8 juillet 2009 : Martine Billard (députée) démissionne des Verts et tient une conférence de presse avec le PG

lundi 10 juillet 2017.
 

Martine Billard a annoncé ce matin 8 juillet 2009 son départ des Verts. Marquant son intérêt pour le projet porté par le Parti de Gauche, elle a tenu une conférence de presse commune avec Jean-Luc Mélenchon et Marc Dolez.

A titre personnel, cette nouvelle me comble de joie : encore trois ou quatre succès de ce type et nous aurons reconstitué une force politique apte à préparer la revanche sur Sarkozy Parisot, apte à disputer aux Verts et au PS l’hégémonie sur la gauche.

Nos lecteurs ne doivent pas sous-estimer l’importance de cet évènement.

A) Martine Billard quitte les Verts sur un texte qui vaut son pesant d’or pour l’avenir

Dans les périodes historiques où l’histoire hésite entre réaction et progrès humain, il est fréquent que des courants politiques anticapitalistes régressent. Or, le texte par lequel Martine Billard démissionne des Verts me paraît parfait quant à sa cohérence politique, d’un point de vue écologiste comme d’un point de vue socialiste :

J’ai décidé de démissionner aujourd’hui d’une organisation dont le projet n’a plus que de lointains rapports avec celui auquel j’avais adhéré il y a 16 ans. A cela, il y a 3 raisons majeures :

1/ l’incompréhension des réalités du monde du travail

Du fait de leur composition sociale (très peu de salariés du secteur privé en dehors des secteurs de la communication et de l’informatique) et de leur vision restreinte de l’écologie, les Verts se préoccupent peu des questions sociales et encore moins du travail, en dehors de déclarations généralistes. A l’exception du champ environnemental, ce sont toujours les mêmes militants, ceux qu’on appelle la « gauche des Verts », qui sont présents depuis des années sans réel soutien du parti Verts et souvent même en opposition avec d’autres militants pour qui il est incongru de perdre son temps avec le social lorsqu’on est écologiste. Les Verts apposent leur signature sur beaucoup d’appels à mobilisations ou de déclarations de soutien mais, concrètement, sont très peu impliqués dans les collectifs et réseaux associatifs non-environnementaux et encore moins syndicaux.

2/ un parti de plus en plus institutionnel

J’ai rejoint les Verts en 1993 pour l’écologie, le féminisme et la politique autrement. C’était un parti bouillonnant, parfois imprévisible mais toujours vivant. Ce n’est plus le cas aujourd’hui où tout débat véritable est étouffé au profit d’un seul objectif, obtenir le plus d’élus possibles. Certains appellent cela du pragmatisme, malheureusement cela tourne souvent à l’opportunisme.

La politique autrement a aussi été rejetée au rang des vieilleries à jeter au rebut : le cumul des mandats s’étend et se revendique (la moitié des parlementaires nationaux, bon nombre de conseillers régionaux). La course aux postes est constante et manifestement déjà relancée par le récent succès d’Europe Ecologie. La démocratie interne s’est réduite à une peau de chagrin et le fonctionnement clanique imprègne beaucoup de décisions : la transparence est en net recul et nombre de demandes d’éclaircissements y compris au sein des instances de délibération des Verts (Conseil national interrégional) restent lettre morte.

3/ l’effacement du clivage droite/gauche

J’ai toujours été une femme de gauche et je le reste. Je sais que certains considèrent cela comme dépassé, archaïque, ringard. C’est vrai que les partis de gauche sont souvent désespérants et incapables de comprendre les enjeux du 21ème siècle. Mais, à droite, Nicolas Sarkzy est porteur d’un projet libéral-autoritaire pleinement assumé et il faudrait avoir honte d’être de gauche ?

Lorsque la gauche se délite, comme dernièrement en Italie, c’est la droite dure et populiste qui occupe l’espace politique, et non le centre ou l’écologie. J’ai été élue députée en 2002 sur la base d’une candidature écologiste soutenue par le Parti socialiste au premier tour et par l’ensemble des forces de gauche au second tour. J’ai été réélue en 2007 dans une configuration similaire (Verts-PS-PRG, au premier tour et toute la gauche au second).

