Etrange société où la publication des coûts supposés du changement climatique aurait finalement plus d’impact que la prise de conscience de menacer l’espèce humaine et l’équilibre écologique de la planète. Décidemment, je ne me ferai jamais à cette échelle des valeurs qui place l’argent au dessus de tout.
La conférence de Nairobi sur le climat s’ouvrira, le 6 Novembre, justement pour préparer une nouvelle étape après le protocole de Kyoto et l’échéance de 2012. Mais ce qui vient au devant de la scène n’est pas ce travail laborieux des instances internationales, où se retrouvent les pays riches et les autres. Non, ce qui fait choc est l’étude britannique qui chiffre le coût de cette catastrophe écologique, à cinq mille cinq cents milliards d’Euros milliards, pour toute la planète. L’argent, toujours l’argent.
Je n’ai jamais partagé l’engouement de certains, même à gauche pour la régulation financière des problèmes environnementaux. Ils sont entrés avec bonne conscience dans la marchandisation de la pollution, espérant ainsi atteindre les objectifs de sa réduction. Je pense en particulier au système de bourses et d’échange, des fameux droits à polluer, appelés pudiquement permis d’émission. Cette méthode est fondée sur le principe que les entreprises pollueuses devaient avoir le choix entre faire elle même des investissements pour réduire les gaz émis ou financer d’autres entreprises ailleurs dans le monde qui diminueraient leurs pollutions.
Bilan des courses, les entreprises chinoises sont les grandes bénéficiaires de ce système qui donne une prime aux pays actuellement les plus polluants mais pas nécessairement les plus pauvres. Ainsi sous l’égide de la Banque mondiale, la Chine a encaissé, pour seulement 2 contrats concernant le renouvellement des centrales anciennes au charbon, 930 millions de Dollars. Depuis 2005, c’est elle qui a raflé la mise, en captant la moitié des marchés de ces émissions. Au regard de sa croissance actuelle et des richesses qu’elle accumule (sans bien les redistribuer) la Chine a les moyens de moderniser et de dépolluer son appareil productif sans les financements européens.
De surcroît nos entreprises feraient mieux d’utiliser ces sommes pour améliorer leurs performances écologiques et réduire leurs émissions. En tout cas, si de l’argent doit être consacré à diminuer les gaz à effet de serre dans d’autres régions de la planète, mieux vaudrait aider les pays vraiment pauvres, à la reforestation, à l’utilisation du solaire ou à d’autres pratiques concourant à leur développement.
J’ai toujours été hostile à ce système des droits à polluer, très contestable du point de vue de leur efficacité écologique et qui contribue à cette financiarisation et marchandisation généralisée qui déstabilise nos sociétés et accroît les inégalités. Un échange marchand fondé sur une allocation de droits à polluer, fixé par les Etats est déjà, par nature biaisé. Mais surtout, ce système dispense, les plus riches des efforts maximaux, ne contribue pas à l’accélération des innovations, ne soutient pas les politiques et comportements à long terme qui s’agissant de l’écologie et du changement climatique doivent être privilégié.
En effet comme le fait remarquer le journal anglais " The Economist" : "alors que les projets à court terme (comme la capture des " vilains" gaz chinois s’avèrent extrêmement rentables financièrement, les projets à long terme comme l’investissement dans des sources d’énergie plus propres n’intéressent guère les spéculateurs." Et oui certains fondamentaux de la gauche sont encore et toujours d’actualité.
La commission européenne vient de faire le point sur l’engagement des européens sur le protocole de Kyoto. L’UE (à 15) s’est engagée solidairement à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 8% durant la période 2008-2012, pensant plutôt atteindre cet objectif en 2010.. Or la commission note que les engagements pris par les Etats membres ne vont les diminuer que de 4,6%. Mais que l’UE pense échanger des permis d’émission avec les autres pays pour 3,6% et du coup atteindrait 7,2% Elle compte sur la reforestation naturelle de son territoire pour 0,8% et atteindre ainsi les 8% prévus.. Presque la moitié de l’effort serait ainsi réalisée par l’achat de droits à polluer, prétexte à ne faire chez nous que la moitié du chemin. Au passage, nous nous privons d’efforts d’innovations, de recherches qui seraient pourtant des atouts pour la compétitivité à venir de notre économie. Eh oui, Il vaudrait mieux être ambitieux pour inventer un développement durable.
La France est loin d’être dans les bons élèves selon les estimations de la commission Européenne, les mesures engagées amèneraient une augmentation de 6,4% de nos émissions, si nous mettons en place réellement toutes les dispositions supplémentaires présentées dans le plan de lutte contre le changement climatique nous serons encore à une légère augmentation de 0,5%. En clair que le compte n’y est pas. Alors il est fondamental que le prochain mandat du président de la République s’ouvre avec une loi de programmation qui oblige à des résultats concrets et conformes à nos engagements sur l’effet de Serre. Le temps de l’alerte est dépassé, est venu le temps de l’action.
Ven, 03/11/2006 - 20:16
Date | Nom | Message |