Irlande : abus sexuels « endémiques » dans les écoles catholiques

jeudi 21 mai 2009.
 

Les abus sexuels étaient « endémiques » dans les institutions pour garçons dirigées par l’Eglise catholique à partir de la fin des années 1930, a affirmé mercredi une commission d’enquête irlandaise dans un rapport qui dénonce le « silence » des autorités religieuses.

« Les abus sexuels étaient endémiques dans les institutions pour garçons », écrivent les auteurs du rapport, publié après neuf ans de travaux et plusieurs milliers de victimes interrogées. « Les autorités religieuses savaient que les abus sexuels étaient un problème persistant dans les institutions religieuses masculines », selon ce document de 2.500 pages.

Le rapport accuse l’Eglise catholique de « ne pas avoir écouté les personnes qui se plaignaient d’abus sexuels survenus par le passé ou de ne pas les avoir crues en dépit de preuves recueillies dans des enquêtes policières, de condamnations criminelles ou de témoignages ».

Après neuf ans d’enquête auprès de plusieurs centaines d’écoles et institutions de l’île et plus d’un millier de victimes interrogées, la Commission créée par le gouvernement en 2000 a rendu un rapport de 2.500 pages qui accable l’Eglise catholique, toute-puissante dans l’île, mais également le ministère de l’Education.

« Les abus sexuels étaient endémiques dans les institutions pour garçons », écrivent les auteurs du rapport, précisant que les filles étaient quant à elles « soumises à des abus sexuels (qui) n’étaient pas érigés en système ».

Pendant la période concernée, de 1936 à la fin des années 90, « les autorités religieuses savaient que les abus sexuels étaient un problème persistant dans les institutions religieuses masculines ». L’Eglise catholique « n’a pas écouté les personnes qui se plaignaient d’abus sexuels survenus par le passé ou ne les a pas crues en dépit de preuves recueillies dans des enquêtes policières, de condamnations criminelles ou de témoignages ».

Les abus sexuels commis par des membres des ordres religieux étaient « rarement portés à l’attention du ministère de l’Education par les autorités religieuses en raison d’une culture du silence », regrette la Commission d’enquête. « Quand le personnel religieux commettait des abus, le problème était plutôt traité avec des procédures disciplinaires internes et avec la loi canonique. La Gardai (police irlandaise, ndlr) n’était pas mise au courant », ajoute-t-elle, soulignant que « des hommes ayant déjà commis des abus sexuels quand ils étaient membres d’ordres religieux continuaient à exercer en tant qu’enseignants ». Omertà

« Je suis profondément désolé et j’éprouve une honte extrême », a déclaré dans un communiqué le primat d’Irlande, le cardinal Sean Brady, assurant que la hiérarchie catholique « restait déterminée à faire tout le nécessaire pour faire de l’Eglise un lieu de sécurité, de vie et de joie pour les enfants ».

Le rapport stigmatise également le ministère de l’Education qui, « dans les rares occasions où il était informé, se rendait complice du silence ». Réagissant pour le compte du gouvernement, le ministre de l’Education, Batt O’Keeffe, a présenté sa « sincère et profonde compassion » aux victimes, s’engageant à « tirer les leçons du passé ».

L’une des victimes, John Kelly, a quant à elle estimé que « rien dans ce rapport n’était significatif en termes de justice rendue ».

Un organisme mis sur pied par le gouvernement parallèlement à la commission d’enquête a déjà versé près d’un milliard d’euros de dédommagements à 12.500 des quelque 14.500 victimes qui se sont manifestées.

Les pensionnaires étaient « dénigrés et humiliés quotidiennement » et leurs draps souillés montrés en public. Les fratries étaient séparés et les contacts avec les familles limités. Les enfants souffraient « souvent de la faim ». Les logements étaient glacials, spartiates et lugubres ». Les sanitaires étaient rudimentaires.

Outre les abus sexuels, le rapport dénonce également de nombreux autres mauvais traitements, qu’ils aient été physiques, tels « des punitions corporelles sévères », ou mentaux. Les enfants étaient soumis à des « pratiques humiliantes » qui faisaient régner un « climat de peur ».

Voici les principales conclusions de ce document de 2.500 pages.

ABUS SEXUELS – « Les abus sexuels étaient endémiques dans les institutions pour garçons. (…) Dans les écoles examinées, l’étude a révélé un niveau important d’abus sexuels sur des garçons allant d’attouchements déplacés et de caresses à des viols avec violence.

Les auteurs des abus ont pu continuer sans être inquiétés pendant de longues périodes ».

VIOLENCES PHYSIQUES – « Un climat de peur, créé par des punitions arbitraires, excessives et fréquentes, régnait dans la plupart des institutions et toutes celles pour garçons. Les enfants vivaient dans la terreur quotidienne de ne pas savoir d’où viendrait la prochaine correction ».

– Dans les écoles pour garçons, « les punitions corporelles étaient privilégiées pour les manquements à la discipline. Des corrections prolongées et excessives étaient infligées de façon à faire le plus mal possible, au su des autorités éducatives ».

HUMILIATIONS – « Des témoins ont raconté avoir été dénigrés et humiliés quotidiennement. Des pratiques humiliantes comme l’inspection des sous-vêtements ou l’exposition en public des draps souillés ou mouillés étaient menées dans tout le système des écoles professionnelles ».

CONDITIONS DE VIE – « Les enfants avaient souvent faim et la nourriture n’était pas adaptée, inmangeable ou mal préparée dans de nombreuses écoles. Des témoins ont vu (des élèves) chercher à manger dans des poubelles ou en prenant de la nourriture pour animaux ».

– « Les locaux étaient froids, spartiates et lugubres ».

RESPONSABILITE DE l’EGLISE ET DE l’ETAT – « Les autorités religieuses savaient que les abus sexuels étaient un problème persistant dans les institutions religieuses pour garçons pendant la période concernée. Néanmoins, chaque cas d’abus sexuel était traité de façon isolée et en secret par les autorités, et rien n’a été tenté pour remédier à la nature systémique du problème ».

– « Les abus sexuels par des membres d’ordres religieux étaient rarement portés à l’attention du ministère de l’Education par les autorités religieuses en raison d’une culture du silence sur la question ».

– « Le ministère de l’Education n’a pas répondu de façon appropriée aux plaintes pour abus sexuels. Ces plaintes étaient généralement rejetées ou ignorées. Une enquête approfondie (…) aurait dû être menée systématiquement ».


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message