Le rapprochement Alain Soral - UOIF ou l’offensive de la réaction (par Youssef GIRARD)

mardi 19 mai 2009.
 

Le fascisme est un mouvement contemporain inhérent au capitalisme et à ses crises qui le nourrissent. Ce mouvement politique et idéologico-culturel, apparut après la guerre 1914-1918, ne naît pas de manière spontanée, même s’il existe toujours des éléments réactionnaires, y compris dans les périodes de développement du capitalisme. L’essence du fascisme est de s’opposer à toute contestation sociale et à toute remise en cause des rapports de domination permettant le processus de reproduction social. Toutefois, il reste difficile de donner une définition précise du fascisme car c’est un mouvement possédant de multiples visages en fonction des conjonctures nationales ou des moments historiques. Comme le notait Georges Jackson : « jamais nous n’aurons une définition complète du fascisme, parce qu’il est en constante évolution, montrant un visage nouveau chaque fois qu’il doit affronter une série donnée de problèmes, de menaces contre la prédominance de la classe dirigeante, traditionaliste et capitaliste » [1]. Cette volonté de préserver l’hégémonie des classes dominantes est l’une des caractéristiques essentielles du fascisme.

Au moyen de l’idéologie fasciste, les classes dominantes cherchent à imposer leur conception du monde à l’ensemble des classes subalternes et par là même à renforcer leur hégémonie sur le plan politique, social et culturel. Prenant pour base sociale les classes moyennes directement menacées par la crise du capitalisme, dans sa phase de conquête du pouvoir, le fasciste est une réponse calculée des classes dominantes à la mobilisation positive des classes subalternes. Il a pour but la désagrégation et la neutralisation des éléments organisés des classes subalternes. Ainsi, le fascisme se présente sous la forme d’une entreprise de propagande pour faire dévier les masses de la contestation de l’ordre social au profit d’entreprises racistes et chauvines permettant de sauvegarder les intérêts matériels et symboliques des classes dominantes. Le fascisme intervient préventivement contre toute forme de contestation sociale ; il est la « troupe de choc » que la réaction utilise lorsque ses intérêts sont menacés. En conséquence, le fascisme fut un outil essentiel des dominants pour préserver leur hégémonie.

Face à cela, dans leur résistance contre l’oppression et l’exploitation, les dominés développent un point de vue en rapport avec leur expérience, leur pratique immédiate, leur vécu car les rapports d’exploitations et d’oppressions sont pratiqués par les individus. Le dominé est pris dans des rapports réels d’exploitation et de domination et il a l’expérience de cette situation. A partir de connaissances sensibles, les représentations des dominés portent en eux une représentation divisée du monde social qui se fonde sur une division réelle de la société. Antonio Gramsci écrivait qu’« une théorie est précisément « révolutionnaire » dans la mesure où elle est élément conscient de séparation de distinction entre deux camps, dans la mesure où elle est un sommet inaccessible au camp adverse » [2]. Le refus ou l’acceptation de cette position de dominé se manifeste dans le degré d’acceptation ou de révolte vis-à-vis de l’ordre du monde divisé. Le refus inhérent à toute domination est à la base de la résistance des dominés.

En opposition à cette contestation, dans les périodes de crise et de contestation sociale, les dominants ont historiquement soutenu la formation de groupes fascistes et de partis politiques organisés niant les contradictions et les antagonismes sociaux. Les programmes de ces groupes et partis visent à modifier les conceptions conservatrices « traditionnelles » que dans la mesures où ils conçoivent le maintient de l’ordre sociale sur un mode nettement autoritaire. Ce projet répond à une volonté de résistance totale à toute remise en cause des hiérarchies sociales. Toutefois, sur le fond, les dominants proposent toujours des représentations qui ont pour essence la collaboration, la « réconciliation », entre les dominants et les dominés, entre les oppresseurs et les opprimés. Le dominant n’ignore pas le conflit entre le dominant et le dominé puisqu’il reste pour lui un problème permanant, mais il entend pérenniser la légitimité de sa domination. Le discours du dominant nie donc que la contradiction l’opposant au dominé prépare sa ruine. Tout l’effort du dominant tend à résorber le caractère antagonique de la résistance du dominé.

