Le poison du sectarisme (François Delapierre et Jean Luc Mélenchon) 301

mardi 19 septembre 2006.
 

C’est la confusion politique maximale. Devant les jeunes de l’UMP Sarkozy cite Jaurès et Blum. Ségolène Royal reprend les propositions de la droite sur la carte scolaire. La machine médiatique tourne à plein pour personnaliser la politique et dépolitiser les personnes. Un leitmotiv : gauche et droite, c’est fini, plus de distinction. La preuve, Olivier Besancenot lui-même explique qu’il n’est pas sûr de faire la différence entre le PS et l’UMP au second tour de la présidentielle.

Un tel matraquage, une telle pensée unique, répétée dans tous les journaux, déclinée à l’identique par les rares personnalités à qui la petite caste médiatique accepte de donner la parole, cela ne tient évidemment pas au hasard. Ce bourrage de crane a un objectif simple : empêcher que le rejet du libéralisme devenu majoritaire l’emporte en 2007. Car depuis que la gauche a pris la tête du combat antilibéral le 29 mai dernier et marginalisé Le Pen, le risque est grand d’un changement politique et social d’ampleur qui fait trembler tous les puissants.

Pour nous barrer la route, ils ressortent les vieilles recettes. D’abord inviter la gauche à ne plus être elle-même. Le meilleur moyen pour un homme ou une femme de gauche d’être loué par les éditorialistes officiels ? Reprendre les idées de la droite ! Si la gauche renonce à changer la vie, les importants pourront dormir tranquilles. Ca se passe d’ailleurs comme ça chez nos voisins. En Angleterre, le patronat ne soutient pas la droite, mais Tony Blair. En Italie, la Cofindustria a appelé à voter Prodi plutôt que Berlusconi.

Ensuite, diviser l’adversaire. Tout ce qui peut rassembler la gauche est soigneusement combattu. Regardez l’ostracisme médiatique que subissent Fabius et Buffet. Les combats qu’ils ont menés les qualifient-ils moins que Nicolas Hulot pour la une du Nouvel Observateur ? Leur crime est dans leur ligne : tout deux parlent de rassembler la gauche sur une ligne de gauche. Le 29 mai 2005 a montré que c’était possible. Il ne manquerait plus que ce cauchemar des bien-pensants se reproduise...

Cette pensée unique peut compter sur le concours d’une partie de la gauche. En son sein, les sectaires de tout bord se donnent la main. L’extrême-gauche refuse de discuter avec le PS... voilà qui laisse les mains libres aux socialistes qui veulent se rapprocher du centre. Alain Krivine répète qu’entre Fabius et Royal il n’y a pas de différence de fond... c’est justement l’argument des partisans de Royal qui refusent toute confrontation politique et conseillent aux militants socialistes de ne lire que les sondages. Olivier Besancenot estime que Ségolène Royal alterne des « propositions très à droite » et des « propositions très à gauche ». On attend de savoir lesquelles. Avez-vous d’ailleurs remarqué que la LCR n’a pas réagi aux propositions de Ségolène Royal sur la carte scolaire ? On ne mort pas la main qui vous nourrit. Une gauche de gouvernement qui chasse sur les terres de la droite, ça peut libérer des voix pour une gauche de contestation qui se proclame « vraiment à gauche ». D’ailleurs, certains socialistes notoires avaient promis à Olivier Besancenot des signatures pour se présenter à l’élection présidentielle.

Face à cela, il faut aussi que les unitaires se donnent la main. Il y en a partout. Les caricatures qui réduisent le PS et son programme au social-libéralisme ne reflètent pas la réalité. De très nombreux militants socialistes veulent ardemment l’union de la gauche pour changer la vie. Certains ont intérêt à ce que le débat entre candidats au sein du PS se réduise à un affrontement de personnes. Ils y parviendront peut-être. Mais cela peut aussi être un moment de clarification politique qui serait utile à la gauche toute entière. Dans la gauche non socialiste également, il y a des unitaires. Là encore, les caricatures complaisamment relayées sur la domination sans partage des penchants groupusculaires et boutiquiers ne traduisent pas la réalité. De nombreux militants ont des ambitions plus élevées. Des camarades de PRS qui participaient dimanche dernier à une réunion nationale des collectifs pour un rassemblement antilibéral et des candidatures unitaires nous ont raconté comment la large majorité des présents s’est opposé à la volonté de la LCR de refuser tout appel à voter pour les candidats socialistes au deuxième tour des élections présidentielles et législatives. Mais il reste encore du travail à faire car l’obsession à se distinguer du PS donne parfois le sentiment que le rassemblement de la gauche passe au second plan. C’est pourquoi nos amis se sont abstenus sur la déclaration finale.

Du 15 au 17 septembre 2006, PRS tient un stand pour la deuxième année consécutive à la Fête de l’Humanité. C’est pour nous un moyen de lutte très concret. Une bonne façon pour la gauche de disperser les caricatures et les faux-semblants véhiculés par les médias dominants, c’est en effet de réapprendre à se parler, de faire l’effort de se connaître. Pour cela, la fête de l’Huma est irremplaçable. En plus, le thème de cette année, c’est le Front Populaire. A l’époque, les partis de gauche sortaient d’une période où ils s’étaient affrontés à coup de barres de fer. Tout semblait les opposer. Comme quoi l’aspiration à l’unité est parfois la plus forte pour peu que le peuple s’en mêle.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message