Des philosophes débattent du communisme

samedi 20 mars 2010.
 

L’ouvrage réunit les interventions prononcées lors de la conférence philosophique mondiale qui s’est tenue à la Birbeck University de Londres, en mars 2009, autour de « L’Idée du communisme ». Une quinzaine de philosophes avaient été conviés pour l’occasion  : outre les deux organisateurs, Alain Badiou et Slavoj Zizek, on a pu y entendre Toni Negri et Michael Hardt, ou encore Jacques Rancière, pour ne citer que les plus connus du public français. Au-delà de leurs divergences théoriques, ils sont venus expliquer pourquoi l’idée du « communisme », l’idée d’une alternative globale au capitalisme, devait être conservée et remise en circulation aujourd’hui. Le titre, l’Idée du communisme, indique en lui-même l’intention polémique de l’ouvrage. En effet, certains condamnent le communisme justement parce qu’il est une idée. L’ouvrage sera pour eux le signe de la réapparition prochaine d’une politique pathologique, la politique de l’idéal, de l’« idéocratie ».

Bref, la violence faite au réel dans le but de le rendre rationnel. À l’inverse, certains marxistes contestent que le communisme soit une idée.

Il faut en effet se souvenir des critiques sévères de Marx à l’endroit des utopistes accusés de proposer des « recettes pour les marmites de l’avenir ».

Le communisme ne doit être que le mouvement réel de ceux qui cherchent à dépasser le capitalisme, il ne découle pas d’une réflexion philosophique.

Mais quoi que l’on pense de l’intitulé de cette conférence, quoi que l’on pense de la pertinence même d’une réunion de philosophes sur la question, force est de constater qu’une telle initiative contribue puissamment à renouveler la pensée politique de ces dernières décennies.

Hier encore, en effet, le mot « communisme » était oublié ou criminalisé. Aujourd’hui, sans nostalgie aucune, il commence à retrouver ses lettres de noblesse, il peut de nouveau faire l’objet de discussions théoriques. Telle est la tâche de cette réunion  : « Donner une forte existence subjective à l’hypothèse communiste » (Badiou). Le contenu des interventions est très varié  : analyse des nouvelles formes de propriété, définition du concept de communisme, réhabilitation du volontarisme politique, histoire des crises du capitalisme, etc. On aurait souhaité néanmoins que des questions traditionnelles comme celles de l’organisation, du parti et du pouvoir par exemple soient abordées de front.

« Parce que le communisme ne peut pas être séparé du problème de sa réalisation, il ne peut pas être séparé de la question du pouvoir », écrit pourtant Alberto Toscano. Le livre ne propose que quelques rares allusions à ce problème, on peut le regretter.

Une nouvelle conférence internationale aura lieu cette année, à Berlin, consacrée au « Bilan en pensée des États socialistes, et de ce qui, dans ce bilan, touche ou ne touche pas, au communisme ».

Florian Gulli, philosophe

Badiou-Zizek. L’Idée du communisme. Conférence 
de Londres, ouvrage collectif,

Éditions Lignes, 2010. 348 pages, 22euros.


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