Contre la contestation sociale, les fascistes portent un projet d’ordre social et d’unité nationale réunissant tous les nationaux, ou ceux qu’ils identifient comme tels. Pour cela, les fascistes font des concessions sociales aux classes subalternes et présentent un visage « social ». Ils se disent même « socialistes » ou « révolutionnaires » sans évidement que leur « socialisme » ou leur « révolution » ne remettent en cause l’ordre social et ses hiérarchies. Ces discours « sociaux » qui sont essentiellement portés durant les périodes de lutte pour leur accession au pouvoir, leur permettent d’avoir une certaines audiences dans les classes moyennes et dans certains secteurs des classes subalternes. Toutefois, si la volonté de préserver l’ordre social et ses hiérarchies est une constante du fascisme, cet ordre social et ses hiérarchies se transforment en fonction de l’espace et du temps. Les hiérarchies sociales n’étant pas les mêmes dans la France des années 2000 que dans le France des années 1930, les lieux de contestation sociale étant aussi différents, le fascisme d’aujourd’hui ne peut plus avoir le même visage que celui des ligues de l’entre deux guerre.

La colonisation puis le néo-colonialisme et l’impérialisme français ont provoqué une immigration de masse vers la France de populations du Maghreb et d’Afrique subsaharienne. Cette immigration qui commença au lendemain de la guerre 1914-1918, prit une ampleur particulière après la guerre 1939-1945. L’immigration post-coloniale a profondément bouleversé la composition et la culture des classes populaires en France en posant de nouvelles questions sociales et politiques. Les mouvements nés dans l’immigration, depuis la constitution de l’Etoile Nord Africaine au milieu des années 1920, mettent l’accent sur la double domination, de classe et de « race », que subissent les prolétaires appartenant à des groupes minoritaires. Cela est d’autant plus prégnant que les immigrés constituent une sous-classe victime de la domination du prolétariat français et de ses organisations, notamment le PCF et la CGT.

A partir des années 1980, de la marche pour l’égalité de 1983, les questions politiques portées par les mouvements de l’immigration ont pris une importance particulière dans la vie sociale, en se posant dans un espace spécifique, celui des banlieues. Mis en branle par des mouvements violents ou plus pacifiques, les banlieues sont devenues l’un des lieux principaux de remise en cause de l’ordre social. Dénonciation des oppressions sociales et raciales, des violences policières ou de la ségrégation urbaine, les banlieues, contrairement à un discours dominant, ont été des lieux de luttes, de réflexions et d’innovations politiques majeures ces trente dernières années.

De fait, pour les classes dominantes, l’ennemi principal cessa de plus en plus d’être le mouvement ouvrier en déliquescence pour devenir les expressions politiques des banlieues. L’arrivée au pouvoir de François Mitterrand favorisa ce changement d’ennemi principal pour les classes dominantes. Le tournant de 1983, au nom du « réalisme », est venu mettre en application une orientation largement favorable au capital contre le travail donc aux classes dominantes contre les classes subalternes. Alors qu’en 1981, la part du capital a atteint son étiage le plus bas, 27,1 %, il remonta, en 1988, à la fin du premier septennat de François Mitterrand, à 35,6%, c’est-à-dire son meilleur score depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Le premier septennat de François Mitterrand fut objectivement l’une des présidences françaises les plus libérales en manière économique malgré son étiquette de « gauche ». Idéologiquement, les discours qui appellent à « réconcilier » le travail avec l’entreprise, font apparaître le ralliement des courants majoritaires de la « gauche traditionnelle » au capital contre le travail. Le renouveau du fascisme, depuis les années 1980, est donc aussi le résultat d’une déception des masses populaires devant l’incapacité de la social-démocratie à améliorer la situation sociale.

Contre la contestation sociale et politique issue des banlieues, dans un premiers temps, les dominants ont utilisé leur vieille arme leur permettant de préserver leur position : la social-démocratie. De la fondation d’SOS Racisme au lendemain de la marche de 1983 à la création du Ni Putes Ni Soumises, les satellites du Parti Socialiste ont eu pour tâche de manipuler, de désarmer et de délégitimer toutes formes de contestations portées par l’immigration et les banlieues. Toutefois, les limites de cette politique qui n’était pas à même de contenir la résistance des banlieues, sont apparues de plus en plus nettement.

