un des lieux essentiels où se construit le rapport de forces entre le capital et le travail. A gauche, certains oublient parfois que « toute lutte de classes est une lutte politique » comme l’écrivait déjà le Manifeste de Marx. Mais nos adversaires, eux, ne l’ont pas perdu de vue. Ils n’ont jamais déserté ce terrain. Sinon les puissants se contenteraient de diriger l’économie et la droite politique n’existerait pas ! Notre tâche de parti de gauche est donc de tout faire pour améliorer le rapport de forces politique face à la droite. Or nous savons que la première chose qui permet de le faire progresser, c’est l’unité. Ce qui est vrai dans la rue l’est aussi dans les urnes.

C’est pourquoi nous avons formulé la proposition du Front de Gauche comme le moyen de réaliser l’union de toutes les forces de l’autre gauche. Nous ne savons pas jusqu’où celle-ci s’accomplira. Mais nous savons au moins que nous aurons tout fait pour parvenir à l’union la plus large. Le Front de Gauche n’a posé aucun préalable au rassemblement. Il s’est adressé à tous sans exclusive. Même ceux qui hésitent encore à le rejoindre le reconnaissent.

Ainsi, les Alternatifs prendront leur décision à la fin de cette semaine. Au sein de ce parti, même les dirigeants favorables à l’union avec le NPA reconnaissent que le Front de Gauche a été le fer de lance de l’unité en écrivant dans le journal des Alternatifs que « l’électorat au moment de voter ne sanctionnera pas nécessairement celui qui pourrait être perçu comme le principal diviseur », et que s’il soutient une alliance avec le NPA c’est parce que malgré « les bases boutiquières et étriquées de sa constitution », les « sondages (...) permettent d’espérer un résultat satisfaisant » pour ses listes. Bien sûr il y a de quoi enrager de voir que des sondages, dont le dernier a été réalisé il y a un mois, avant que le Front de Gauche ait commencé à faire campagne, puissent faire la décision. Mais au moins notre engagement pour l’unité est reconnu. Cela compte pour l’avenir. Quant aux convictions fondées sur les sondages, rien n’est perdu car elles varient avec les sondages eux-mêmes... Et trois mois avant une élection, ceux-ci se sont invariablement trompés.

Samedi, le MRC décidera également de sa participation ou non au Front de Gauche. Si les discussions sur le fond nous ont conduit à refuser plusieurs formulations proposées par le MRC, ce n’est pas pour imposer nos conceptions à ce Parti. C’est seulement pour à l’inverse ne pas avoir à renoncer aux nôtres. A chaque étape, le Front se construit donc dans le respect de la singularité de ses composantes. Là encore, cette méthode facilite l’élargissement continu du Front.

Car notre ambition pour le Front de Gauche va bien au-delà du simple cartel électoral. Nous voulons que le Front de Gauche soit le moyen d’une nouvelle union populaire. Qu’il devienne un nouveau Front Populaire en quelque sorte. Lorsque la gauche française surmonta sa division en 1934, elle rendit possible un rassemblement d’une étendue considérable. Le Front populaire comportait plus de 90 organisations de toute nature, partis de toutes tailles, syndicats rassemblés et associations les plus diverses, du Grand Orient à l’Union naturiste de France. Le Front Populaire était donc davantage qu’une alliance électorale. C’est parce qu’il unissait étroitement la lutte sociale, politique, intellectuelle, culturelle que le Front Populaire a eu la capacité d’entraîner la société et de bouleverser l’ordre établi.

A travers la multiplication des comités sur le terrain, voilà le Front de Gauche que nous voulons construire. Cette ambition vous paraît immense ? C’est pourtant la seule voie réaliste dès lors que l’on prend au sérieux la profondeur de la crise du capitalisme et que l’on veut ouvrir une issue pour nos sociétés. Il est des moments historiques où l’on est obligé d’être ambitieux car les objectifs étriqués perdent tout sens.


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