Quand l’Empire britannique organisait dans le Deccan (Inde) un génocide (12 à 30 millions de morts) par la famine

jeudi 22 février 2018.
 

Dans son livre, "Late Victorian Holocausts", publié en 2001, Mike Davis raconte les famines des années 1870 qui ont tué entre 12 et 29 millions de personnes en Inde. L’originalité de l’étude de Davis est de démontrer que, loin d’être une fatalité, ces millions de morts sont la cause directe d’une politique de la couronne britannique.

En effet, quand, en 1876, le courant marin El Niño a provoqué une sécheresse suivie d’une famine dans la province de Decca, les réserves de riz et de blé en Inde étaient au plus haut. Mais le Vice-Roi des Indes, Lord Lytton, plutôt que d’utiliser ses réserves pour venir en aide aux populations frappées par la famine, décida, contre l’avis de ses conseillers, d’exporter le blé et le riz vers l’Angleterre. Entre 1877 et 1878, au sommet de la famine, l’Inde a exporté une quantité record de 6,4 millions de bushels de blé.

Quand les organisations caritatives anglaises proposèrent d’envoyer du blé et du riz en aide d’alimentaire d’urgence, les marchands de blé, inquiets que cela pourrait provoquer une baisse du prix du blé et donc réduire leurs bénéfices, obtinrent de la part de l’administration des mesures douanières en vue de "décourager autant que possible l’aide d’urgence aux populations affectées".

Le parlement britannique fit voter la loi "Anti-contributions charitables" (Anti-Charitable Contributions Act) en 1877 qui interdisait "sous peine de prison, les donations charitables provenant de fondations privées et qui pourraient interférer avec la fixation par le marché des prix céréaliers". L’unique aide charitable autorisée était le regroupement des populations affamées dans des camps de travail - mais on y refusait l’accès à toute personne trop malnutrie pour avoir la force de travailler.

Ceux qu’on admettait dans les camps devaient réaliser des durs travaux de terrassement et d’assèchement, tout en recevant une ration alimentaire plus faible que celle octroyée par les nazis aux prisonniers du camp de Buchenwald. En 1877, la mortalité dans les camps de travail était de 94%.

Alors que des millions mourraient dans les campagnes, le gouvernement impérial - qui avait besoin d’argent pour financer la guerre en Afghanistan - lança une campagne militaire "dans le but de recouvrir les arriérés d’impôts accumulés par les paysans lors de la sécheresse". Le zèle impitoyable des collecteurs d’impôts, soutenus par la brutalité de l’armée britannique et de ses auxiliaires, acheva de ruiner ceux qui avaient survécu à la famine.

Même dans les régions traditionnellement exportatrices de céréales, les politiques gouvernementales causèrent la famine et tuèrent des millions de personnes. Ainsi dans les provinces du Nord-Ouest, l’Oud et le Pendjab, qui avaient connues des récoltes record dans les trois années précédentes, au moins 1,25 millions de personnes moururent de faim - tandis que des convois militaires protégeaient les charrois de blé et de riz transportés vers les ports, pour être exportés. (...)


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