Les fortes mobilisations en faveurs de la Palestine au début des années 2000, puis celles contre l’agression états-unienne de l’Irak, ont montré l’émergence politique des banlieues qui s’organisaient de manière autonome indépendamment, voire même en opposition, avec les forces politiques traditionnelles. La participation du Mouvement de l’Immigration et des Banlieues [MIB] ou du Collectif des Musulmans de France [CMF] au Forum Social Européen en 2003 ou à d’autres évènements du même type, fit sortir les problématiques des banlieues des espaces où elles étaient traditionnellement discutées pour avoir une caisse de résonance plus large. Cette affirmation de plus en plus forte d’une voix politique autonome remettant en cause l’ordre social et ses hiérarchies était intolérable pour les dominants qui cherchèrent à museler cette opposition grandissante. Les méthodes de contestations organisées gagnant du terrain en banlieues, les classes dominantes partisanes de l’ordre furent contraintes de se réarmer pour défendre leur hégémonie.

C’est dans ce contexte de contestation de l’ordre social par des mouvements autonomes issues des banlieues qu’a émargé la figure médiatique d’Alain Soral. Paradant sur les plateaux télévisés, celui qui se dit ostracisé par les médias, a eu pour rôle, derrière une phraséologie pseudo contestatrice, d’attaquer ceux qui remettaient en cause l’ordre social existant. Ainsi, Soral dénonce « les Franco-magrébins musulmans » qui « se mettent à leur tour au communautarisme, cette « arabian pride », à la fois fierté des origines et droit à la solidarité sur le modèle du « communautarisme victimaire » »[3]. Pour Soral, le problème, ce sont les militants de l’immigration et des banlieues qui s’auto-organisent et remettent en cause l’ordre post-colonial c’est-à-dire les hiérarchies sociales car il défend les intérêts des dominants, comme tout idéologue fasciste.

Interrogé par Guysen Israel News, notre militant « anti-sioniste » dénonçait les « banlieusards » et expliquait ses conceptions sociales conservatrices : « Quand tu es pauvre, tu dois travailler deux fois plus pour réussir et t’intégrer, pour faire ta place, c’est comme ça dans toutes les sociétés du monde » [4]. Part là, il condamnait toute action politique collective visant à remettre en cause l’ordre social notamment lorsqu’il était porté par les militants de l’immigration et des banlieues. Dans la plus pure logique dominante, pour Soral, la « réussite » sociale ne dépend nullement de l’environnement mais uniquement de la volonté individuelle de chacun.

Mais la « réussite » sociale, la « moyennisation », d’une petite minorité de musulmans est pour lui nécessaire pour maintenir l’ordre social actuel et ses hiérarchies : « Je suis un Nationaliste et je suis pour l’Ordre. […] L’accession aux classes moyennes d’une certaine élite arabo-musulmane atténuera la délinquance, les musulmans cesseront leur agressivité émotionnelle, preuve d’un profond malaise identitaire » [5]. Chez Soral, comme dans l’ensemble du discours des dominants, la résistance et la révolte du dominé sont perçues comme un « désordre », une transgression de la « loi » qui fait du révolté un « délinquant », un « hors la loi ». Le contestataire n’est qu’un « délinquant » violant le « contrat social » fondant les hiérarchies réelles. De même, par « agressivité émotionnelle », Alain Soral entend, bien évidement, toute contestation radicale de l’ordre social.

Au-delà de la phraséologie, nous ne voyons pas en quoi la position d’Alain Sroal est nouvelle par rapport aux idéologies des partis et des idéologues « bourgeois » traditionnels ? Nous sommes face à une série d’affirmations qui ne sont pas nouvelles en elles-mêmes mais ressassent de vieux arguments de polémique politique éculé et remis au gout du jour par la manie de nouveauté qui tourmente les intellectuelles organiques des classes dominantes menacées.

Certains n’ont pas compris que l’Union des Organisation Islamique de France [UOIF] ouvre grand ses portes à Alain Soral lors de son Congrès annuel [6]. Pourquoi l’organisation islamique qui cherche depuis plusieurs années à devenir « l’interlocuteur respectable » des autorités françaises, se rapprocherait-elle d’un activiste d’extrême droite à la réputation « sulfureuse » ? Pourquoi l’une des principales « têtes pensantes » de l’UOIF, Tareq Oubrou, anime-t-il une conférence organisée par « Egalité et Réconciliation » en compagnie d’Alain Soral [7] ?

