Fédération : prendre la posture de l’unité ou construire l’unité ? (par Gauche Unitaire)

jeudi 30 avril 2009.
 

Après s’être, comme nous, engagée dans le combat pour le plus large rassemblement de la gauche sociale et écologique aux élections européennes, la Fédération annonce que, jusqu’au dépôt officiel des listes, elle continuera à militer pour une fusion entre les listes du Front de gauche et celles du NPA. Mais aussi qu’en cas d’échec, elle appellera indistinctement à voter pour les listes opposées à la droite et au traité de Lisbonne. Autrement dit, pour les listes du Front de gauche, du NPA et de Lutte ouvrière…Une telle position nous pose problème.

La volonté de réaliser à l’occasion des élections européennes l’unité des forces antilibérales et anticapitalistes, incluant à côté du PCF et du PG le NPA, est parfaitement juste. Nous la partageons et avons mené jusqu’au bout le débat en ce sens au sein de la LCR et du NPA.

Mais les votes du congrès du NPA, confirmés par les décisions du Conseil politique national des 7 et 8 mars, ont consacré le refus délibéré de la perspective d’un Front de gauche au profit d’une logique de cavalier seul, dont les arrières-pensées électoralistes ont été tout à fait déterminantes même si elles n’ont jamais été avouées comme telles.

On peut, et Gauche Unitaire le fait également, continuer à prôner un rapprochement des uns et des autres pour parvenir à des listes communes. C’est ce qu’il faudrait pour donner toute sa force au Front de gauche et aux réponses qu’il lui faut porter. On ne saurait, pour autant, se comporter comme si l’impossibilité d’y parvenir jusqu’alors relevait de simples incompréhensions ou du choc de comportements également diviseurs. La question est incontournable de savoir si cette division est justifiée politiquement par des divergences politiques insurmontables, comme l’affirme la direction du NPA, ou si cette même direction du NPA en porte seule la responsabilité.

Notre propre décision d’intégrer le Front de gauche fut la conclusion de notre tentative d’empêcher une logique de repli de prévaloir. En conscience, nous ne pouvions cautionner un comportement privilégiant un prétendu intérêt de parti au détriment de l’intérêt général du peuple de gauche, des acteurs et actrices du mouvement social, de ces hommes et de ces femmes de gauche qui souffrent de trop d’inégalités imposées et d’injustices subies !

Le Front de gauche a systématiquement agi en direction du NPA pour débattre des conditions permettant à celui-ci de s’associer à cette alliance électorale. De son côté, la direction du NPA a fixé des conditions, de surcroît à géométrie variable, visant à rendre impossible cette unité.

Dans ces conditions, si le communiqué de la Fédération renvoyant dos-à-dos le Front de gauche et le NPA réalise peut-être un équilibre entre les diverses composantes de la Fédération, il ne nous en apparaît pas moins comme un choix de nature à stériliser les apports militants d’une composante importante de la gauche de gauche.

Certes, les discussions menées entre la Fédération et le Front de gauche se sont d’emblée enlisées, créant une situation confuse. Nous le regrettons. Mais force est de constater qu’elles ont eu lieu dans des conditions qui n’étaient pas de la plus grande clarté. Alors que ADS avait décidé d’intégrer en tant que telle le Front, les Alternatifs pour leur part négociaient d’un côté avec le Front de gauche et de l’autre avec le NPA, pour finalement décider de ne pas participer à la campagne des européennes. Les composantes écologistes de la Fédération considéraient ne pas devoir entrer en compétition avec les listes de Cohn-Bendit où se retrouve José Bové. Quant aux Communistes unitaires, ils se trouvaient en situation difficile du fait de leur double statut de composante du Parti communiste et de structure indépendante, et du conflit que cela créait avec la direction du PCF. Reste la Coordination des collectifs unitaires, qui ne peut à elle seule représenter l’ensemble de la Fédération… Et dont on peut s’inquiéter de la voir aujourd’hui considérer que l’échec de l’unité est patent et qu’il faut à présent songer à faire mieux aux régionales ! Cette situation est profondément dommageable, et on voit combien elle empêche nombre de forces et de militants qui sont les plus sincères partisans de l’unité des forces à gauche du PS d’intervenir dans cette campagne décisive.

Chacun et chacune doit à présent faire le constat lucide de la situation. Le Front de gauche est la seule offre unitaire de la gauche de gauche pour cette bataille des européennes. Parce qu’elle regroupe nationalement le Parti communiste, le Parti de gauche et la Gauche unitaire (qui y apporte l’acquis de la bataille pour l’unité conduite jusqu’au bout au sein du NPA, ainsi que l’expérience des militantes et militants issus d’autres traditions qui l’ont rejointe depuis). Parce que, sur le terrain, le Front se voit rejoint par des militants ou structures de la gauche alternative ou de l’écologie anticapitaliste (c’est, par exemple, le cas en Meurthe-et-Moselle). Parce qu’il est ouvert à toutes et à tous, au-delà des forces organisées qui l’ont impulsé.

Rien ne saurait, dès lors, empêcher au maximum de forces et de militants de s’inscrire dans la campagne du Front de gauche. Cela suppose de ne pas se réfugier dans un positionnement consistant à répéter que les responsabilités de la division sont imputables aussi bien au Front de gauche qu’au NPA. Et, surtout, à prendre la mesure des enjeux de cette campagne.

Alors que la crise nous menace des plus grandes catastrophes, sur les plans social, écologique, démocratique, des plus grandes catastrophes, que la colère sociale est à son paroxysme, l’inexistence d’une alternative digne de ce nom à gauche représente le principal atout de la droite et du patronat. Selon que le Front de gauche, par son intervention militante et ses résultats électoraux, rencontre un écho populaire, ou selon qu’il subit un échec, tout le monde peut voir que les conditions ne seront pas le mêmes au regard du rapport de force d’ensemble, entre la droite et la gauche, et au sein de la gauche. La capacité à poursuivre au-delà des européennes la politique en faveur d’une perspective unitaire en dépend.

C’est pourquoi nous regrettons profondément le choix fait par les Alternatifs de neutraliser leur intervention dans cette campagne. Nous regretterions tout autant que les courants et militants regroupés dans la Fédération se retirent d’un rendez-vous politique essentiel et que, à l’inverse de toute leur tradition, ils n’oeuvrent pas à construire la dynamique militante et populaire du Front de gauche…

A l’inverse leur implication favoriserait un développement du Front de gauche, l’élargissement des comités de campagne, l’entrée sur la scène politique d’acteurs du mouvement social qui peuvent permettre de dépasser les limites des organisations qui ont initié le Front de Gauche et enclencher une réelle dynamique populaire et militante. Celle-ci permettrait de rouvrir le débat sur l’alternative à gauche dont nous avons besoin.


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