Je ne peux donc me réjouir de la crise de la gauche alors qu’aucune force de gauche n’est encore prête à prendre le relais pour proposer un nouveau projet politique de transformation sociale, écologique et démocratique à la hauteur des réponses à apporter à la crise globale du système à l’échelle de la planète.

Mes convictions écologistes n’ont pas changé, elles se sont même renforcées. Mais justement, parce que l’urgence est de plus en plus grande, je ne peux me résoudre à une simple gestion environnementale du système, toute positive qu’elle soit, sans que cela ne s’articule à un projet global clair. Pour affronter la crise actuelle - économique, sociale, démocratique et écologique -, il faut apporter des réponses qui ne se contentent pas de changements à la marge. Les Verts n’ont plus cette audace : d’un parti pour la transformation de la société, ils sont devenus un parti d’accompagnement.

Les résultats des européennes constituent certes une bonne nouvelle pour l’écologie mais je suis en désaccord avec le projet politique d’Europe-Ecologie, tel que confirmé ces derniers jours par ses animateurs. En effet, je ne peux me retrouver dans un rassemblement qui entretient la confusion quant au clivage droite/gauche, au point, pour certains, de prôner un élargissement du rassemblement jusqu’à des environnementalistes membres du gouvernement UMP ou participant à des exécutifs municipaux de droite.

J’ai donc décidé de faire le pari de construire ailleurs la synthèse entre le social et l’écologie pour laquelle je me suis battue pendant 16 ans chez les Verts. C’est pourquoi, avec Paul Ariès, objecteur de croissance et directeur du journal Le Sarkophage, nous lançons un appel aux écologistes de gauche afin d’oeuvrer à l’évolution du Parti de Gauche en ce sens, en participant à la préparation de son congrès programmatique de fin d’année.

Face à l’hégémonie de la droite en Europe, c’est une force de gauche et écologiste qui est nécessaire, et non une force centriste.

Martine Billard

Paris, le 8 juillet 2009

Nos lecteurs ne doivent pas sous-estimer l’importance de cet évènement pour une autre raison

B) La logique des fusions politiques

Dans les périodes où l’histoire hésite entre réaction et progrès humain, il est fréquent que des courants politiques anticapitalistes se divisent.

Or, le rapprochement de la gauche des Verts avec le Parti de Gauche, d’une part contribue à une clarification politique du courant écologiste politique historique, d’autre part symbolise un processus possible d’union des courants anticapitalistes.

L’appel lancé tout en démissionnant des Verts marque la possibilité d’un accord politique de fond. Il insiste sur l’impasse du capitalisme mondial dans son rapport à la planète et sur l’urgence d’une réponse progressiste tant en France qu’en Europe et au niveau mondial. Notre accord est total sur ces points.

Appel pour un Parti de Gauche écologiste (par Paul Ariès, Martine Billard et 120 premiers signataires)

Cet appel insiste sur la nécessité de construire une force politique nouvelle. Mieux, l’accord pour participer à un processus de congrès constituant commun : " Il n’y aura donc pas d’alternative crédible tant qu’une nouvelle construction politique ne prendra pas en compte les exigences d’une transformation à la fois sociale et écologiste... L’écologie ne va pas de soi, elle n’est pas une demi mesure et doit compter à part entière dans l’identité – et donc dans le nom-même – de cette force politique nouvelle. Le Parti de Gauche doit franchir ce pas pour construire une dynamique collective de convergences qui dépasse de simples ralliements individuels.

Il a décidé de tenir en fin d’année un congrès refondateur et propose pour cela un comité de co-organisation. Nous prenons nos responsabilités en rassemblant des écologistes antilibéraux et des militants de gauche antiproductivistes pour participer à cette refondation vers un parti de gauche écologiste."

