Crise des missiles et coexistence pacifique 1962 à 1967 : quel mensonge honteux !

lundi 19 octobre 2020.
 

Les manuels scolaires adoptent chaque année un peu plus le point de vue des néo-cons américains et des multinationales. Voici l’exemple de la crise des fusées pour Cuba en 1962.

1) Cuba, un paradis pour milliardaires américains, truands et dictateurs militaires de 1902 à 1959

Depuis son indépendance acquise en 1902, l’île de Cuba est devenue l’arrière-cour du capitalisme américain : un christianisme pudibond à Washington et 10000 prostituées à leur service dans les rues de La Havane, un capitalisme bon chic bon genre à Washington et le blanchiment de l’argent sale (drogue, casinos, prostitution, trafics) à la Havane, un moralisme politique affiché à Washington et la corruption de la classe politique cubaine par l’argent à La Havane.

Les Etats Unis ne peuvent se permettre de prendre le risque d’élections démocratiques dans cette île, paradis de ses milliardaires et de ses escrocs. Aussi, en mars 1952, leur pantin Batista fait un coup d’Etat, reporte les élections, suspend le Parlement et se voit aussitôt officiellement reconnu par le gouvernement de Washington. Les opposants politiques de gauche subissent une telle répression qu’ils ne peuvent plus sortir de chez eux sans être armés. Aussi, beaucoup, comme Fidel Castro, quittent l’île pour le Mexique. Dans ce pays, il fait la connaissance du Che Guevara qui vient de vivre l’expérience horrible de la domination américaine au Guatémala.

2) Ernesto Guevara de l’Argentine au Guatemala

Le jeune médecin Guevara a été très tôt scandalisé par les injustices sociales criantes de la société sud-américaine. De 1951 à 1954, lors de son deuxième voyage en moto, il traverse le Chili, le Pérou, la Colombie, le Vénézuela, l’Equateur, le Nicaragua, le Panama, San José et le Costa Rica. Il en conclut dans une lettre à sa tante que l’Amérique latine n’est qu’un des domaines de la United Fruit.

Il va en faire l’expérience encore plus cuisante au Guatemala. En mars 1951, Arbenz est devenu le premier président de la République de ce pays élu au suffrage universel. Le caractère pacifique et légal de cette élection n’a jamais été contesté par personne. Elu avec 60% des voix, le nouveau président est confronté au problème des grands propriétaires fonciers qui ne travaillent pas leurs terres alors que la population meurt de faim sans travail. On estime qu’en 1945, 2% de la population du pays contrôlait 72% de toutes les terres arables, mais seulement 12% de celles-ci étaient utilisées.

Arbenz envisage donc en 1952 une réforme agraire sur le modèle de l’Homestead Act promulgué en 1862 aux États-Unis. La nouvelle loi permettait au gouvernement d’exproprier uniquement les parties en friche des grandes plantations. Les propriétés de plus de 670 acres (271 hectares) en étaient exclues si au moins les 2/3 de leur surface étaient cultivés ; de même que les terres présentant une déclivité supérieure à 30 degrés (une exemption significative dans le paysage montagneux du Guatemala). Les propriétaires des terres expropriées furent dédommagés sur la valeur déclarée, par eux-mêmes, de leurs terres lors du calcul de l’impôt en mai 1952.

L’entreprise américaine United fruit s’est considérée en danger car elle était le plus grand propriétaire terrien du Guatemala et, avec 85% de ses terres non exploitées.

L’instabilité, combinée à la tolérance dont Arbenz faisait preuve à l’égard du PGT et d’autres groupes communistes ou apparentés, poussa la CIA à étudier, en 1951, un plan intitulé opération PBFORTUNE. Celui-ci suggérait une méthode d’éviction d’Arbenz, s’il venait à être considéré comme une menace communiste dans l’hémisphère.

La United Fruit Company, une multinationale américaine, était également menacée par l’initiative de réforme agraire. En effet, , susceptible de tomber sous le coup de la réforme. En calculant le montant de ses impôts, la United Fruit avait constamment (et drastiquement) sous-évalué la valeur de ses terres. Pour les impôts de 1952, elle déclara une valeur de 3$ par acre de surface détenue. Quand, en accord avec la déclaration d’impôts rédigée par la United Fruit, le gouvernement Arbenz proposa de dédommager l’entreprise à hauteur de 3$ l’acre de surface expropriée, la compagnie déclara que la valeur réelle de la terre était désormais de 75$/acre mais refusa d’expliquer l’augmentation soudaine de sa propre estimation de la valeur des terres qu’elle possédait.

La United Fruit possédait quelques liens avec des personnalités influentes du gouvernement des États-Unis. Le secrétaire d’État américain, John Foster Dulles et son frère, directeur de la CIA Allen Dulles, entretenaient d’étroites relations avec la United Fruit, à travers leur ancien cabinet juridique. Le conseiller et sous-secrétaire d’État du président Eisenhower, Walter Bedell Smith avait également des liens étroits avec elle et avait précédemment postulé à un poste de direction en son sein. Tous trois étaient actionnaires de l’entreprise.