La réponse est que l’UOIF et Alain Soral partagent un même projet social réactionnaire visant à s’opposer à toute forme de remise en cause de l’ordre social et de ses hiérarchies. L’UOIF qui représente la bourgeoisie musulmane néo-compradores, cherche à jouer le rôle d’intermédiaire entre la communauté musulmane et l’Etat français afin de retirer les bénéfices de son rôle d’encadrement. Pour cela, l’UOIF s’emploie à promouvoir l’idée de « réussite » individuelle par le travail et à lutter contre toute forme de contestation sociale. Ce rôle de défenseur de l’ordre social au profit des dominants lui est indispensable pour être pleinement reconnue comme « interlocuteur respectable » par l’Etat français.

Ainsi, défendant les intérêts des dominants, l’UOIF fit édicter une « fatwa » pour condamner les révoltes de novembre 2005 et appeler au « calme » [8]. La contestation de l’oppression et de l’exploitation était condamnée par l’organisation islamique au nom du respect de l’ordre.

C’est cette même volonté de préserver l’ordre social et ses hiérarchies qui expliquent ce rapprochement entre Alain Soral et l’UOIF. D’ailleurs ce qui intéresse Soral dans la religion musulmane ce n’est pas son « contenu » propre mais la fonction d’« opium du peuple » qu’il espère lui voir remplir. L’islam, pour Soral, doit prévenir toute forme de contestation sociale et préserver les vieilles hiérarchies : « la culture musulmane, elle, ne produit pas des délinquants drogués et suicidaires, mais des hommes élevés dans des valeurs. Des valeurs de dignité et de respect qui ressemblent beaucoup, finalement, à celles qu’on inculquait aux hommes de France, et à moi-même, avant la déferlante du néo-matriarcat à l’américaine importé par mai 68 » [9]. Evidemment, l’islam conservateur prêché par l’UOIF s’accorde parfaitement avec le projet social de Soral.

De fait, le rapprochement entre Alain Soral et l’UOIF repose sur un projet social commun et non sur une commune opposition au sionisme comme certains pourraient le penser. Toutefois, même sur cette question, l’UOIF et Alain Soral partagent des points de vue relativement proches puisqu’ils ont fait les mêmes efforts pour dépolitiser le soutien à la résistance du peuple palestinien car elle est un facteur de politisation de l’immigration et des banlieues. Soral comme l’UOIF ne veulent pas d’un soutien politique réel à la Palestine car cela va à l’encontre de leur projet social réactionnaire.

L’UOIF a lutté contre ce soutien politique en cantonnant la question de la solidarité avec la Palestine dans la sphère humanitaire et Soral en dénonçant le « communautarisme » et « l’importation du conflit ». Ainsi, se désolidarisant d’Euro-Palestine qu’il avait soutenu dans un premier temps, Soral reprenait la rhétorique des dominants voulant casser le mouvement de solidarité avec la Palestine, en dénonçant « l’importation du conflit » : « Importer la seconde Intifada en banlieue, faire passer aux yeux de l’ensemble du peuple de France, les Français de première génération originaire d’Afrique et du Maghreb pour la cinquième colonne du Hamas, est-ce vraiment un service à leur rendre ? » [10]. Cette rhétorique néo-conservatrice est, en tous points, éloignée des positions des militants des banlieues qui sont engagés dans le soutien à la Palestine depuis des années.

La très forte mobilisation de l’immigration et des banlieues après l’attaque sioniste de Gaza en décembre dernier a obligé l’UOIF et Soral à réviser leur position vis-à-vis du soutien à la Palestine. Face à cette forte mobilisation qui participe d’un processus plus large de volonté d’action politique pouvant aboutir à la remise en cause de l’ordre social, les dominants qui hier se détournaient de tout soutien actif à la Palestine, ont été obligés de prendre en compte la colère populaire. Pour canaliser cette colère, les habituels hymnes à la « paix », visant à annuler les antagonismes, ont été ressortis alors que face à l’oppression seule la résistance libère.

De même, pour canaliser la colère populaire et pour ne pas se couper totalement de la population musulmane, l’UOIF décida de descendre dans la rue. A la fin du mois de janvier, Alain Soral et son association « Egalité et Réconciliation » firent de même avec la volonté de récupérer un mouvement de solidarité avec la Palestine dont ils étaient totalement absents.