C) La trajectoire politique de Martine Billard représente une garantie quant à ses convictions

Toute organisation politique a besoin de jeunes, souvent porteurs d’un enthousiasme flamboyant non obscurci par les défaites passées. Cependant, le combat politique ne demande pas seulement de l’enthousiasme, il requiert beaucoup de convictions trempées par l’expérience : face au capitalisme, face à la droite qui protège ce capitalisme, face aux puissants canaux de l’idéologie dominante, face à l’extrême droite à l’affût, face aux directions social-démocrates qui souvent complètent le dispositif capitaliste de tromperie des masses.

C’est sur plusieurs dizaines d’années que l’on peut le mieux juger de la personnalité réelle des dirigeants politiques. Or, Martine Billard fait partie de celles et ceux en qui j’ai confiance quant à leur attachement profond du côté du peuple et non de la classe possédante, du côté des objectifs d’émancipation et non de la seule ambition, du côté de la défense réelle de l’environnement et non de l’utilisation tactique du thème environnemental.

Son action militante a commencé dans les années 68 au sein des Comités d’Action lycéens, une bonne école à mille lieues de la politique politicienne. Elle adhère à l’OCT (organisation Communiste des Travailleurs), fusion d’une minorité ayant scissionné de la LCR (Révolution) et de la GOP (scission gauche du PSU).

Dans le même temps, elle est active au sein du mouvement féministe, contre l’énergie nucléaire, contre les dictatures militaires d’Amérique latine.

Après l’explosion de l’OCT (1981), elle est très présente dans la défense des droits (logement, santé...) et sur le terrain internationaliste (solidarité avec les Palestiniens...).

En 1993, elle adhère aux Verts, contribuant à animer son aile gauche (La Gauche écologiste). Elle est consciente du glissement de cette organisation sur une trajectoire politicienne qui abandonne de façon importante la dimension sociale anticapitaliste et qui utilise l’environnementalisme comme thème électoral plus que comme bataille posant à l’humanité la question de sa survie.

D) L’apport personnel de Martine Billard

En quittant les Verts et en travaillant à présent avec le Parti de Gauche sur l’objectif de construire une force nouvelle capable de contribuer de façon décisive à une alternative de gauche anticapitaliste pour notre peuple et pour l’Europe, Martine Billard nous apporte un plus très important :

- par son groupe

- par son statut de députeé et par la tribune que représente l’Assemblée nationale

- par sa crédibilité sur le combat écologiste

- par ses qualités militantes largement vantées depuis longtemps

- par sa capacité à s’intégrer dans des projets collectifs

CONCLUSION

Ce soir, je crois un peu plus en la possibilité pour le Parti de Gauche de servir de point d’appui pour une recomposition de l’autre gauche et pour que celle-ci devienne majoritaire à gauche.

Jacques Serieys les 8 et 9 juillet 2009

Ci-dessous quelques articles concernant cet évènement politique :

Conférence de presse de Martine Billard, députée de Paris, démissionnaire des Verts, et Jean Luc Mélenchon à l’Assemblée nationale

Martine Billard décide de quitter le parti des Verts et de participer au Congrès fondateur du PG, chargé d’adopter son programme

Europe Ecologie : Billard démissionne des Verts et se rapproche de Mélenchon (article Le Monde)

Après le renfort de Martine Billard : la vie en vert... Yes !!!

Refusant une dérive vers la droite des Verts, Martine Billard participera au congrès de la fondation programmatique du Parti de gauche (article de L’Humanité)

Martine Billard au PG UNE ANNONCE PAS COMME LES AUTRES

Écologie politique : La députée Verte Martine Billard rejoint le Parti de Gauche

Petits remous à la gauche des Verts troublée par le positionnement d’Europe Ecologie (article du Monde)

"Chez Les Verts, des compromis, il y en a eu beaucoup trop" (interview de Martine Billard)

"L’écologie et la gauche" par Martine Billard, députée de Paris, lors du Remue-méninges du PG


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