Non, Bernard Guetta, le salariat n’est pas mort

dimanche 21 juin 2009.
 

Quel réveil sur France inter : Bernard Guetta explique pourquoi la gauche est morte, en gros parce qu’il n’y a plus de mineurs, de métallos et de grosses industries… et « la crise », comme l’a titré Libé, « profite à la droite » et « ne sert pas la social démocratie ». Entassement de mauvais clichés !

Le coup des masses ouvrières qui n’existent plus, Guy Sorman l’a fait, il y a vingt ans déjà…et même Serge Mallet en 1967 ! Il paraît qu’il n’y aurait plus jamais d’assemblée générale à main levée sur le parvis des corons ! Plus jamais de grève générale ! Ont-ils ouvert les yeux en mai 1968, 76, 86, 94, 95, 2003, 2006 ? Si nous avons encore des « amortisseurs sociaux qui nous protègent » (selon la succulente expression de François Fillon) c’est grâce à ces mouvements répétés du salariat.

Qu’ils prennent garde ! Ne voient-ils pas qu’en mai 68 le salariat était environ 70 % de la population active et qu’aujourd’hui le salariat est environ 93 % de la population active ? Les jeunes sont des salariés en formation. Les chômeurs sont des salariés temporairement privés d’emploi. Les retraités vivent au jour le jour grâce aux cotisations des salariés. Le salariat n’a jamais été aussi fort.

Ce ne sont plus les « coups de grisou » qui tuent mais les « AVC » qui frappent indistinctement ouvriers (6 millions) employés ( 9 millions) cadres (3,5 millions), tous les salariés n’ont que leur force de travail à vendre, les écarts de salaires sont réduits, bloqués, compactés, les CDI font de 85 % à 97 % des contrats et ils durent plus longtemps, cols blanc et cols bleus sont mélangés. Le salariat n’a jamais été aussi homogène, même s’il ne le sait pas et si les discours comme celui de Guetta contribuent à empêcher qu’il le sache !

Et si la crise ne sert pas la social-démocratie, c’est parce que celle-ci ne sait pas s’en servir !

C’est-à-dire que tout devrait pousser les peuples à gauche, mais les chefs de la gauche sont si peu à la hauteur que ce phénomène de masse, logique dans la période où nous sommes, ne se produit pas : mais ce n’est pas la droite, c’est l’abstention qui l’emporte comme le 7 juin. Sarkozy président en exercice a obtenu 10,5 % des voix des électeurs inscrits dans son pays : il devrait être chassé ! Lui, qui vient de détruire par sa politique 175 000 emplois en quelques mois, qui fait 3000 chômeurs de plus par jour, qui supprime 30 000 emplois publics chaque année depuis 4 ans, qui vise à prolonger « les seniors » au travail alors qu’il y a 23 % de jeunes qui cherchent un emploi, qui fait faire à la fois des heures supplémentaires et du chômage partiel au lieu de réduire la durée du travail !

Alors quand France inter fait parler les générations socialistes les unes contre les autres sur le thème de la « mort du PS », on a de quoi bondir de l’abêtissement du journalisme et de l’abaissement organisé de la politique. Comme si c’était affaire de génération ! Plus stupide, tu meurs, en effet. Il vaut mieux des sexagénaires bien à gauche expérimentés, que des quadras jeunes coqs archi droitiers ! Et Delphine Batho met tout cela sur le dos des courants : ce serait à se décourager de l’intelligence des « jeunes générations » si c’était tout ce qu’elles ont à dire. Car sans la proportionnelle, sans le droit de s’organiser sur des plateformes d’idées, le PS, oui, serait mort depuis longtemps : ce sont les courants et le droit à la proportionnelle qui le sauvent encore !

On peut toujours espérer grâce au débat d’idées le ré orienter à gauche. C’est le seul parti en Europe qui a encore ces règles démocratiques et c’est pour cela qu’il est encore un peu plus à gauche que le reste du PSE. Tuer le débat à la proportionnelle, remplacez-le totalement par des écuries présidentielles, et c’en est fini.

Gérard Filoche


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