Sarkozy inflige la rigueur au peuple pour préserver la France "d’en haut"

dimanche 21 août 2011.
 

Le chef de l’État a fait son grand retour à Paris, en convoquant en urgence ses ministres. Une réunion durant laquelle il a annoncé un nouveau tour de vis. Les décisions seront prises le 24 août.

Après avoir applaudi, dans un communiqué de presse, les décisions des « institutions européennes et américaines », qui ont « permis de réduire les tensions sur les marchés financiers », le chef de l’État a affiché une unique feuille de route  : « Les engagements de réduction du déficit des comptes publics sont intangibles et seront tenus quelle que soit l’évolution de la situation économique », dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2012. Un changement de discours puisque, pour la première fois, celui qui devait aller chercher la croissance avec les dents, s’assoit dessus. L’occasion également de remettre sous pression le Parti socialiste en appelant chacun « à la responsabilité, au-delà des clivages partisans » sur « l’inscription de cet effort de redressement dans une règle constitutionnelle d’équilibre des finances publiques », la sacro-sainte règle d’or.

Valérie Pécresse avait savamment préparé le terrain la veille en agitant le spectre d’une baisse de la note française. Pour conserver la bienveillance des agences de notation, la ministre s’est dite prête à « d’avantage d’efforts » « s’il le fallait ». Dans cet esprit, les ministres sont appelés à réfléchir sur de nouvelles propositions qu’ils devront remettre le 17 août au tandem Sarkozy-Fillon, avant une réunion de « décision » le 24 août.

Sarkozy renonce à la croissance

D’ores et déjà, le projet se dessine. Dans son communiqué, le président de la République n’a cité qu’une seule mesure de « sa stratégie économique » qui, selon lui, témoigne de la bonne marche à suivre. Celle des retraites qui aurait « permis de renforcer de manière durable la soutenabilité à long terme de nos finances publiques et conforte le crédit de la France ». Une réforme antisociale qui n’a rien réglé des déficits de la Sécurité sociale et du financement des retraites. Pour preuve, le gouvernement a déjà convoqué un nouveau rendez-vous retraite en 2013. Mais cette réforme, saluée en son temps par les agences de notation, aura bien une répercussion, celle de baisser le niveau général des pensions.

Cette rigueur infligée à la France « d’en bas » pour préserver la France « d’en haut » et la finance est bien le fil conducteur de l’ensemble des mesures prises par Nicolas Sarkozy tout le long de son quinquennat. En témoigne la révision générale des politiques publiques (RGPP) qui vise à sabrer les moyens des services publics et à geler les salaires des fonctionnaires ou encore le refus du coup de pouce au Smic, alors qu’à l’inverse, la réforme de l’ISF, la baisse de la TVA pour les restaurateurs, le sauvetage des banques sans conditions, les aides à l’industrie sans politique industrielle, n’ont eu comme résultat que d’accroître les inégalités et de priver la France d’une reprise économique. Hier, l’Institut national des statistiques et des études économiques (Insee) a annoncé une chute de 1,6 % de la production industrielle en juin par rapport à mai. Un chiffre qui appuie la série de prévisions publiées cette semaine. Selon la Banque de France, le PIB progresserait de 0,2% au troisième trimestre. Une croissance bien inférieure à celle de l’Insee qui prévoit une hausse de 0,5%. Même s’il est prudent d’attendre la prévision de l’institut vendredi, cette révision à la baisse dans une économie déjà morose est inquiétante.

Résoudre les déficits par une austérité accrue

La France n’est pas isolée. Le cercle vicieux lié à la volonté de résoudre au plus vite les déficits par une austérité accrue est enclenché. Résultat, si les dépenses publiques qui jusqu’ici soutenaient l’emploi et plus globalement l’embryon d’activité sont supprimées, la croissance s’érode. Comme pour l’Hexagone, le PIB de la zone euro n’est plus attendu qu’à 0,3% au troisième trimestre, et à 0,3% également au quatrième (contre 0,4% et 0,4% dans l’étude de juillet). Sans compter que la décision prise par la BCE, début juillet, d’augmenter son taux directeur à 1,5%, ne permet pas aux économies européennes de récupérer un peu d’oxygène au travers des exportations. Il en va de même aux États-Unis, où les économistes sont de plus en plus nombreux à envisager une nouvelle récession.

Clotilde Mathieu, L’Humanité


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