En 1952, le Parti guatemaltèque du travail fut légalisé ; l’influence, bien que minoritaire, des communistes, sur les importantes organisations paysannes et sur les syndicats s’accrut considérablement, mais pas sur le parti politique alors au gouvernement, le PGT ne gagnant que 4 sièges sur les 58 que comptait le congrès. La CIA, ayant conçu l’Opération PBFORTUNE, était déjà intéressée par les liens potentiels entre Arbenz et les communistes. La United Fruit avait fait pression auprès de la CIA pour écarter les différents gouvernements réformateurs au pouvoir depuis la période Arevalo, mais ce ne fut pas avant l’arrivée de l’administration Eisenhower que ces idées trouvèrent une oreille attentive à la Maison Blanche. En 1954, l’administration Eisenhower était toujours sûr de la victoire depuis son opération clandestine destinée à renverser le gouvernement Mossadegh en Iran l’année précédente. L’agent de la CIA Kermit Roosevelt, architecte du coup d’État en Iran, décrit une réunion avec le secrétaire d’État Dulles : "[Il] semblait presque enthousiaste. Ses yeux brillaient ; il semblait ronronner comme un chat géant. Clairement il ne savourait pas uniquement ce qu’il entendait, mais mon instinct me disait qu’il planifiait aussi."[3] En Février 1954, la CIA lança l’Opération WASHTUB, qui consistait à installer une fausse cache d’armes soviétiques au Nicaragua, afin de démontrer les liens entre Moscou et le Guatemala. [4]

En mai 1954, de l’armement de fabrication tchèque arriva au Guatemala à bord du bâtiment suédois, le Alfhem. Les États-Unis déclarèrent qu’il s’agissait de la preuve finale des liens entretenus par Arbenz avec l’Union soviétique. Les partisans d’Arbenz, notent, néanmoins, que les Guatémaltèques tentèrent, à plusieurs reprises, d’acheter des armes en Europe de l’Ouest et se tournèrent uniquement vers les Tchèques devant l’impossibilité de s’en procurer ailleurs. Le gouvernement Arbenz était convaincu qu’une invasion soutenue par les États-Unis était imminente : il avait précédemment dévoilé une note détaillée (appelée les White Papers) concernant l’opération PBFORTUNE menée par la CIA et perçut les actions des États-Unis lors de la réunion de l’OEA à Caracas cette année comme un moyen de lancer une intervention. L’administration ordonna à la CIA de financer un coup d’État, au nom de code opération PBSUCCESS qui renversa le gouvernement. Arbenz démissionna le 27 juin 1954 et fut forcé de fuir, trouvant refuge auprès de l’ambassade mexicaine.

2) Castro, Guevara et leurs guerrilleros prennent le pouvoir à La Havane

Le 2 décembre 1956, Fidel et Raul Castro, Ernesto Che Guevara et leurs 81 compagnons débarquent à Oriente, à bord du yacht Gramma. Ils constituent un point de guerrilla dans la Sierra Maestra. La grève générale ouvrière de 1958 est écrasée par Batista ( au moins 200 morts) ; cette tuerie confirme pour une partie de la gauche et du peuple cubain l’impossibilité d’une lutte politique démocratique.

Les barbudos de Fidel Castro opèrent vers Santiago alors que le Che prend Santa Clara le jour de Noël 1958. Un véritable soulèvement populaire porte alors la guerrilla au pouvoir. Fidel Castro entre dans La Havane le 8 janvier 1959.

Le nouveau régime prend rapidement quelques décisions significatives comme la gratuité des loyers et un début de réforme agraire. Batista s’enfuit.

3) La détermination des Etats Unis à renverser le régime de Fidel Castro.

Les Américains, trop sûrs du pouvoir de leurs dollars n’ont pas vu venir le soulèvement populaire en faveur de la guerrilla : "Les casinos se multiplient, les truands prospèrent, derrière Meyer Lansky, le plus grand d’entre eux. Le night-club Tropicana ne désemplit pas. Les prostituées de la rue des Virtudes sont en embuscade pour capter le chaland. Le Hilton monte ses étages. Le Bodeguita del medio, charmant bistrot de la vieille ville, où Hemingway vient boire ses mojitos, devient l’endroit où les stars de Hollywood aiment à être vues".

Par contre, dès la chute de Batista, ils mettent en oeuvre toutce qui est possible pour saboter la vie économique de l’île et renverser Fidel : embargo commercial, tentatives permanentes d’assassinat des dirigeants, débarquement militaire dans la baie des cochons...

Face à cette politique économiquement et militairement agressive, Cuba s’affiche comme un régime marxiste au printemps 1961 et se rapproche de l’URSS.


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