Australie : Les Orphelins du Commonwealth

samedi 21 novembre 2009.
 

De 1947 à 1967, des milliers d’enfants britanniques sont déportés dans le Commonwealth, en Australie notamment mais aussi dans d’autres pays de l’Empire britannique.

La plupart du temps, ces enfants sont déportés sans l’accord de leurs familles.

Des œuvres charitables catholiques, méthodistes et anglicanes organisent ce trafic avec le soutien du gouvernement. Le scandale éclate en 1986 par hasard.

Le film de Michael Jenkins intitulé les orphelins de Liverpool (The Leaving of Liverpool) tourné en 1992 s’inspire de cette tragédie.

Une déportation massive

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, de nombreux britanniques confient leurs enfants à des orphelinats. Cette démarche est temporaire, le temps pour toutes ces familles de retrouver un toit et un travail. Mais, quand les parents reviennent chercher leurs enfants, la direction affirme qu’ils ont été adoptés par de riches familles.

En réalité, ces enfants ont été incorporés dans des contingents d’orphelins afin d’être envoyés dans l’Empire.

On estime que 130 000 enfants ont été déportés entre 1947 et 1967 par la Grande-Bretagne dans ses colonies : Canada, Rhodésie, Nouvelle-Zélande et Australie.

La plupart sont de vrais orphelins mais environ 10 000 ont été envoyés outre-mer sans qu’on demande le consentement à leur famille.

35 organisations comme Barnados, l’Armée du Salut ou l’Eglise catholique organisent ces déplacements d’enfants. Le gouvernement britannique apporte son soutien financier à ce vaste trafic.

Officiellement, les orphelins doivent être accueillis par des orphelinats. Mais, à leur arrivés, ces structures ne sont pas encore construites. Aussi, les enfants sont-ils employés comme main d’œuvre.

De nombreux témoignages ont été recueillis depuis. Les anciens orphelins envoyés à Blindoon en Australie ont témoigné du travail harassant, des mauvais traitements, du fouet et des abus sexuels.

D’autres, trop traumatisés, se sont suicidés ou ont sombré dans la folie. Cet orphelinat était dirigé par le frère Keany.

Le scandale britannique

Ce n’est qu’en 1986 que le scandale a éclaté. On doit la vérité à Margaret Humphreys, une assistante sociale. Elle mène alors une recherche personnelle sur ses origines.

En réponse à l’un de ses questionnaires, elle reçoit une lettre d’une femme qui vit en Australie. Cette dernière lui dit ne rien connaître de son passé car elle a été déportée à l’âge de 4 ans.

Intriguée, l’assistante sociale enquête et découvre une vingtaine de cas similaires.

Elle fonde alors, en 1987, une association « The Child Migrant’s Trust » et adresse régulièrement au gouvernement britannique un rapport sur la situation de milliers de victimes retrouvées.

Un procès par une victime est engagé contre le gouvernement. L’attitude de ce dernier est ambiguë.

Il alloue à l’association des subventions pour aider à réunir les familles brisées mais parallèlement, Margaret Thatcher et ensuite John Major refusent d’ouvrir une enquête publique.

La tradition d’émigration

L’objectif du gouvernement britannique était d’une part de se débarrasser d’enfants jugés « difficiles » et d’autre part d’assurer une représentation majoritaire de l’Empire britannique dans ses colonies.

Cette émigration s’est faite en totale violation des droits de l’Homme. Cependant, ce cas n’est pas unique.

Les colonies britanniques et françaises ont été peuplées pendant tout le XIXe siècle par la « lie » de la société : prisonniers politiques, de droit commun, prostituées, vagabonds …

Au XIXe siècle, la déportation d’orphelins est une méthode couramment utilisée pour peupler les colonies européennes. La France a utilisé également cette méthode avec l’Algérie. En 1852, à l’initiative d’un prêtre catholique, 200 garçons de 10 à 13 ans ont été envoyés à côté d’Alger. Ils devaient en principe rester dans cette colonie jusqu’à leur majorité. Mais, en 1860, 58 enfants ont fugué et les enfants de moins de 12 ans ont été terrassés par les fièvres et le travail.

Devant ce désastre, le gouvernement a rapatrié les enfants rescapés. Vers 1891, un autre essai sera tenté, tout aussi désastreux.

Ce qui choque le plus c’est que cette tradition d’émigration a perduré jusqu’au milieu du XXe siècle en Angleterre et que pendant 40 ans, une véritable conspiration du silence a étouffé ce scandale.

V.B (10.2005)

Référence bibliographique principale

Les orphelins du Commonwealth, Mémoire de l’Humanité. Editions Larousse 1994


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