Affrontements sanglants en Chine entre forces de l’ordre et minorité ouigour

mercredi 8 juillet 2009.
Source : L’Humanité
 

Au Xinjiang, les affrontements entre membres de la minorité ouïgours et la police ont coûté la vie à 140 personnes, selon les autorités, et fait 816 blessés. La police est à la recherche de 90 personnes accusées d’être responsables des émeutes.

« L’ordre partiellement rétabli à Urümqi », écrivait hier le Quotidien du peuple, le journal officiel chinois. Dimanche, les affrontements entre membres de la minorité ouïgours et forces de l’ordre ont fait 140 morts à Urümqi, capitale de la région autonome ouïgours du Xinjiang. Selon le chef régional de la police, Liu Yaohua, 57 corps ont été retrouvés dans les rues d’Urümqi. Les autres personnes auraient succombé à l’hôpital. Il y aurait 816 blessés.

Les autorités n’ont pas précisé la part de manifestants, de policiers ou de passants dans ces chiffres. Hier, les pompiers éteignaient les derniers incendies, qui auraient touché 203 magasins et 14 maisons. 261 véhicules ont été retournés. Le nombre de manifestants est encore difficilement estimable. Les autorités parlaient initialement de quelques centaines de personnes. Peu crédible au vu du nombre de victimes. Des associations ouïgours de l’étranger parlaient, elles, de 3000 manifestants.

Des centaines de personnes ont été arrêtées et la police annonçait être encore à la recherche de 90 responsables d’émeutes. Une centaine de responsables « ethniques » de régions voisines ont gagné la capitale pour aider à l’interrogatoire des suspects. Si le nombre de victimes était confirmé, on aurait au Xinjiang « l’incident le plus grave depuis la fin de la Révolution culturelle » (1966-1976), a déclaré Nicholas Bequelin, de Human Rights Watch.

Dans un discours télévisé, le président régional Nur Bekri a expliqué que les émeutes faisaient suite à un affrontement entre Ouïgours et Han (l’ethnie majoritaire en Chine) à Guangdong, dans le sud de la Chine, le 26 juin. Des ouvriers ouïgours avaient été victimes d’un véritable lynchage, après que le viol d’une jeune fille han eut été attribué à l’un des leurs dans une usine de jouets. Deux Ouïgours ont trouvé la mort dans ce lynchage. 118 personnes ont été blessées, dont 79 Ouïgours.

Selon les autorités, les manifestants armés de couteaux, de briques et de pierres s’en sont pris à des membres des Han, tandis que certains opposants à Pékin avancent que la police aurait tiré sur une manifestation pacifique qui réclamait justice pour ses conationaux de Guangdong. Le Xinjiang, 20 millions d’habitants, est une région autonome (comme le Tibet) qui couvre un sixième de la surface de la Chine et est peuplée à majorité d’Ouïgours. 45% des habitants appartiennent à cette ethnie turcophone et musulmane. 41 % sont des Han, l’ethnie majoritaire en Chine, arrivés récemment. En 1953, ils n’étaient qu’un demi-million. Ils sont 7,5 millions aujourd’hui.

Malgré une indépendance éphémère, de 1930 à 1949, sous le nom de Turkestan oriental, un moment dans le giron soviétique, le Xinjiang est chinois depuis 1884. Certains groupes rêvent de reconstituer ce Turkestan et ont commis des attentats par le passé. Trois jours avant le lancement des jeux Olympiques, en août 2008, un attentat attribué au Parti islamique du Turkestan oriental avait fait 16 morts. Pékin attribuait hier les émeutes au Congrès mondial ouïgours, dirigé en exil par Rebiya Kadeer. Le Congrès aurait incité à la violence en appelant ses sympathisants à se montrer « plus braves » et à faire « quelque chose de gros ».

Gaël De Santis


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