Les émissions télé bidonnent les visites d’usine de Sarkozy, mâchant son chewing-gum devant des figurants choisis pour leur petite taille (4 articles)

mardi 15 septembre 2009.
 

Pour visionner le reportage de la RTBF ( belge), cliquez sur le titre en page d’accueil puis sur l’adresse URL portée en source (couleur rouge).

1) Le chewing-gum de Sarkozy dans l’usine Faurecia

Les médias ont crié au scandale quand ils ont appris les critères de sélection des employés de Faurecia figurant derrière Sarkozy. Mais pour Philippe Bilger, magistrat et blogueur associé, le problème est ailleurs. Dans la bouche du président.

L’obligation de réserve est à la fois une chance et une entrave. Si elle m’empêche d’écrire sur les dernières péripéties de l’affaire Clearstream, elle me contraint à demeurer dans les liens d’analyses acceptables pour un avocat général exerçant une activité soutenue de blogueur sur des thèmes somme toute sensibles.

L’actualité a concentré ses feux, sur tous les sites d’information avec une vidéo à la clé, sur ce qui à première vue pouvait apparaître secondaire : les modalités de la visite du président de la République à l’usine Faurecia de Caligny (Orne), où il était venu rencontrer les salariés de l’équipementier automobile. Cette focalisation est née d’un reportage de la télévision belge donnant la parole à une salariée affirmant avoir été présente seulement à cause de sa petite taille. Il laissait entendre que cette sélection de personnes en raison de leur taille avait été systématique et qu’elle relevait non pas de Faurecia mais de la présidence de la République. Celle-ci a jugé l’accusation absurde et grotesque, un syndicaliste l’a confirmée mais Frédéric Lefebvre, homme d’un grand courage intellectuel (il l’a démontré à Mots croisés en face d’un responsable CGT récemment condamné) a, pour l’UMP, dénoncé cette polémique selon lui inepte.

Benoît Hamon a affirmé que cet incident révélait la complaisance des chaînes d’information françaises qui n’avaient parlé de rien. Fallait-il évoquer cette organisation du voyage présidentiel ? A partir de quel moment la préparation nécessaire du déplacement du chef de l’Etat, sur le plan de la sécurité, devient-elle véritablement une information méritant d’être communiquée ? Il est évident que si les dispositifs mis en place ne sont fondés que sur le rituel républicain, plus ou moins alourdi au gré des présidents, il est inutile d’en faire état. Si en revanche ils font place, pour des raisons intimes et personnelles, à des configurations crées en quelque sorte « sur mesure » pour le président en exercice, il y a là une nouveauté qui peut être qualifiée d’information car susceptible de renseigner sur la personnalité de notre président. Toujours est-il qu’en l’occurrence seule la télévision belge ayant communiqué sur cette affaire, comme pour se rattraper on ne traite plus que de cela en France (avec quelques autres nouvelles !) d’une manière un tantinet obsessionnelle. On a l’impression de mauvais élèves qui veulent en faire trop ensuite pour se racheter. Cela devient, à force, ridicule. Ridicule aussi, car je n’ose imaginer le président lui-même derrière ce « bidonnage », la volonté de « ses » communicants de prétendre éviter les effets d’une inégalité de taille entre d’autres et lui-même. La conséquence perverse en est qu’au lieu de rendre encore plus scandaleux les sarcasmes et les attaques sur l’apparence physique, cette réplique bêtement anticipée met l’accent sur ce qui ne devrait même pas être relevé dans un pays civilisé, car c’est clairement le degré zéro de la dérision politique.

Pour ma part, j’ai été beaucoup plus frappé, en regardant cette vidéo, par le fait que durant un certain temps, le président de la République mâchait un chewing-gum lors de ses échanges avec la Direction de Faurecia. D’abord, je n’ai pas voulu le croire. Je vais m’abstenir des comparaisons à la longue fatigantes avec ses prédécesseurs mais si je n’ai pas rêvé, c’est tout de même une première dans la Ve République ! Ce comportement si quotidien, si innocent mais si peu approprié publiquement au maintien d’un chef d’Etat me semble infiniment plus étonnant que toutes les manipulations réelles ou prétendues pour la taille des assistants, car personne d’autre que le président n’en est responsable. Qui aujourd’hui serait prêt à s’émouvoir parce que son interlocuteur mastiquerait en s’adressant à lui, ne le regarderait pas dans les yeux ou grommellerait de manière inaudible en suçant le tuyau de sa pipe ? On a admis non seulement que cette politesse élémentaire ne pouvait plus, au fil du temps, être respectée mais que ce délitement était un bien. Offrir à autrui une parole, une attitude gangrenées par la négligence devient l’habitude d’un monde qui ne sait plus très bien ce qu’est le pur affrontement des regards et l’échange de paroles concentrées sur elles-mêmes. Je suis d’autant plus sensible à ce chewing-gum, si j’ose dire, qu’à plusieurs reprises, en cour d’assises, à des jurés, à des témoins parfois fonctionnaires de police, voire à des avocats, j’ai rappelé l’inélégance publique d’une telle mastication surtout lorsqu’elle s’accompagnait de l’oralité. Je me souviens même d’une enquêtrice de personnalité, personnage officiel s’il en est dans le procès criminel, qui a osé me répondre, parce que je lui reprochais son témoignage masticatoire à la barre : « Si cela vous gêne ! ». Alors qu’elle s’adressait, au travers du jury, au peuple français.

