L’ISF très allégé, c’est adopté

mardi 28 juin 2011.
 

C’est voté, avec une petite centaine de voix d’avance à l’Assemblée, le projet d’allègement de l’ISF est passé. Dans un même mouvement, le bouclier fiscal est abrogé, voté par la gauche comme la droite, à l’unanimité.

Le texte voté est quasi identique au projet précédemment décrit. Il allège donc clairement l’ISF. Il prévoit que l’impôt ne s’applique désormais qu’aux patrimoines supérieurs ou égaux à 1,3 million d’euros, contre 800.000 euros jusqu’à présent. 300 000 contribuables ne le paieront donc plus. Au-dessus du nouveau seuil, il fixe un taux d’imposition de 0,25% pour les patrimoines compris entre 1,3 million et trois millions d’euros et de 0,5% au-delà. Allègement qui représente un manque à gagner pour l’Etat de 1,6 milliards d’euros.

Petite nouveauté du texte adopté, et comme la vie est dure pour les familles riches, mais nombreuses, une nouvelle disposition prévoie que les assujettis à l’ISF pourront déduire 300 euros par personnes.

L’abrogation du bouclier fiscal n’a pas fait débat et a été voté par tous, mais fonctionnera encore en 2012 et 2013. Le tout devrait passer au Sénat le 21 juin prochain.

Pour mieux se rendre compte des effets de la réforme de l’ISF, voici les « économies » que vont réaliser Liliane Bettancourt et François Pinault. La réforme en détail : Bonne fortune pour les gros contribuables de l’ISF L’explication de comment l’impôt sur le revenu est devenu dénaturé par les réformes.

2) Bonne fortune pour les gros contribuables de l’ISF

Contraint à un an de la présidentielle de retirer à contrecœur son bouclier fiscal, le président de la République réforme l’impôt sur la fortune. Un nouveau cadeau aux nantis à l’heure où le gouvernement exige la rigueur pour les fonctionnaires, les services publics et les collectivités locales.

Ce n’est pas aujourd’hui que Nicolas Sarkozy pourra mettre au placard son costume de « président des riches". En donnant son feu vert à une réforme de la fiscalité, le conseil des ministres vient pourtant de jeter par-dessus bord le trop décrié bouclier fiscal. Mais pour faire mauvaise fortune bon cœur (si l’on peut dire), l’abandon contraint du bouclier fiscal s’accompagne de l’allégement de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune). Et à tout prendre, les riches s’en sortent plutôt bien  !

Globalement, le bouclier fiscal privait l’État d’environ 700 millions d’euros annuellement qui retournaient sous forme de chèques dans la poche des très gros contribuables. La baisse des taux de l’ISF décidée hier en conseil des ministres coûtera à l’État 1,6 milliard d’euros de recettes fiscales, qui resteront dans les poches de grands possédants. On voit donc de suite où sont les gagnants  ! Avec en prime un vrai bonus cette année  : si l’allégement des barèmes de l’ISF entre en jeu dès cette année, la fin du bouclier fiscal ne prendra effet qu’après 2012. Jackpot en 2011  !

Qui sont alors les grands gagnants de la réforme ?

Dans le concret, que porte cette nouvelle réforme ? Le seuil d’entrée dans l’ISF est relevé à 1,3 million d’euros contre 800 000 euros auparavant, ce qui fait sortir de l’impôt sur le patrimoine 300 000 assujettis. Les patrimoines supérieurs à 1,3 million d’euros seront taxés de 0,25% sur la totalité de leur valeur et ceux supérieurs à 3 millions d’euros seront taxés à 0,50%. Les barèmes de l’ISF s’étageaient jusqu’à présent d’une tranche à 0,55% à une tranche à 1,80% pour les patrimoines supérieurs à 16,8 millions d’euros. Et la réduction de 50% de l’ISF en cas d’investissement dans les PME ou pour les dons aux associations est maintenue.

Qui sont alors les grands gagnants de la réforme ? Le syndicat des impôts Snui-SUD, s’est intéréssé aux 2 000 contribuables qui se situent dans la dernière tranche avec des patrimoines supérieurs à 16 millions d’euros. Selon le syndicat, 1 000 d’entre eux bénéficiaient d’une restitution au titre du bouclier fiscal. En perdant le bénéfice de cette restitution et en bénéficiant des nouveaux barèmes de l’ISF, ils sortiront gagnants de la réforme de 35  400 euros en moyenne. Pour les 1 000 autres qui ne bénéficiaient pas du bouclier fiscal, le gain sera beaucoup plus important encore puisqu’il s’élèvera en moyenne à plus de 400 000 euros  !