Pour endiguer toute forme de contestation et de remise en cause des hiérarchies sociales qui sont portées en germe dans le mouvement de solidarité avec la résistance du peuple palestinien, aujourd’hui Alain Soral et l’UOIF mettent au cœur de leur discours la question de la lutte contre le sionisme et la Palestine : grand artisan de la dépolitisation du soutien à la Palestine, Fouad Alaoui consacre l’essentiel de son allocution au Congrès annuel de l’UOIF à la Palestine ; Alain Soral qui condamnait Euro-Palestine et dénonçait « l’importation du conflit », souhaite se présenter aux prochaines élections européennes sur une liste « anti-sioniste ». Ces retournements de positions, ne sont qu’une manœuvre des dominants visant à annuler la résistance des dominés, de l’immigration et des banlieues, et à la faire dévier vers des positions idéalistes sans prise sur la réalité sociale.

L’intitulé de l’association d’Alain Soral, « Egalité et Réconciliation », est le symbole même de cette volonté d’annuler la résistance des dominés, de l’immigration et des banlieues, et de la faire dévier. En effet, l’« égalité » prônée par Soral n’est qu’une égalité formelle[11], « bourgeoise », qui n’a jamais été en mesure d’assurer une égalité réelle. Cette « égalité » formelle n’est qu’une manière pour les dominants de garantir, au-delà des rapports d’oppressions et d’exploitations concrets, une égalité abstraite. Face au inégalités concrètes, le discours « bourgeois », celui d’Alain Soral, propose une « égalité », toute théorique, devant la loi afin d’annuler la résistance du dominé. De même, la « réconciliation » qui est une forme de reconnaissance des contradictions existantes entre les oppresseurs et les opprimés, vise à annuler la résistance du dominé à qui les dominants proposent la fin des « hostilités » sans modifier les rapports sociaux à la base de la résistance du dominé. Ainsi, dans le discours d’Alain Soral, comme dans celui de tous les dominants, les antagonismes apparents ne sont aux mieux que des différences, des contradictions non antagoniques, c’est-à-dire conciliables. L’imaginaire social d’Alain Soral, reprenant les invariants de celui de tous les dominants, est un mythe qui tend à dissoudre les éléments antagoniques opposant le dominant au dominé et qui tend à refouler la résistance de ce dernier.

Si, sur le plan des idées, nous méprisons la rhétorique fascisante d’Alain Soral, tactiquement nous devons prendre en compte l’influence réelle qu’elle a sur les banlieues. Cette influence risque d’annuler, au moins partiellement, la résistance des banlieues et de détourner des luttes réelles de certains de ses éléments les plus actifs vers des combats purement idéalistes et individualistes : volonté d’intégration-assimilation, défense du « patriotisme » français ou de « réussite » purement individuelle. Ce rapprochement est donc directement tourné contre ceux qui ont intérêt à contester les hiérarchies sociales, et seuls les dominants en tireront les bénéfices.

Mais le rapprochement entre Alain Soral et l’UOIF doit aussi être considéré comme un signe de faiblesse des dominants qui ne sont plus en mesure d’exercer leur hégémonie en utilisant les satellites associatifs de la social-démocratie. De fait, les dominants sont obligés de recourir à des organisations réactionnaires et fascisantes pour canaliser la résistance des banlieues. La crainte des dominants de perdre leur hégémonie sociale, politique et idéologique favorise le développement du fascisme. Cela est le signe que les dominants n’ont plus la force idéologique de contenir la dissidence qui se manifeste en banlieue et qu’ils sont obligés de recourir à l’ultime arme leur permettant de défendre leurs privilèges sociaux et « raciaux », le fascisme.

Youssef Girard

[1] Jackson Georges, « Du recul », 1971

[2] Gramsci Antonio, Textes, Paris, Ed. Sociales, page 188

[3] Alain Soral, 29 janvier 2004, oumma.com

[4] Alain Soral, 13 septembre 2004, Guysen Israel News

[5] Ibid.

[6] Tenu du 10 au 13 avril au Bourget.

[7] Conférence intitulée « Musulman et patriote » organisé à Bordeaux 18 avril 2009.

[8] Edicté le 6 novembre 2005 par « Dar el Fatwa » organe dépendant de l’UOIF

[9] Alain Soral, 29 janvier 2004, oumma.com

[10] Alain Soral, « Pourquoi je me désolidarise d’Euro-Palestine », 3 septembre 2004

[11] En 2004, Soral affirmait vouloir travailler « au respect et à l’application de la loi républicaine, rien que la loi républicaine, mais toute la loi républicaine ». « Pourquoi je me désolidarise d’Euro-Palestine », 3 septembre 2004


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