Une Rue Robespierre à Paris ? Au Conseil municipal, la droite, presque tous les Verts et Socialistes votent contre

mercredi 2 novembre 2011.
 

En juin dernier, le voeu, présenté par Alexis Corbière, du Parti de gauche, au conseil municipal de Paris, que soit attribué le nom de Robespierre à une rue de Paris a été repoussé à une forte majorité.

Seuls ont voté pour les élus du Groupe communiste-Parti de gauche, auxquels se sont joints un socialiste et deux Verts. Les autres élus socialistes et Verts, comme la droite, ont voté contre ou ont déserté le vote !

Par contre, que Paris ait sa rue Thiers ne semble pas leur poser de problème...

Les thèses réactionnaires assimilant Robespierre à un despote assoiffé de sang ont fait leurs ravages à travers les âges. Mais que des élus socialistes en soient là est déconcertant !

Rappelons, entre autres, que Robespierre utilisa le premier la devise républicaine, « Liberté. Égalité. Fraternité » ; qu’il défendit le suffrage universel, l’abolition de l’esclavage, la liberté de la presse, l’abolition de la peine de mort, le droit à tous à l’existence tant matérielle que sociale. Quelle avance pour son temps !

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Intervention d’Alexis Corbière au conseil municipal de Paris

Ce mercredi matin, je suis intervenu à propos d’un voeu déposé pour qu’une rue parisienne porte le nom de Robespierre.

Voici mes propos :

"Mes chers collègues,

A plusieurs reprises, dans le passé, le Groupe auquel j’appartiens a présenté, hélas en vain, des vœux identiques à celui dont nous débattons à nouveau aujourd’hui.

Pour nous, c’est clair : Paris doit s’honorer en rendant hommage à Maximilien Robespierre.

C’est une véritable injustice historique, que celui qui eut un rôle important dans la rédaction de la Déclaration universelle des Droits de l’homme, qui se prononça parmi les premiers pour l’abolition de l’esclavage, pour le droit de vote des comédiens et des juifs, pour la fin des colonies, pour le droit de pétition, qui intervint à l’Assemblée nationale pour l’abolition de la peine de mort… soit effacé des murs de notre Capitale, puisque pour l’instant aucun lieu ne porte son nom.

Et pourtant, cet homme fut un grand Républicain, un grand révolutionnaire, un grand patriote, et je dirais même, à partir de cette vision politique exigeante, il fut un vrai "citoyen d’honneur" de la Ville de Paris !

Une certaine histoire officielle, d’abord écrite par les thermidoriens et les « contre-révolutionnaires », le présente depuis plus de deux siècles comme « l’âme de la terreur » ce qui est faux. Cet acharnement à le salir, a sans doute pour but de faire disparaître les promesses d’égalité et de justice de la Grande Révolution de 1789.

Ceux qui montrent Robespierre comme un « tyran » responsable de la brutalité de cette période se trompent et ignorent la réalité des détails de l’histoire de la Révolution. Pour comprendre les actes de tous les acteurs de cette époque, il faut garder en mémoire les grandes difficultés auquel ils devaient faire face, notre pays était secoué par une guerre civile et attaqué par des armées étrangères. Cette complexité ne peut être exposée en 3 minutes.

Un mot toutefois. Maximilien Robespierre , même de mon point de vue, n’est pas irréprochable (notamment lors du "drame de ventôse" et la mort des dirigeants des Cordeliers), mais s’il fut membre du « Comité de salut public » élu à la Convention, il n’a jamais fait partie du « Tribunal Révolutionnaire ». D’ailleurs, de plus en plus en désaccord avec beaucoup de décisions que prendront ces différentes instances, il ne participera plus aux réunions du « Comité de salut public » à partir du 11 juin 1794. Et c’est d’ailleurs ce Tribunal, qui condamnera Robespierre, et près de 93 de ses partisans, à la mort le 28 juillet 1794. Il faudra attendre le 31 mai 1795 pour que le « Tribunal révolutionnaire » soit supprimé. C’est dire combien il est inepte de faire porter la responsabilité au seul Robespierre la période de « la Terreur ».

Mais aussi, quelle que soit l’opinion des élus siégeant dans le Conseil de Paris sur Robespierre, nul ne peut nier qu’il fait partie de l’Histoire de notre pays. Alors que tant de rues de Paris portent encore les noms d’hommes et de femmes aux engagements et au parcours politiques très discutables, (quelques exemples pour ne parler que des contemporains de Robespierre, les responsables de Thermidor ont leurs rues : Carnot, Robert Lindet, Cambon, Boissy d’Anglas, Cambacérès, François de Neufchâteau... Coupable de haute trahison le Général de La Fayette a une avenue, politicien vendu à la cour Mirabeau a un pont...), alors ne pas voter ce vœu reviendrait à prendre la responsabilité de déformer la transmission de notre histoire collective.

Paris serait plus grand en n’oubliant plus Robespierre.

Voilà pourquoi nous voterons ce vœu."

Avant moi, Georges Sarre en présentant le voeu avait développé des arguments comparables aux miens. J’ai appris qu’en 1946, le Conseil de Paris, dans la chaleur de la Libération, avait nommé une place Robespierre, mais qu’elle fut débaptisée en 1950 par la droite.

60 ans plus tard, la droite UMP, par la voix de l’un de ses jeunes porte-parole, M. Pierre-Yves Bournazel élu du 18e, resta fidèle à la position historique de son courant politique depuis deux siècles. Point de surprise donc. C’est par les mots de "criminels" et "d’assassins" et que M. Bournazel, avec une conviction induscutable comme il en a l’habitude, a dépeint une fois de plus Robespierre. Son intervention enflammée ne m’étonna pas.

Plus triste fut l’attitude de mes amis socialistes. Gênée, alors que c’est un sujet qui lui tient à coeur, Anne Hidalgo au nom de l’Exécutif appella à voter contre. Dommage. Jean-Pierre Caffet, Président du groupe socialiste, fit de même, dans un style un peu plus brutal, tout en indiquant qu’il laissait la liberté de vote à son groupe.

Les Verts sont restés silencieux, mais leur Président Sylvain Garrel votera contre, alors que mes amis Yves Contassot et René Dutrey ont voté pour. Anne Le Strat aussi. Lors de ce vote, la trés grande majorité des socialistes ont voté contre, avec la droite unanime. A ma connaissance, seule la socialiste Lyne Cohen Solal, adjointe au Maire, a voté pour et quelques uns se sont abstenus tels Christophe Girard ou Michèle Blumenthal.

Robespierre n’aura toujours pas de rue à Paris. Décevant.

Alexis Corbière


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