De nouveaux revenus fiscaux très aléatoires

Évidemment le gouvernement s’en défend, arguant que la réforme s’accompagne de nouvelles mesures fiscales destinées à la financer. Il faut en effet combler les 900 millions d’euros de trou qu’elle laisserait dans les caisses de l’État. Le gouvernement compte sur le relèvement des barèmes des droits de succession, l’allongement des délais entre deux donations défiscalisés. Il créé une taxe sur les résidences secondaires des étrangers et une « exit taxe » pour frapper les entrepreneurs qui s’établissent à l’étranger dans le seul but d’échapper à l’imposition. Mais tous ces revenus semblent très aléatoires, au point que même des élus UMP s’en émeuvent, réclamant, comme Pierre Méhaignerie, la création d’une nouvelle tranche de l’impôt taxant à 45% les plus hauts revenus.

« Le gouvernement imprime à l’impôt de solidarité sur la fortune une nouvelle évolution, destinée à justifier, à compter de 2012, sa disparition définitive, réclamée depuis longtemps par nombre d’élus de la majorité  ! », affirme le groupe des sénateurs communistes et du Parti de gauche. « En conditionnant la suppression du bouclier fiscal à l’aménagement de l’ISF, le chef de l’État réalise un tour de prestidigitation fiscale, qui consiste à leur donner d’une main ce que l’on prend de l’autre », dénonce la CGT.

On est loin en tout cas d’une grande réforme de la fiscalité annoncée comme le dernier chantier du quinquennat Sarkozy. Le conseil des prélèvements obligatoires (CPO) qui dépend de la Cour des comptes remettait hier un rapport qui demande notamment une réforme de l’impôt sur le revenu, dont « les recettes sont désormais faibles », et qui « peine de plus en plus à remplir (son) objectif de progressivité et de redistribution ».

Olivier Mayer

1) Carton rouge de la gauche à l’ISF

À l’ouverture au Sénat du débat sur la loi de finances rectificative qui vise à alléger l’impôt de solidarité sur la fortune, l’opposition se manifeste. « Vous portez la défaite des pauvres à son comble et l’allégresse des riches à son summum », a déclaré, hier, Jack Ralite, sénateur (PCF), en présentant, au nom du groupe communiste, républicain, citoyen, et des sénateurs du Parti de gauche (CRC-SPG), un rappel au règlement en ouverture du débat sur la loi de finances rectificative. L’indignation du sénateur de Seine-Saint-Denis concernait l’un des articles essentiels de cette loi, l’allégement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

D’ailleurs, pour marquer leur colère, les sénateurs du groupe (CRC-SPG) ont, symboliquement, mis un carton rouge au gouvernement au moment où François Baroin, ministre du Budget et des Comptes publics, montait à la tribune pour justifier la réforme du gouvernement. Justification qui ne passe pas chez les élus communistes, qui concidèrent que si le gouvernement recule sur le bouclier fiscal, qui permettait, essentiellement aux plus riches des contribuables, de récupérer 700 millions d’euros sur leurs impôts, c’est pour mieux alléger l’ISF. baisse du barème à 0,25 %

Ainsi, en supprimant l’ISF pour les patrimoines compris entre 800 000 et 1,3 million d’euros, en baissant le barème de l’imposition de 0,55 % à 0,25 % pour ceux en dessous de 3 millions d’euros et de 1,8 % à 0, 5% pour ceux au-dessus de cette somme, non seulement l’État va perdre 1,8 milliard d’euros, mais ce sont les plus riches contribuables qui bénéficieront le plus de cette loi. Ce qui fait dire à Jack Ralite : « Vous baissez de fait les impôts pour les riches mais vous exigez 5 heures de corvée pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et vous ne donnez aucun coup de pousse au smic en juillet en le relevant de 2 % seulement, soit 27,31 euros par mois » ou 1,36 euro par jour !

François Baroin s’est évertué à montrer que cette réforme visait à rendre « plus juste l’ISF en levant trois difficultés, relever le seuil d’imposition, rendre la déclaration sur le patrimoine moins inquisitoire et l’adapter à la compétitivité », expliquant par ailleurs le risque de fuites à l’étranger.

Seulement, les faits sont têtus et s’inscrivent en faux face aux propos ministériels. Ainsi, François Marc, sénateur du groupe socialiste, donne des chiffres : « L’ISF ne représente que 0,3 % de la valeur du patrimoine, qui représente dans notre pays 900 milliards d’euros. » De là à dire que le taux d’impôt sur les hauts patrimoines favoriserait l’exode des capitaux... Et François Marc de constater que « pendant cinq ans, la roue de la fortune tourne dans le même sens et toujours pour les mêmes, votre loi ne privilégie que 0,01 % des ménages ». Comme le groupe CRC-SPG, le groupe PS votera contre cette loi de finances rectificative 2011

Max Staat


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