Mais le président de la République ? Je n’en suis pas encore remis, au point de me demander si je n’ai pas eu la berlue. Ce serait rassurant. Si j’ai bien vu, il est symptomatique que cet épisode, qui tient à la conception de soi en face de ceux qui sont honorés de vous recevoir, n’ait troublé personne. Cela signe un peu notre monde, non ?

Une seconde j’ai tenté de faire de la démocratie-fiction. Qui, dans son entourage politique, aurait eu le courage de signifier au président que cela ne se faisait pas ? Personne. Personne n’aurait pris le risque de formuler cette évidence, ce conseil, cet avertissement. L’opposition n’a rien remarqué et d’ailleurs s’en soucie comme d’une guigne. La seule qui se permettra tendrement de lui murmurer ce qui convient, ce sera peut-être son épouse. Je suis tout de même très inquiet devant une République où il y a un homme à qui on ne peut pas se permettre de tout dire, même si c’est pour son bien. Et notre respect. Les rois avaient leurs fous qui n’étaient là que pour faire passer, sous le caustique, l’audace de la vérité. Notre démocratie est plus peureuse. Elle feint de ne pas prendre au sérieux des détails qui en disent long sur notre communauté civique.

Enfin, qu’on ne soit pas surpris par l’importance démesurée qui s’attache aujourd’hui à l’examen critique des personnalités publiques. Les contraintes européennes, la crise mondiale constituent un terrible goulot d’étranglement pour les politiques qui rêvent d’être autonomes. En dépit des moulinets, il n’y a plus mille choix possibles. Quand le volontarisme du Pouvoir et la contradiction de l’opposition s’affrontent moins qu’ils ne se rassemblent dans un même réalisme lucide et attristé, quand le jusqu’au boutisme révolutionnaire s’excite seul dans son coin, inéluctablement le visage de la politique s’efface au profit d’une politique des visages.

La pipolisation de la politique a pris sans gloire la relève d’un destin collectif difficile, douloureux, voire impossible à inventer.

Philippe Bilger

Source : http://www.marianne2.fr/Le-chewing-...

2) Faurécia : d’une incroyable imposture sarkozyste démasquée et de la façon dont ils tentent de l’étouffer

par Gérard Filoche

Ce en quoi il y a “scandale” , c’est l’entreprise totalitaire, l’imposture énorme que représente cette séquence.

Oui, c’est une pratique totalitaire, cela ne s’appelle pas autrement : préparation, combine, calcul, mise en scène, manipulation des images, des esprits, de l’information… Sarkozy ne peut parler devant un public de salariés sans ce genre de manip’ : là, la manif était à l’écart, 300 personnes pas citée, l’usine était en pleine campagne, isolée, le “montage” des images même : plan resserré donnant une fausse impression de masses, salariés, en ordre, en blouse, la même pour tous, uniforme, faussement “libres” d’être là, triés sur le volet, placés, conditionnés, arrivés en car, obligés d’écouter, question de boulot, seul le délégué syndical (protégé) parle… Tentative de tromper des millions de gens sur TF1, de faire accroire qu’il s’intéresse au salariat…

L’amant de Catherine II faisait ainsi : des villages artificiels avec de fausses façades prospères pour cacher la misère aux visiteurs de marque… Ceaucescu faisait cela posant dans les campagnes, mais Mussolini aussi, et Staline qui était petit… Olivier Stirn a été sanctionné pas Luc Chatel ni Nadine Marano… Ni Sarkozy !

