Maroc : Dix bonnes raisons pour boycotter le référendum sur la constitution octroyée (Attac Maroc)

vendredi 1er juillet 2011.
 

La « nouvelle » constitution rédigée par la commission Menouni et sur laquelle le peuple marocain est appelé à voter le 1er juillet, n’a de nouvelle que le nom. Cette loi fondamentale consolide l’absolutisme politique, économique et culturel. Considérant que cette constitution ne répond pas aux aspirations impulsées par les luttes du 20 février et les mobilisations populaires, ATTAC Maroc, appelle les citoyen-e-s de notre pays à boycotter ce référendum, pour les raisons exposées ci-dessous :

1. Le discours du 9 mars n’a pas rompu avec la méthodologie classique. Le changement est présenté comme un don royal et non comme l’émanation de la lutte collective du peuple marocain.

2. La nouvelle constitution a été rédigée d’une manière non démocratique. La commission de rédaction du texte a été désignée par le Roi et non pas élue. Cette même commission n’a eu qu’un rôle réduit, limité à la rédaction du projet, le dernier mot restant au roi lui-même, avant de le soumettre au référendum. La règle démocratique aurait voulu que la constitution soit rédigée par une assemblée constituante élue par tous les citoyens et toutes les citoyennes.

3. Ce projet consacre le pouvoir absolu et personnel du système politique. Le roi continue à détenir tous les pouvoirs : exécutif, législatif, judiciaire, militaire, économique et sécuritaire. Il est à la tête de l’ensemble de ces pouvoirs et c’est lui qui décide des nominations et des dissolutions. Les réformettes du nouveau texte consistent à prendre l’avis du chef du gouvernement pour certaines de ces décisions, consultations non contraignantes pour le roi.

4. La concentration des pouvoirs entre les mains du roi est en contradiction avec les principes de la souveraineté populaire, de la responsabilité et de la reddition des comptes, le Roi n’y étant constitutionnellement pas assujetti.

5. Le projet de nouvelle constitution n’a pas aboli le fameux article 19, il l’a simplement divisé en deux parties, qui consacrent l’esprit de l’article 19. Cet article rend l’institution monarchique très au-dessus du texte lui-même, vu que le roi à une légitimité religieuse (commandeur des croyants) et politique car il est « le Chef de l’Etat, son Représentant suprême, Symbole de l’unité de la Nation ».

6. Dans son discours du 17 juin, le roi considère que préserver les équilibres macro-économiques est une règle constitutionnelle. Ces équilibres imposés par les institutions financières internationales battent en brèche le principe de souveraineté nationale. Notre économie et nos richesses nationales se trouvent prisonnières du service de la dette. Ces politiques suivies depuis des décennies n’ont pas fait qu’appauvrir de larges pans de la société marocaine.

7. Le projet soumis à référendum constitutionalise la privatisation des services et des établissements publics ! Les articles 49 et 71 mentionnent cette forme déguisée de vol des biens publics comme une des prérogatives du conseil des ministres et du parlement. Il est scandaleux que l’Etat compte sur une politique décriée de toutes parts comme nuisible à l’économie nationale qui ne fait que concentrer les richesses entre les mains de capitalistes nationaux et étrangers.

8. Ce projet n’aborde pas la problématique de la répartition des biens communs publics, et notamment celle de l’eau. Le texte se contente de déclarer : « la mobilisation de tous les moyens à disposition pour faciliter l’égal accès aux conditions leur permettant de jouir des droits à l’accès à l’eau et à un environnement sain ». Alors que l’Etat ne s’engage pas à protéger les ressources hydrauliques et à respecter les priorités de son utilisation pour la vie (eau potable, agriculture et sécurité alimentaire), ces ressources sont dans le viseur d’entreprises marocaines (spécialement le holding royal ONA) et étrangères (Veolia et GDF-SUEZ) qui se les approprient.

9. Le ministère de l’Intérieur, qui a un lourd passif dans la falsification des résultats des référendums et des élections, veille à l’organisation de ce nouveau scrutin. De même, les listes des inscrits pour le vote de la constitution ont été préparées par les mêmes équipes qui ont une longue expérience dans la fraude. à cela s’ajoute l’absence de missions internationales indépendantes pour superviser le processus de vote.

10. On ne peut pas parler d’une constitution démocratique alors que des pôles du clientélisme et de la corruption politique, des voleurs des biens publics, des tortionnaires sévissent encore en toute impunité. Au même moment, ceux qui appellent au changement sont presque interdits de s’exprimer dans l’espace public, seuls ceux qui applaudissent à l’absolutisme ont le droit à la parole, à quelques exceptions près.

ATTAC Maroc considère que ces dix raisons sont suffisantes pour justifier le boycott. Cet appel n’est pas une position nihiliste, il exprime une volonté de rompre avec des décennies d’absolutisme politique et de négation de la justice sociale. Que la prochaine constitution ne fera qu’à affirmer encore plus. Nous considérons que le combat pour une constitution démocratique poursuivra dans le cadre de la lutte collective du peuple marocain se poursuivra, à l’initiative du mouvement du « 20 février » pour la fin de l’absolutisme sous toutes ses formes et de la corruption.

Pour toutes ses raisons et pour un avenir meilleur pour le Maroc et pour ses enfants, en fidélité à tous les martyrs, détenus, blessés de ce combat, ATTAC Maroc appelle les citoyen-e-s de notre pays à boycotter ce référendum.

Nous ne voterons pas…NO PASARAN…Nous boycotterons…et dans la lutte nous continuerons

ATTAC Maroc

Contre la mondialisation libérale

Membre du réseau CADTM


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