« Je suis prof et je désobéis" Il n’y en a pas un sur cent, et pourtant ils existent... les « désobéisseurs » !

dimanche 12 juillet 2009.
 

Ce mouvement répond aux décisions incompréhensibles du précédent ministre : diminution historique du temps de classe, nouveaux programmes très années 30, mise en place d’une aide personnalisée (30 minutes par jour) à la place des réseaux d’aides spécialisées.

Si de nombreux enseignants n’en font qu’à leur tête dans leur coin, d’autres – près de 3.000 – ont choisi d’afficher publiquement leur désobéissance. Attention : ils font bien classe mais s’inspirent des programmes de 2002 qui avaient fait consensus (Lang-Ferry). Loin d’être d’aigris conservateurs, ils réclament un véritable débat national sur l’éducation.

Ainsi, Alain Refalo, (Colomiers 31), a mis en place, avec le soutien des parents, un atelier théâtre pour tous ses élèves sur le temps d’aide personnalisée (c’est une activité autorisée). Depuis, il a perdu 19 jours de salaire et passera demain en commission disciplinaire avec le risque d’être déplacé. Oui, vous avez bien lu : il perd des jours de salaire pour avoir pris toute sa classe et non une partie !

Bastien Cazals, auteur du petit livre revigorant auquel j’emprunte le titre, a déjà perdu 36 jours de salaire pour les mêmes raisons. On vient de lui retirer sa fonction de directeur pour ne pas avoir appliqué Base Elèves, le fichage généralisé des élèves. D’autres enseignants sont ainsi convoqués comme Erwan Redon de Marseille. Hallucinante brutalité d’une administration qui recrute ses profs à bac +5 mais leur demande de n’avoir aucune compétence d’analyse et de décision.

On m’objectera que dans le « privé », désobéir c’est prendre le risque d’être viré. Oui, et dans une dictature c’est prendre le risque de se faire tuer ! L’important est de savoir qui a raison. Car s’ils sont tenus au devoir de neutralité en classe et au secret professionnel, les enseignants n’ont pas d’obligation de réserve (cf. Anicet le Pors, loi de 1983) et sont des citoyens de plein droit qui n’ont pas à être inquiétés pour leurs opinions (article 6 Déclaration des droits de l’Homme).

De plus, il y a deux poids deux mesures. Un autre désobéisseur, mais du genre archaïque, se moquait pas mal en son temps des évolutions attendues (pédagogie différenciée, politique des cycles, projets, etc.). Eh bien ce collègue breton, Marc Le Bris, a eu droit non pas à une sanction mais à la médaille de chevalier de l’ordre national du mérite remise par X. Darcos en personne ! Etonnant, non ?

Il est temps de dépasser la vision de Michel Debré dans les années 50 pour qui : « le fonctionnaire est un homme de silence, il sert, il travaille, il se tait ». Car on peut aussi se réjouir de voir que la fidélité à la mission d’éducation anime encore sous diverses formes une profession étouffée qui semble parfois à bout de souffle.

Sylvain Grandserre

1 Bastien Cazals, Je suis prof et je désobéis, éditions indigène 2009, 3 €


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