Sarkozy est donc allé jeudi 3 septembre, dans une usine Faurécia, isolée, dans des champs quadrillés par la police, à Caligny, prés de Flers, dans l’Orne, parler devant des ouvriers alignés en blouses blanches. Un reportage de la RTV belge, démontre le bidonnage de cette “visite d’entreprise” avec des figurants amenés en car, déjà habillés, et le choix de ceux qui sont derrière Sarkozy parce qu’ils sont “plus petits”. C’est la TV belge qui démonte cette pantalonnade, heureusement, car pas un média français, pas un des articles répertoriés par Google n’a dévoilé ce scandale durant 3 jours.

Le problème ce n’est pas « la petite taille » des ouvriers choisis pour être derrière Sarkozy, c’est surtout le “casting”, la « répétition », la “mise en scène” effectuée avec les figurants amenés artificiellement alors qu’ils ne sont pas de l’usine : on les voit bel et bien venir et descendre en car spécial. Ils sont déjà tous habillés en blouse blanche toutes marquées Faurécia dans le dos. Un car, c’est une cinquantaine de personnes d’où viennent-elles ? Quelle autre « usine proche » ? Pourquoi sont-ils tous déjà prêts comme à la parade ?

Quand le film officiel commence, il y a peu de gens devant Sarkozy, une cinquantaine, pas plus + une douzaine derrière. Donc, une majorité de figurants « extérieurs ». On a même vu, avant, sur la TV belge, un court moment de « répétition », quelqu’un tient la place du président, les figurants sont déjà en place à leur marque, devant et derrière, qu’est ce qui se dit et se passe à ce moment-là ? La salle » est-elle chauffée, comment ? Les figurants ont ils une prime, du temps, un congé, une faveur ? Comment ont ils été sélectionnés par la hiérarchie ?

Là, on a une mise en scène qui est une véritable et dangereuse escroquerie médiatique. C’est Ceaucescu en province, c’est comme ces fameux « village Potemkine » de façade, c’est Mussolini aux champs, rien d’autre, comme cela arrive avec toutes les propagandes totalitaires, l’Elysée est pris la main dans le sac.

Il faut le redire : Olivier Stirn a été chassé du gouvernement pour moins que cela dans le passé. Luc Chatel et Nadine Moreno ont déjà été pris la main dans le sac, à Intermarché avec des vraies fausses ménagères de l’UMP faisant leurs courses…

Ne soyons pas pessimistes : il a fallu trois jours de « buzz » sur internet avant la 1ere dépêche AFP. Puis une centaine d’articles sortent, visibles sur Google, certes seulement à partir de lundi 7 sept, quatre jours après l’événement et le journal TV belge. France inter à 7 h 55, Pascal Clark à 9 h, et Didier Porte à 12 h lundi. Comme quoi Internet bouscule les silences organisés : mais on n’en est pas encore à ce que les grands médias de masse télévisés liés à ce pouvoir expliquent à des millions de gens la profondeur de cette énorme imposture sarkozyste…

3) Petits salariés à Faurecia : « une requête de l’Elysée ». Interview du délégué syndical central CFDT de Faurecia

José De Sa Moreira est le délégué syndical central CFDT Siège automobile de Faurecia. Il répond à Franck Louvrier, conseiller presse de l’Eysée qui qualifiait ce matin sur France Inter de « ridicules et grotesques » les affirmations du journaliste de la RTBF (radio television belge) selon lesquelles les salariés présents lors des prises de vue dans l’usine Faurecia de Coligny (Orne) avaient été été choisis en fonction de leur taille.

Rue89 : Vous confirmez les dires de la télévision belge ?

José De Sa Moreira : Oui. Il y a eu des négociations avec les Renseignements généraux, la préfecture et le cabinet de l’Elysée sur différents points de la visite du président. Le premier point était l’organisation d’une manifestation la veille. Le deuxième point l’autorisation pour le président, son cabinet et les gardes du corps de pénétrer dans l’usine sans la tenue de protection obligatoire. Et le troisième point, le critère de taille pour figurer sur les prises de vue.

La requête, ou l’ordre, comme vous voulez, a été donné à la direction générale de Faurecia. Nous, syndicalistes, nous nous sommes juste assurés que les personnes sollicitées n’avaient pas été forcées et qu’ils n’avaient pas été choisis en fonction de critère de couleur, d’âge ou autre. Toutes les personnes sollicitées par la DRH étaient d’accord. Nous nous sommes assurés qu’il n’y aurait pas d’incident stupide, du type un salarié qui refuse de serrer la main au président. Ce n’est pas notre intérêt, il y a eu 1215 suppressions d’emploi seulement sur l’activité siège.

Vous n’avez pas trouvé cette requête incongrue ?

Ça nous a fait sourire, un égo si fort, franchement… Ce qui est triste c’est que du coup on ne retienne que ça de sa visite, alors qu’il a fait des promesses, sur l’emploi, l’industrie la nécessité de garder le savoir en France. Et l’on voit qu’en réalité, il ne vient pas à Faurecia rencontrer les salariés, il vient faire sa publicité, montrer comme il est décontracté, bien reçu.

Peut-on envisager que la direction de Faurecia ait fait du zèle, comme Intermarché prétend l’avoir fait pour la visite de Luc Chatel ?

Je peux vous assurer que nous avons la certitude, de source sûre et fiable, que cette exigence n’est pas sortie de la tête d’un responsable de Faurecia et qu’il s’agit bien d’une requête venant de l’Elysée.

Source : rue 89

4) Sarkozy chez Faurecia, un film des studios de l’Elysée ?

C’est la dernière super-production du Studio Sarkozy. Après Luc Chatel, et Brice Hortefeux, apparus récemment dans des séquences de communication gouvernementale réalisée avec trucages et sans prises de risques, c’est cette fois-ci le président de la République qui tient le premier rôle. On le sait comédien-né. Le voici tête d’affiche. Nicolas Sarkozy effectuait, vite fait, son premier déplacement en province, dans l’usine Faurécia à Caligny, dans l’Orne.

Une présentation de l’entreprise, encore en grande difficulté il y a quelques mois, quelques serrages de mains d’ouvriers, un discours puissant. Merci, au revoir. Une visite éclair calibrée « 20 heures » comme les membres de gouvernement nous en offrent si souvent. L’exercice est devenu le lot commun de la communication gouvernementale. A tel point, que si l’on en croît la RTBF, il relève du bidonnage complet. Ainsi, bon nombre des ouvriers seraient des ouvriers d’autres sites ayant accepté de jouer les figurants. Ils auraient même été choisis en fonction de leur taille ! Les images parlent d’elles-mêmes. Hormis les ministres qui entourent Sarkozy sur la tribune, tous les « figurants » sont calibrés « taille Sarko ». Pas une tête ne dépasse celle du président. Les figurants auraient été amenés en car sur la zone du « tournage » et se prêtent de bonne grâce, avec lucidité et une complicité amusée, à ce pur exercice de communication politique. On y voit, en effet, une trentaine de salariés répéter la mise en scène avant son arrivée, des plans truqués pour donner l’impression de masse.

Sarkozy n’est pas le premier homme politique à se livrer à ce type d’enfumage. En 1990, ministre de Michel Rocard, Olivier Stirn avait « embauché » des figurants pour faire la claque lors d’un discours. Autre style, dans un reportage de Canal Plus, on voyait Strauss-Kahn demander –hors caméra, du moins le croyait-il- à l’un de ses conseillers quel disque acheter pour ne pas passer pour un has been. On se rappelle également de Balladur pris en stop par une militante UMP après une pseudo-panne de voiture lors de la campagne présidentielle de 1995.

Mais il est incontestable que sous l’ère Sarkozy, ce type de pratique s’est professionnalisée sinon institutionnalisée. Le passage de Luc Chatel et Hervé Novelli chez Intermarché échangeant avec de fausses clientes leur a valu un article sur le site du New-York Times, la rencontre « jeunes-police » du ministère de l’Intérieur a fait l’objet, selon Le Monde, d’un casting « très serré ».

Les Français pas dupes ?

Depuis les cafouillages de son début de mandat et ses sorties hasardeuses, Nicolas Sarkozy ne laisse plus rien au hasard. Pas question de croiser un citoyen hostile ou de laisser apparaître une banderole non conforme. Quelques sorties dans une France irréelle pour donner l’illusion de la la connaissance de la réalité du terrain feront l’affaire.

Le journaliste de la RTBF conclut son reportage par cette formule « pas sûrs que les Français soient dupes ». Pas sûrs, en effet. Encore faudrait-il qu’ils soient informés de ces manipulations. Les médias audiovisuels Français n’ont pas ce souci de l’irrévérence belge. Le bidonnage Chatel n’a pas fait l’objet d’une attention particulière.

Preuve de la vassalité des médias audiovisuels envers le pouvoir. Encore ce week-end, interviewant Xavier Bertrand, Claire Chazal qui ose, pure folie, interroger le secrétaire général de l’UMP sur « la cacophonie qui règne au gouvernement sur la taxe carbone » ne peut s’empêcher de s’excuser de son insolence par un très prudent : « Pardon de vous poser cette question, Monsieur Bertrand ».

D’ici à ce que TF1 nous révèle comment le président de la République « prépare » ses sorties médiatiques. Le chemin sera long. Très long.

Article de Marianne 2


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